Intervention de Ladislas Poniatowski

Réunion du 25 mars 2010 à 9h00
Tarif réglementé d'électricité — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Ladislas PoniatowskiLadislas Poniatowski, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission de l’économie et du développement durable :

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, la commission de l’économie et du développement durable a bien voulu me désigner rapporteur de ma proposition de loi tendant à autoriser les consommateurs domestiques et les petites entreprises à retourner au tarif réglementé d’électricité. C’est donc à la fois en tant qu’auteur et que rapporteur que j’ai le plaisir de vous exposer les motivations de ce texte, dont la portée est certes très limitée, mais qui présente un vrai caractère d’urgence. Permettez-moi, mes chers collègues, de vous rappeler brièvement les raisons qui appellent urgemment une nouvelle loi dans ce domaine.

Vous le savez tous, l’Union européenne a décidé de libéraliser le marché de la fourniture d’électricité et de gaz. En application des directives communautaires successives, la France a ouvert à la concurrence, par étapes, le marché de ces deux formes d’énergie. Depuis le 1er juin 2007, l’ensemble des consommateurs, particuliers comme professionnels, peuvent s’adresser librement au fournisseur d’électricité ou de gaz de leur choix.

Mais plus de deux ans après la libéralisation complète du marché, la très grande majorité des consommateurs ont choisi de demeurer aux tarifs réglementés, et la répartition des ventes entre les tarifs réglementés et le marché libre évolue très lentement.

Monsieur le ministre d’État, vous nous avez fourni les chiffres les plus récents, qui datent de décembre 2009.

Concernant l’électricité, seuls 1 312 000 particuliers très précisément, sur un total de 29 900 000, sont passés à un fournisseur alternatif à EDF ; pour les clients industriels, la concurrence est un peu plus importante puisque 366 000 industriels sont passés à un fournisseur alternatif, sur un total de 4 850 000.

La situation est comparable pour le marché du gaz puisque 637 000 particuliers seulement, sur un total de 10 790 000, sont passés à un fournisseur alternatif à GDF. Pour les industriels, grands et petits, le ratio est de 113 000 sites passés à un fournisseur alternatif, sur un total de 685 000.

Les tarifs réglementés bénéficient auprès des consommateurs d’une image positive, tenant à leur simplicité, à la notoriété des fournisseurs qui les proposent, ainsi qu’au caractère modéré de leur évolution, dû à leur encadrement par l’État.

En pratique, l’écart entre le tarif réglementé et le prix de marché – ce qu’il est convenu d’appeler le « ciseau tarifaire » – est demeuré plus grand pour l’électricité que pour le gaz, dont le tarif réglementé est très proche du prix de marché.

Deuxième observation, je voudrais attirer votre attention, mes chers collègues, sur l’importance de prolonger, d’étendre et de simplifier le principe de réversibilité.

La loi permet, jusqu’au 30 juin 2010, aux consommateurs d’électricité et à certains consommateurs de gaz qui quittent leur fournisseur d’origine et optent pour la concurrence de revenir, au terme d’un délai de six mois, au tarif réglementé s’ils jugent que tel est leur intérêt, s’ils ont été mal servis ou si les prix, à leurs yeux, étaient trop élevés.

Ce principe de « réversibilité » est essentiel pour un réel développement de la concurrence, et les consommateurs hésiteront en effet d’autant moins à quitter l’opérateur historique qu’ils auront la garantie de pouvoir revenir au tarif réglementé, que celui-ci est le seul à offrir, si d’aventure le tarif de marché évoluait à la hausse. C’est pourquoi la réversibilité est un argument commercial majeur pour les nouveaux entrants lorsqu’ils démarchent des clients.

Or ce principe de réversibilité a été défini comme une mesure transitoire. Dernièrement, la loi du 21 janvier 2008 en a fixé le terme au 1er juillet 2010, d’où la nécessité de le prolonger.

Par ailleurs, le périmètre du principe de réversibilité est complexe. Pour l’électricité, il convient de distinguer entre les consommateurs finals domestiques, qui bénéficient d’une réversibilité totale, et les consommateurs finals non domestiques, qui ne profitent du principe de réversibilité qu’en dessous d’un seuil de puissance de 36 kilovoltampères. Pour le gaz, il convient également de distinguer entre les consommateurs finals domestiques, qui ne bénéficient que d’une réversibilité partielle, et les consommateurs finals non domestiques, qui ne profitent pas du principe de réversibilité, d’où la nécessité de simplifier cette réversibilité.

Troisième observation, je voudrais également attirer votre attention sur un risque de caducité avant l’adoption du texte relatif à la nouvelle organisation du marché de l’électricité, dit projet de loi NOME, tant attendu, dont vous nous direz certainement quelques mots, monsieur le ministre d’État.

En effet, dans le prolongement du rapport Champsaur présenté au printemps 2009, le Gouvernement travaille actuellement à ce projet de loi. À ce propos, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre d’État, de votre volonté d’associer les nombreux acteurs concernés par ce sujet, y compris les élus que nous sommes, en diffusant assez largement un premier avant-projet, en amont de l’envoi du texte au Conseil d’État, mardi dernier. L’ensemble des acteurs concernés ont été sensibles à cette volonté de les associer, en amont, afin de faire réagir les uns et les autres.

Selon l’avant-projet soumis à concertation, ce texte devrait comporter notamment un mécanisme dit « d’accès régulé à la base » qui consistera à mettre à disposition des fournisseurs alternatifs une fraction de la production électronucléaire d’EDF. Je crois que c’est un des sujets qui fera largement débat, …

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