Intervention de Thierry Repentin

Réunion du 31 janvier 2007 à 21h30
Droit opposable au logement — Articles additionnels avant l'article 2

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin :

Lors de la discussion dans cet hémicycle du projet de loi portant engagement national pour le logement, la majorité sénatoriale est parvenue à ce que notre Haute Assemblée requalifie les logements déconventionnés en logements sociaux, de manière à les comptabiliser au titre de l'article 55 de la loi SRU pendant encore cinq ans après leur sortie du conventionnement.

L'objet du présent amendement est de revenir sur cette mesure, qui confond logement conventionné et logement social et qui vise plus à apporter une solution aux maires qu'aux personnes résidant dans les logements en question.

Je tiens à le souligner, logement social et logement conventionné relèvent de deux réalités bien distinctes : l'un est définitif, l'autre est réversible ; l'un s'inscrit dans une politique du logement abordable durable, l'autre incarne la précarité d'un logement à loyer modéré en intérim ; l'un relève d'un engagement public, l'autre est soumis à la décision d'un acteur économique privé.

Si le logement conventionné constitue un outil utile, il ne peut donc en aucun cas se substituer à la réalisation de logements sociaux.

Surtout, la comptabilisation des logements conventionnés au titre du logement social cinq années après la chute des conventions est une illusion. On compte des carottes en affirmant que ce sont des choux : cela change le résultat de l'addition, mais aucunement la nature du chou !

Dans l'amendement qu'ils ont présenté à l'époque, MM. Cambon et Braye ont pointé l'injuste situation de maires qui se seraient « engagés » dans le logement social et « subiraient » les décisions de déconventionnement auxquelles ils n'ont pu prendre part.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, si les maires défendus alors, victimes du déconventionnement, n'y sont effectivement pour rien, ils ne sont pas non plus pour grand-chose dans le conventionnement initial. C'est le propre du dispositif !

Par conséquent, cessons de nous réfugier derrière de bonnes intentions, qui risquent de se transformer bien vite en protection inavouable d'édiles peu scrupuleux de la mixité sociale.

Quant à la responsabilisation des bailleurs, évoquée lors de l'adoption de cette disposition, je ne vois pas en quoi le fait de limiter les conséquences politiques de leurs choix de déconventionnement les incitera à la négociation, voire au réexamen ou à l'ajournement de leur décision. Bien au contraire, celle-ci n'en sera que plus indolore et leur extraterritorialité n'en sera que plus grande.

Le déconventionnement a des conséquences dramatiques pour de nombreuses familles. Dans le contexte de flambée des prix et d'insuffisance de l'offre locative abordable, déconventionnement rime avec relèvement insoutenable des loyers. Rappelons-nous qu'un loyer conventionné peut-être jusqu'à deux fois, voire trois fois inférieur aux loyers de marché.

Déconventionnement rime également avec mobilité contrainte, puisque le logement se situe toujours plus loin du centre des agglomérations et entraîne un allongement toujours plus important des temps de transport.

Au vu de ces différentes remarques, la disposition introduite dans la loi ENL, parce qu'elle aboutit à traiter les demandes des maires avant les besoins des familles, amoindrit la portée de l'article 55 de la loi SRU. Elle doit donc être supprimée.

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