Certes, nous l'avons vu précédemment, le nouveau code pénal reconnaît la gravité des violences, et la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui va encore améliorer cette répression.
Toutefois, certaines victimes disent encore avoir été convaincues par les services de police de transformer leur plainte en simple main courante. Et, comme elles n'en ont souvent pas gardé les références, elles ne peuvent en obtenir copie.
Sauf lorsque l'incapacité totale de travail était importante ou les blessures graves, les violences conjugales ont longtemps été banalisées par les services de police et de justice comme relevant de la sphère privée, au sein de laquelle il apparaissait normal de ne pas s'immiscer. Cela relevait non du domaine répressif, mais plutôt du champ social ; de ce fait, aucune politique pénale n'était déclinée.
Par ailleurs, si la plainte est déposée, le traitement juridique variera considérablement en fonction des tribunaux.
De nombreux parquets ont désormais une politique pénale en la matière, mais ces directives sont très disparates d'un tribunal de grande instance à l'autre, voire au sein d'un même tribunal. Cette absence de cohérence est fort dommageable.
Tous les conjoints violents ne sont pas des malades : ils ont des profils allant du « normal » au « franchement pathologique », en passant par toute la gamme des profils névrotiques. Ces personnes doivent être amenées à comprendre leur violence et doivent apprendre à la contrôler. Cela suppose une aide à la maîtrise, à la maturation : les deux ressorts de la violence sont, en effet, l'immaturité et l'égocentrisme.
Pour les psychiatres, la prise en charge repose sur deux leviers : l'obligation de suivi et les techniques de groupe. En effet, lorsque l'on est immature, on répugne à aller de soi-même vers une prise en charge. Les personnes violentes ne viennent consulter que sur la pression de la famille ou du juge. Seul, à froid, l'auteur de violences aura tendance à ne pas reconnaître ce qui s'est passé et à se réfugier dans l'autojustification, la dénégation, la minimisation des faits, allant même jusqu'à en faire porter la responsabilité sur la victime.
Les techniques de groupe permettent aux auteurs de violences de prendre plus facilement conscience de gravité de leurs actes. Cette technique a été éprouvée pendant une dizaine d'années à La Garenne-Colombes : le parquet de Paris, en partenariat avec la Ligue française pour la santé mentale, a ouvert une antenne de psychiatrie et de psychologie légales.
Envoyées par le procureur de la République, les personnes violentes sont examinées afin de distinguer de simples disputes de faits plus graves impliquant des personnes particulièrement violentes qu'il convient d'éloigner.
Pour ceux qui ne font pas partie de cette dernière catégorie, le parquet propose un classement sous condition : on ne vous poursuit pas pour l'instant, mais vous vous soumettez à un suivi.
Les parquets de Nîmes et de Douai proposent également des solutions de « classement sous condition ».
Toutefois, le traitement judiciaire des violences conjugales devrait s'inscrire dans les politiques publiques mises en place par le Gouvernement. D'où la nécessité de généraliser ces antennes de psychiatrie et de psychologie légales dans tous les tribunaux de grande instance.
C'est l'objet de notre amendement ; nous invitons le Gouvernement à créer ces antennes dans des conditions qui seront fixées par décret en Conseil d'Etat.
Conscients de la charge que constitue la création de ces antennes, nous proposons de la compenser par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.