Intervention de Odette Terrade

Réunion du 5 novembre 2009 à 9h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Article 1er

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

« Il n’est pas question de privatiser La Poste », ne cesse-t-on de nous répéter. Pourtant, l’article 1er du projet de loi indique explicitement que « la personne morale de droit public La Poste est transformée à compter du 1er janvier 2010 en une société anonyme dénommée La Poste ». Au-delà de la question de la propriété publique du capital, cette disposition figurant au deuxième alinéa signifie bien, en droit, une privatisation du statut et des modes de gestion de La Poste.

La Poste sera donc soumise aux dispositions législatives applicables aux sociétés anonymes, autrement dit, La Poste relèvera des dispositions du droit commun des sociétés commerciales, comme du code de commerce et du code monétaire et financier. Cette transformation, à elle seule, est lourde de sens et de conséquences, puisqu’elle signifie la soumission aux règles et normes de gestion économiques, comptables et sociales des entreprises privées agissant dans un marché fortement concurrentiel. Nous mesurons déjà tous les dégâts provoqués.

Depuis trente ans, il n’est pas un exemple de transformation d’établissement public en société anonyme qui n’ait conduit, à terme, à une banalisation et à une privatisation de sa gestion, autrement dit à une disparition programmée de ses missions de service public, quand il ne s’agit pas tout simplement de sa disparition totale.

Vous nous affirmez que seuls l’État et la Caisse des dépôts et consignations seront les principaux actionnaires publics de La Poste et que le capital sera à 100 % public. Cette garantie est censée rassurer les employés et les usagers de La Poste sur la pérennité des emplois et des missions publiques. Encore une fois, une telle garantie est insuffisante puisque, d’une part, ce qu’une loi a fait, une autre loi peut le défaire et, d’autre part, la qualité publique d’un actionnaire est toute relative lorsqu’il s’agit d’une société anonyme soumise au code du commerce.

Là encore, les exemples ne manquent pas. Je voudrais vous citer celui d’ICADE, dont le capital est détenu à 60 % par la Caisse des dépôts et consignations, qui fut l’un des premiers bailleurs sociaux français et qui, aujourd’hui, cède la plupart de ses activités de service et la totalité de son patrimoine de logements à vocation sociale, mettant ainsi en danger 2 000 employés.

Lorsqu’elle agit en qualité d’investisseur privé, la Caisse des dépôts et consignations exige un rendement de ses actifs à peine inférieur à celui qui est fixé par les autres investisseurs. Dans sa plaquette Les doctrines d’action, publiée en décembre 2008, après la promulgation de la loi de modernisation de l’économie, dite loi LME, la Caisse des dépôts et consignations indique, à la page 7 de ce document, qu’elle « peut attendre un retour financier significatif […] de participations substantielles dans les grandes entreprises françaises dont la rentabilité est “indexée” sur la croissance mondiale ». Il n’en faut pas plus pour comprendre les volontés d’investissement de la Caisse des dépôts et consignations, dont on nous assure pourtant aujourd’hui qu’elle est le seul garant possible des missions du service public postal.

Rien n’interdit de nos jours à la Caisse des dépôts et consignations de céder ultérieurement tout ou partie de sa participation au capital de La Poste. C’est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet amendement.

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