Séance en hémicycle du 22 octobre 2009 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, déposé sur le bureau de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel deux lettres par lesquelles celui-ci informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi, en application de l’article 61, alinéa 2 de la Constitution, le 20 octobre 2009 par plus de soixante députés, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution de la loi pénitentiaire et par plus de soixante sénateurs, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution de la loi relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.

Le texte de ces saisines du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de ces communications.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 47 de Mme Nathalie Goulet à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur le contrôle parlementaire de l’action du Fonds stratégique d’investissement.

Cette question est ainsi libellée.

« Mme Nathalie Goulet attire l’attention de Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur la nécessité d’instaurer un meilleur contrôle parlementaire de l’action du Fonds stratégique d’investissement.

« Né de la volonté du Président de la République et d’une annonce du 20 novembre 2008, le Fonds stratégique d’investissement, ou FSI, est composé de deux actionnaires, la Caisse des dépôts et consignations, ou CDC, et l’État, qui détiennent respectivement 51 % et 49 % du Fonds. Le Parlement, s’il a agréé au principe de la création de ce fonds, n’a été associé ni à son organisation ni à sa gouvernance. Le 6 juillet dernier, l’État et la CDC ont annoncé l’apport de 14 milliards d’euros de participations au FSI, portant ainsi sa dotation à 20 milliards d’euros.

« Comme toute filiale de la CDC, le FSI exerce ses activités sous le contrôle de la commission de surveillance de la Caisse. C’est dans ce cadre que les parlementaires représentant les deux assemblées au sein de la commission de surveillance exercent, quand ils sont présents, leur contrôle sur la stratégie et les investissements du FSI. De même, un rapport au Parlement est bien remis, mais il s’agit seulement d’une information a posteriori. Elle s’interroge sur le bien-fondé d’une telle gouvernance, à l’heure où l’ensemble des organismes financiers réclament plus de contrôle et plus de transparence. De la même façon, elle s’interroge sur le processus décisionnel qui a conduit l’État à apporter des participations dans des entreprises faisant l’objet d’un rapport annuel, jaune budgétaire annexé à la loi de finances. Ces procédés lui semblent peu en adéquation avec les impérieuses nécessités de la LOLF.

« Hormis ces questions de gouvernance et de stratégie, les annonces récentes du Président de la République le 3 septembre, à Caligny, dans l’Orne, quant à l’implication du FSI dans plusieurs actions visant à renforcer les fonds propres des entreprises, puis, le 25 septembre, quant à la participation du FSI dans un fonds de consolidation et de développement des entreprises destiné à soutenir les PME en difficulté, ne sauraient laisser le législateur indifférent. Là encore, compte tenu de la crise de l’ensemble du secteur industriel, elle estime nécessaire que les modalités de participation fassent l’objet d’un examen attentif non discriminatoire et soient justifiées économiquement.

« Compte tenu de l’importance des montants engagés, du caractère stratégique de son intervention, mais aussi du fait que le FSI a la pleine et entière responsabilité de ses actifs, elle estime souhaitable qu’une réflexion commune soit engagée rapidement afin de mettre en place un pilotage spécifique de ses actions. Il lui apparaît en effet essentiel que le Parlement soit pleinement associé dans la gouvernance et le contrôle des choix du FSI. Les exemples étrangers comme le Fonds structurel norvégien, qui associe en amont et en aval le Parlement norvégien à ses travaux, montre qu’il existe d’autres types de gouvernance.

« Elle souhaite par conséquent que la présente question orale avec débat permette de débattre des méthodes et des objectifs du FSI ainsi que du contrôle parlementaire sur son fonctionnement et ses choix. »

La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, vous voyez aujourd’hui à cette tribune un parlementaire heureux.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Heureux, parce que nous débattons d’un sujet qui m’est cher, le Fonds stratégique d’investissement. En effet, en février 2008, j’ai rencontré les collaborateurs de Mme Lagarde pour leur présenter un projet de fonds souverain à la française destiné à aider nos entreprises sans encourir les foudres de Bruxelles.

L’accueil a été mitigé, sauf de la part du chef du service juridique, qui d’ailleurs ne fait plus partie aujourd’hui du cabinet de Mme Lagarde, mais je rends grâce à ses encouragements.

Quelques semaines plus tard, c’est au service politique du Président de la République que je proposais le même projet, sans plus de succès !

N’étant pas une femme habituée à renoncer, j’ai publié dans La Tribune le 18 mars 2008 un article sur ce même thème.

C’est donc avec intérêt que j’ai suivi l’annonce, puis la mise en place, en novembre 2008, du Fonds stratégique d’investissement, avec la participation à 51 % de la Caisse des dépôts et consignations et à 49 % de l’État. Il fut abondé initialement par la loi de finances rectificative du 14 janvier 2009, puis par des participations en juillet 2009.

Ce fonds est, à mon sens, un excellent outil qu’il faut défendre et soutenir. Il n’est pas dans mes intentions de porter un jugement sur les compétences des responsables du FSI ou sur leur intégrité. C’est sur le système de gouvernance que je souhaite vous interpeller afin que nous améliorions, ensemble, le fonctionnement de cet outil récent, né en période de crise, qui dépend de la CDC et qui est impliqué dans tant d’actions et tant de secteurs d’activité.

Je suis un parlementaire heureux, mais je suis aussi un parlementaire inquiet. En effet, nous n’avons officiellement aucune information sur le fonctionnement du Fonds, sur ses critères de choix et sa stratégie.

Il s’agit d’une filiale de la Caisse des dépôts et consignations. Nous devrions donc être pleinement rassurés, puisque députés et sénateurs siègent au conseil de surveillance de la Caisse.

J’ai lu avec intérêt l’article publié hier dans Les Échos, qui répond par avance à notre débat, et celui qui est paru ce matin dans Le Figaro.

La présence de parlementaires au conseil de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations n’est pas synonyme, loin s’en faut, d’information du Parlement et encore moins d’information préalable.

Nous devrions également être rassurés par les nouvelles dispositions de la loi de modernisation de l’économie, sur lesquelles nous avons travaillé ensemble et qui renforceraient la gouvernance de la Caisse et le contrôle sur ses activités.

En réalité, nous ne sommes pas vraiment rassurés, car rien de tel n’existe pour le Fonds stratégique d’investissement, auquel aucun parlementaire ne participe au moins statutairement.

Quand bien même, d’ailleurs, ce serait le cas, je rappellerai les titres d’un article publié en 2007 : « La Caisse des dépôts et consignations au service d’elle-même », « Des centaines de milliards d’argent public sans contrôle ». Du point de vue de la gouvernance, quel modèle !

Qu’en disait M. Philippe Marini, interviewé à cette occasion et à qui nous pouvons, vous et moi, accorder quelque crédit ?

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

« Rappelons que la Caisse des dépôts et consignations est un établissement public sui generis. On peut d’ailleurs considérer que la CDC et son groupe sont encore une monarchie absolue. » Il est vrai que c’était avant la modification apportée par la loi LME.

À la question : « Vous siégez à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, que pensez-vous du contrôle exercé par le Parlement sur la CDC ? », Philippe Marini répondait : « Les ordres du jour sont pléthoriques. Je ne crois pas que la présence du Parlement dans l’organe de surveillance soit aussi efficace qu’on le dit. […] Lors des réunions de la commission, nous sommes seulement informés des principaux enjeux. J’ai siégé dans plusieurs conseils d’administration et aucun n’était comparable aux réunions de la commission de surveillance de la CDC. Elles sont interminables – entre quatre et cinq heures – et les exposés y sont longs et descriptifs. »

Il poursuivait : « À la Caisse, c’est la stratégie de l’étouffement qui domine : les dossiers sont très épais et on nous donne rarement de problématique avec choix. Cela montre le niveau de l’influence du Parlement sur la Caisse. Ce système est largement obsolète. »

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

C’est pour cela qu’elle a été réformée !

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

En effet, et c’est tant mieux !

Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d’État, que, dans ces conditions, puissent naître quelques interrogations.

Examinons brièvement certaines des dix-sept interventions du Fonds stratégique d’investissement depuis sa création. Parmi elles, on trouve les noms de Carbone Lorraine, Open Portal, Technip, sans oublier le plan de reprise de Mecachrome au Canada, Frey nouvelles énergies, Nexans, Gemalto, Photonics, Farinia, Daher et Valeo.

Arrêtons-nous sur ce dernier groupe. Valeo, sous-traitant automobile bien connu, a reçu de la part du Fonds stratégique d’investissement 24 millions d’euros. Cette prise de participation visait à accompagner, dans une période d’évolutions importantes du secteur, un acteur majeur de l’industrie européenne et mondiale de l’équipement automobile.

Nous avons tous ici le souvenir de la crise qu’a connue le secteur automobile et il semble tout à fait normal que les sous-traitants de ce secteur aient été soutenus, mais, dans la foulée de cette aide de 24 millions d’euros, le président-directeur général sortant a reçu une indemnité de départ de 3, 2 millions d’euros !

Il y eut un concert d’indignation, mais aucune possibilité de récupérer cette somme versée au dirigeant.

En fait, tout ne va pas si mal maintenant pour Valeo : son chiffre d’affaires est en hausse de 3, 5 % et l’équipementier enregistre une amélioration de sa marge brute de 310 millions d’euros.

Autrement dit, le Fonds stratégique d’investissement n’a pu éviter ni les licenciements dans l’entreprise, ni le versement d’un parachute doré de 3, 2 millions d’euros au dirigeant congédié.

J’en viens à l’investissement dans Farinia, groupe de fonderie néerlandais, qui a reçu récemment 20 millions d’euros. Là non plus, les licenciements n’ont pas été évités et la société continue à racheter des entreprises prêtes à être mises à la casse, sans se soucier de l’emploi.

On pourrait au moins imaginer que, grâce à l’aide du Fonds stratégique d’investissement, cette société rapatrie son siège social en France. Ne serait-ce pas là une excellente idée ?

Gemalto, dont le nombre de salariés n’est pas mentionné, a aussi reçu une participation.

Nexans a reçu 58 millions d’euros par le biais du FSI, qui a acquis 5 % du fabriquant de câbles. Mon collègue Antoine Lefèvre vous en parlera sans doute mieux que moi.

En septembre, le groupe a annoncé des licenciements, notamment dans les Ardennes. Or, on trouve au conseil d’administration de Nexans un directeur de la Caisse des dépôts et consignations, qui est aussi censeur d’OSEO ! Je m’interroge donc sur l’existence d’une certaine consanguinité dans ce dossier.

Plus récemment, le FSI a investi 5 % dans la société Technip, bien connue dans le domaine pétrolier et qui n’a vraiment pas besoin de soutien financier !

Ce matin, à la lecture du Figaro, nous apprenons que le Fonds stratégique d’investissement va investir 7, 5 millions d’euros dans Dailymotion. C’est intéressant pour Nadine Morano, si elle gagne son procès !

Rappelons-nous les objectifs annoncés lors de la création du Fonds, qui devait être un outil stratégique. Il s’agissait d’aider les entreprises à faire face à la crise économique et sociale, sur fond de patriotisme économique.

Ne croyez-vous pas qu’il faudrait instaurer des procédures posant des garde-fous et, à tout le moins, comme cela se fait dans d’autres pays, un comité d’éthique qui déterminerait les secteurs dans lesquels le Fonds ne pourrait pas investir et les créneaux prioritaires ?

Nous venons d’essuyer la plus grave crise économique de ces trente dernières années. Lors de tous les sommets internationaux, les institutions et les gouvernements ont compris –du moins en apparence – que cette crise était en partie due à un laxisme en matière de contrôle, de gouvernance et surtout de transparence. De l’affaire Kerviel à la faillite de Lehman Brothers, nous avons tous compris que la devise « too big to fail » a vécu.

Il faut une règle du jeu, c’est indispensable lorsque l’on manie des fonds publics. Il faut également une transparence des procédures, une traçabilité et une conditionnalité des investissements en fonction d’objectifs préétablis et un contrôle extérieur.

Comment les fonds d’investissement fonctionnent-ils à l’étranger ? Prenons l’exemple de la Caisse des dépôts du Québec. Sur les quinze membres de son conseil d’administration, dix sont considérés comme indépendants et viennent du privé. Leur assiduité est soigneusement contrôlée, ainsi que leur rémunération. La transparence de la Caisse est totale : ses comptes sont contrôlés et approuvés par le vérificateur général du Québec, qui dépend exclusivement de l’Assemblée nationale.

Le fonds stratégique norvégien fait, quant à lui, figure de modèle. Doté d’un comité d’éthique, il intervient et contrôle les investissements, avec un pouvoir de contrainte. Il possède de plus un contrôle que nous pourrions qualifier de « grenello-compatible ».

Ainsi, le 9 septembre 2008, le ministère des finances norvégien a décidé d’exclure du fonds d’investissement Rio Tinto, en raison de graves risques que cette entreprise faisait peser sur l’environnement. Le conseil d’éthique a conclu que Rio Tinto était directement impliquée dans de graves dommages écologiques causés par cette exploitation minière.

La ministre des finances a affirmé que le fonds ne pouvait détenir des participations dans une telle société, parce que la poursuite des investissements dans cette entreprise conduisait à prendre un risque inacceptable.

Dans une lettre du 28 avril dernier, elle a donc demandé au fonds de céder dans les deux mois les participations qui avaient été prises. Comme vous le voyez, pouvoir de contrainte et capacité d’analyse se combinent dans cet exemple.

Mais il existe également en Norvège un contrôle politique. Vous me pardonnerez d’ailleurs, puisque je suis vice-présidente du groupe d’information internationale France-Territoires palestiniens – dont la présidente, Monique Cerisier-ben Guiga, est elle aussi présente – de m’attarder sur une décision rendue par la Norvège le 3 septembre 2009.

Je suis certaine que vous aurez à cœur, monsieur le secrétaire d’État, de comparer cette position à celle qui a été adoptée officiellement par la France en ce qui concerne un contrat conclu par Alstom dans une affaire connue sous le nom de « tramway de la honte » à Jérusalem.

Le ministère des finances norvégien a exclu de son fonds la société israélienne Elbit Systems Limited, parce qu’elle fournit aux autorités israéliennes un système de surveillance qui constitue l’une des principales composantes de la barrière de séparation entre Jérusalem et la Cisjordanie et de son régime de contrôle.

Le système de surveillance a été spécialement conçu en étroite collaboration avec les autorités israéliennes et n’a pas d’autre application. En outre, Elbit est clairement informée de la destination de son produit.

La Cour internationale de justice a rappelé les obligations pesant sur tous les États parties à la quatrième convention de Genève. Il s’agit de prévenir d’éventuelles violations du texte telles que la construction de ce mur de séparation.

Aux dires de la ministre norvégienne des finances, les autorités de son pays agissent conformément à ces prescriptions. Affirmant que la décision d’exclure Elbit Systems Limited n’était pas liée à la nationalité de cette entreprise, elle a déclaré : « Nous ne voulons pas financer les entreprises qui contribuent ainsi directement aux violations du droit humanitaire international. »

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le fonctionnement de cette autorité de contrôle qu’est le comité d’éthique norvégien est très intéressant : il peut soit s’en tenir à vérifier ce que l’on pourrait appeler le caractère « grenello-compatible » des investissements effectués, soit s’attacher à des considérations beaucoup plus politiques.

Ses décisions sont d’ailleurs réversibles. C’est ainsi que la société Thales, exclue de la sphère d’investissement du fonds en 2005 au motif que l’une de ses filiales était impliquée dans la fabrication de bombes à fragmentation, a été réintégrée après la cessation de cette activité. Et c’est justement parce que le fonds norvégien considère EADS et Safran comme des fabricants de bombes ou d’armes qu’il se refuse à contribuer à leur financement.

En l’espèce, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, reconnaissons-le, nous sommes tout de même assez loin de la gouvernance du fonds français ! À cet égard, j’aurai trois idées à vous soumettre.

La première, sans doute la plus simple à mettre en place, réside dans l’élaboration d’un code d’éthique. Le contrôle de sa bonne application serait confié à un organisme extérieur, qui disposerait d’un pouvoir de contrainte en cas de violation des règles fixées. Cette nécessité absolue d’un régulateur financier indépendant a d’ailleurs été soulevée par le Fonds monétaire international lui-même.

La deuxième idée consiste à poser un certain nombre de conditions.

Monsieur le secrétaire d’État, nous sommes nombreux à souhaiter que l’on remette la question de l’emploi, totalement absente des préoccupations du FSI – du moins dans les motivations annoncées –, au cœur de l’activité du fonds. Il n’est pas concevable qu’une entreprise ayant reçu des fonds publics procède à des licenciements. L’affaire Nexans est, de ce point de vue, exemplaire !

Dans la mesure où les entreprises concernées ont perçu des fonds publics, il importe de définir les conditions de rémunération des dirigeants, s’agissant, notamment, des bonus et des retraites chapeau.

Lors du dernier sommet sur la régulation financière, le Président de la République, usant de toute son influence, a affirmé devant le monde entier qu’il fallait moraliser le capitalisme. Qu’il commence donc par imposer quelques règles de conduite au FSI, à ce fonds, qui, finalement, est « sa » création !

La troisième idée est d’instaurer une obligation de contrôle externe dans les dossiers complexes.

Il faudrait sans doute effectuer de façon plus claire et plus lisible une distinction entre, d’une part, les participations à visée purement spéculative ou prospective, qui ne sont d’ailleurs ni contestables ni même critiquables, et, d’autre part, les actions de soutien aux entreprises stratégiques. L’investissement de 7, 5 millions d’euros dans Dailymotion, annoncé ce matin, relève manifestement du premier cas, tout comme les prises de participation dans les entreprises du secteur de la biotechnologie ou de la biodiversité.

À mon sens, il s’agit de deux démarches bien distinctes, qui ne peuvent pas se voir appliquer les mêmes règles de fonctionnement. Le directeur général du FSI l’a dit, le fonds n’est pas un « pompier » : il lui revient de nous indiquer clairement quelle est sa ligne d’action !

L’analyse des dossiers complexes – je pense en particulier aux difficultés rencontrées par un armateur de Marseille – doit faire l’objet d’un examen contradictoire effectué par un organisme externe et pas seulement par les services de Bercy. Les salariés des entreprises concernées doivent y être associés. L’objectif est de contrôler en détail les comptes et l’activité des filiales, quand elles existent, afin que le principe de précaution trouve sa pleine application dans le domaine de la gestion de l’argent public.

Auditionné par la commission des finances du Sénat, M. Augustin de Romanet a d’ailleurs déclaré que la Caisse des dépôts et consignations devra être « plus sélective dans ses investissements ». Ces propos ont été largement repris dans la presse, notamment par Les Échos.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, réglementation des procédures, contrôles extérieurs, principes de gestion prudentielle et code éthique, tels sont les éléments qui doivent servir de base au FSI pour qu’il trouve sa place dans notre économie, qui a bien besoin d’un tel outil.

Quant aux participations des fonds d’Abou Dabi ou des fonds souverains chinois, il faudrait, là encore, que les conventions soient visées par une autorité extérieure et que leur utilisation soit fléchée, afin de disposer d’une certaine traçabilité en la matière. Que n’a-t-on entendu voilà quelques mois sur l’opacité de ces fonds étrangers, à qui l’on vient aujourd’hui demander de l’aide !

Si le Fonds stratégique d’investissement entend défendre l’industrie française à l’étranger et la compétitivité de nos entreprises, il doit aussi être attentif à sa notation. Les fonds sont en effet notés en fonction de critères objectifs de gouvernance.

Ensemble, nous devons rendre plus pertinent cet outil, sans hésiter à proposer des solutions innovantes pour accroître la transparence en la matière et assurer une gouvernance efficace.

Nous avons en France des entreprises stratégiques. Je pense notamment aux Chantiers de l’Atlantique, société pour laquelle M. le secrétaire d’État sait que j’ai les yeux de Chimène ! Au mois de juillet dernier, l’État, par le biais du FSI, y a apporté sa participation, et c’est très bien ainsi. L’entreprise sera ainsi en mesure de renforcer sa stratégie de développement et de maintien d’un savoir-faire véritable et exceptionnel.

Mais il faut aussi tenir compte de ces milliers de PME et de PMI qui maillent notre territoire : elles aussi ont besoin du soutien du Fonds stratégique d’investissement ! Et que dire de l’agriculture et de la filière laitière : voilà un autre secteur stratégique ! Nous pourrions nous inspirer de ce qui est prévu pour la filière bois, laquelle va bénéficier d’un fonds de soutien spécifique de 20 millions d’euros. Mon collègue Claude Biwer évoquera sans doute ce sujet tout à l’heure.

Monsieur le secrétaire d’État, en cette période de disette budgétaire, tout le monde reste sur sa faim ! Nos entreprises sont inquiètes. Comprenez ma démarche : il faut veiller à ce que l’argent du contribuable soit bien employé. Nous avons tous à y gagner, et la compétitivité de notre pays en sortira renforcée !

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, « notre pays vit comme le reste du monde une situation de crise économique brutale », qui a perturbé et désorienté les acteurs économiques et a répandu une anxiété universelle et un stress « irrationnel ».

Nicolas Sarkozy a réagi rapidement et efficacement à cette tornade pour rétablir la stabilité, regagner la confiance des acteurs économiques et tenter d’apaiser les craintes. Le plan de relance, concernant les entreprises et les collectivités locales, s’inscrit dans cette logique et se consacre en priorité à l’investissement, pour renforcer la compétitivité du pays et créer de l’emploi.

En pleine tourmente économique, les banques ont vu se multiplier les structures chargées de les secourir. Quant aux entreprises, il nous faut persévérer dans l’aide qui leur est apportée. Le plan de relance représente un effort de soutien à l’activité de 26, 5 milliards d’euros, soit 1, 3 % du PIB.

C’est dans ce contexte qu’est née l’idée d’un fonds stratégique d’investissement, mis en place avec la Caisse des dépôts et consignations, pour disposer d’une force de frappe souple et pouvant être mise en œuvre rapidement.

Le FSI dispose d’une dotation totale de 20 milliards d’euros, dont 14 milliards en fonds propres et 6 milliards en dotation numéraire. C’est à la fois modeste face aux besoins et important au regard de notre faible capacité d’investissement. C’est en tout cas une première dans l’histoire économique de la France.

Son volume annuel est estimé à 2, 5 milliards d’euros. Les deux actionnaires, la CDC et l’État, ont un double objectif : soutenir le développement des grandes entreprises dans les secteurs sensibles ainsi que celui des PME prometteuses et sécuriser le capital de certaines entreprises stratégiques. Il vise ainsi à constituer à la fois une garantie et un supplément de puissance.

Avec la contraction du crédit bancaire et la baisse de la consommation, un grand nombre d’entreprises se sont retrouvées fragilisées, en particulier dans les secteurs où chiffre d’affaires et taux de croissance sont fortement corrélés. Un certain nombre de groupes cotés ont ainsi vécu une situation particulièrement préoccupante, leur financement en fonds propres étant enrayé par la chute des cours boursiers et la méfiance des investisseurs individuels et institutionnels. En effet, la propension de ces derniers à souscrire à des augmentations de capital avait parfois disparu à mesure qu’augmentait leur aversion au risque.

La création du Fonds stratégique d’investissement procède de l’accélération de la mondialisation des échanges et de l’émergence d’un nouvel équilibre économique mondial entre, d’une part, certains pays dotés d’importantes ressources, en particulier les grands pays émergents et les États pétroliers, placés en position plutôt « offensive » et, d’autre part, les principaux pays industrialisés, qui disposent de groupes puissants et d’un savoir-faire reconnu dans des domaines stratégiques, mais dont la capacité d’action est entravée par les déficits publics.

Le rôle du FSI peut s’avérer déterminant et même parfois vital dans le renforcement de nos entreprises sur un marché international très concurrentiel. La gouvernance du Fonds met en pratique ce conseil du « père » de la publicité, David Ogilvy : « Encouragez l’innovation. Le changement est notre force vitale, la stagnation notre glas. »

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le FSI ne prête pas, il investit. Investir, c’est s’intégrer à la vie des entreprises, pour partager leur avenir et encourager leur développement. Ce fonds est tout récent, mais il a déjà investi 450 millions d’euros en direct dans 13 entreprises, dont 6 PME. Les perspectives d’investissement permettent d’envisager le doublement de ce montant d’ici à la fin de l’année.

Il est toutefois indispensable d’apporter quelques modifications, afin de rendre le Fonds plus efficace dans son soutien aux PME, lesquelles restent structurellement sous-capitalisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Alors qu’elles constituent pour la France le plus grand bassin d’emploi de France et un tissu économique vital, les petites et moyennes entreprises sont souvent « coupées » des investissements, à la différence des grandes qui ont accès aux marchés boursiers.

Par conséquent, les PME ne sont pas en mesure de développer des technologies qu’elles ont pu ébaucher. N’oublions pas que, dans un tel contexte de crise, leur situation économique est devenue dangereusement critique. Hormis les secteurs fragilisés, comme l’automobile, ce sont elles qui ont le plus besoin d’investissements. Nos grandes entreprises ont des réserves pour faire face à la crise, alors que les PME souffrent de leur fragilité financière et d’une assise insuffisamment puissante.

Le FSI cible aujourd’hui les PME avec un potentiel de croissance et investit dans des entreprises présentant une forte capacité d’innovation. Il choisit ses partenaires, refuse d’être la « voiture-balai » des entreprises en difficulté et sélectionne les entreprises compétitives, celles qui sont, je le répète, porteuses de croissance, d’innovation, d’exportation, d’hégémonie et d’emploi.

Nous devons nous interroger sur la stratégie à tenir.

Faut-il privilégier certains secteurs particuliers de l’économie et ainsi préparer la France à y être leader ? C’est ce qu’ont fait les Japonais dans les années soixante : leur stratégie de laser beaming leur a permis d’acquérir un quasi-monopole dans la production de télévisions, caméras ou appareils photos.

Faut-il, au contraire, considérer l’économie de façon horizontale et choisir d’investir dans les entreprises dont l’activité est considérée comme déterminante pour l’avenir ?

Dans la mesure où nous avons choisi de soutenir une politique industrielle, il est indispensable de privilégier les entreprises occupant une position stratégique.

Les PME jouent un rôle clé dans l’innovation, mais elles pâtissent d’un manque de fonds propres et ne peuvent donc se consacrer à une prospection qui s’avère coûteuse. Parfois, elles n’ont pas la capacité de se protéger par des brevets mondiaux ou même européens. Chacun en conviendra, il nous faut absolument développer la taille et les capacités de nos petites et moyennes entreprises.

Les entreprises ont besoin d’investisseurs de confiance, stables, qui, loin de privilégier la logique financière au détriment de la vocation entrepreneuriale, consacrent leurs fonds propres à leur développement.

Il est toujours plus facile d’avoir la confiance des banques quand on est une grande entreprise. Pour les autres, le FSI propose une solution alternative de sécurisation, notamment à l’égard des entreprises stratégiques. C’est, à mon sens, une excellente initiative.

En revanche, comme l’a souligné le président de la commission des finances du Sénat, Jean Arthuis, les dossiers « baladeurs » qui ne trouvent pas de guichet présentent un risque systémique et peuvent conduire à la disparition définitive d’emplois dans le secteur industriel.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ne serait-il donc pas opportun de créer un fonds spécifique pour les PME en difficulté, lesquelles doivent absolument disposer d’un adossement financier ?

Par ailleurs, l’accès au crédit des très petites et moyennes entreprises constitue une problématique récurrente ô combien inquiétante. Selon une étude récente, sur les neuf derniers mois, 15 000 d’entre elles se sont retrouvées dans l’obligation de saisir le Médiateur du crédit en raison d’un durcissement des conditions d’accès au crédit. La baisse de 10, 8 % du crédit de trésorerie aux entreprises, observée depuis le mois de juillet 2008, est pour le moins inquiétante.

Le plan FSI-PME, lancé le 5 octobre 2009 par le Président de la République, prévoit un renforcement des dispositifs d’investissement en faveur des PME.

Ce programme équilibré comprend quatre outils : l’apport en fonds propres en direct, l’intervention via les fonds habituels, le fonds de consolidation des PME et, surtout, la création d’obligations convertibles.

Un an après, monsieur le secrétaire d’État, il vous est demandé de dresser un premier bilan. L’initiative de notre collègue Nathalie Goulet s’inscrit parfaitement dans la recherche de solutions pour affronter la crise et préparer le futur.

Est-il aujourd’hui possible de tirer des conclusions sur les premiers résultats du FSI ? Comment associer le Parlement dans la gouvernance et le contrôle des choix du FSI ? Le Président de la République s’est engagé à ce que les parlementaires membres du Conseil de surveillance suivent de près l’action de ce fonds et participent à son orientation.

Je pense que le contrôle parlementaire de l’action du FSI peut être renforcé. Le Parlement n’a été associé ni à l’organisation, ni à la gouvernance de ce Fonds. La commission de surveillance de la CDC compte, bien sûr, des parlementaires représentant les deux assemblées et exerçant leur contrôle sur la stratégie et les investissements du FSI. Mais le rapport remis au Parlement est une information a posteriori.

Davantage de contrôle et de transparence sont nécessaires dans l’action même du FSI : compte tenu de l’importance des montants engagés, du caractère stratégique de son intervention et du fait qu’il a l’entière responsabilité de ses actifs, il est essentiel que le Parlement soit pleinement associé dans la gouvernance et le contrôle du FSI.

Je partage l’analyse de Mme Goulet, qui demande une réflexion commune pour mettre en place un pilotage spécifique des actions du Fonds.

En conclusion, je citerai Sir Winston Churchill : « Que la stratégie soit belle est un fait, mais n’oubliez pas de regarder le résultat. » Monsieur le secrétaire d’État, c‘est le rôle du Parlement !

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens, d’abord, à remercier Mme Goulet d’avoir attiré notre attention sur les problèmes que pose le Fonds stratégique d’investissement.

Si l’idée de créer cet outil pour faciliter la compétitivité des entreprises était bonne, son fonctionnement actuel pose un certain nombre d’interrogations.

Comme nous sommes en France où rien n’est simple, où rien n’est lisible, les modalités de contrôle de ce Fonds sont compliquées et multiformes. Exercé à trois échelons, le contrôle passe, d’abord, par la Caisse des dépôts et consignations et sa commission de surveillance. Il se poursuit par la surveillance parlementaire du plan de relance ; quand tout sera débloqué, monsieur le secrétaire d'État, le Fonds devrait recevoir 3 milliards d’euros d’argent frais. Il s’achève avec l’intervention de l’Agence des participations de l’État. Rapporteur spécial de la commission des finances, chargé d’examiner le compte spécial « Participations financières de l’État, j’ai auditionné les responsables de l’Agence des participations de l’État et examiné de plus près le fonctionnement du Fonds stratégique d’investissement.

Contrairement à Mme Goulet, je ne pense pas que le Parlement doive participer à la gouvernance du Fonds pour améliorer la lisibilité et garantir l’efficacité. Le rôle du Parlement est, selon moi, non de participer à la gouvernance, mais de contrôler. Pour ma part, je récuse tous les mécanismes qui ont pour objet d’associer des parlementaires à toute une série d’organismes. Je veux bien les admettre tant qu’ils ont une fonction de contrôle. Mais, dès lors qu’il s’agit de gouvernance, la participation des parlementaires se fait au détriment de l’efficacité. Les parlementaires américains ou britanniques ne participent pas à la gouvernance des institutions. Mais leur droit de contrôle est total, et ils ne se privent pas de l’exercer ! Le rôle de contrôle des commissions du Sénat est beaucoup plus important aux États-Unis qu’en France.

Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais vous soumettre quatre interrogations sur ce Fonds.

Première interrogation, comment le Fonds va-t-il gérer les 14 milliards d’euros de participations qui lui ont été transférés en plein été, à un moment important, le 15 juillet ? L’Agence des participations de l’État a transféré trois types de participations. La Caisse des dépôts et consignations a rassemblé des participations d’origines très diverses. Le Fonds est-il outillé pour gérer ces sommes ? Revendra-t-il certaines participations ? Je pense, notamment, à celles qui viennent de France Télécom. Les fera-t-il fructifier ? Confiera-t-il leur gestion à la Caisse des dépôts et consignations, son actionnaire principal, à hauteur de 51 % ? Toutes ces questions sont ouvertes et j’aimerais avoir quelques explications.

Deuxième interrogation, comment seront ciblés les investissements du Fonds. Sa vocation n’est pas de venir en aide aux entreprises en difficulté. Pour avoir créé moi-même, il y a très longtemps, un mécanisme d’aide aux entreprises en difficulté, le comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI, dont je constate, toujours avec un égal plaisir, qu’il fonctionne toujours, je crois qu’il ne faut pas multiplier les mécanismes d’aide aux entreprises en difficulté. Le Fonds stratégique d’investissement doit, au contraire, se concentrer sur les entreprises – grandes, moyennes ou petites – capables de jouer leur rôle dans la mondialisation, de créer des emplois et d’accroître la compétitivité globale de l’économie française.

Tous les économistes le savent, tous les hommes politiques commencent à en être persuadés, ce qui nous manque dans notre pays, ce sont des entreprises moyennes – jusqu’à 5 000 salariés – capables, comme en Allemagne, comme aux États-Unis, de jouer leur rôle sur le plan international.

Il faut mettre en place les outils nécessaires à ce développement. À cet égard, la question s’est posée de savoir s’il était envisageable d’inclure dans le champ d’intervention du Fonds les entreprises en phase de restructuration ; je pense, par exemple, à Nexans.

Dans cette affaire, gardons-nous des tabous et des réglementations préétablies. Quand une entreprise peut, grâce à la technologie qu’elle développe et aux parts de marchés qu’elle a su gagner, se développer, il faut l’aider et investir, même si elle doit passer par un plan social.

Le Fonds ne saurait se contenter d’investir dans les entreprises très fortement capitalisées, dont les résultats sont si satisfaisants qu’ils font la splendeur du CAC 40 !

On ne saurait écarter de sa cible les entreprises qui ne peuvent accéder à un niveau de performances mondiales qu’au prix d’un plan de restructuration conforme aux normes sociales en vigueur.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Troisième interrogation, monsieur le secrétaire d’État, le grand emprunt servira-t-il à renforcer la masse critique du Fonds spécial d’investissement ? Entend-on lui faire jouer un rôle important dans le cadre de la mise en œuvre des orientations qui sont enfin arrêtées après avoir recueilli l’avis de commissions savantes et de personnes autorisées ?

Pour en finir sur le ciblage des investissements, il me paraît souhaitable de pouvoir aider les entreprises, petites, moyennes ou grandes susceptibles d’apporter une valeur ajoutée à la compétitivité nationale. Mais, une fois les cibles de l’emprunt déterminées, il faudra s’assurer que l’intervention du Fonds spécial d’investissement se situe bien dans ces cibles et n’augmenter ses dotations que si cette condition est remplie. Or pour l’instant, nous ne savons rien. Nous espérons que vous pourrez nous apporter quelques réponses, monsieur le secrétaire d’État.

Dernière interrogation, qu’en est-il de la cohérence de l’action publique en faveur de la compétitivité des entreprises.

Après les annonces du Président de la République, après la création du Fonds, pas moins de quatre organismes - plus leurs filiales ! – s’occupent des mêmes sujets. Outre le Fonds lui-même, il y a Oséo pour les petites et moyennes entreprises, l’Agence des participations de l’État, en capacité de vendre, d’acheter ou de soutenir un certain nombre d’opérations, et la Caisse des dépôts et consignations, avec sa filiale CDC-Entreprises ! Comment peut s’y retrouver le chef d’entreprise de base, celui qui veut développer son entreprise et sa technologie ?

Auditionné hier par la commission des finances, le président d’Oséo nous a expliqué qu’il dispose de nombreux prêts participatifs. Il nous a dit que les obligations convertibles seraient réservées au Fonds spécial d’investissement.

Imaginons, monsieur le secrétaire d’État, une entreprise de 500 salariés qui a une bonne technologie et dont il faut renforcer le capital : en phase d’expansion, elle a absolument besoin d’être modernisée. Pourra-t-on ajouter les prêts participatifs d’Oséo et les obligations convertibles du Fonds ? Le Fonds interviendra-t-il ? Si oui, de quelle manière ?

Comme nous sommes en France, chacun défend sa paroisse ! Il est pourtant clair qu’on obtiendrait de meilleurs résultats en procédant à des décloisonnements et en donnant au Fonds spécial d’investissement et à Oséo un rôle équivalent, l’un et l’autre intervenant pour des entreprises de tailles différentes. C’est un problème de cohérence !

Pour autant, je ne crois pas que le guichet unique soit la solution. Il est clair que les statuts du Fonds spécial d’investissement lui imposent de respecter les conditions du marché et les règles de la concurrence. Il demeure actionnaire toujours minoritaire.

Il faut répondre aux questions sur la concordance entre le grand emprunt et le Fonds spécial d’investissement et sur la cohérence de l’action publique entre tous les organismes en charge des mêmes sujets, si nombreux en France !

Sur le problème des gouvernances, j’ai constaté qu’un parlementaire participe au contrôle interne de l’opération en sa qualité de membre du comité d’orientation du FSI. Cela ne me paraît pas être une bonne chose. Je ne souhaite pas qu’il y en ait plusieurs.

Il faut bien séparer les questions : le Fonds stratégique investit, étudie, travaille avec le milieu bancaire, discute de l’ensemble des problèmes que peuvent rencontrer les entreprises. Le Parlement contrôle, dans des conditions qu’il faut améliorer.

Si le Fonds parvient, grâce à ces 20 milliards d’euros de dotations, à accompagner le développement des PME capables d’exporter et de soutenir notre commerce extérieur, je suis persuadé, monsieur le secrétaire d’État, que nous aurons gagné ! Nous réussirons à stabiliser la position de la France sur les marchés internationaux, à stopper le recul et, ensuite, à regagner des parts de marché.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la question orale avec débat déposée par notre collègue Nathalie Goulet présente un certain nombre de caractéristiques pour le moins intéressantes.

Elle permet d’ouvrir un débat que la loi de finances devrait encore approfondir, ce qui ne peut manquer de donner sens à l’initiative parlementaire, sous tous ses aspects.

Les parlementaires du groupe CRC-SPG ont d’ailleurs pour eux d’avoir, lors de la création du Fonds stratégique d’investissement, marqué leur interrogation quant aux attendus et aux missions confiées à ce qui nous était présenté comme un « fonds souverain à la française ».

Permettez-moi de procéder à un rappel.

S’inspirant sans doute de l’exemple du fonds norvégien Statoil, qui capitalise les bénéfices des investissements réalisés à partir des revenus tirés de l’exploitation des ressources énergétiques de la mer du Nord pour prendre en charge, entre autres choses, le financement de la protection sociale de ce pays nordique, le Président de la République a souhaité mettre en place le FSI pour répondre aux défis de la désindustrialisation.

En mettant sur la table 20 milliards d’euros, apportés à parts quasi égales par l’État et par la Caisse des dépôts et consignations, et destinés à financer des prises de participation dans toute entreprise industrielle de notre pays, on tentait de donner une réponse, que d’aucuns qualifiaient d’ailleurs, à l’époque, de « colbertiste », au problème de l’hémorragie constante d’emplois et d’activités industrielles dans notre pays.

De fait, ainsi que le souligne l’auteur de la question orale, le Fonds d’investissement stratégique est une forme de filiale de la Caisse des dépôts et consignations – dont la spécificité, je le rappelle, est d’être soumise au contrôle du Parlement – alors même que la majorité du capital du Fonds est détenue par la CDC.

Pour le moment, comme chacun le sait, le Fonds n’a qu’une existence juridique particulièrement ténue, découlant de l’application de l’article 5 de la loi de finances rectificative de février dernier, et je me permets de rappeler ce que nous en disions déjà alors.

« Le collectif consacre la création du Fonds stratégique d’investissement, structure dont la gestion est confiée à la fois à Augustin Romanet de Beaune, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, et au P-DG de Citroën, qui sort juste d’un plan social massif à Rennes...

« Déjà, avec une telle “carte de visite”, cela promet...

« Mais voilà aussi qu’on apprend que la Caisse des dépôts et consignations s’apprête à apporter 3 milliards d’euros de “cash” pour le capital de ce fameux “fonds souverain à la française”...

« Comment le fait-elle ? En cédant des actifs immobiliers et, en l’espèce, 35 000 logements sociaux appartenant aux filiales immobilières de la CDC et situés notamment dans de nombreuses communes de la proche banlieue parisienne.

« La vente de ce patrimoine, dont la Caisse espère donc obtenir une plus-value de 3 milliards d’euros, risque fort de conduire à la mise sur le marché de ces logements, en dehors de la législation HLM !

« De fait, pour financer des prises de participation prétendument publiques dans des entreprises considérées comme stratégiques, on va commencer par dilapider le logement social ! »

Cette observation liminaire nous amène directement au sujet qui nous préoccupe.

Non content d’avoir fait d’un cadre du groupe PSA le directeur général du Fonds, on a nommé le fils du ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance directeur général adjoint !

Venons-en aux faits plus récents qui ressortent de l’action du Fonds stratégique d’investissement.

Préservation des emplois et des activités industrielles sont la raison d’être du Fonds, si l’on doit croire ses créateurs.

Le problème est que quelques salariés d’entreprises d’ores et déjà recapitalisées par le FSI n’ont pas cette lecture des faits ou, plutôt, ils constatent qu’il y a loin de la coupe aux lèvres et que les faits n’ont qu’un lointain rapport avec les intentions !

Je présenterai ici un exemple significatif de l’intervention du Fonds, que la presse a d’ailleurs traité, celui de la société Nexans, à Chauny dans l’Aisne.

Je confesse que le journal dont j’ai tiré cet exemple n’est pas vraiment favorable à la politique gouvernementale actuelle, puisqu’il s’agit de l’Humanité (M. le secrétaire d'État sourit), mais les faits sont les faits et, Mme Goulet ayant cité Le Figaro, permettez-moi de citer un article dont le titre ne présente pas d’équivoque – « L’État boursicote, les salariés trinquent » – et que son auteur résume lui-même de la façon suivante : « Le Fonds stratégique d’investissement était “l’arme anticrise” de Sarkozy. Voilà qu’elle s’est transformée en bombe contre l’emploi. Dans l’Aisne, la multinationale Nexans va raser l’un de ses berceaux avec l’aide de l’argent public. C’est un scandale qui tient à deux chiffres : 60 millions d’euros et 387 chômeurs ! »

L’article compte ensuite l’histoire de Chauny, cette petite bourgade de l’Aisne qui, depuis 1922, « vit au rythme de ses usines de câbles passées de la Compagnie générale d’électricité à Thomson, puis Alcatel, puis Nexans ».

« Début juillet, la multinationale française Nexans – 22 400 salariés dans le monde, dont 3 000 en France, une marge opérationnelle à 8, 9 % et 195 millions d’euros de profits en 2008 – a bénéficié d’un investissement de 60 millions d’euros de la part du Fonds stratégique d’investissement tant vanté par Nicolas Sarkozy comme sa véritable “arme anticrise” censée défendre le travail et les usines en France. À peine trois mois plus tard, voilà qu’avec les largesses de ce fonds à capitaux exclusivement publics, le groupe programme le saccage de l’emploi, en supprimant 14 % de ses effectifs sur le territoire de son berceau historique, qui demeure aussi son principal marché ! “ Cet argent ne peut pas servir pour investir dans des unités déficitaires”, ont osé arguer, devant les salariés, les dirigeants de Nexans.

« Sur place, le vacarme du scandale commence à parasiter la complainte des licenciements. Le délégué syndical central CGT, soupire : “Franchement ? Je sais que le FSI est rentré dans le capital du groupe, mais c’est tout !” À Fumay, dans les Ardennes, sur un autre site de Nexans où cinquante-trois licenciements viennent d’être annoncés, le délégué CGT et membre du comité de groupe européen réclame, par courrier recommandé, une entrevue avec Gilles Michel, le directeur général du FSI. “Ce fonds devait servir à consolider les positions des fleurons industriels et à préserver les emplois en France, se souvient-il. Il ne peut en aucun cas être utilisé pour restructurer ou délocaliser. Or, dans le cas de Nexans, il y a manifestement un petit doute…” À Paris, au conseil d’orientation stratégique, censé être, selon Nicolas Sarkozy, le “gardien de la cohérence et des équilibres de l’action du fonds”, les syndicats sont pour le moins fumasses. “Nous n’avions aucune information sur les conséquences sociales du projet, s’insurge l’un de leurs représentants. N’ayant aucun pouvoir réel dans la gouvernance du FSI, nous ne disposons que de l’information qu’ils veulent bien nous donner. Manifestement, le patron de Nexans se sert du FSI pour améliorer ses fonds propres. Après, c’est vraiment : “Circulez, il n’y a rien à voir !” »

« Dans toute sa communication financière, le groupe, plutôt florissant, avoue ne viser qu’un objectif : “Faire de Nexans, un groupe plus rentable.” Sur le terrain, cela signifie par exemple que, depuis des années, la direction de l’usine organise la sous-activité de son site industriel à Chauny. “Le groupe a trois coulées continues de cuivre en Europe et celle de Chauny est à la fois la plus performante et la plus productive, pointe le délégué syndical. Chez nous, toutes les installations sont doublées, c’est unique au monde ! Mais la direction de Nexans s’en fiche, ils ont décidé qu’on était en surcapacité et que, de toute façon, cette activité ne produisait plus assez de valeur ajoutée.” Au FSI, où travaille un petit commando d’as de la finance débauchés dans les banques d’affaires et les fonds d’investissement traditionnels, on s’excuse de ne pas s’immiscer du tout dans la stratégie industrielle de Nexans. “Moi, je ne sais pas quand le plan social a été préparé, avance le porte-parole du FSI. Nous n’avons pas à décider de la stratégie de l’entreprise, ni de sa gestion. Si on arrivait en disant à l’entreprise qu’on veut jouer un rôle important, elle n’accepterait pas que l’on entre dans son capital. Nous pouvons discuter par exemple du reclassement des salariés, mais c’est l’entreprise qui garde la main.”

« Opacité complète pour les ouvriers et leurs représentants, transparence totale pour les patrons et leurs actionnaires, privés… ou publics ! En avril, Nexans promet “d’accentuer très fortement ses actions de restructuration” et, en juillet dernier, au moment de l’entrée officielle du FSI dans le capital de la multinationale, Frédéric Vincent, son P-DG, se félicite bruyamment : “Le FSI connaît les enjeux auxquels un groupe industriel global comme le nôtre doit faire face.” Détail piquant, à la limite du conflit d’intérêts : le FSI connaît d’autant mieux la stratégie de Nexans qu’un des membres du comité exécutif du fonds, Jérôme Gallot, président de CDC Entreprises, filiale de capital-investissement de la Caisse des dépôts et consignations, siège au conseil d’administration du leader mondial du câble depuis 2007. Alors que Nexans a provisionné des dizaines de millions d’euros pour la restructuration envisagée et qu’il vient de distribuer près de 56 millions d’euros à ses actionnaires, à quoi servent donc les 60 millions d’euros du FSI ? À Chauny comme à Fumay, ou sur les autres sites de Nexans en France, les ouvriers en sont de plus en plus convaincus, le FSI est un fonds d’investissement comme les autres. Ni plus ni moins rapace que les autres. Un fonds qui ne crache même pas sur les “licenciements boursiers” de ceux qui l’ont abondé par leurs impôts… »

Mes chers collègues, s’il convenait de se demander quel sens donner à la réponse à la question posée par notre collègue Nathalie Goulet, ce serait sans doute assez aisé à définir.

Premier aspect, le Fonds stratégique d’investissement doit effectivement être placé sous la responsabilité de la Caisse des dépôts et consignations et, par là même, de sa commission de surveillance, où siègent des parlementaires.

Second aspect, oui, l’argent public est une chose bien trop précieuse et une denrée bien trop rare pour qu’il soit utilisé aux fins de financer des stratégies d’externalisation d’activité – c’est bien ce qui s’est produit dans l’affaire Nexans – et des plans sociaux dont souffrent au premier chef les salariés, leurs familles et les territoires où ils résident !

Au-delà des étranges choix stratégiques qui président au fonctionnement du FSI, on peut remarquer, dans cette affaire, que l’intervention du Fonds se fait sans la moindre information des salariés et, plus encore, sans la moindre participation des premiers intéressés aux choix de gestion opérés par le Fonds.

On ne peut, mes chers collègues, faire le bonheur des gens contre leur gré. C’est une tendance qui semble guider la manière de gérer les affaires du pays et qui prévaut singulièrement depuis le printemps 2007 ; les salariés de notre pays sont suffisamment intelligents pour s’intéresser au premier chef à la gestion de l’entreprise où ils travaillent !

Ce que nous venons de décrire n’empêchera nullement Nexans de tirer pleinement parti de la réforme de la taxe professionnelle, présentée comme la mesure phare du projet de budget pour 2010 et qui ne servira, dans le cas précis, qu’à assurer encore plus aisément le financement du plan social !

Si le Fonds stratégique d’investissement devient l’auxiliaire des plans sociaux et des liquidations d’activité, comme chez Nexans, Technip, Trèves, Valeo ou encore dans la holding des aventuriers qui avaient promis à Jean-Luc Warsmann monts et merveilles lors du rachat, avant la liquidation que l’on sait, de Thomé-Génot, nous sommes en présence d’une opération pure et simple de détournement de fonds publics au profit d’on ne sait trop quoi !

Il est grand temps, et Mme Goulet a eu raison de soulever la question ce matin, que le Fonds stratégique d’investissement soit soumis au contrôle parlementaire, que son action réponde à une éthique plus précise et que les salariés des entreprises où il est appelé à intervenir soient pleinement associés à l’évaluation de l’efficacité de son implication.

Nous nous attacherons à faire valoir cette exigence le moment venu.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon propos sera probablement moins pessimiste que celui de mon prédécesseur à cette tribune !

Je remercie notre collègue Nathalie Goulet d’avoir posé cette question orale qui nous donne l’occasion de débattre d’un sujet particulièrement important en cette période de crise économique, à savoir le financement de nos entreprises, en particulier de nos PME.

La création du Fonds d’investissement stratégique en 2008 procède de la volonté du Président de la République d’aider les entreprises françaises qui ont besoin de trouver des investisseurs stables pour financer leurs projets de développement.

Il s’agissait notamment de soutenir le développement de PME prometteuses qui ont souvent des difficultés à accéder à des financements, de sécuriser le capital d’entreprises stratégiques ou encore d’intervenir pour développer ou aider temporairement des entreprises à fort potentiel ou des projets industriels novateurs et audacieux, avant de s’en désengager à moyen terme lorsque les objectifs qui avaient été définis auront été atteints.

Afin d’accomplir le plus efficacement possible les missions qui lui ont été confiées, le FSI doit investir dans des projets rentables et qui engendrent des revenus, détenir une minorité du capital des entreprises dans lesquelles il investit, agir de préférence avec des partenaires privés et ne pas investir à long terme, afin de faire « tourner » son portefeuille de manière à disposer de liquidités pour agir rapidement.

Nul doute qu’en incitant à la création du FSI, le chef de l’État avait à l’esprit le rôle de plus en plus important que jouent dans l’économie mondiale les fonds souverains, notamment moyen-orientaux, chinois, russe ou norvégien.

En réalité, on a assigné au FSI non pas la stratégie offensive de ces fonds souverains, mais une stratégie plus défensive, ne serait-ce qu’à cause de la faiblesse de sa capitalisation originelle : 20 milliards d’euros, dont 14 milliards d’euros sous forme de participations déjà détenues par la CDC ainsi que par l’État dans de très grandes entreprises et 6 milliards d’euros de fonds nouveaux apportés à parité par l’État et par la CDC. La taille de ce fonds le situe donc seulement au vingtième rang mondial des fonds souverains.

Comme l’a précisé notre collègue Nathalie Goulet, le FSI est dirigé par une double structure : un conseil d’administration présidé par le directeur général de la CDC et un directeur général. Il comprend en outre un comité d’investissement et un comité d’orientation composé de représentants des entreprises, des organisations syndicales et de personnalités qualifiées, qui doit garantir la cohérence et les équilibres du fonds.

Premier sujet d’étonnement pour moi : comment se fait-il que le Parlement ne soit pas représenté au sein du comité d’investissement ou du comité d’orientation du FSI ? M. Fourcade nous a certes expliqué qu’une telle représentation ne lui paraissait pas souhaitable, mais je pense pour ma part qu’il serait tout de même préférable que le Parlement soit associé d’une manière ou d’une autre au fonctionnement du FSI, ne serait-ce que pour assurer une meilleure circulation de l’information.

Mon étonnement croît encore lorsque j’apprends, de la bouche du secrétaire général de Force ouvrière, que si les organisations syndicales sont bien représentées au sein du comité d’orientation, elles ne sont pas véritablement informées de ce qui se passe au sein du FSI. Et ce responsable syndical d’ajouter par ailleurs qu’il lui paraissait anormal que ce fonds soit venu en aide à une entreprise ardennaise qui, finalement, licencie une partie de son personnel. Cela étant, on peut aussi considérer, me semble-t-il, qu’une véritable restructuration peut aussi passer par là.

Quoi qu’il en soit, les malheureux parlementaires que nous sommes disposent de moins d’informations encore. Tout au plus apprenons-nous, en lisant la presse, que le FSI est venu en aide à certaines grandes entreprises, comme Valeo, Daher ou Heuliez, pour assurer le développement du véhicule électrique. Ces choix, il faut le reconnaître, sont néanmoins tout fait cohérents avec les politiques que nous définissons.

Dans le même temps, et malgré la mission confiée à France Investissement, de nombreuses PME souffrent sur l’ensemble du territoire, et sont victimes de la frilosité des banques. Le Président de la République et le Gouvernement l’ont bien compris : le FSI a lancé ce mois-ci, à leur demande et dans le cadre du plan d’aide aux PME, un programme FSI-PME doté, je crois, de 1, 5 milliard d’euros.

Ces crédits sont certes destinés aux PME relevant de secteurs stratégiques, mais j’estime qu’ils devraient aussi permettre d’aider les entreprises du secteur agricole et agroalimentaire, qui en ont grand besoin en cette période difficile.

Ne l’oublions pas, la production agricole a également une importance stratégique à l’échelon mondial. Cela est tellement vrai que la Chine et l’Inde ont fait l’acquisition de plusieurs milliers d’hectares de terres cultivables en Afrique, afin d’y développer de nouvelles productions.

Nous avons la chance d’avoir un potentiel agricole et agroalimentaire parmi les plus importants au monde. Or ce secteur souffre terriblement, et la crise touche toutes les productions : le lait et les fruits et légumes, bien sûr, mais également l’élevage et les céréales.

Notre groupe a calculé qu’il faudrait mettre en place, pour la seule filière laitière, un plan de financement de 675 millions d’euros, et il a proposé que cette somme soit avancée par le FSI sous forme de prêts, selon le schéma qui a été utilisé pour le secteur bancaire, mais avec de faibles taux d’intérêt.

À l’instar de la majorité des élus de l’Union centriste, j’ose espérer que le Gouvernement sera sensible au désarroi et aux difficultés des hommes et des femmes qui dirigent les entreprises de notre pays. Nous espérons également que le Fonds stratégique d’investissement sera utilisé, à l’avenir, de façon optimale et servira à l’ensemble des activités économiques qui ont besoin de son aide.

Ce que vous mettez en place progressivement, monsieur le secrétaire d’État, améliore déjà notre politique d’investissement. Nous devons poursuivre ensemble les efforts et assurer une meilleure circulation des informations, afin qu’aucune entreprise ne soit laissée sur le bord du chemin. Je souhaite pour ma part que les élus, souvent sollicités lorsque des difficultés apparaissent dans les entreprises, puissent au moins relayer l’information et accompagner votre démarche.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à partir d’une réflexion sur l’organisation et la gouvernance du Fonds stratégique d’investissement, ainsi que sur ses choix d’investissement, notre collègue Nathalie Goulet s’interroge sur le rôle de la Caisse des dépôts et consignations et sur le contrôle qu’exerce le Parlement sur celle-ci. Étant, depuis la récente entrée en vigueur de la loi de modernisation de l’économie, qui a notamment modifié la gouvernance de la CDC, représentante de l’opposition sénatoriale au sein de la commission de surveillance de cette dernière, c’est bien volontiers que je participe au présent débat.

Mme Goulet note avec raison que le FSI est né de la volonté du Président de la République. Dans ce langage qui n’appartient qu’à lui, celui-ci a exposé sa vision du Fonds : « Je veux que l’on arrête le processus de délocalisation. […] l’État est là, et naturellement, quand la situation sera meilleure, eh bien on revendra notre part, s’il le faut on prendra un bénéfice, tant mieux pour le contribuable. Cela, c’est la première vocation de ce fonds. »

Cette vision est-elle simplificatrice ? Peut-être. En tout cas, c’est une vision circonstancielle, qui conduit, si on la suit à la lettre, à faire du FSI un pompier dans la crise.

Le 20 avril dernier, la commission des finances a pris l’initiative d’auditionner Michel Bouvard, président de la commission de surveillance, Augustin de Romanet, directeur général de la CDC, et Gilles Michel, directeur général du FSI. Ce dernier a donné sa vision de la société qu’il dirige : « La mission du FSI est d’investir dans les entreprises françaises afin de renforcer la compétitivité de notre pays. À cet égard, le Fonds prend en compte la rentabilité de l’opération et le retour sur investissement, qui sont des conditions de la pérennité du FSI, et le projet économique de l’entreprise. »

Entre les deux conceptions que je viens d’exposer, il y a, on le voit bien, plus qu’une nuance, d’où certainement une ambiguïté amenant les élus à s’interroger légitimement, notamment sur les critères présidant aux choix d’investissement du FSI.

Ce qui intéresse au premier chef la commission de surveillance, ce n’est pas trahir un secret que de le dire, c’est le « S » du FSI : la stratégie. En effet, elle s’interroge régulièrement et avec constance sur la doctrine d’emploi commandant les choix stratégiques destinés à muscler notre appareil productif pendant la crise, et surtout en période de sortie de crise. Nous auditionnons régulièrement le directeur général et nous faisons un point, tous les quinze jours, sur l’avancement de la mission du FSI. Notre collègue député Michel Bouvard est, quant à lui, l’invité permanent du comité des investissements du FSI.

D’une manière générale, nous, parlementaires, devons poser la seule question qui vaille à l’exécutif, celle de l’existence d’une politique industrielle qui mobilise les choix économiques de la nation. Une société, fût-elle érigée à partir de fonds publics, peut-elle, doit-elle être à elle seule le lieu de définition d’une stratégie industrielle ? Pour sa part, le groupe socialiste répond : certainement pas !

Après l’éphémère Agence de l’innovation industrielle, l’A2I, voulue par le président Chirac, nous doutons de l’efficacité du Fonds stratégique d’investissement lancé par le président Sarkozy pour renforcer notre appareil productif, qui était déjà bien faible avant la crise : des diagnostics ont été établis et de multiples rapports publiés sur le sujet, notre pays manquant, comme l’a dit M. Fourcade, de grosses PME capables d’être offensives et bien placées sur les marchés mondiaux. Il faut prendre la crise pour ce qu’elle est : un bouleversement du monde. Après le coup d’arrêt de la crise financière, les nouvelles puissances industrielles, c’est-à-dire la Chine, le Brésil, l’Inde, la Russie, voient redémarrer leur production, alors que celle de l’Europe a simplement cessé de chuter, tandis que les investissements sont gelés. C’est l’Union européenne qui a besoin d’une politique industrielle de coopération entre les nations qui la composent, fondée sur l’innovation et l’écologie. Traduit-on cet impératif, en France, par le biais du FSI ? Lit-on cela dans la doctrine d’emploi de ce dernier ? Je ne le crois pas.

Les états généraux de l’industrie lancés par le Gouvernement suffiront-ils à guérir notre industrie malade depuis trop longtemps ? Le débat autour de l’affectation du produit de l’emprunt suffira-t-il à engager enfin notre pays dans la voie de l’avenir ? Ces questions sont ouvertes, et nous y reviendrons certainement lors de la discussion du projet de loi de finances, et surtout du projet de loi de finances rectificative pour 2010 que l’on nous annonce d’ores et déjà comme devant faire suite aux propositions de la commission présidée par MM. Rocard et Juppé, qualifiée de « savante » par notre collègue Jean-Pierre Fourcade.

En revanche, les parlementaires siégeant à la commission de surveillance ont toute légitimité pour contrôler non seulement les investissements du FSI, mais aussi, le moment venu, les choix de cessions éventuels des actifs qui lui ont été transférés par l’État et par la CDC, son actionnaire principal. Au regard de l’autonomie d’initiative et de décision du FSI dans la gestion de ces actifs, telle qu’elle a été revendiquée par sa direction générale, la marge est étroite.

La croissance du Fonds stratégique d’investissement est un défi que la CDC doit relever. Il lui faudra concilier sa présence au FSI avec le rôle d’investisseur de long terme que lui a conféré expressément la loi de modernisation de l’économie, la LME. Il est certain que, dans la période récente, la Caisse des dépôts et consignations a été sur tous les fronts. Faut-il rappeler qu’elle a joué son rôle d’actionnaire historique de Dexia, transféré des actifs et des liquidités au FSI, soutenu une intervention auprès des entreprises, assuré la gestion du fonds d’épargne après la banalisation du livret A, veillé au respect du niveau des ressources fixé par la LME, accru ses financements au logement social, contribué au plan université et assuré la trésorerie de l’ACOSS, sans oublier de verser son écot au budget de l’État, soit 900 millions d’euros au titre de 2009 ?

Dans le même temps, les sollicitations multiples auxquelles la CDC est soumise en cette période de crise ont mis en lumière la nécessité de redéfinir ses relations financières avec l’État. Ce travail est en cours, sur l’initiative de la commission de surveillance et de son président.

En outre, depuis l’entrée en vigueur de la LME, la commission bancaire, via la commission de surveillance, exerce son droit de regard sur les activités bancaires et financières, par conséquent sur les ratios de fonds propres et sur la capacité d’endettement. Un comité des investissements a été créé, qui vise toutes les cessions et acquisitions. Je rappelle par ailleurs que lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative portant plan de relance, le groupe socialiste a soutenu, avec le groupe de l’Union centriste, M. Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, quand il a voulu encadrer le décret en Conseil d’État relatif aux rémunérations variables que le Gouvernement devait prendre. Nous avons obtenu, malgré les fortes réticences du Gouvernement, que soient précisées les conditions dans lesquelles les actions gratuites, les stock-options, les bonus, les indemnités de départ cesseront d’être attribués, pendant la durée de la crise, aux dirigeants et mandataires sociaux de toute entreprise financièrement aidée par l’État, directement ou indirectement. Le Fonds stratégique d’investissement est concerné.

Pour que le contrôle du Parlement soit effectif, il suffit donc que les parlementaires se saisissent de leurs droits. Du reste, puisque la Caisse des dépôts et consignations est placée sous le contrôle du Parlement, il serait bienvenu que le Sénat, qui s’était beaucoup investi dans l’élaboration de la loi de modernisation de l’économie, procède à l’évaluation complète de l’application de cette dernière, y compris les modifications intervenues dans la gouvernance de la CDC. Le groupe socialiste, depuis l’été dernier, demande régulièrement en conférence des présidents l’inscription de cette évaluation à l’ordre du jour des semaines réservées au Parlement. J’invite les autres groupes politiques, notamment le groupe de l’Union centriste, à appuyer cette revendication. C’est ainsi, me semble-t-il, que nous pourrons exercer pleinement notre vigilance.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur celles de l’Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Mme Nathalie Goulet appelle notre attention sur l’importance du contrôle parlementaire de l’action du Fonds stratégique d’investissement, dont la création avait été décidée en 2008 par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, et qui est opérationnel depuis le début de cette année.

Doté aujourd’hui de 20 milliards d’euros, le FSI a investi directement, depuis sa création, 450 millions d’euros dans treize entreprises. Les perspectives d’investissement permettent d’envisager un doublement de ce chiffre d’ici à la fin de l’année.

Pour ce qui concerne le contrôle de la pertinence des choix stratégiques d’investissement, en fonds propres ou par le biais de prises de participations de l’État dans les entreprises au travers du FSI, j’estime que le Parlement doit encourager toute décision d’investir dans des entreprises stratégiques ou d’avenir. Toutefois, ces investissements ne doivent pas concerner seulement les technologies ou l’économie verte, mais porter sur tous les secteurs de pointe, ainsi que sur les transferts de technologies entre domaine militaire et domaine civil.

Le FSI doit ainsi se concentrer sur les investissements d’avenir hautement technologiques. Je sais que ce débat aura lieu lors de l’examen du collectif budgétaire relatif au grand emprunt, au mois de janvier 2010, mais la problématique reste la même : l’État doit concentrer ses dépenses et ses investissements dans ces domaines stratégiques ou à fort potentiel de croissance.

C’est la raison pour laquelle je me félicite de certains investissements réalisés par le FSI en 2009. Il a, par exemple, investi 160 millions d’euros dans l’entreprise Gemalto, leader mondial des technologies numériques stratégiques. Cet investissement a permis de sécuriser un important bloc d’actions – 8 % du total – mis en vente par le deuxième actionnaire, américain. Évoquons également les 2 millions d’euros investis par le FSI pour financer la croissance de Led To Lite, petite entreprise très innovante dans le domaine de l’éclairage à base de diodes électroluminescentes à haute luminosité.

Pour ce qui concerne les domaines des technologies militaires et civiles stratégiques, je me réjouis que le FSI ait investi plus de 65 millions d’euros dans l’entreprise Daher, qui fournit des équipements et des services pour l’aéronautique, le nucléaire et la défense, mais dont la structure capitalistique familiale limitait la capacité de développement et soulevait des problèmes de partenariat à Airbus et au groupe EADS. La société Daher a repris Socata à Airbus et vient de lancer la construction d’une nouvelle usine à Nantes pour la fabrication d’aérostructures de pointe. Je ne saurais y être insensible, en tant que sénateur de Loire-Atlantique… L’investissement du FSI dans la société Daher a permis de soutenir le programme d’investissements de l’entreprise et de financer l’implantation dans mon département d’une nouvelle usine qui produira des composants pour l’A350 et le futur A400M. L’usine sera réalisée en deux phases : la première, cet été, a abouti à la création de 400 postes, et la seconde, qui devrait intervenir à la mi-2010, débouchera sur la création de 1 000 postes au total.

Aujourd’hui, le FSI intervient directement dans le financement du secteur aéronautique par l’intermédiaire des fonds publics-privés Aerofund I et Aerofund II, qu’il abonde à hauteur de 20 % à 30% chacun.

Par ailleurs, le niveau d’investissement des entreprises dans la recherche et développement figure parmi les principaux critères d’investissement du FSI, quel que soit le secteur.

D’une manière plus générale, l’orientation stratégique du fonds doit reposer sur l’amélioration de la compétitivité et de la position concurrentielle de nos entreprises, afin de dynamiser l’emploi, la recherche et les exportations. À mes yeux, je n’ai pas peur de le dire, le critère essentiel doit être la rentabilité des capitaux investis, signe du succès. Le rendement du capital en France demeure en effet encore largement inférieur à la moyenne de nos concurrents ; il n’y a aucune raison de s’en glorifier. L’objectif d’un retour sur investissement de 10 % fixé par le président du FSI doit être tenu. Le rôle du Parlement est d’y veiller.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je remercie Mme Goulet d’avoir demandé l’inscription à l’ordre du jour de cette question, la gouvernance du FSI étant un sujet d’une importance déterminante pour la politique industrielle de la France, eu égard aux moyens considérables que ce fonds déploie.

Le FSI est en effet doté de 20 milliards d’euros de fonds propres, dont 14 milliards d’euros de participations. Les parlementaires doivent être étroitement associés au contrôle financier, en temps réel, mais surtout politique, de la destination de ces sommes.

La Caisse des dépôts et consignations a été créée en 1816, après l’épisode des Cent-Jours, avec l’exigence morale et éthique de « restaurer une confiance du citoyen dans le crédit d’État ». Cette exigence est d’une saisissante actualité ! Quand l’État intervient massivement pour soutenir Valeo, et qu’ensuite un dirigeant de cette entreprise déclenche un parachute doré, comment ne pas s’interroger ?

La confiance suppose que nos concitoyens puissent être certains que tout investissement public est transparent, efficace et, dans le cas d’espèce, stratégique. Or, je ne suis pas sûr que tous ces objectifs soient vraiment atteints.

Cet après-midi, des milliers de salariés manifesteront contre les licenciements dans l’industrie. Il est bon que notre ordre du jour nous permette de faire un point d’étape sur le fonctionnement du Fonds stratégique d’investissement.

Je suis un élu du pays de l’automobile, le siège de PSA se trouvant à Sochaux. Aujourd’hui, de nombreuses PME et TPE de ce secteur, souvent innovantes et ayant parfois beaucoup investi dans l’ingénierie, sont confrontées à de grandes difficultés financières. Mois après mois, elles se demandent si elles pourront honorer les salaires et « boucler » leurs comptes. Dans le même temps, de grands constructeurs persistent à confondre compétitivité et stratégie low cost. Il faudra que l’on parvienne un jour à comprendre que les stratégies low cost n’aboutissent qu’à freiner l’innovation. La recherche à tout prix de la baisse des standards sociaux, la délocalisation systématique ne sont pas des stratégies qui mènent à l’innovation.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

En externalisant au-delà de nos frontières certaines productions, les entreprises concernées manifestent qu’elles n’ont pas la volonté d’innover et de faire en sorte que l’Europe et la France puissent mettre en place une économie de la connaissance.

J’ai demandé que soit constituée une commission d’enquête parlementaire sur les aides et les prêts dédiés à la filière automobile. En effet, ma curiosité à cet égard n’est pas toujours satisfaite, et se trouve ravivée aujourd’hui du fait que le FSI a apporté 200 millions d’euros au Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, le FMEA, et va investir certainement plusieurs dizaines de millions d’euros supplémentaires dans la création d’un fonds de soutien aux sous-traitants automobiles de deuxième rang. Or, à ce jour, monsieur le secrétaire d’État, nous ne connaissons toujours pas exactement les critères industriels et économiques d’éligibilité des entreprises au FMEA.

Cette situation n’est pas normale. Pourquoi une telle obscurité ? Pourquoi ne pas développer une stratégie complètement transparente ? Pourquoi un contrôle parlementaire régulier ne s’exercerait-il pas sur ces aides et sur leur attribution ? Le FSI a rendu publique une liste de huit entreprises aidées par le biais du FMEA, mais combien se sont heurtées à un refus, et pour quel motif ?

Certes, vous me répondrez, monsieur le secrétaire d'État, que le Parlement exerce un contrôle sur la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations, comme l’a rappelé Nicole Bricq tout à l'heure, mais j’estime que nous devrions être davantage associés aux actions menées en amont, sur le terrain.

Ainsi, le Gouvernement a mis en place dans les préfectures des cellules de veille qui, chaque semaine, examinent la situation des entreprises en difficulté. Je souhaiterais que les parlementaires, ainsi que les salariés et leurs représentants, puissent participer à cette démarche. Nous ne pouvons, dans cette enceinte, aborder les cas particuliers de milliers d’entreprises, mais nous pourrions prendre part, dans nos départements, aux travaux conduits dans les cellules de veille.

En tant que membre du groupe d’études sénatorial sur l’automobile, je n’ai jamais eu l’occasion de discuter des modalités des aides versées à ce secteur, ce qui est extrêmement regrettable. Quant aux collectivités territoriales, qui sont particulièrement engagées dans le soutien à l’économie, elles éprouvent les plus grandes difficultés à comprendre les rouages des décisions prises, notamment par le FSI. Celui-ci gagnerait en efficacité et en transparence s’il communiquait systématiquement avec ses partenaires.

En Europe du Nord, les salariés et leurs représentants sont systématiquement associés aux décisions. Monsieur le secrétaire d'État, ne serait-il pas plus simple que, en France aussi, ils puissent siéger dans les conseils d’administration et donner leur avis ? Nous en sommes encore loin aujourd'hui !

Que l’on ne se méprenne pas : nous ne demandons pas des postes de personnalités qualifiées, mais seulement la possibilité de faire valoir notre expérience de terrain et notre connaissance du tissu économique dans les bassins d’emploi dont nous sommes les élus.

De plus, les informations dont nous disposons nous conduisent à penser que le FSI sélectionne des dossiers selon des critères strictement économiques auxquels nous ne souscrivons pas toujours. Nous traversons une crise sans précédent : ce n’est pas parce que le système bancaire se porte un peu mieux et qu’il s’est refait une santé, souvent sur le dos de ses clients, …

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

… et grâce à des aides d’État d’un montant impressionnant, que l’économie dans son ensemble s’est rétablie !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Aujourd'hui, hormis dans quelques secteurs, nous pouvons nous attendre à une année 2010 extrêmement difficile. Il faudrait repenser le fonctionnement du FSI et du FMEA dans ce contexte.

Quel est, aujourd'hui, le principal problème des petites et moyennes entreprises ? C’est l’absence de liquidités, car ces sociétés manquent de fonds propres, même quand elles se sont modernisées. Nous devons donc mettre en place un filet de sécurité qui soit le plus serré possible, afin qu’aucune entreprise ne ferme en raison d’un manque de liquidités. Si nous laissons faire le marché, tel qu’il existe aujourd'hui, nous perdrons des PME innovantes et d’une qualité exceptionnelle, qui, parfois, se sont dotées de moyens d’ingénierie de haut niveau pour affronter la concurrence mondiale.

Les banques qui se trouvaient au bord de la faillite voilà un an ont retrouvé des marges de manœuvre confortables. Elles veulent à présent rembourser les aides qu’elles ont reçues, afin de pouvoir accorder de nouveau à certains de leurs cadres des bonus considérables !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Or, dans le même temps, le volume des crédits consentis aux entreprises et aux particuliers s’est réduit d’un quart en 2009. Monsieur le secrétaire d'État, cette situation n’est pas acceptable ! Vous ne pouvez pas la tolérer, car elle nuit à notre tissu économique ! S’en remettre au laisser-faire est inconcevable : nous devons réorienter en profondeur l’action du FSI, pour que ses investissements répondent à des critères pertinents, à savoir la création d’emplois, tout d’abord, la protection de l’environnement, l’aménagement du territoire, le maintien des filières et le développement de l’emploi industriel, l’innovation.

Nous avons approuvé l’attribution d’aides très importantes aux deux grands constructeurs automobiles nationaux. Or nous sentons que deux stratégies s’opposent : voilà quelques jours, nous apprenions que PSA relocalisait à Sochaux des centres d’ingénierie ; de son côté, Renault persévère dans une stratégie de délocalisation. Lors des états généraux de l’automobile, j’ai été surpris que Carlos Gohsn intervienne uniquement pour déplorer le coût de la main-d’œuvre en France… Ce qui compte aujourd'hui, ce qui devrait être notre priorité, c’est que notre économie soit compétitive et fondée sur la connaissance.

Le groupe Trèves a reçu 55 millions d’euros du FSI, or il a des projets de délocalisation en Afrique du Nord. Pour ma part, cela ne me dérange pas dans la mesure où il s’agit de conquérir des marchés dans cette région du monde. Ce qui me gêne davantage, ce qui me semble même insupportable, ce sont des investissements visant à mettre nos salariés en concurrence avec la main-d’œuvre d’autres pays et, à terme, à fermer des unités de production sur notre territoire !

Mme Nathalie Goulet approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Nos compatriotes ne supportent plus de telles situations, auxquelles il faut remédier. Dans cette optique, le FSI devrait pouvoir verser des primes à la relocalisation et à l’innovation, afin d’inciter les entreprises à contribuer à la redynamisation de l’industrie française, plutôt que de licencier ou de réduire les standards sociaux en déplaçant leurs activités à quelques centaines de kilomètres de nos frontières.

Aujourd'hui, les élus, les salariés et, plus largement, nos compatriotes sont très attentifs aux politiques publiques. Quand celles-ci sont dotées, de surcroît, de moyens considérables, nous devons faire en sorte qu’elles soient lisibles, transparentes, et surtout que les fonds publics engagés servent à la mise en place d’une politique industrielle digne de notre pays.

Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais que vous nous apportiez des réponses précises, parce que le temps presse. Nous ne voudrions pas que l’année 2010 soit marquée par une nouvelle explosion du chômage, qui atteint déjà des niveaux insupportables. Nous devons conserver ces joyaux que sont nos PME et nos TPE, qui accomplissent des efforts considérables pour être à la hauteur des défis du monde économique actuel, mais qui, aujourd'hui, supportent un poids terrible, notamment à cause de cette absence de liquidités que j’évoquais tout à l'heure.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG. – Mme Nathalie Goulet et M. Jean -Paul Virapoullé applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite réagir aux propos de notre excellente collègue Nathalie Goulet, dont la question trouve d’autant plus d’écho chez moi que le département dont je suis l’élu, l’Aisne, est directement concerné par l’action du Fonds stratégique d’investissement.

En effet, la ville de Chauny accueille deux des sites du fabricant français de câbles électriques Nexans, leader mondial dans ce domaine, qui emploie 24 000 salariés dans le monde, dont 3 000 en France.

Nexans exerce son activité dans un secteur sensible et de haute technologie. Ce groupe est entièrement maître de la chaîne de production, depuis le minerai de cuivre jusqu’aux produits finis, comme les câbles pour le transport de l’énergie ou les télécommunications. Le cours de bourse de son action n’a cessé de progresser ces derniers mois, les marchés évoquant « une situation financière parmi les plus saines de son secteur, lui permettant de se développer sur des segments à forte valeur ajoutée ». Nexans occupe la première place sur le marché mondial des câbles d’énergie sous-marins, ainsi que sur le marché européen des câbles de cuivre, des câbles spéciaux et d’équipement. Le groupe vient d’ailleurs de signer des contrats d’un montant de 3, 3 millions d’euros en Turquie et de 2 millions d’euros en Arabie Saoudite. Il doit également fournir 500 kilomètres de câbles pour l’aéroport international du Caire, et cette liste n’est pas exhaustive.

Toutefois, la fermeture prochaine de l’unité de Chauny, qui compte 220 salariés, soit 14 % des effectifs du groupe sur le territoire français, et qui coule et tréfile du cuivre depuis 1922, vient d’être annoncée. Dans les Ardennes, le site de Fumay se voit quant à lui amputé de 53 emplois, après en avoir déjà perdu 123 en 2003.

Or, voilà quelques mois, Nexans a bénéficié de 58 millions d’euros d’aides du Fonds d’intervention stratégique, dont la vocation est de sauver les entreprises en difficulté et de sauvegarder l’emploi sur le territoire national. Le Président de la République avait annoncé que l’objectif assigné au fonds serait de contribuer à maintenir sur le territoire national une industrie et des services, pour que la France ne devienne pas « une simple réserve pour touristes ». Il appartient donc au fonds de sélectionner les bons dossiers, de façon à aider les entreprises qui ont des projets d’avenir.

Au vu des chiffres que je viens de rappeler, la société Nexans semble avoir un bien bel avenir, et son carnet de commandes ne paraît absolument pas justifier les importantes suppressions d’emplois annoncées et la fermeture du site de Chauny !

Les acteurs locaux ne comprennent donc pas que Nexans, après avoir reçu près de 60 millions d’euros de fonds publics et distribué près de 56 millions d’euros à ses actionnaires, se permette ce type d’annonce, au moment même où l’observatoire économique des URSSAF de Picardie note que l’emploi salarié a régressé de 7 % dans le département de l’Aisne durant le deuxième trimestre de cette année.

Comme l’a souligné M. Thierry Foucaud, le FSI connaît d’autant mieux la stratégie de Nexans qu’il semble que l’un des membres de son comité exécutif siègerait au conseil d’administration de cette société depuis 2007… Est-ce bien normal ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Tout comme Mme Goulet, je m’interroge sur les choix et la gouvernance du FSI, qui aboutissent à détourner de son objectif premier ce dispositif de soutien financier aux entreprises en temps de crise. Il convient aujourd'hui de remettre l’emploi au cœur de l’action du Fonds stratégique d’investissement.

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie par avance de nous apporter des éclaircissements sur ces différents points et de vous montrer particulièrement attentif à la situation des salariés du groupe Nexans dans l’Aisne, qui rencontreront demain matin le préfet du département et les élus locaux pour évoquer cette crise.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je remercie Mme Goulet d’avoir posé cette question très intéressante sur la gouvernance du Fonds stratégique d’investissement et la stratégie d’emploi des crédits de celui-ci.

M. Bourquin a évoqué avec beaucoup d’émotion les conséquences de la stratégie de démantèlement appliquée par certaines entreprises. Je voudrais lui indiquer, en toute sincérité, que je partage à la fois son analyse et ses interrogations. En d’autres temps, dans d’autres secteurs économiques, j’ai eu à connaître et à vivre des crises qui condamnent au chômage des salariés qualifiés, parce que des délocalisations ou des fermetures de sites les privent de leur travail, c'est-à-dire de leur dignité.

Le Président de la République, avec courage, a pris l’initiative de créer le FSI. Je n’interviendrai pas sur la gouvernance de ce dernier, n’étant pas compétent pour le faire. Il vous reviendra, monsieur le secrétaire d'État, de répondre aux interrogations formulées par des collègues plus qualifiés que moi.

Toutefois, je représente ici une autre facette de la France, des territoires que l’Union européenne considérait jusqu’à présent comme une charge, c'est-à-dire les régions ultrapériphériques. J’ai d'ailleurs une bonne nouvelle à vous annoncer, mes chers collègues : voilà quelques mois, alors que je me trouvais à Bruxelles, j’ai vu qu’un rapport rédigé par la Commission s’intitulait : Les Régions ultrapériphériques, une chance pour l’Europe ! Je me suis alors dit que les temps changeaient !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Puisque nous sommes une chance pour l’Europe et puisque le Président de la République et le Gouvernement ont pris l’initiative – heureuse, nul ne le conteste ici – de créer un fonds doté de 20 milliards d'euros, j’en réclame notre part afin de développer les régions ultrapériphériques, dans un esprit de responsabilité, et de les transformer en de véritables atouts !

Je le rappelle, nous sommes les vecteurs de la puissance maritime de la France, nous participons à la conquête spatiale européenne avec la base de Kourou, nous détenons la plus grande biodiversité marine du pays, depuis les îles Kerguelen jusqu’à Saint-Pierre-et-Miquelon, nous sommes au cœur de la problématique du changement climatique, qui s’opère à partir des masses océaniques, enfin nos richesses naturelles constituent un atout pour l’industrie pharmaceutique française, dont on connaît la puissance : l’intervention du FSI pourrait permettre de valoriser la forêt guyanaise non pas en coupant ses arbres, mais en développant la pharmacopée.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, vous qui êtes un homme ouvert au développement, vous conviendrez qu’il n’y a aucune raison que nous soyons les oubliés des nouvelles technologies.

À cet égard, je formulerai trois propositions.

Premièrement, grâce au FSI, nous pourrions créer un fonds d’intervention de proximité pour les départements d'outre-mer, un « FIP DOM », dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication, les NTIC, où le rapport qualité-prix actuel des prestations offertes relève d’un temps révolu, ce qui prive notre jeunesse de l’accès à la connaissance. Le comité interministériel de l'outre-mer du 6 novembre prochain pourrait être l’occasion, pour la secrétaire d’État chargée de l’outre-mer et vous-même, d’indiquer avec force que le Fonds stratégique d’investissement interviendra, davantage qu’il ne le fait déjà, dans ce secteur stratégique, pour que l’outre-mer puisse connaître un décollage économique.

Deuxièmement, nous souhaitons également l’intervention du Fonds stratégique d’investissement dans le domaine des énergies renouvelables, pour lequel la Réunion sera une région de pointe. Monsieur le secrétaire d'État, vous accompagnerez certainement le Président de la République lors de son prochain déplacement sur notre île. Notre objectif est l’autonomie énergétique. Dans cette perspective, nous souhaitons expérimenter de nouvelles technologies qui nous permettront de porter haut les couleurs de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Troisièmement, il conviendrait de réduire la fracture numérique. Rien ne justifie que les câbles déjà en place ne nous permettent pas de bénéficier du haut débit, voire du très haut débit.

Je partage l’inquiétude de mes collègues de métropole et fais miennes les interrogations légitimes qu’ils ont formulées à cette tribune.

Si vous voulez vous aussi, monsieur le secrétaire d’État, faire de l’outre-mer une chance pour la France, donnez-nous un coup de main dans les domaines que je viens d’évoquer, afin que nous puissions être l’un des fleurons de la France !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Martial Bourquin applaudit également.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici au terme de ce débat sur le Fonds stratégique d’investissement et, plus généralement, sur l’action de l’État face à ce que vous avez été nombreux à qualifier de crise majeure, sans précédent, dont les conséquences affectent l’emploi et les entreprises sur l’ensemble du territoire national, tant en métropole qu’outre-mer.

Le Président de la République, le Gouvernement et le Parlement ont décidé d’affronter cette crise, et non de la subir.

Pour toute la communauté internationale, notamment pour les pays membres du G20, l’urgence a été de garantir la stabilité du système financier. Toutefois, la France s’est démarquée dans la mesure où, dès le 2 octobre dernier, elle a adopté des mesures spécifiques pour soutenir les PME. Cette attention portée aux petites et moyennes entreprises a caractérisé l’action de notre pays durant toute cette période.

Le Gouvernement a bâti un véritable arsenal pour tenter de juguler la crise. Ainsi, un soutien financier de 27 milliards d'euros a été apporté aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire, les ETI, reconnues par loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008. Un certain nombre d’orateurs ont rappelé que l’Allemagne comptait près de deux fois plus de ces entreprises moyennes que notre pays.

Par ailleurs, la médiation du crédit a été instaurée. Cette instance innovante, qui a été pérennisée au moins jusqu’à la fin de l’année 2010, a joué un rôle majeur à l’échelon local, monsieur Bourquin, un maillage ayant été mis en place pour accompagner les petites et moyennes entreprises. En outre, les compléments d’assurance-crédit publics ont été mis au point. Enfin, le Fonds stratégique d’investissement a été institué. Doté de 20 milliards d'euros, sa mission est de renforcer les fonds propres d’entreprises françaises.

Avec le plan de relance, jamais autant de moyens n’avaient été mobilisés en faveur des PME et des ETI. Cela suffit-il ? Assurément non. Vous avez été nombreux, mesdames, messieurs les sénateurs, à souligner les difficultés que connaissent vos territoires.

J’attire votre attention sur le fait que, selon une enquête de la Banque centrale européenne, les conditions de financement des entreprises par les banques sont globalement meilleures en France que dans les autres pays européens.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Devons-nous pour autant relâcher notre action ? Absolument pas !

Durant toute cette période, la nouveauté a consisté à agir à l’échelon local. Les médiateurs départementaux du crédit et les comités de suivi du financement de l’économie ont été mis en place dans l’ensemble des départements. Nous avons actionné tous les leviers disponibles : le FSI, bien entendu, mais aussi OSEO, qui, au cours de cette période, a acquis une place centrale dans le financement des petites et moyennes entreprises, qu’il s’agisse de la trésorerie, du crédit, par des cofinancements ou des garanties, ou des quasi-fonds propres après l’annonce récente du Président de la République.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Je n’ai pas les mêmes échos que vous dans ce domaine !

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Je n’en doute pas, on peut toujours en trouver ; je peux, pour ma part, vous donner des exemples de réussite, mais ce n’est pas ainsi que se juge une politique.

Je voudrais souligner un point qui n’a jamais été évoqué : le soutien en fonds propres apporté grâce au dispositif « ISF-PME », dont le succès a permis d’alimenter à hauteur de plus de 1 milliard d'euros le développement des fonds propres de nos PME.

Le 5 octobre dernier, le Président de la République a décidé de renforcer le haut de bilan des petites et moyennes entreprises et des ETI, à hauteur de 2 milliards d’euros : 1 milliard d'euros proviendra du fonds souverain à la française, le FSI, 1 milliard d'euros sera apporté en quasi-fonds propres par OSEO.

M. Fourcade a déploré avec raison la complexité du dispositif français. Le système de financement a du moins été simplifié, OSEO, né de la fusion de l’Agence nationale de valorisation de la recherche, l’ANVAR, de la Banque de développement des petites et moyennes entreprises, la BDPME, de la Société française pour l’assurance du capital-risque des PME, la SOFARIS, et de l’Agence de l’innovation industrielle, l’AII, étant désormais l’agence publique de financement des PME. Cette évolution me semble tout à fait pertinente.

Je précise que le milliard d’euros mobilisable auprès du Fonds stratégique d’investissement sera accessible au travers notamment de deux structures.

D’une part, le Fonds de consolidation et de développement des entreprises pourra mettre à la disposition des entreprises en médiation du crédit 200 millions d'euros –95 millions d'euros sont apportés par le FSI et 105 millions d'euros par les banques et les assureurs.

D’autre part, la souscription d’obligations convertibles est prévue, grâce à un montage juridique et financier « standardisé », avec engagement de réponse sous quatre semaines. Cela représentera 300 millions d'euros de quasi-fonds propres efficaces. Cette mesure répond à un besoin fort, car, en période de crise, les entreprises sont sous-évaluées.

Mme Goulet et M. Fourcade se sont plus particulièrement interrogés sur l’articulation entre les différents véhicules d’intervention publics, OSEO, le FSI et l’Agence des participations de l’État. En effet, il faut toujours veiller à canaliser notre esprit français, qui tend à créer naturellement, si j’ose dire, de la complexité !

Ces trois outils répondent à des objectifs différents.

Le FSI intervient exclusivement pour renforcer les fonds propres des entreprises, qu’elles soient petites, moyennes ou grandes, tandis qu’OSEO est la banque publique généraliste des PME et des ETI, dont l’action porte sur tous les segments du financement.

Quant à l’articulation entre l’APE et le FSI, elle est très claire : la mission confiée au FSI est différente de celle qui a été assignée à l’APE, laquelle gère un portefeuille de participations historiques de l’État comprenant une part importante de participations majoritaires. Le FSI a été créé, madame Bricq, pour prendre des participations au capital d’entreprises stratégiques pour l’économie française et présentant des besoins en fonds propres.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Le Fonds stratégique d’investissement a pour vocation essentielle de réaliser des investissements minoritaires pour une durée limitée, même s’il est un investisseur de long terme. À ce titre, il investit aussi bien dans des PME de croissance ou dans des entreprises de taille moyenne présentant un potentiel de création de valeur, par le biais de la maîtrise de technologies innovantes ou de la construction de positions concurrentielles favorables, que dans de grandes entreprises ayant besoin de stabiliser leur capital.

L’APE, pour sa part, exerce son rôle d’actionnaire du FSI via sa participation aux réunions des organes de gouvernance de ce dernier aux côtés de la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, la DGCIS, qui y apporte la vision industrielle de l’État. Madame Bricq, vous avez eu raison de souligner que la vision industrielle de la France ne se limitait pas à l’action du FSI.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Le directeur général de l’APE et le directeur général de la DGCIS ont ainsi été nommés administrateurs du FSI.

Mme Goulet a fait allusion à la gouvernance du FSI et au rôle de la Caisse des dépôts et consignations. Sur cette question, il y a un avant et un après la loi de modernisation de l’économie.

En effet, la LME a renforcé les prérogatives de la commission de surveillance pour les décisions stratégiques et créé un comité des investissements. Elle a en outre élargi la composition de la commission de surveillance à des personnalités qualifiées indépendantes et renforcé les capacités de contrôle de celle-ci, qui peut notamment s’appuyer sur la commission bancaire pour améliorer la surveillance prudentielle du FSI.

Les deux actionnaires du FSI – la CDC détient 51 % des parts, l’État 49 % – ont porté une attention toute particulière à son mode de gouvernance, qui se situe au niveau des meilleurs standards de place actuels.

Ainsi, le FSI est administré par un conseil d’administration restreint de sept membres, équilibré entre les représentants de ses actionnaires, la CDC et l’État, et trois personnalités qualifiées aux compétences reconnues : Patricia Barbizet, Xavier Fontanet et Denis Kessler.

Les travaux du conseil d’administration sont préparés par des comités spécialisés auxquels participent les administrateurs du FSI, dans leur ensemble ou non. Il existe ainsi, au sein du FSI, trois comités permanents : un comité d’investissement, chargé de donner au conseil d’administration un avis sur les projets de prise de participation qui lui sont présentés, un comité d’audit et des risques et un comité des rémunérations et des nominations. À ces trois comités permanents s’ajoute un comité d’orientation stratégique, présidé par Jean-François Dehecq, rassemblant les représentants des entreprises et des entrepreneurs, les grandes confédérations syndicales et des personnalités qualifiées. Sa mission est d’être le gardien de la cohérence et des équilibres de la doctrine d’investissement, ainsi que des grandes orientations stratégiques du FSI.

En tant que filiale de la Caisse des dépôts et consignations, le FSI exerce ses activités sous le contrôle de la commission de surveillance de cette dernière, présidée par Michel Bouvard et où siègent également deux sénateurs et deux députés. En particulier, le FSI est auditionné tous les quinze jours par la commission de surveillance de la CDC. En outre, M. Bouvard, président de la commission de surveillance, est l’invité permanent des réunions du comité d’investissement du FSI.

S’agissant des débats sur le contrôle du FSI par le Parlement, , quotidien généralement bien informé, indique ce matin que, selon M. Bouvard, ils seraient « infondés » : « Pendant ses sept premiers mois d’existence, explique-t-il, le FSI a fait des rapports tous les quinze jours à la commission de surveillance, laquelle n’a jamais rassemblé autant de parlementaires ». Informé a priori des décisions d’investissement du FSI, il affirme en outre n’avoir eu « à ce jour aucun point de désaccord sur les investissements qui ont été réalisés par l’équipe du FSI ». Ce témoignage montre que les parlementaires sont attentifs et jouent pleinement leur rôle de contrôle et de surveillance.

À ce propos, M. Fourcade a posé à juste titre le problème de la répartition des rôles. Je partage sans réserve son jugement sur ce point : il appartient aux parlementaires de contrôler, et non pas de gérer. La distinction doit être claire, car être à la fois juge et partie, contrôleur et acteur, mène immanquablement à des dérives.

Comme l’indique le rapport de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009, « c’est dans ce cadre que les parlementaires représentant les deux assemblées au sein de la commission de surveillance devront exercer leur contrôle sur la stratégie et les investissements du FSI ».

Au cours du premier semestre, la commission des finances du Sénat a examiné l’organisation et la stratégie du FSI à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui a ouvert des crédits à hauteur de 3 milliards d’euros sur le budget général et sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », afin de permettre à l’État de remplir ses engagements envers le FSI.

En outre, le Parlement a naturellement la faculté d’interroger le Gouvernement sur la gestion du FSI, sur ses investissements et ses résultats, par le biais de questions écrites ou orales. Mme Goulet a parfaitement utilisé cette possibilité aujourd’hui. Le Parlement peut aussi auditionner directement le FSI, comme l’a déjà fait la commission des finances du Sénat, ainsi que l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’évaluation du plan de relance.

Enfin, le député Bernard Carayon siège au sein du comité d’orientation stratégique du FSI, qui a pour mission d’assurer la cohérence et les équilibres de la doctrine d’investissement et des grandes orientations stratégiques du fonds. M. Carayon a été désigné pour cette fonction non pas en qualité de parlementaire, mais en raison de ses compétences éminentes en matière d’intelligence économique et de stratégie.

Le Parlement dispose donc des moyens lui permettant d’être associé à la définition de la stratégie du FSI et au contrôle de son action.

Certains ont fait allusion à l’exemple norvégien pour justifier que les décisions d’investissement du FSI soient soumises au Parlement. Or, à notre connaissance, aucun investissement du fonds souverain norvégien n’a été approuvé par le parlement national, et aucune discussion sur des dossiers précis n’y a eu lieu.

La gouvernance resserrée du FSI doit, en effet, lui permettre une grande réactivité – indispensable, surtout en période de crise –, ainsi que la confidentialité absolument nécessaire à l’exercice de sa mission, notamment pour ne pas fragiliser les sociétés cotées dans lesquelles le fonds est susceptible d’investir.

Par ailleurs, le FSI doit exercer la pleine et entière responsabilité de la gestion de ses actifs. Il ne saurait donc être question d’affaiblir cette responsabilité en substituant, même partiellement, un système de pilotage spécifique aux organes de direction du fonds.

J’en viens aux investissements du FSI.

Monsieur Biwer, le FSI peut décider d’investir dans des activités agricoles et des entreprises agroalimentaires, et il ne s’en privera pas si de tels investissements sont en cohérence avec sa stratégie.

Madame Bricq, la doctrine d’investissement du FSI, dont j’ai déjà donné les grandes lignes, a été affinée au fil des mois à la suite des multiples échanges avec le comité d’orientation stratégique du fonds. Ce processus a permis au FSI de trouver un bon équilibre, respectant à la fois sa mission d’investisseur avisé, soucieux de l’argent public, et la nécessité de prendre en compte les difficultés économiques actuelles. Le FSI n’est pas, cela est vrai, un fonds d’investissement comme les autres. Ses principes d’investissement sont publics et s’inscrivent dans la politique industrielle nationale définie globalement que j’évoquais tout à l’heure.

Le FSI a contribué à la création de fonds dédiés, notamment celui du secteur automobile, sur lequel M. Bourquin a insisté à juste titre. Le FMEA ne résulte pas de la seule initiative du FSI, puisque les constructeurs automobiles ont bien entendu apporté leur concours. La stratégie de ce fonds doit être précisée, notamment en matière d’investissement dans les sociétés sous-traitantes de deuxième rang. Le FSI est intervenu dans la mise en place d’autres fonds spécifiques, concernant en particulier les secteurs du bois ou des biotechnologies, ainsi que dans celle du fonds de consolidation.

En ce qui concerne l’action du FSI en direction des territoires ultramarins, monsieur Virapoullé, je me rendrai à la mi-novembre dans ces derniers avec Mme Marie-Luce Penchard, mon champ de responsabilité comprenant notamment le tourisme, secteur qui représente un fort enjeu pour l’outre-mer. Les états généraux de l’outre-mer ont mis en évidence un besoin en fonds propres des entreprises ultramarines. Je vous indique, monsieur le sénateur, que, en complément des dispositifs existants, le FSI et l’Agence française de développement, l’AFD, créeront un fonds commun de placement à risque pour les Antilles.

S’agissant du cas spécifique de Nexans, évoqué par MM. Foucaud et Lefèvre, il est vrai que l’investissement du FSI dans cette entreprise est intervenu alors même qu’un important plan de restructuration était annoncé. Cet investissement, d’un montant de 58 millions d’euros, a été réalisé sous la forme d’un rachat de titres sur les marchés financiers ; il ne s’est pas agi d’une injection d’argent frais dans l’entreprise, et l’on ne saurait donc prétendre que le FSI aurait en quelque sorte financé des plans sociaux. Le FSI a pour rôle d’accompagner Nexans dans son développement, les restructurations faisant partie, il faut bien le reconnaître, de la vie d’une entreprise. En tout état de cause, le FSI s’assurera que les ajustements que vous avez évoqués, messieurs les sénateurs – cela va d’ailleurs au-delà de simples ajustements dans certains bassins d’emploi –, ne seront opérés qu’en dernier recours et seront assortis de mesures d’accompagnement exemplaires, notamment sur les sites de Chauny et de Fumay.

Faut-il donner au FSI un rôle plus important en matière de sauvegarde de l’emploi, comme certains d’entre vous l’ont souhaité ?

La réalité économique fait qu’aucune entreprise ne saurait s’engager à ne jamais restructurer ses activités. Empêcher une entreprise d’adapter ses structures de production à des situations mouvantes aboutirait certainement à la condamner, et avec elle les emplois que l’on entendait protéger.

En revanche, les entreprises qui acceptent l’aide du FSI et par conséquent son intervention dans leur gouvernance savent que ses représentants seront particulièrement attentifs, plus que des investisseurs privés, à la motivation réelle et à la qualité d’éventuels plans sociaux.

Ce sujet est systématiquement abordé avant l’entrée du FSI dans le capital d’une entreprise, mais interdire au FSI d’entrer au capital d’entreprises fragilisées au motif qu’elles doivent lancer un plan social risquerait d’exposer ces dernières aux appétits d’autres actionnaires socialement moins responsables, ce qui aurait des conséquences sans nul doute plus négatives encore pour l’emploi.

Mme Goulet a interrogé le Gouvernement sur le processus décisionnel qui a conduit l’État à apporter des participations au FSI. Comme vous l’avez indiqué, madame la sénatrice, le rapport annuel sur l’État actionnaire dresse une présentation détaillée de cette opération.

L’apport de participations de l’État au FSI du 15 juillet 2009 sur lequel vous appelez notre attention porte sur 13, 5 % du capital de France Télécom, 8 % du capital d’Aéroports de Paris et 33, 34 % du capital de STX France. Le choix de telles participations minoritaires cotées s’est fait en accord avec la Caisse des dépôts et consignations. Cette opération constitue, de fait, un reclassement de titres au sein de la sphère publique. L’État a reçu une juste rémunération en contrepartie de son apport, sous la forme d’actions nouvellement émises par le FSI. Concernant les apports de la CDC, j’en tiens, monsieur Fourcade, la liste à votre disposition.

Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier de vos interventions. Il est très important que le Parlement joue son rôle de contrôle sur l’outil innovant qu’est le FSI. En moins d’un an, la gouvernance de ce dernier a été mise en place, le fonds a été doté, a réalisé 450 millions d’euros d’investissements directs et s’est engagé à hauteur de 650 millions d’euros dans des fonds spécifiques. Le FSI a également mis l’accent sur le financement des PME.

Dans un contexte de reprise que nous appelons tous de nos vœux, l’action du FSI se justifiera demain plus que jamais pour soutenir la croissance et stabiliser le capital d’entreprises stratégiques riches de compétences, de technologies et d’emplois précieux pour l’économie nationale. Nous pourrons ainsi, chose très importante en une telle période, accroître la compétitivité de notre pays. C’est cette préoccupation qui nous a guidés face à la crise que nous continuons d’affronter.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En application de l’article 82 du règlement, chaque orateur peut, s’il le souhaite, utiliser une partie de son temps de parole pour répondre au Gouvernement.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je vous remercie de vos explications, monsieur le secrétaire d'État.

Comme l’a indiqué Mme Bricq, les interrogations sur la gouvernance du FSI proviennent du hiatus, qu’elle a mis en lumière, entre la vocation initiale de ce fonds, à savoir le soutien aux entreprises nationales, et le fait qu’il s’agit finalement d’un fonds souverain comme les autres. Nous pouvons être pleinement rassurés.

Je reste cependant quelque peu sur ma faim en ce qui concerne le comité d’éthique, notamment eu égard à la conditionnalité de certains investissements. Certes, je comprends que l’outil doit rester souple et réactif, je comprends également que les investissements doivent produire des intérêts financiers, néanmoins, péchant probablement par jeunesse, je pensais que les fonds publics devaient servir à protéger l’emploi.

Quoi qu’il en soit, nous exercerons notre vigilance lors de l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de finances rectificative et veillerons à ce que les investissements du FSI servent bien à renforcer la compétitivité de nos entreprises et à leur assurer un meilleur positionnement sur le plan international, car notre commerce extérieur est tout de même en mauvaise posture…

Personne ici n’a contesté l’intérêt du FSI, mais il m’a semblé qu’il convenait d’en préciser les contours et la gouvernance. C’est ce que vous avez fait aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État, et nous avons joué notre rôle de parlementaires en obtenant davantage d’explications que nous n’en avions eues initialement. Chacun a donc fait sa part du chemin, ce qui nous permettra de rassurer nos concitoyens, qui s’interrogent parfois sur la pertinence de l’utilisation de sommes extrêmement importantes. Nous suivrons avec beaucoup d’intérêt les investissements du fonds, qui doit rester un outil souple et réactif. Cela est indispensable pour nos entreprises.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le secrétaire d'État, le FSI est un fonds stratégique. J’aurais donc souhaité que vous nous éclairiez sur votre stratégie.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le Japon, voilà bien des années, est entré dans le monde industriel moderne en pratiquant le laser beaming, c'est-à-dire en se concentrant sur certains secteurs : la photographie, l’automobile, l’électronique, etc. Appliquerez-vous la même politique ou privilégierez-vous, au contraire, certaines entreprises dans certains secteurs ? Vous ne pouvez pas tout faire et devez donc choisir une stratégie : laquelle ?

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Monsieur de Montesquiou, le problème est celui de l’articulation entre les investissements du FSI et la définition stratégique de la politique industrielle.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Je vous demande un peu de patience, madame Bricq, car il serait paradoxal que l’on ne s’appuie pas sur les conclusions de la commission Juppé-Rocard, dite du « grand emprunt », qui a justement pour mission de déterminer les investissements d’avenir. Il nous reste donc encore quelques semaines à attendre : quand elle aura remis ses conclusions, nous croiserons les priorités assignées pour l’utilisation du grand emprunt avec les investissements stratégiques du FSI.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le secrétaire d'État, les parlementaires souhaitent être beaucoup plus étroitement associés, à l’échelon local, aux réunions hebdomadaires qui se tiennent en préfecture et aux réunions organisées en urgence lorsqu’une entreprise est en difficulté.

Par ailleurs, il conviendrait d’éviter que des aides publiques ne soient accordées quand il existe des projets de délocalisation. Il faut, au contraire, donner des primes à la relocalisation, faute de quoi nos compatriotes ne comprendront pas l’action du FSI.

Monsieur le secrétaire d'État, je n’ai pas entendu de votre part de réponse très claire sur ces points.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Sur le plan local, la situation est très variable, selon la décision du préfet d’associer ou non les parlementaires aux réunions.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d'État

Non, madame Bricq, car tous les parlementaires ne s’impliquent pas au même degré sur ces questions, et la réalité est très diverse sur le plan local. J’ai suffisamment installé de comités locaux de suivi du financement pour le savoir : chaque préfet tient compte de la situation locale.

En ce qui concerne les délocalisations, monsieur le sénateur, il faut veiller à ne pas les diaboliser. La création d’activités hors de nos frontières peut avoir des effets bénéfiques, en retour, sur l’entreprise concernée. Il ne faut donc pas diaboliser a priori, comme vous semblez vouloir le faire, une démarche qui peut être nécessaire au développement des entreprises dans un schéma d’internationalisation bien compris. Bien sûr, il faut éviter de transférer à l’identique à l’étranger des activités auparavant exercées en France, mais cela n’est qu’une vision très partielle de la situation. L’internationalisation des entreprises doit s’apprécier de manière globale, en fonction de leur stratégie.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur le secrétaire d'État, en tant que parlementaire de Loire-Atlantique, je puis témoigner de la grande satisfaction des habitants de mon département devant l’intérêt manifesté par l’État pour les filières aéronautique et navale.

Je pense très sincèrement que notre politique industrielle ne doit pas être définie dans le cadre d’un partenariat trop poussé avec les parlementaires. Mes chers collègues, je me souviens des Chantiers de l’Atlantique de la haute époque, quand des parlementaires promettaient la commande d’un bateau. En ce temps, les chantiers construisaient 0, 8 bateau en moyenne, et cela coûtait cher à l’État. J’ai vécu la fin de l’ancien système et la mise en œuvre du plan Cap 21, qui a changé la logique de fonctionnement. Nous sommes alors passés à un rythme de construction de trois bateaux par an, exception faite de la période difficile que nous vivons actuellement. Je préfère donc une dynamique industrielle soutenue par l’État à une industrie dirigée…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

À titre exceptionnel, dans la mesure où il ne figure pas sur la liste des orateurs inscrits, et parce que l’intérêt de la question de Mme Goulet le justifie, je donne la parole à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, je vous suis infiniment reconnaissant et j’ai conscience de bénéficier d’un privilège. J’ai rejoint tardivement cet hémicycle, car je devais présider une réunion de la commission des finances, mais ne pas participer du tout à ce débat aurait été pour moi une véritable punition !

J’ai entendu évoquer la possibilité d’instaurer une prime aux relocalisations. Monsieur le secrétaire d’État, il ne s’agit pas, dans notre esprit, de diaboliser les délocalisations, mais de prendre conscience de la réalité de ce phénomène, que les discours officiels ont peut-être trop tendance à gommer.

Il s’agit d’ailleurs moins aujourd’hui de délocalisations que de « non-localisations ». Dans les entreprises, lorsqu’une ligne de production arrivait en fin de cycle, il était d’usage qu’une autre prenne le relais. Tel n’est plus le cas aujourd’hui : la nouvelle ligne de production démarre hors du territoire national, là où se trouvent les nouveaux marchés et d’où il sera facile d’exporter vers les vieux marchés, dont le nôtre.

Ce phénomène ne touche pas que l’industrie, monsieur le secrétaire d’État. Les grandes entreprises, celles de l’automobile ou de l’aéronautique, par exemple, externalisent les travaux de recherche et les confient à des cabinets d’ingénieurs. Les représentants d’une de ces sociétés étaient d’ailleurs assez gênés, lorsque je les ai reçus, à la veille de l’été, de m’exposer ce qu’ils subissaient, car ils prenaient ainsi le risque de perdre leurs marchés. Ils m’ont expliqué que leurs donneurs d’ordres les poussent maintenant à établir leurs cabinets en Europe centrale plutôt qu’en France, pour réduire les coûts.

Ces phénomènes existent, et vous verrez que nous sortirons de la crise que nous vivons actuellement – nous en sommes peut-être d’ailleurs déjà sortis – en ayant perdu une partie de notre potentiel de croissance. Nous devons donc prendre conscience de la nature des facteurs de compétitivité. Dans cette perspective, j’apprécie la réforme de la taxe professionnelle, mais je m’étonne que l’on introduise la valeur ajoutée dans son assiette, car la valeur ajoutée inclut les salaires.

Monsieur le secrétaire d’État, nous avons donc de vraies réformes à entreprendre pour rendre leur pleine compétitivité à nos entreprises et à nos territoires. Il s’agit non pas de diaboliser les délocalisations, mais de souligner qu’elles reflètent nos propres hésitations et nos retards à nous adapter, à nous transformer pour être compétitifs, qui font qu’aujourd’hui, certains pays ont des fonds souverains, et d’autres une dette souveraine !

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d’État

Je suis d’accord avec M. le président de la commission des finances pour reconnaître que les délocalisations sont révélatrices des handicaps de compétitivité de nos territoires. Mais, au-delà de la réforme de la taxe professionnelle, notre action en matière de crédit d’impôt-recherche, par exemple, représente une avancée majeure.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, secrétaire d’État

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Notre dispositif est aujourd’hui le plus important du genre de tous les pays de l’OCDE ! L’action du Gouvernement en faveur de l’innovation, qui est un des facteurs clés de la compétitivité, au-delà du travail et des investissements, a donc été forte. Je pourrais entrer dans le détail, mais c’est là un autre débat….

Applaudissementssur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à midi, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.