Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 17 janvier 2006 à 16h00
Accord sur l'office franco-allemand pour la jeunesse — Adoption d'un projet de loi

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga, rapporteur :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les origines de l'OFAJ et la qualité de son bilan. On le sait, cet organisme original, transnational reste un symbole exemplaire de ce que la France et l'Allemagne ont décidé de faire pour ancrer leur réconciliation dans la connaissance mutuelle et l'amitié entre leurs jeunesses respectives.

Pour autant, depuis quelques années, des difficultés ont marqué l'évolution de l'OFAJ. Il s'agit non pas vraiment d'un problème de statut mais surtout d'un mauvais fonctionnement lié au manque d'intérêt manifesté par les gouvernements, au manque de transparence des critères selon lesquels les secrétaires généraux ont trop souvent été nommés et à l'absence fréquente de réunions du conseil d'administration.

Les deux évaluations de l'Office qui ont été réalisées en 2004, l'une d'origine gouvernementale, l'autre d'origine parlementaire - il est à noter que cette dernière émane exclusivement de l'Assemblée nationale, le Sénat n'ayant pas été associé à ces travaux -, ne sont pas parvenues aux mêmes conclusions. Ce sont les recommandations de la mission parlementaire qui ont inspiré l'accord qui nous est soumis aujourd'hui et dont j'évoquerai les points principaux.

J'aborderai tout d'abord les missions de l'Office.

Selon l'exposé des motifs du projet de loi, l'un des principaux enjeux de la réforme porte sur « l'adaptation et l'équilibre des missions confiées à l'Office, dont l'apprentissage linguistique devrait constituer une composante importante ».

Certes, il convient d'adapter et de rééquilibrer les missions de l'OFAJ. Toutefois, il est difficile de définir précisément les activités que pourrait avoir l'OFAJ en matière d'enseignement linguistique direct, car son rôle n'est pas d'être une école de langues mais de former des professeurs, de mener des expertises et de concevoir des méthodes d'enseignement nouvelles.

Le nouvel accord prévoit un conseil d'administration resserré, composé de quatorze membres au total. Outre les deux ministres chargés de la jeunesse, les douze autres membres sont désignés à parité par chaque gouvernement. Ce conseil définit les actions prioritaires de l'Office, adopte les programmes et le budget, assure la bonne gestion des crédits, approuve les comptes et le rapport du secrétaire général. Cette instance doit maintenant se réunir, ce qui n'a pas été le cas au cours de plusieurs années précédentes. Le secrétaire général doit également remettre un rapport, ce qui ne fut pas non plus le cas certaines années.

Créé par le nouvel accord, le conseil d'orientation accueille les représentants de la société civile, qui ne feront plus désormais partie du conseil d'administration, des représentants des secteurs de l'éducation et de l'université, de la culture, de l'économie et des institutions franco-allemandes. Cette instance de concertation, composée de vingt-quatre membres, n'a plus qu'un rôle consultatif : elle élabore des avis et recommandations concernant les orientations, les objectifs, les mesures et les programmes de l'Office, qui sont ensuite transmis au conseil d'administration. Dans ce cadre, les intervenants directs dans les échanges franco-allemands entre la jeunesse se trouvent écartés de la direction opérationnelle de l'Office.

Organe d'exécution du conseil d'administration, le secrétariat général sera composé de deux secrétaires généraux, l'un français, l'autre allemand, dotés des mêmes attributions et nommés par accord des deux gouvernements, pour un mandat de six ans.

Madame la ministre, lors du choix des deux personnalités appelées à exercer ces fonctions, il faudra veiller à ce qu'une concurrence ne naisse pas entre elles, dans la mesure où, contrairement aux recommandations du rapport ministériel, leurs attributions sont identiques.

Le personnel de l'Office est composé d'agents recrutés, par principe, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, ainsi que le précise l'article 15 de l'accord.

S'il est certain que le statut du personnel de l'OFAJ devait faire l'objet de certains aménagements, on peut toutefois regretter que le nouveau texte ne laisse guère de marge de manoeuvre aux dirigeants de l'Office, qui ne peuvent proposer, par principe, que des contrats à durée déterminée.

On peut aussi regretter que rien ne soit prévu pour gérer la période de transition pour le personnel actuellement en poste.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, aujourd'hui tout le monde connaît et reconnaît les résultats obtenus par l'OFAJ ainsi que la qualité des actions menées depuis 1963. L'Office a mis en place un réseau de partenariat et un système d'échanges, tant de personnes que d'idées, d'une qualité exceptionnelle.

Jamais un tel maillage entre les jeunesses de deux pays, autrefois en conflit, ainsi qu'entre les organismes, associations, institutions chargés de la jeunesse n'avait été construit.

Depuis 1963, plus de sept millions de jeunes Allemands et Français ont bénéficié des services de l'OFAJ. Leurs familles, leurs villages ou leurs villes ont également noué des liens durables qui ont contribué à la construction de l'esprit européen.

Jean Monnet disait : « Rien ne se crée sans les hommes, rien ne dure sans les institutions ». C'est pourquoi l'Office doit s'inscrire dans la pérennité, comme l'avaient souhaité ses fondateurs Konrad Adenauer et le général de Gaulle.

Il s'agit donc aujourd'hui de moderniser une institution dont les principes fondateurs restent parfaitement pertinents. Tel est l'objet du projet de loi qui nous est soumis.

Il conviendra de veiller à ce que cette modernisation des structures de l'Office ne prive pas celui-ci de l'apport indispensable de la société civile et à ce qu'un véritable dialogue s'instaure entre le conseil d'administration et le conseil d'orientation.

De même, les conséquences liées aux changements de statut des personnels devront faire l'objet d'un suivi particulièrement vigilant. Je souhaite que le Gouvernement nous fasse part de ses intentions sur ces deux sujets.

Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose d'adopter le présent projet de loi.

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