Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 24 janvier 2006 à 21h30
Prévention et répression des violences au sein du couple — Article 5 bis B

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Cet amendement est important puisqu'il concerne la médiation pénale dont nombre de nos collègues ont parlé au cours de la discussion générale.

L'article 5 bis B, adopté par l'Assemblée nationale, tend à interdire au procureur de la République, en cas de violences conjugales, de proposer une nouvelle médiation pénale. Le Sénat avait eu l'occasion de discuter longuement, avant de le rejeter, un amendement ayant le même objet.

Il va de soi qu'une médiation pénale n'est pas adaptée en cas de violences graves répétées et que, dans ce cas de figure, elle ne saurait même être envisagée, et encore moins proposée une deuxième fois. Toutefois, les situations individuelles peuvent être extrêmement variées et il serait regrettable de limiter la marge d'appréciation du juge.

En effet, d'une part, la perspective de poursuites et d'un procès peut dissuader la victime de porter plainte. D'autre part, la prise en charge de la victime paraît parfois plus satisfaisante dans le cadre de la médiation pénale. À ces deux titres, cette procédure peut présenter un intérêt.

Le guide de l'action publique en matière de lutte contre les violences au sein du couple, élaboré par le ministère de la justice en 2005, circonscrit d'ailleurs étroitement les cas dans lesquels une médiation pénale peut être pertinente : « violences isolées et de moindre gravité et mis en cause sans antécédent et couple vivant sous le même toit et désirant maintenir le lien conjugal, de concubinage ou le PACS ».

Selon les informations recueillies auprès du ministère de la justice, la circulaire d'application de la présente proposition de loi devrait confirmer et renforcer encore ces orientations. Aussi la restriction proposée ne paraît-elle pas indispensable. C'est pourquoi nous avons proposé la suppression de cet article.

J'ai entendu certains orateurs critiquer la médiation pénale, en affirmant que cette procédure reviendrait à faire de la victime un quasi délinquant et à entériner l'acceptation des violences. Au contraire, la médiation pénale reconnaît le statut de la victime, qui n'est absolument pas responsable. Il peut y avoir des cas où, au lieu d'aller au procès, la victime peut ainsi obtenir une solution à son problème, par une indemnisation ou un engagement de l'auteur des violences de ne plus les réitérer. Cette voie est donc parfois bien préférable au procès et à la judiciarisation. De toute façon, sans la médiation, après de très longues procédures, le procès risque de ne pas aboutir ou d'aboutir à un classement sans suite.

Au demeurant, la médiation pénale ne s'applique pas seulement à de telles situations. D'une manière générale, les critiques que j'ai entendues sur l'intérêt de cette procédure ne me paraissent pas fondées. Je le rappelle, la médiation pénale est tout autre chose, notamment, que la conciliation civile entre voisins. C'est une nouvelle procédure, qui a été mise en place progressivement et qui présente un intérêt, notamment dans les cas « légers ». Monsieur le garde des sceaux, elle a prouvé qu'elle fonctionnait bien dans certaines juridictions.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion