Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons ce soir au terme de l’examen du projet de loi de finances pour 2011.
Le texte issu de la commission mixte paritaire, qui s’est réunie lundi, est sans surprise sur le fond, puisqu’il respecte l’esprit du projet de loi initial et ajuste finalement le déficit à 91, 64 milliards d’euros. Au cours des débats, j’ai eu l’occasion d’exprimer un certain nombre de réserves, d’ailleurs partagées par la majorité de mes collègues du RDSE.
Monsieur le ministre, comme je vous l’ai indiqué la semaine dernière, je ne suis, une fois de plus, pas certain que ce texte réponde aux objectifs d’efficacité et de justice fiscale que les entreprises et nos concitoyens sont en droit d’attendre.
Tout d’abord, l’équilibre de ce projet de budget est fragile. Il est bâti sur une hypothèse de croissance beaucoup trop haute. Avant l’été, pour fonder le projet de loi de finances pour 2011, le Gouvernement avait sagement décidé de revenir sur la prévision de croissance initialement prévue autour de 2, 5 % pour la ramener à 2 %. Ce demi-point d’écart aurait en effet surestimé les recettes d’au moins 3 milliards d’euros. Depuis, alors que les experts envisagent une croissance d’environ 1, 5 % ou 1, 6 %, vous avez maintenu la prévision de 2 %.
Conserver cette fourchette haute est très risqué. Nous connaissons quelques précédents. La réalité se situe toujours en deçà des espérances. Si certains indicateurs macroéconomiques laissent entrevoir une amélioration de la croissance française, celle-ci reste – nous le savons – tributaire d’un certain nombre de paramètres que nous ne maîtrisons pas.
La soutenabilité de cette reprise suppose notamment le maintien du bon rythme de la croissance mondiale. Or l’économie américaine montre depuis quelques semaines des signes d’essoufflement qui pourraient sans doute coûter quelques points de croissance à la zone euro, donc à la France.
Cela suppose aussi la résorption des déséquilibres financiers internationaux. Malheureusement, nous ne sommes pas à l’abri de nouvelles tensions obligataires et boursières. Et, à mon sens, ce ne sont pas les dernières décisions du sommet de Séoul qui suffiront à réguler fondamentalement les marchés financiers.
C’est pourquoi, même si je le regrette évidemment, la croissance française sera proche de celle que les experts anticipent. Vous le savez bien, monsieur le ministre, mais vous privilégiez l’affichage politique au détriment de la sincérité budgétaire !
Je conteste d’autant plus votre optimisme que vous avez opéré certains choix budgétaires susceptible de se répercuter fortement sur l’activité de notre pays. Afin de ramener le déficit public à 6 %, vous n’avez pas hésité à pratiquer des coupes claires sur des missions dont les actions sont pourtant essentielles au soutien de notre économie, mais aussi à la cohésion sociale de notre pays, qui en a bien besoin.
Je pense par exemple aux collectivités locales. Alors que celles-ci alimentent les trois quarts de l’investissement public et qu’elles sont aussi le pivot de l’aide sociale, le gel de leur dotation pour trois ans – cela a été rappelé par François Fortassin – est un mauvais coup – un de plus – porté à leurs capacités financières.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire n’est pas revenue sur la ponction de 245 millions d’euros sur les offices HLM pour financer l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. Alors que le secteur immobilier privé continue d’écarter les plus modestes, vous vous en prenez au principal levier de leur accès au logement.
Je pense aussi que votre souhait de réduire les niches fiscales, fort louable sur le principe, risque de se révéler désastreux dans les faits. Le sort que vous avez réservé à certaines d’entre elles dans le projet de loi de finances pour 2011 n’est pas de nature à bouleverser une architecture budgétaire qui continue de pénaliser – nous le savons – les plus modestes, les classes moyennes, et qui ne soutient pas suffisamment les PME.
Encore une fois, nous attendions le grand soir fiscal. Ce n’est pas pour tout de suite. Faut-il espérer que nous l’ayons un jour ? On vit d’espoir…
Nous avons au moins la perspective d’un débat sur les revenus du patrimoine. Mais le résultat de la commission mixte paritaire laisse présager une discussion difficile. Je constate en effet que les quelques initiatives consistant à durcir la fiscalité du patrimoine sans pour autant gêner le débat de demain n’ont pas été retenues.