Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 4 octobre 2005 à 16h00
Convention et entente en matière de sécurité sociale avec la tunisie et le québec — Adoption de deux projets de loi

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en matière de sécurité sociale, notre pays est lié à ses partenaires européens par un règlement communautaire de 1971 et, pour les Etats tiers, par une trentaine de conventions bilatérales. S'agissant des plus anciennes, notre pays a engagé un travail de refonte qui vise à les actualiser et à les simplifier.

Est ainsi concernée la convention de sécurité sociale qui lie notre pays avec la Tunisie, signée le 17 décembre 1965 et complétée depuis lors par plus d'une vingtaine d'autres instruments.

Initialement conçue pour une immigration de main-d'oeuvre, la convention de sécurité sociale prend désormais en considération à la fois les effets du regroupement familial et ceux du vieillissement de la population concernée.

En outre, la Tunisie est signataire, depuis le 26 janvier 1998, d'un accord d'association avec l'Union européenne, ce qui a conduit à rapprocher les stipulations de la convention de sécurité sociale du règlement communautaire de coordination des systèmes de sécurité sociale.

La convention de sécurité sociale avec la Tunisie obéit aux principes classiques des conventions de sécurité sociale les plus complètes : l'égalité de traitement, le rattachement au régime de sécurité sociale du pays où l'activité professionnelle est exercée - on ne peut pas dire que cela arrange tout à fait les Français qui vivent en Tunisie ! - ou encore la totalisation des périodes d'assurance.

Outre le rassemblement, dans un même texte, de stipulations éparses, la principale modification introduite par la convention est l'élargissement du champ des bénéficiaires des soins de santé aux travailleurs non salariés, aux chômeurs, aux fonctionnaires, aux étudiants, aux stagiaires en formation professionnelle ainsi qu'à leurs ayants droit, qu'ils soient résidents ou non.

Pour tenir compte de la proximité des deux pays et des allers et retours fréquents qu'effectuent les familles, la convention lève la clause de résidence en matière de prestations vieillesse, d'assurance invalidité et d'assurance accidents du travail et maladies professionnelles. Elle permet aux ayants droit non résidents de bénéficier, lors d'un séjour dans l'autre pays, des prestations en nature de l'assurance maladie. Elle ouvre également le droit aux allocations familiales pour les enfants des travailleurs qui résident sur le territoire de l'autre Etat, en limitant leur paiement à quatre enfants, conformément à la loi tunisienne qui limite le versement des allocations familiales à quatre enfants.

La convention permet également que les chômeurs, les rentiers et les pensionnés bénéficient des allocations familiales pour leur famille.

Un premier avenant à cette convention a été signé à Tunis le 4 décembre 2003 ; il vise à supprimer toute référence à l'allocation veuvage, cette dernière ayant été abrogée par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites.

Les mesures de coordination en matière de sécurité sociale entre la France et la Tunisie s'appliquent à environ 10 000 personnes chaque année et entraînent des transferts financiers de l'ordre de 3 millions d'euros par an des régimes sociaux français vers les régimes tunisiens. La totalité des paiements effectués au titre des accords de sécurité sociale signés par notre pays s'élevaient en 2003 à 4, 63 milliards d'euros, dont 2, 2 milliards d'euros au titre des conventions bilatérales.

J'en viens maintenant au projet de loi autorisant l'approbation de l'entente en matière de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec, signée le 17 décembre 2003.

Cette entente a pour but de favoriser la mobilité géographique des Français et des Québécois, notamment en facilitant les accès réciproques aux systèmes de protection sociale d'un Etat à l'autre. Elle a été rendue possible par la renégociation de l'accord-cadre de sécurité sociale entre la France et le Canada.

Auparavant, l'entente franco-québécoise du 12 février 1979 couvrait l'ensemble des branches de la sécurité sociale : maladie, maternité, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles, vieillesse et pensions de réversion, assurance décès et prestations familiales.

S'agissant des travailleurs salariés et assimilés ainsi que de leurs ayants droit, elle comportait un ensemble de dispositions complexes visant à assurer une parfaite coordination entre l'ensemble des régimes québécois et français de sécurité sociale.

Un avenant, signé le 5 septembre 1984, avait permis d'étendre cette entente aux travailleurs non salariés.

Un autre avenant, signé le 19 décembre 1998, visait à parfaire la coordination des régimes de sécurité sociale pour mieux prendre en compte certaines situations particulières concernant des travailleurs non salariés, en particulier les artistes du spectacle.

Un autre avenant, signé le 2 décembre 1998, a permis de résoudre ces situations en modifiant les prises en compte des lieux d'activité des populations concernées et en assouplissant les règles relatives à la durée de leurs activités.

La nouvelle entente de 2003 est issue de la renégociation de l'entente de 1979, renégociation rendue nécessaire par le durcissement de la législation québécoise applicable à l'accès au régime public de prise en charge des soins de santé. En effet, l'ensemble des provinces canadiennes, dont le système de santé publique est financé par l'impôt, s'étaient peu à peu dotées de législations toujours plus restrictives. A son tour, la province québécoise a été également obligée d'introduire dans sa législation des délais de carence en matière de prise en charge des soins de santé, faute de quoi elle supportait la charge de ceux qui, tout en arrivant par le Québec, allaient en réalité s'installer dans une province anglophone.

De la même façon, la loi sur la couverture maladie universelle du 27 juillet 1999 imposait, en France, un délai de carence de trois mois.

Désormais, ces délais sont supprimés, en France comme au Québec, et le bénéfice du système de santé en vigueur dans le pays d'accueil est accordé, dès leur arrivée, à tous ceux qui effectuent une mobilité professionnelle.

En ce qui concerne les pensions, le système en vigueur amenait le régime français de sécurité sociale à payer à la fois la pension de vieillesse et une partie de la pension d'invalidité québécoise. Désormais, à partir de l'âge de soixante ans et en cas de liquidation d'une pension de vieillesse à la charge du régime français, la pension d'invalidité sera partielle, versée par la régie des rentes du Québec, et ne reposera que sur les périodes de cotisations québécoises.

Je rappellerai que, selon les statistiques les plus récentes, le nombre de Québécois vivant en France se situe entre 3 000 et 4 000, sur un total de 8 500 Canadiens, tandis que sont enregistrés au Québec près de 48 000 Français - 29 000 actifs et 19 000 inactifs.

Les modalités de la nouvelle entente ne pourront qu'améliorer et clarifier la situation des citoyens résidant dans l'autre partie au traité. Cette fois-ci, les Français sont bénéficiaires.

En conclusion, la commission des affaires étrangères vous recommande l'approbation de ces deux projets de loi.

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