Monsieur le président, je vous suis infiniment reconnaissant et j’ai conscience de bénéficier d’un privilège. J’ai rejoint tardivement cet hémicycle, car je devais présider une réunion de la commission des finances, mais ne pas participer du tout à ce débat aurait été pour moi une véritable punition !
J’ai entendu évoquer la possibilité d’instaurer une prime aux relocalisations. Monsieur le secrétaire d’État, il ne s’agit pas, dans notre esprit, de diaboliser les délocalisations, mais de prendre conscience de la réalité de ce phénomène, que les discours officiels ont peut-être trop tendance à gommer.
Il s’agit d’ailleurs moins aujourd’hui de délocalisations que de « non-localisations ». Dans les entreprises, lorsqu’une ligne de production arrivait en fin de cycle, il était d’usage qu’une autre prenne le relais. Tel n’est plus le cas aujourd’hui : la nouvelle ligne de production démarre hors du territoire national, là où se trouvent les nouveaux marchés et d’où il sera facile d’exporter vers les vieux marchés, dont le nôtre.
Ce phénomène ne touche pas que l’industrie, monsieur le secrétaire d’État. Les grandes entreprises, celles de l’automobile ou de l’aéronautique, par exemple, externalisent les travaux de recherche et les confient à des cabinets d’ingénieurs. Les représentants d’une de ces sociétés étaient d’ailleurs assez gênés, lorsque je les ai reçus, à la veille de l’été, de m’exposer ce qu’ils subissaient, car ils prenaient ainsi le risque de perdre leurs marchés. Ils m’ont expliqué que leurs donneurs d’ordres les poussent maintenant à établir leurs cabinets en Europe centrale plutôt qu’en France, pour réduire les coûts.
Ces phénomènes existent, et vous verrez que nous sortirons de la crise que nous vivons actuellement – nous en sommes peut-être d’ailleurs déjà sortis – en ayant perdu une partie de notre potentiel de croissance. Nous devons donc prendre conscience de la nature des facteurs de compétitivité. Dans cette perspective, j’apprécie la réforme de la taxe professionnelle, mais je m’étonne que l’on introduise la valeur ajoutée dans son assiette, car la valeur ajoutée inclut les salaires.
Monsieur le secrétaire d’État, nous avons donc de vraies réformes à entreprendre pour rendre leur pleine compétitivité à nos entreprises et à nos territoires. Il s’agit non pas de diaboliser les délocalisations, mais de souligner qu’elles reflètent nos propres hésitations et nos retards à nous adapter, à nous transformer pour être compétitifs, qui font qu’aujourd’hui, certains pays ont des fonds souverains, et d’autres une dette souveraine !