Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, modifiant la loi du 15 juillet 1994 relative aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de contrôle en mer, le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui montre la volonté du Gouvernement d'apparaître résolument décidé à renforcer la lutte contre les activités illicites commises en mer.
Si nous comprenons les objectifs visés dans ledit projet, nous ne pouvons manquer de relever que les moyens proposés pour les atteindre sont beaucoup moins clairs et qu'ils mettent en exergue le fossé béant existant entre les intentions louables exprimées par le Gouvernement et les actions qui sont effectivement réalisées.
Pour illustrer cette contradiction, je prendrai l'exemple des douanes, dont le présent projet de loi vise à renforcer les compétences et les missions. Or, dans le même temps, une réforme du ministère de l'économie et des finances prévoit un remodelage complet des administrations exerçant leurs missions dans le cadre de l'action de l'Etat en mer, réforme qui diminuera fortement les moyens accordés aux douanes françaises.
Alors que le Gouvernement affiche l'ambition de lutter plus efficacement contre les trafics illicites dans la plupart des espaces maritimes, il supprime parallèlement à l'un des acteurs essentiels de la surveillance aéromaritime française et communautaire les moyens qui lui sont octroyés pour lutter contre ces trafics. C'est incompréhensible et inacceptable.
La recherche effrénée d'économies budgétaires ainsi que la volonté de vouloir rationaliser à outrance les moyens navals en présence se heurtent donc de plein fouet aux objectifs affichés par ailleurs de lutter contre les trafics illicites en tous genres.
La restructuration néfaste en cours est d'autant plus incompréhensible que les résultats de l'activité de l'administration des douanes sont sans cesse en hausse dans une Union européenne où la criminalité économique et financière croît en permanence. Il semble que la sécurité des populations ne soit plus une priorité du Gouvernement, qui privilégie la recherche du profit et élimine ce qui peut y faire obstacle.
Ainsi, sur 317 unités de surveillance terrestre des douanes, 124 ont d'ores et déjà été supprimées. Par ailleurs, 35 brigades de recherches, ainsi que des structures importantes de la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, sont vouées au même sort.
Aujourd'hui, la fonction de renseignement est assurée par la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, chargée du démantèlement des grands réseaux de trafics illicites, et par les brigades régionales de recherches, les BRR, pour la collecte active du renseignement. Ces dernières sont reconnues comme étant des unités particulièrement performantes de leur administration dans la lutte contre tous trafics. Pourtant, selon le projet de restructuration en cours à Bercy, il est question de les supprimer, à l'exception de celles de la Corse et de l'outre-mer. C'est également incompréhensible, car le renseignement constitue un pilier indispensable pour démanteler les réseaux internationaux et combattre les organisations criminelles.
Ce projet de restructuration suscite donc des craintes très vives, qui sont tout à fait justifiées. S'il était réalisé en l'état, c'est tout l'édifice douanier qui s'écroulerait, et près de 200 emplois disparaîtraient.
Dès lors, comment surveiller, madame la ministre, l'ensemble de la façade maritime atlantique en diminuant fortement les moyens des douanes, dont l'efficacité a pourtant été démontrée dans la lutte contre les trafics illicites ?
Vous comprendrez, dès lors, que nous ne pouvons voter ce texte, dont les objectifs affichés sont contrecarrés par les réformes en cours à Bercy. Vous ne pouvez méconnaître, madame la ministre, que ces deux réformes sont en totale contradiction, une contradiction qui révèle que tous les discours volontaristes tenus par votre gouvernement resteront, dans les faits, lettre morte.