Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je ferai, d'emblée, une observation d'ordre général au sujet de ces amendements.
Il est tout à fait regrettable que les Français de l'étranger ne reçoivent pas de l'État l'attention qu'ils méritent, alors qu'elle devrait être à la mesure du service rendu à la France.
L'amendement présenté par la commission des finances, et dont l'esprit est identique à celui qu'a déposé la commission des affaires étrangères, vise, à juste titre, à poser un problème d'une importance capitale pour nos compatriotes établis hors de France.
L'éducation est, en effet, l'une de leurs préoccupations majeures. C'est dire l'émoi qu'a suscité dans notre communauté expatriée l'amendement voté par l'Assemblée nationale, préconisant le transfert des crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger du programme « Français à l'étranger et étrangers en France » au programme « Rayonnement culturel et scientifique » relevant de la coopération au ministère des affaires étrangères.
En réalité, ce transfert n'est pas anodin. Sa première conséquence serait de faire passer le budget du programme « Français de l'étranger et étrangers en France » sous le seuil des 300 millions d'euros préconisé par les concepteurs de la LOLF, hypothéquant ainsi lourdement son maintien par l'amputation des 323 millions d'euros destinés à l'Agence.
Or ce choix est contraire aux intérêts éducatifs de nos compatriotes expatriés. Ceux-ci ont donc eu l'impression d'un abandon de la priorité de la scolarisation des enfants français, telle qu'elle découle de la loi de 1990 créant l'AEFE. C'est ainsi que le programme dont ils relèvent se trouve de ce fait fragilisé et, dans le contexte budgétaire incertain qui caractérise la gestion publique, ce choix présente, à terme, le danger d'un désengagement financier plus important de l'État.
Nonobstant, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale pose également une question de fond liée aux conditions du développement cohérent de l'enseignement français à l'étranger, notamment en matière tant de croissance des frais de scolarité, exponentielle, que de gestion immobilière et d'attribution de bourses aux enfants français.
Le réseau éducatif extérieur voit croître d'année en année les effectifs d'enfants scolarisés, la majorité d'entre eux étant d'origine étrangère, alors que, dans le même temps, les moyens financiers de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger diminuent.
Si la priorité doit, certes, être donnée aux enfants français, comment pourrons-nous à l'avenir concilier dans les meilleures conditions cette croissance des effectifs avec une telle réduction des moyens ?
Les familles assument d'ores et déjà plus de 60 % du coût de fonctionnement de nos établissements, ce qui conduit à exclure les deux tiers d'enfants français recensés à l'étranger qui, issus de familles à revenus intermédiaires, sont victimes du barème d'attribution des bourses.
C'est dans ce contexte que nous en appelons à une attitude volontariste de l'État, tant sur le plan politique que sur le plan financier, à travers, notamment, l'augmentation des bourses scolaires.
Il convient, cependant, de ne pas agir dans la précipitation. En effet, le transfert éventuel des crédits de l'AEFE axé sur la coopération internationale ou tout autre programme plutôt que sur le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » doit, le cas échéant, faire l'objet d'une concertation.
À cet égard, je rappellerai, dans cet hémicycle qui sait se montrer attentif aux expatriés, que la création, en 2004, de l'Assemblée des Français de l'étranger, composée d'élus au suffrage universel direct, avait précisément pour objet de « donner au Gouvernement des avis sur les questions et projets intéressant les Français établis hors de France et le développement de la présence française à l'étranger ».
C'est la raison pour laquelle je voterai les amendements identiques qui nous sont présentés aujourd'hui, et qui répondent, en premier lieu, à mon souci de pérenniser le programme « Français à l'étranger et étrangers en France ». Je m'engage à saisir, par la suite, la commission des affaires culturelles et de l'enseignement de l'Assemblée des Français de l'étranger afin que toute nouvelle imputation budgétaire puisse, à l'avenir, être rapidement examinée dans la perspective du projet de budget pour 2007.
La LOLF, pour imparfaite qu'elle soit encore, n'impose pas, que je sache, un mode de gestion qui irait à l'encontre des intérêts de nos compatriotes expatriés. Elle est un moyen de redonner du sens à l'action publique en termes de lisibilité et de responsabilisation des acteurs par la recherche, entre autres, d'actions interministérielles auxquelles, dans certaines circonstances, le ministère de l'éducation nationale ne pourra pas éternellement continuer à se soustraire.