Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 25 mars 2010 à 15h00
Adoption par les partenaires liés par un pacte civil de solidarité — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga :

On assiste depuis quelques années à une évolution de la reconnaissance juridique de l’homoparentalité parce que les réalités finissent par prendre le pas sur les préjugés. Selon l’Institut national des études démographiques, l’INED, 30 000 enfants font partie aujourd’hui d’une famille homoparentale en France.

Leurs parents et eux ne doivent plus subir les discriminations juridiques et administratives qui pèsent sur leur vie quotidienne. Inacceptables en soi, celles-ci contribuent aussi à renforcer les attitudes archaïques de rejet dont les enfants ont parfois à souffrir, à l’image des enfants de divorcés il y a moins d’un siècle, notamment lorsque j’étais moi-même un enfant.

En adoptant cette proposition de loi, le Sénat n’apparaîtrait pas comme un précurseur mais serait tout simplement à l’unisson de nos partenaires européens, puisque neuf pays européens admettent aujourd’hui, sous une forme ou sous une autre, l’adoption pour les couples homosexuels. Il s’agit de l’Allemagne, de la Belgique, du Danemark, de l’Espagne, de l’Islande, de la Norvège, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suède. Ces pays sont pourtant signataires de la convention de La Haye !

En effet, la famille homoparentale ne correspond pas à la vision traditionnelle de la famille. Est-ce une raison pour la rejeter dans le non-droit et lui interdire d’adopter ?

Comme l’écrit l’anthropologue Anne Cadoret : « aujourd’hui, ces familles homoparentales nous disent que la sexualité d’un homme ou d’une femme n’est pas la raison première de la paternité ou de la maternité, que sexualité et parenté n’appartiennent pas au même domaine. Alors, respectons la sexualité de chacun, qui est une affaire privée ; et aidons nos concitoyens qui le souhaitent à devenir parents, ce qui est, là, une affaire publique. » Et cela ne concerne pas seulement l’adoption.

La conception unique et idéale de la famille tend à disparaître. L’important est que les enfants s’épanouissent, avec des parents affectueux et soucieux de leur éducation. Les Français d’aujourd’hui en ont conscience : un sondage effectué en novembre 2009 indiquait que 57 % des Français étaient favorables à l’adoption par des familles homoparentales, et 41 % se prononçaient contre cette possibilité.

Voilà pour vous rassurer, mes chers collègues !

En adoptant cette proposition de loi, non seulement vous mettriez notre législation en conformité avec la jurisprudence européenne, mais vous auriez de plus l’assentiment de ceux qui parmi nos concitoyens admettent de moins en moins le retard de la législation sur les mœurs.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion