De la même manière, en cette période de resserrement budgétaire, quelles sont les garanties apportées par l’État pour que les collectivités puissent poursuivre l’entretien des monuments et des sites acquis ? Notons que, à défaut d’un tel entretien, la seule possibilité serait le déclassement pour revente afin d’éviter un coût devenu insupportable pour les finances de la collectivité.
Les modalités de suivi de l’utilisation du monument, une fois celui-ci transféré, nous apparaissent également insuffisantes. Les délais impartis pour la communication des bilans de transferts par les collectivités à l’État sont fixés à trois ans. Cette période est trop longue et ne permettra pas une réaction rapide en cas d’éventuelles difficultés financières ou lorsque des carences manifestes apparaîtront dans la mise en valeur d’un monument, d’autant que l’assistance juridique de la part du ministre chargé du domaine de l’État est, elle, prévue pour une durée très courte, à savoir un an seulement.
Cette inquiétude est renforcée par le fait que le Haut conseil du patrimoine ne jouera pas un rôle assez fort. En effet, il ne devrait pas seulement s’exprimer sur les projets qu’il a décidé d’analyser ou qui lui seront soumis, comme cela est prévu dans le dispositif, mais il devrait également se prononcer sur tous les projets de transfert de monuments.
Prenons l’exemple de la citadelle de Blaye, achetée par la ville en 1954, classée monument historique et inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2008. Le maire souhaite aujourd’hui en vendre une partie à la découpe. Or la présente proposition de loi n’institue aucune protection de nature à éviter le démembrement de ce monument classé, puisque les destinataires de cette vente à la découpe ne seront pas des collectivités et que seuls les transferts au profit de celles-ci entrent dans le champ d’application du texte dont nous débattons.
Pour conclure, nous souhaitons rappeler fortement que la culture tout comme le patrimoine ne sont pas des produits de luxe. Ils représentent bien plus : un élément de notre conscience collective et la garantie de notre rayonnement international.
Comme l’a dit Catherine Morin-Desailly, l’engouement formidable des Français et des étrangers pour les Journées du patrimoine nous oblige, dans l’intérêt du pays, à proposer un dispositif responsable dont l’objectif unique est la préservation du patrimoine monumental de la France.