A l'issue d'un très long débat, qui était sans doute justifié puisqu'il avait lieu dans la presse depuis six mois, je dois avouer que j'ai été surpris par certains propos. Sans doute est-ce une faiblesse mais, lorsque je vote un texte, j'essaie de voter sur lui et lui seul, et pas sur autre chose. Nous aurons l'occasion de débattre de ces sujets de société.
Je constate que certains s'ingénient à fausser le débat. Il y a beaucoup de non-dits. Certains collègues qui ne veulent pas voter pour être politiquement corrects trouvent autre chose.
Le texte du Gouvernement prévoit que toutes les provocations à la haine ou à la violence, quelles qu'elles soient, doivent être réprimées. Jusqu'à présent, notre arsenal législatif réprimait mal les actes de haine ou de violence commis contre des personnes en raison de leur sexe ou de leur orientation sexuelle. Quelqu'un peut-il dire qu'il n'est pas d'accord avec cela ? Il s'agit de la dignité de chacun.
On a parlé de la charia, de la lapidation. Savez-vous que le code pénal réprime plus sévèrement un crime ou un délit commis contre une personne parce qu'elle est différente ou qu'elle se trouve dans une situation de faiblesse ?
Je comprends bien l'inquiétude qui s'est manifestée en ce qui concerne la liberté d'expression. Souvent, il est proposé de modifier la loi de 1881. Il est vrai que le projet de loi initial, qui ne réservait pas le même traitement à toutes les catégories et prévoyait l'allongement des délais de prescription dans un cas particulier, ce qui tendait à instituer une discrimination, pouvait être considéré comme dangereux pour la liberté d'expression.
En revanche, étendre l'injure, la diffamation, au sens du code pénal et de la jurisprudence, semble opportun. Dire qu'on est opposé au mariage homosexuel ou à l'adoption par un couple homosexuel n'est ni une injure ni une diffamation, mais relève du débat démocratique. Il n'est pas question non plus d'interdire d'écrire dans un livre son sentiment sur l'orientation sexuelle. Si tel était le cas, nombre de livres devraient être brûlés et d'éminents auteurs pourraient être censurés. Combien de grands auteurs dans le passé n'étaient pas antisémites ? Mais l'injure ou la diffamation sont des notions différentes.
Autant le texte initial était dangereux pour la liberté d'expression, autant le texte qui nous est présenté aujourd'hui met fin à une fausse polémique et permet de lutter contre les discriminations en raison de l'orientation sexuelle, du sexe et surtout d'éviter que certains n'utilisent la liberté d'expression pour stigmatiser une catégorie ou une autre. Il fut des périodes où des personnes ont été stigmatisées en raison de leur différence. Alors faisons attention. Nous avons le devoir de respecter les personnes, leur liberté, leur indépendance. De ce point de vue, le texte va dans le bon sens.
Mes chers collègues, si vous ne votez pas le texte, c'est parce que vous avez d'autres motifs. Alors, je vous en supplie, votez le texte !