Intervention de Michel Billout

Réunion du 5 novembre 2009 à 15h00
Entreprise publique la poste et activités postales — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

En ce qui me concerne, j’insisterai sur l’une des raisons avancées par le Gouvernement pour justifier la transformation de La Poste, EPIC, en société anonyme.

À longueur de discours officiels, on nous présente ce changement de statut comme étant évident et surtout obligatoire afin de nous mettre en conformité avec la législation européenne. Le Gouvernement et les autres promoteurs du présent projet de loi nous affirment en effet que « ce changement de statut permettra de disposer des moyens nécessaires pour affronter la libéralisation totale du marché du courrier en 2011 et de respecter ainsi la réglementation européenne ».

Or il n’en est rien.

Cet argument ne résiste pas à l’examen des textes européens eux-mêmes. Il faut rétablir la vérité : textes à l’appui, j’affirme que ni les directives, ni les normes communautaires ne comportent d’obligations juridiques concernant le statut des opérateurs. De même, ils n’obligent en rien à privatiser lesdits opérateurs.

Pour notre part, nous n’avons eu de cesse de dénoncer les dispositions ultralibérales contenues dans tous les traités européens depuis le traité de Rome, acte fondateur de la Communauté européenne. Nous avons également combattu, pour n’en citer que quelques-uns, le traité de Maastricht de 1992, qui, comme l’a rappelé mon ami Jean-Claude Danglot, est passé de justesse, et, dans la même logique, le projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe qui, lui, a été largement rejeté par les électeurs lors du référendum de 2005.

À cet égard, nous pensons que le revers subi par les élites en 2005 n’est sans doute pas étranger au refus du Président de la République d’organiser un débat suivi d’un référendum sur l’avenir de La Poste dans notre pays.

Consulter le peuple devient en effet de plus en plus risqué pour le Président de la République et pour son Gouvernement, car les effets d’annonce largement médiatisés et la communication officielle ne suffisent plus à abuser l’opinion publique.

Revenons-en aux textes européens qui, nous dit-on, régiraient le présent projet de loi.

La directive européenne de 2008 complète les directives européennes de 1997 et de 2002. Ces directives avaient commencé à libéraliser le secteur postal. La petite dernière, la directive de 2008, vise « à l’achèvement du marché intérieur postal en procédant à la libéralisation totale du courrier en 2011 ».

Voilà pour le contexte général.

Si l’on examine cependant de manière plus précise les dispositions spécifiques propres au secteur postal, force est de constater que ce secteur est traité différemment des autres, par exemple les télécommunications, l’énergie ou les transports. En effet, les textes communautaires comportent une définition ambitieuse et exigeante du service universel garanti à chaque habitant-usager de l’Union au plan communautaire.

Il s’agit précisément de définir un plan ambitieux de présence postale afin de « tenir compte des besoins des utilisateurs » ; de permettre d’assurer la gratuité pour les aveugles ; d’assurer, et ce au moins cinq jours ouvrables par semaine – contre six actuellement – au minimum la levée, le tri, le transport et la distribution des envois postaux jusqu’à 2 kilogrammes, des colis postaux jusqu’à 10 kilogrammes, ce poids pouvant atteindre 20 kilogrammes, les services relatifs aux envois recommandés et aux envois à valeur déclarée ; de définir précisément les normes de qualité de service – délais de distribution, temps d’attente aux guichets, réactivité des demandes, traitement des plaintes ou des litiges pour les utilisateurs.

Est-il utile de rappeler que les textes communautaires ne parlent en aucun cas de « clients » dans ce domaine ?

Pour utiliser l’intégralité du temps de parole qui m’est imparti, je rappelle également que les textes communautaires prévoient la garantie « d’exigences essentielles » : respect des conditions de travail du personnel et des conventions collectives, aménagement du territoire, protection de l’environnement, obligation de décider d’un tarif unique sur tout le territoire national, pour ne citer que ces exemples.

Je comprends l’embarras de la commission de l’économie qui, alors qu’elle ne peut ignorer le contenu de ces textes, doit tenir ses engagements et faire respecter la parole gouvernementale.

Nous voterons donc ces amendements.

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