Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me souviens du vote à l’UNESCO de la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. J’y étais. C’était vraiment un grand, un très grand plaisir. Seuls deux pays s’y étaient opposés : les États-Unis et Israël…
Ce soir, je retrouve au sein de notre assemblée le même climat, et j’en éprouve le même plaisir.
C’est que, mes chers collègues, j’aime, moi, les travaux qui sont menés avec sérieux, avec profondeur, qui laissent toute leur place aux contradictions, tout en sachant en faire la synthèse efficace.
Je crois que c’est ce qui a caractérisé non seulement nos débats, mais aussi, dès le début, la proposition de loi du président de la commission de la culture, M. Jacques Legendre, ainsi que le travail de notre collègue Colette Mélot.
Il vient d’être dit que c’était le premier vote sur ce sujet dans le monde. Je trouve cela très bien. La France donne là l’exemple d’une expérience législative bien préparée et bien pensée pour un texte qui sera donc bien appliqué.
Le vote unanime des deux assemblées est assez rare pour être salué, et encore le mot « unanime » manque-t-il peut-être ici de précision : c’est un geste politique fort, d’autant plus fort qu’il est pluraliste ! Il gagne ainsi en autorité et en ralliement ou, en tout cas, en convergence possible.
En substance, deux grandes questions ont été traitées.
Premièrement, il s’agissait d’empêcher tout contournement par rapport à la diversité culturelle, et de quelque pays que ce soit, même de l’Union européenne, qui a voté en faveur de cette diversité culturelle ; c’est même l’Union européenne qui nous défendait dans les discussions internationales.
Deuxièmement, il fallait faire en sorte que l’on n’oublie jamais que l’audace de la création, sa rencontre avec tous les publics, est à la base de tout ce dont nous discutons. Cette audace a besoin d’être rémunérée, cela a été dit, de manière « juste et équitable ». Il était aussi nécessaire de prendre en compte, y compris dans le code de la propriété intellectuelle, les plus-values que réaliseront les éditeurs à la suite de la baisse du coût de fabrication.
Ce sont ces deux idées fortes qui ont reçu l’aval, collectif et personnel, de tous les parlementaires.
Je tiens à dire que cette qualité politique, ce non-retard d’avenir, nous oblige aujourd’hui, nous, parlementaires et Gouvernement, et nous oblige à regarder plus loin.
En effet, il est impossible de ne pas voir qu’il y a une offensive contre le droit d’auteur, en tout cas une offensive pour le contourner, et que des lobbies puissants sont à l’œuvre dans le monde, singulièrement en Europe.
Il faut donc que notre texte soit suivi d’un acte, de deux actes, voire de trois, dans la foulée. Même s’il est bien aujourd'hui, il sera encore meilleur ainsi. Une loi est un moyen, et non une fin en soi.
Bien entendu, cela, c’est le travail des professionnels. Je pense que, une fois voté, notre texte pourra contribuer à les rassembler, mais le fait est qu’ils sont encore un peu divisés pour le moment, vous l’aurez noté.
Il nous faut donc des actes. Souvenons-nous : à la grande période de la Télévision sans frontières, de l’exception culturelle, de l’Accord multilatéral sur l’investissement, l’AMI, et de la réunion de Seattle, les membres du Parlement français et les autorités gouvernementales, et même les présidents de la République, ont fait tout ce qu’il fallait pour que les choses avancent.
Je me souviens d’un discours du Président de la République François Mitterrand, à Gdansk, et d’un discours du Président de la République Jacques Chirac, au Louvre. Le propos était ferme, poli, mais ferme.
Nous devons nous inscrire dans la même démarche. Peut-être faudrait-il, par exemple, réunir rapidement tous ceux avec qui nous avons travaillé pour montrer comment la substance acquise peut innerver ceux qui n’ont pas tenu l’unité jusqu’au bout et qui ont pourtant grand besoin de réaliser cette unité et de la faire entendre.
J’aimerais aussi que la commission entreprenne des démarches avec le Gouvernement, notamment avec le ministre de la culture, afin de pouvoir affiner les choses. Nous devons emprunter un chemin pour réussir – Aragon parlerait de « venelles », mais, même des venelles débouchent quelque part ! Et je pense qu’une réunion au niveau européen s’impose.
Monsieur le président de la commission de la culture, je crois qu’il faut prendre une initiative, il faut la travailler, la ciseler finement et la faire aboutir !