Intervention de François-Noël Buffet

Réunion du 29 juin 2010 à 15h00
Réforme des collectivités territoriales — Suite de la discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de François-Noël BuffetFrançois-Noël Buffet :

Le Sénat a déjà adopté en première lecture ce projet de loi, que l’Assemblée nationale a modifié sur un certain nombre de points, sans pour autant dénaturer les principales mesures que nous avions votées.

C’est par un travail collectif, avec nos collègues députés, que la réforme proposée par le Gouvernement prendra toute la mesure des besoins exprimés par les élus locaux et je tiens en cet instant à saluer le travail exhaustif effectué par le rapporteur, Jean-Patrick Courtois, aux côtés du président Hyest, pour tenter de trouver l’équilibre nécessaire à la sérénité de nos débats.

Il est de notre devoir d’aborder cette réforme en restant fidèles à notre héritage institutionnel, tout en adoptant une organisation territoriale adaptée aux défis de notre époque. Au fil du temps, notre pays a su dégager un modèle original d’administration locale ; à nous d’en préserver l’esprit.

Je le dis clairement : la décentralisation était absolument nécessaire. Elle a contribué à la vitalité démocratique de notre pays, renforcé les libertés locales, consacré une nouvelle forme de gestion publique, plus proche des citoyens. Chacun mesure combien la France a changé depuis une trentaine d’années. D’ailleurs, personne ne songerait à revenir sur cet acquis fondamental.

Pourtant, notre paysage institutionnel est aujourd’hui fragmenté du fait d’un empilement déraisonné de structures administratives. Il était donc nécessaire de réformer notre organisation administrative territoriale, devenue trop complexe.

Je rappelle que nous sommes favorables à la clarification des structures, avec la mise en œuvre d’un bloc communes-intercommunalité scellé par l’unité des élus communaux et d’un bloc départements-région consolidé par le futur élu commun, le conseiller territorial.

À tous les élus locaux qui nous écoutent, dans cet hémicycle, bien sûr, mais aussi dans tous nos territoires, je réaffirme que les communes sont confortées dans leur rôle de cellules de base de la démocratie locale et de notre organisation territoriale, et les propos inquiétants que, de-ci de-là, d’aucuns tiennent sont contraires à la réalité.

C’était l’une des préoccupations majeures du Sénat, et cet objectif est pleinement atteint dans le projet de loi, dont je vais maintenant aborder différents aspects, en commençant par l’institution des conseillers territoriaux.

La commission des lois du Sénat a supprimé, la semaine dernière, les articles concernant les modalités de l’élection du futur conseiller territorial ainsi que le nombre des futurs élus.

Le principe de la création du conseiller territorial a néanmoins été sauvegardé : il est désormais acquis puisque les deux assemblées se sont prononcées de la même manière.

Évidemment, il n’existe pas de mode de scrutin parfait. Il faut donc faire des choix. Le nôtre est clair : il s’agit du scrutin majoritaire uninominal à deux tours, comme nous le propose le Gouvernement dans un amendement que nous examinerons ultérieurement.

C’est un mode de scrutin simple et lisible pour les électeurs. Il permet par ailleurs de maintenir un lien indéfectible entre l’élu et le territoire qu’il représente et donne à l’élu une véritable légitimité.

Le relèvement à 12, 5 % du seuil d’accessibilité au deuxième tour des élections cantonales a été maintenu et s’appliquera quel que soit le mode d’élection qui sera retenu à terme.

Sur l’initiative de notre collègue Portelli, le « territoire » a été redéfini comme étant – et c’est un point important – « une circonscription électorale, dont les communes constituent un espace géographique, économique et social homogène ».

En revanche, la commission a supprimé le tableau de répartition des conseillers territoriaux.

Sur ce point particulier, le groupe UMP suivra la proposition du rapporteur Jean-Patrick Courtois de rétablir un nouveau tableau de répartition des conseillers territoriaux ne sacrifiant pas le monde rural – c’était, bien sûr, un enjeu – et aboutissant à un nombre raisonnable d’élus, conformément à l’objectif de simplification.

La commission des lois du Sénat nous invite par ailleurs à poursuivre la réflexion sur les propositions qui nous sont faites pour répondre aux exigences que sont le respect de l’objectif de parité, la place du suppléant des futurs conseillers territoriaux et le cumul des mandats.

Les conséquences de la création des conseillers territoriaux sont désormais claires.

Le mandat de conseiller territorial compte pour un seul mandat. Il est ajouté à la liste des mandats soumis à la limitation de cumul à deux mandats locaux et de représentant au Parlement européen.

Enfin, les conseillers territoriaux sont intégrés dans le collège sénatorial de leur département d’élection.

J’en viens à l’intercommunalité.

La commission des lois du Sénat a noté avec satisfaction que l’économie générale des dispositions prévues pour parachever le paysage intercommunal a été relativement bien préservée, qu’il s’agisse de mettre en place de nouvelles règles pour adapter la composition des conseils communautaires à la démocratisation des EPCI à fiscalité propre, de proposer de nouvelles formes pour adapter les structures à la diversité des territoires, de développer et de simplifier les processus ou d’achever et rationaliser la carte.

Sur de nombreux points, l’Assemblée nationale a adopté le dispositif voté par le Sénat. C’est pourquoi la commission des lois du Sénat a souhaité retenir le texte voté par nos collègues députés. Elle n’a donc apporté aucune modification.

J’insisterai sur deux points importants, en commençant par l’élection au suffrage universel direct des délégués des communes au sein des conseils communautaires des EPCI à fiscalité propre.

Pour les communes de plus de 500 habitants, le système retenu est celui du « fléchage », les premiers de la liste ayant vocation à siéger au conseil municipal de leur commune et au conseil communautaire, les suivants de liste ne siégeant qu’au conseil municipal de leur commune.

Dans les communes de moins de 500 habitants, les délégués des communes sont le maire et les conseillers municipaux désignés dans l’ordre du tableau établi lors de l’élection de la municipalité.

Ces précisions sont importantes, car, sur le terrain, il était nécessaire de rassurer les uns et les autres.

S’agissant ensuite de la rationalisation de l’intercommunalité, elle constitue évidemment la consécration du schéma départemental de coopération intercommunale.

Son objectif est d’établir une couverture intégrale du territoire par des EPCI à fiscalité propre, en prenant en compte notamment des regroupements de population de 5 000 habitants et la rationalisation des périmètres des EPCI existants.

La date fixée pour sa mise en œuvre est le 31 décembre 2011.

Le projet de loi comporte un élément nouveau : la création des métropoles et des pôles métropolitains.

Le rapporteur a proposé à la commission des lois un retour à la définition de la métropole adoptée par le Sénat en première lecture en revenant sur une conception plus restreinte de celle-ci, conception dont je rappelle les aspects essentiels : définition de l’intérêt métropolitain à la majorité des deux tiers du conseil de la métropole ; fixation d’un délai de dix-huit mois pour la signature de la convention de transfert à la métropole de compétences départementales ou régionales ; pour la création de métropoles, extension aux discontinuités territoriales de la dérogation temporaire au principe de continuité territoriale instituée au profit des enclaves ; enfin et surtout, suppression du transfert automatique de la taxe foncière sur les propriétés bâties des communes de ce nouvel EPCI, point important sur lequel la commission des lois a tenu à apporter de profondes modifications.

Sur le sujet des pôles métropolitains, la commission des lois du Sénat a jugé conforme les dispositions introduites par l’Assemblée nationale et n’a donc pas adopté de modification particulière au projet de loi.

Il convient de rappeler que le pôle est constitué par accord des EPCI en vue d’actions d’intérêt métropolitain en matière de développement économique, de promotion de l’innovation, de la recherche et de l’université, de la culture, d’aménagement de l’espace et de développement des infrastructures et des transports afin d’améliorer la compétitivité et l’attractivité de nos territoires.

S’agissant des communes nouvelles, le rapporteur de la commission des lois n’a proposé que des modifications visant à améliorer les qualités rédactionnelles et de coordination du projet de loi, sans apporter de changement majeur, l’axe principal retenu par le Sénat, à savoir l’adhésion volontaire des communes au principe de fusion, ayant été respecté par l’Assemblée nationale.

L’Assemblée a d’ailleurs prévu l’unanimité des conseils municipaux, tant au stade de l’initiative qu’à celui de la décision de créer une commune nouvelle, sans recours à des consultations populaires. L’incitation financière, qui était mal comprise, a également été supprimée.

Autrement dit, et c’est essentiel, il n’y a absolument pas de volonté d’imposer des fusions autoritaires de communes à grande échelle.

J’évoquerai à présent le regroupement des départements et des régions.

Tout d’abord, concernant les procédures de regroupement, l’Assemblée nationale a validé dans son principe le choix opéré par le Sénat de conditionner l’issue du projet de regroupement des départements et des régions à l’accord de chacun des territoires concernés et de sa population.

L’accord de la population de chacun des territoires concernés devra se manifester par la majorité absolue des suffrages exprimés, correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits.

L’Assemblée nationale a également intégré une procédure de consultation du comité de massif compétent, lorsque le territoire est en zone de montagne.

Ensuite, s’agissant de la procédure d’inclusion d’un département à une région limitrophe, la commission des lois du Sénat a, là aussi, souhaité adopter conforme cette procédure, sans remise en cause de ce qui avait déjà été décidé à l’Assemblée nationale.

Enfin, pour ce qui est de la procédure de fusion d’une région et de départements qui la composent, après consultation des électeurs, les assemblées délibérantes de la région et des départements peuvent solliciter la création, par la loi, d’une collectivité qui les réunisse. C’est un point important. Là encore, la commission des lois a adopté conforme ces dispositions.

Pour terminer, il faut bien parler à la fois de compétences et de cofinancements. Cela a fait l’objet de discussions. Sur ce point, la commission des lois a adopté, sans le modifier, l’article 35 qui fixe les grands principes de la répartition des compétences entre les collectivités.

Concernant l’exclusivité des compétences conférées par la loi, il est réaffirmé que seules les communes conservent la clause de compétence générale. Les départements et les régions n’exercent, quant à eux, que les compétences que leur a conférées le législateur, mais disposent d’une capacité d’initiative qui leur permet « par délibération spécialement motivée de se saisir de tout objet d’intérêt départemental pour lequel la loi n’a donné compétence à aucune autre personne publique ». C’était également un point important.

À propos de l’existence de compétences partagées, les compétences en matière de tourisme, de culture et de sport seront partagées entre les communes, les départements et les régions. Cela permet aussi de couper court à nombre de démarches faites auprès des différentes structures sportives ou culturelles de nos territoires dans le but de les affoler en disant que, dès l’année prochaine, elles n’auraient plus rien, et que tout cela serait terminé après 2014. Le texte, de ce point de vue, est parfaitement clair.

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