Le texte initial du projet de loi constituait une provocation, après le succès de la consultation citoyenne, qui a permis de recueillir plus de deux millions de signatures en faveur du maintien du caractère public de La Poste.
« À la date de publication de ses statuts initiaux, le capital de La Poste est, dans sa totalité, détenu par l’État », est-il écrit à l’article 1er. Et ensuite ? Je reste dubitatif quant aux intentions réelles du Gouvernement.
En effet, le statut de société anonyme permet la détention de parts par une société d’économie mixte. Cela est tout à fait courant. Par quelle magie pourrait-on garantir qu’il n’en sera jamais ainsi concernant La Poste ? Comment le Gouvernement, dans cette période incertaine de crise, face à l’injonction européenne de tout ouvrir à la concurrence, pourrait-il prévoir et garantir que, à l’avenir, le capital de la société anonyme restera à 100 % public ?
Les déclarations gouvernementales visent à calmer l’opinion publique, hostile à la privatisation de La Poste.
Nous aimerions pouvoir les croire, mais nous éprouvons des doutes, car cette opération n’est pas une première et les précédents changements de statut d’entreprises publiques ont abouti, en dépit des promesses faites, à des privatisations totales, à une dégradation du service rendu, à une hausse des tarifs et à une couverture insatisfaisante du territoire. De surcroît, ce processus suscite un mal-être profond parmi les salariés, qui, attachés au service public, se voient contraints d’adopter une logique de rentabilité à tout prix. Nous avons tous en tête l’exemple dramatique de France Télécom, mais il en va de même pour Gaz de France, pour ERDF ou je ne sais quel autre morceau de ce que l’on appelait naguère EDF.
Pourquoi en irait-il différemment demain avec le secteur public postal ? Tous les personnels ont attiré notre attention sur le fait que La Poste était déjà prête à être dépecée et vendue à la découpe. Les activités non rentables, celles qui faisaient pourtant la qualité du service rendu à celui que l’on appelait l’ « usager », devenu maintenant le « client », seront laissées à la charge de l’État et dotées de moyens drastiquement réduits, avant d’être purement et simplement supprimées. C’en sera alors fini des multiples petits services quotidiens que rendent encore certains résistants, considérés comme des « moutons noirs » par la direction actuelle.
Cette prédiction est malheureusement plus crédible que la promesse du maintien de la propriété publique de l’intégralité du capital de la société anonyme…