Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi dont nous allons discuter aujourd'hui répond à une attente forte de nos concitoyens.
Les échanges réguliers entretenus avec les associations de consommateurs, notamment au sein du comité consultatif du secteur financier, montrent que les épargnants demandent en priorité des services financiers plus intelligibles et plus accessibles. Nous ne pouvons que partager ce souhait, et je suis heureuse de vous présenter les orientations du Gouvernement en matière de protection de l'épargnant, notamment de l'assuré, qui sont au coeur de ce projet de loi.
Je ne doute pas que vous partagiez le même objectif, et je tiens tout particulièrement à remercier à cet égard le rapporteur de la commission des finances, M. Philippe Marini, pour la très grande qualité du travail qu'il a fourni sur ce projet de loi et pour ses nombreuses initiatives, qui améliorent des dispositions du texte mais visent également à répondre aux besoins complémentaires des investisseurs et des épargnants.
L'assurance est une composante importante des dépenses et de l'épargne des ménages, à laquelle sont attachés des enjeux essentiels pour les assurés en termes de protection et de transmission du patrimoine. Il est donc indispensable que, dans ce domaine, les produits soient bien commercialisés et que le consommateur comprenne les garanties auxquelles il souscrit. C'est la raison pour laquelle le travail de conseil joue pleinement à leur égard.
Dans ce sens, le présent projet de loi comporte des améliorations essentielles. Il s'inscrit dans une démarche de modernisation à laquelle le Parlement a largement contribué au cours de ces dernières années, notamment à l'occasion du vote de la loi de sécurité financière du 1er août 2003. Les deux directives européennes qui inspirent ce projet de loi, à savoir, d'une part, la directive sur l'intermédiation en assurance et, d'autre part, la directive concernant l'assurance directe sur la vie, montrent d'ailleurs à quel point la pratique française a inspiré la discussion européenne.
Le Gouvernement attache en effet une grande importance dans les débats européens à promouvoir une régulation équilibrée des services financiers, dans laquelle les trois objectifs fondamentaux de l'action européenne que sont l'ouverture au niveau européen des marchés nationaux, la sécurité et la stabilité du système financier, ainsi que la protection des consommateurs doivent être d'importance égale, sans qu'aucun ne supplante les autres.
C'est pour cette raison que, dans sa réponse au Livre vert de la Commission européenne sur les services financiers, la France a insisté pour qu'une place plus substantielle soit accordée à la concertation avec les représentants des associations de consommateurs dans le cadre de l'élaboration des textes. Réciproquement, je ne puis qu'encourager ces représentants à venir défendre à Bruxelles notre importante tradition de protection des consommateurs.
Les dispositions sur les intermédiaires d'assurance qui vous sont proposées aujourd'hui offrent, sans bouleverser d'ailleurs la législation existante, qui est déjà l'une des plus protectrices d'Europe, un nouveau cadre, sécurisé et clair, pour accompagner la mise en place du « passeport européen » que prévoit la directive pour cette activité.
Ce dispositif repose, d'une part, sur l'immatriculation des intermédiaires d'assurance et, d'autre part, sur la transparence du mode de commercialisation retenu. L'intermédiaire sera donc désormais tenu soit d'analyser un nombre suffisant de contrats d'assurance offerts sur le marché, de façon à pouvoir recommander le contrat le mieux adapté aux besoins du souscripteur, soit d'indiquer à ce dernier les entreprises d'assurance avec lesquelles il travaille. Le projet de loi donne, enfin, un fondement légal à l'exercice du devoir de conseil, qui n'était jusqu'alors reconnu que par la seule jurisprudence.
De telles dispositions sont valables pour les contrats d'assurance vie comme pour les contrats d'assurance dommage.
Au-delà de la régulation des intermédiaires, la protection des investisseurs passe par une bonne information du consommateur lors de la souscription de son contrat. Tout cela ne peut pas fonctionner sans un rôle actif de l'assuré, qui doit choisir les garanties, les contrats et les formules qui lui conviennent le mieux et faire ainsi jouer la concurrence. Pour ce faire, l'assuré doit bénéficier d'une information complète, mais aussi, dans toute la mesure du possible, d'une information homogène et accessible.
Cet aspect nous paraît d'autant plus important que, avec une telle démarche, chacun est finalement gagnant. Le fait d'avoir à discuter avec des consommateurs avertis constitue en effet la meilleure incitation pour que notre industrie financière propose de bons produits et soit compétitive.
Monsieur le rapporteur, vous êtes à l'origine d'un amendement sur l'indépendance des associations souscriptrices. L'exemple de ces associations témoigne précisément de l'intérêt, pour l'industrie de l'assurance comme pour les assurés, de pouvoir établir un dialogue aussi équilibré et éclairé que possible entre les investisseurs et les professionnels. Nous aurons d'ailleurs certainement l'occasion de revenir sur ce sujet.
Améliorer l'information de l'épargnant passe également par une réflexion assurant la cohérence « transsectorielle » de la commercialisation des produits financiers. Le principe en a été posé de manière décisive dans la loi de sécurité financière : l'assuré doit ainsi recevoir exactement la même information que le souscripteur en direct de parts d'OPCVM, ou parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières.
Dans le domaine de l'information délivrée à l'occasion de la signature d'un contrat d'assurance vie, le projet de loi s'attache à préciser les conditions d'exercice du droit de renonciation des contrats d'assurance vie, tout en clarifiant et en enrichissant les obligations d'information.
Les évolutions récentes du droit européen ont rendu nécessaire de mettre en accord le droit français de l'information avec la directive sur l'assurance vie, qui est d'harmonisation maximale en ce qui concerne la durée du délai de renonciation de trente jours et le calcul de son point de départ. Ce délai doit en effet courir à partir de la date à laquelle l'assuré est informé de la conclusion du contrat, ce qui nécessitait de modifier notre droit interne.
Certains ont déduit du caractère « maximal » de l'harmonisation européenne sur cette question la remise en cause du principe même de la prorogation du délai de renonciation, prévu dans notre droit, dès lors que les informations requises avant la souscription du contrat n'avaient pas été correctement remises à l'assuré.
Le Gouvernement a souhaité, quant à lui, maintenir cette prorogation, tout en en limitant le terme afin de ne pas perpétuer indéfiniment les situations d'incertitude juridique. Le délai, initialement prévu à cinq ans, a été porté à huit ans au terme des débats qui se sont tenus à l'Assemblée nationale. Un équilibre a ainsi été atteint, et il serait excessif de le modifier, compte tenu du caractère théoriquement « maximal » de l'harmonisation européenne sur ce point. Je rappelle d'ailleurs avec insistance qu'il s'agit là non pas d'un droit général à renonciation pendant huit ans, mais d'un délai maximum durant lequel une action peut être engagée si l'assuré estime que l'information qui lui a été remise initialement ne répond pas aux obligations qui s'imposent à l'assureur.
Parallèlement, dans le projet qui vous est soumis, l'information délivrée à l'assuré est significativement améliorée. La discussion du projet de loi de sécurité financière, notamment à l'issue des débats qui s'étaient tenus ici même au Sénat, avait permis de modifier très profondément l'état des lieux dans cette matière. L'Assemblée nationale a explicitement étendu ce dispositif très complet aux contrats d'assurance de groupe, qui constituent une part importante des contrats. Il était important de préciser les obligations d'information des adhérents à ces contrats et de les aligner le plus fidèlement possible sur le régime des contrats individuels.
Une nouvelle étape devrait être franchie aujourd'hui. Il paraît en effet nécessaire de clarifier les modalités de communication de l'information à l'occasion de la signature d'un contrat d'assurance vie.
Comme l'avait indiqué à l'Assemblée nationale le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Thierry Breton, une réflexion intense a été menée, non seulement au sein du groupe animé par M. Delmas-Marsalet, mais également au sein du comité consultatif du secteur financier et avec les représentants des associations de consommateurs.
En effet, il ne suffit pas de donner une information exhaustive, encore faut-il qu'elle soit communiquée efficacement. Tel était, à l'origine, l'objectif de la note d'information. Toutefois, alors qu'un tel document est censé présenter l'avantage d'une meilleure lisibilité, force est de reconnaître que l'accumulation des rubriques et l'impact de certains litiges ont conduit à une réelle confusion entre le contrat, d'une part, et la note d'information, d'autre part.
Dans ces conditions, la note d'information ne remplit plus réellement son rôle et risque en outre de dissuader tout simplement le souscripteur de lire son contrat. A partir de l'initiative élaborée par M. Marini, le Gouvernement vous proposera de revenir à un modèle plus opérant, avec un encadré très lisible en tête de contrat. Il prêtera par ailleurs une grande attention aux initiatives sénatoriales susceptibles de conforter la protection des épargnants.