Deuxièmement, la cotisation complémentaire sera assise sur la valeur ajoutée, ce qui a pour conséquence très directe que la réforme, engagée au nom de l’objectif de rétablissement de la compétitivité de nos entreprises, va réintroduire dans l’assiette d’imposition les salaires qui en avaient été exclus en 1999, sous l’invocation du même objectif de défense de la compétitivité de l’économie française.
Concrètement, le prélèvement de 1, 5 % se traduira par une nouvelle cotisation de près de 2, 5 % sur les salaires bruts, s’ajoutant aux charges sociales déjà acquittées par les entreprises. Ce paradoxe ne peut être en partie surmonté que par l’allégement de 4, 3 milliards d’euros des prélèvements obligatoires dont bénéficieront globalement les entreprises et par l’aggravation concomitante du déficit public. Mes chers collègues, évitons de proclamer que nous supprimons la taxe professionnelle en créant une contribution économique territoriale qui aurait toutes les apparences d’une taxe professionnelle antérieure à 1999 !
Troisièmement, il existe un risque d’optimisation, car, en France, certains sont champions en la matière. L’Assemblée nationale devrait cependant y pourvoir en imposant que la valeur ajoutée soit calculée au niveau de la structure mère et non pas des filiales.
Le second volet de la réforme, à savoir la refonte des finances locales, est celui qui suscite aujourd’hui les crispations les plus visibles, à la mesure de l’enjeu pour les collectivités territoriales, qui perdront une recette leur rapportant globalement plus de 20 milliards d’euros par an.
L’inquiétude est d’autant plus forte que les simulations détaillées par contribuable et par collectivité des conséquences de la suppression de la taxe professionnelle et de l’attribution de nouvelles ressources tardent à être diffusées auprès des intéressés. Celles qui sont d’ores et déjà disponibles paraissent peu lisibles et guère probantes…
D’ailleurs, monsieur le ministre, ces simulations ne se fondent que sur le texte du projet de loi de finances initial et ne prennent pas en compte les propositions de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Peuvent-elles être réalisées de manière suffisamment éclairante dans des délais aussi courts et conduire à une prise de décision efficace par le Parlement, dès l’examen du présent projet de loi de finances ? Très sincèrement, je ne le pense pas…
J’ai bien noté la position du Gouvernement, qui peut se résumer ainsi : prenons les décisions maintenant et procédons l’année prochaine aux inévitables réglages qu’appelle une réforme de cette ampleur.
Pour ma part, je constate que 2010 sera une année de transition : profitons-en pour mettre en place une organisation des ressources locales qui soit fondée sur le plus large consensus possible et dissocions clairement le volet « entreprises » de la réforme, qui doit entrer en vigueur dès le 1er janvier prochain, du volet « collectivités territoriales », qui n’a vocation à s’appliquer qu’à partir de 2011, quoi qu’il arrive.
M. le rapporteur général de la commission des finances a fait une ouverture : inscrire ce dernier volet dans la seconde partie du projet de loi de finances, puisqu’il n’aura pas d’impact au cours de l’année 2010. Nous discuterons de cette proposition. Personnellement, je reste persuadé qu’il faudra mettre à profit les premiers mois de 2010 pour procéder aux derniers réglages et ne laisser subsister aucun soupçon ni aucun doute.