Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après plusieurs tentatives pour imposer le travail du dimanche – je pense à divers textes précédents –, nous arrivons donc au terme de l’examen de cette proposition de loi de commande, qui restera dans l’histoire comme une loi de circonstance destinée à amnistier des actes illégaux.
La lecture de l’annexe 2 du rapport, où figure la liste des futurs PUCE, prouve à l’évidence que cette liste colle parfaitement aux situations litigieuses. Ainsi, les surfaces commerciales mentionnées pour mon département, le Val-de-Marne, sont Carrefour Pompadour à Créteil et Thiais Village. Or, cet hiver, Thiais Village a opportunément reçu la visite de deux membres du Gouvernement un dimanche après-midi, alors que l’ouverture de cet ensemble commercial n’était pas autorisée…
Au cours de nos deux journées de débat, tous les arguments sur les risques de dérégulation des rythmes de vie de notre société, notamment des rythmes de vie familiale, ont pu être développés. Mais, comme cela vient d’être rappelé, la volonté d’obtenir un vote conforme a primé ! Tous nos amendements ont été balayés d’un revers de main, tant le Gouvernement semble désireux de faire adopter à tout prix ce texte en urgence, l’été, pendant que les salariés sont en vacances.
Au-delà des arguments sur le « volontariat » ou « les majorations de salaire », qui sont bien peu convaincants au regard des conditions qui seront faites aux salariés, la question majeure qui demeure est celle de la société que nous voulons construire : solidaire ou éclatée ?
Hélas, ce texte constitue une brèche considérable dans notre modèle social, en remettant en cause un acquis de plus d’un siècle qui permettait d’avoir une journée de repos commun et de temps partagé. Qu’il soit passé en commun ou consacré à d’autres activités, comme le bénévolat ou les loisirs, ce temps partagé est aussi important pour la vie de famille que pour la cohésion de notre société.
Comment tous ces salariés fragilisés, précarisés et contraints d’accepter de travailler le dimanche, parfois pour tenter d’améliorer un pouvoir d'achat bloqué, pourront-ils trouver le temps nécessaire à leur vie personnelle et culturelle ? De surcroît, et cela a été souligné à plusieurs reprises, ces salariés sont majoritairement des femmes avec des charges de famille qui devront faire garder leurs enfants pour aller travailler le samedi et le dimanche. À défaut, elles seront obligées de les laisser seuls à la maison ou dans la rue…
Monsieur le ministre, face à cette société de consommation à outrance que vous semblez vouloir construire, certains de mes collègues ont parlé de « civilisation du caddy » et de « culture de supermarché ». Pour ma part, ce n’est pas l’idée que je me fais du développement de la personne humaine et de la famille en ce début de XXIe siècle.
C’est pourquoi je voterai résolument contre cette proposition de loi, qui porte en elle tous les ingrédients d’une généralisation du travail du dimanche.