Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 13 janvier 2009 à 10h00
Questions orales — Avenir de la profession d'avoué

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Je souhaite attirer votre attention, madame la ministre, sur l’intention de la Chancellerie de supprimer la profession d’avoué à compter du 1er janvier 2010.

Cette décision a été annoncée brusquement et a surpris toute la profession. Or, cette décision a des conséquences qui ne sont pas neutres ; elle risque de causer un important préjudice à la fois économique et humain aussi bien pour les professionnels concernés que pour les justiciables. Elle risque également de perturber le bon fonctionnement de la justice.

C’est toute une profession qui est ainsi vouée à disparaître ! Je précise qu’elle compte plus de 2500 salariés répartis sur l’ensemble du territoire français entre 235 études et 28 cours d’appel et que les avoués interviennent en priorité sur les affaires des justiciables les plus modestes.

Les avoués sont des officiers ministériels qui représentent les parties devant les cours d’appel. Ils ont exclusivement le droit de postuler et de prendre des conclusions devant la juridiction auprès de laquelle ils sont établis. Cette fonction exclusive en fait des spécialistes du droit judiciaire privé, contrairement aux avocats qui ont une activité juridique importante et dont l’activité judiciaire, même si elle peut être relativement développée en première instance, est extrêmement marginale devant les cours d’appel en matière civile et commerciale.

Les correspondants les plus importants d’une étude d’avoués ont entre huit et quinze dossiers en appel dans une année alors que la moyenne pour les avocats traditionnels en appel est de deux à quatre dossiers par an.

Les avoués exercent donc des compétences tout à fait particulières et ont développé des techniques spécifiques. De fait, la reconversion d’un avoué en avocat, comme vous l’avez suggéré, ne sera ni automatique, ni évidente. Les avoués ne pratiquent pas le métier d’avocat même s’ils ont les mêmes diplômes universitaires et des qualifications proches en procédure. Ils sont en fait aussi éloignés du métier d’avocat que le sont les avocats à la Cour de cassation.

Ceux qui ont été avocats avant de devenir avoués savent qu’ils exercent une tout autre profession, fondamentalement différente, entièrement consacrée à l’activité des cours d’appel et à la technique spécifique du procès en appel.

Madame la ministre, la spécificité est encore plus évidente pour les collaborateurs des avoués qu’une telle suppression mettra dans une situation très délicate. Il s’agit en grande majorité – 90 % – de femmes qui risquent de se trouver sans travail et donc sans ressources le 1er janvier 2010.

De même, il faut le rappeler, les avoués n’ont pas de clientèle propre ; les dossiers leur sont adressés par les avocats, au nom ou pour le compte de leurs clients qu’ils ont eux-mêmes représentés ou assistés en première instance. La clientèle institutionnelle des avoués à la cour n’est en réalité attachée à leurs études qu’en raison du caractère obligatoire du recours à un avoué pour la procédure d’appel.

Je voudrais donc savoir si une étude préalable sur les conséquences de cette décision a été réalisée, si une concertation a enfin été engagée avec les professionnels concernés, si des mesures sont envisagées afin d’en atténuer les effets économiques et sociaux et si un processus d’indemnisation a été prévu.

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