Intervention de Roland Courteau

Réunion du 25 mars 2010 à 9h00
Tarif réglementé d'électricité — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

L’Europe a jusque-là montré son incapacité à mener une véritable politique énergétique, sauf à laisser croire que le marché pourra tout réguler.

On connaît la suite avec les désordres qui s’ensuivirent, en particulier des hausses des prix de l’énergie très pénalisantes au cours des dernières années : 80 % au Royaume-Uni, 90 % au Danemark, et j’en passe.

Pourtant, depuis 2002, les gouvernements français successifs et leurs majorités parlementaires ont toujours voulu favoriser la primauté des mécanismes concurrentiels sur tout autre mécanisme régulateur. Je me souviens d’ailleurs très clairement des propos que vous teniez au moment de la transposition en 2000 de la directive signée en 1996 par M. Juppé, alors Premier ministre.

Par exemple, le rapporteur de ce texte, M. Revol, n’a eu de cesse de dénoncer le choix du gouvernement de l’époque, celui de M. Jospin, d’effectuer « une transposition tardive et insuffisamment libérale ». Oui, j’ai bien dit « insuffisamment libérale » ! Il regrettait que la France choisisse de limiter le degré d’ouverture au minimum et que cette transposition ne permette pas l’activité de négoce de l’électricité – achat pour revente –, sans laquelle, disait-il, la réalisation d’un véritable marché intégré de l’électricité était compromise

Avec le futur projet de loi NOME, nous allons franchir une étape supplémentaire pour tenter de soutenir artificiellement une concurrence dans un secteur qui, de par sa nature même, ne peut fonctionner si on l’abandonne aux mécanismes purement concurrentiels.

À qui cela va-t-il bénéficier ? Aux consommateurs, au premier rang desquels les ménages ? J’en doute ! L’instabilité des prix de l’énergie, leur volatilité à la hausse font planer de sérieux doutes et laissent à penser que ce seront plutôt eux qui en feront les frais avec une baisse de leur pouvoir d’achat du fait des dépenses incompressibles – le chauffage, par exemple – qui ne cessent de croître.

Pour la majorité sénatoriale, la conception de la construction européenne reposait sur une foi inconditionnelle dans les vertus de la concurrence et du marché. La preuve en est que, quelques années plus tard, le gouvernement de M. Raffarin a permis l’émergence de fournisseurs alternatifs à l’opérateur historique. La suite, nous la connaissons…

Dans un souci de clarté, je souhaiterais établir une bonne fois pour toutes les responsabilités par rapport à l’ouverture à la concurrence aux ménages.

Lors du Conseil européen de Barcelone, en mars 2002, le gouvernement Jospin avait obtenu que l’ouverture du marché de l’électricité et du gaz soit uniquement limitée aux professionnels et aux entreprises. En contrepartie de cette ouverture aux professionnels pour 2004, il avait obtenu le principe de l’adoption d’une directive-cadre sur les services d’intérêt général, la construction européenne devant ainsi reposer sur d’autres fondements que ceux du marché et des lois de la concurrence.

J’ajoute que le Président de la République de l’époque, M. Jacques Chirac, avait précisé, lors de la conférence de presse qui avait suivi le Conseil, que c’était bien la solution souhaitée qui avait été retenue et qu’il n’était pas admissible ni même acceptable d’aller plus loin. Bref, les ménages n’étaient en aucune façon concernés par l’ouverture du marché de l’électricité.

En revanche, c’est bien le 25 novembre 2002, lors d’un Conseil des ministres européens de l’énergie, que Mme Fontaine, ministre déléguée à l’industrie dans le gouvernement Raffarin, a accepté qu’une date finale soit fixée pour l’achèvement du marché intérieur de l’électricité et du gaz. C’est ainsi que les nouvelles directives de juin 2003 pour l’électricité et le gaz prévoiront plusieurs étapes pour aboutir à l’ouverture totale à la concurrence au 1er juillet 2007.

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