Intervention de Michel Teston

Réunion du 27 novembre 2009 à 14h30
Loi de finances pour 2010 — « gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien »

Photo de Michel TestonMichel Teston :

Monsieur le président, madame le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme 134 « Développement des entreprises et de l’emploi » et, plus particulièrement, l’action 04 « Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information ».

Les crédits prévisionnels de l’action se situent à 211, 4 millions d’euros tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement, soit une hausse de 2, 06 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009.

Faut-il en conclure pour autant que l’État va mieux assurer ses obligations à l’égard de La Poste ou encore son rôle d’aménageur du territoire dans le domaine des télécommunications ?

Qu’en est-il réellement s’agissant, d’abord, de La Poste ? Comme dans les lois de finances initiales précédentes, des crédits sont inscrits pour accompagner La Poste dans sa mission de service public de transport et de distribution de la presse.

À ce sujet, je tiens à formuler des remarques de forme et de fond.

Je commencerai par une remarque de forme : les 242 millions d’euros inscrits le sont au titre de deux missions – « Économie » et « Médias ». Cette présentation nuit à la lisibilité. Il serait plus efficace de rassembler les crédits sous une même mission.

La remarque de fond touche à l’importance que revêt l’aide au transport de la presse pour La Poste. Je l’ai dit à plusieurs reprises ces dernières années, le soutien de l’État à La Poste pour l’exercice de cette mission de service public est réel, mais insuffisant puisque la dépense restant à la charge de La Poste était estimée à 480 millions d’euros en 2007.

Même s’il fait l’objet pour l’instant d’un moratoire, l’accord tripartite – État-Poste-Presse – de 2008 ne permet pas d’être optimiste pour l’avenir. Il prévoit, en effet, une réduction en sifflet de l’accompagnement de l’État, accompagnement qui disparaîtra en 2016.

Pourtant, le bon exercice de cette mission constitue une véritable garantie d’égal accès à l’information sur tout le territoire.

Quant à la mission de service public de présence postale, pas plus que dans les budgets annuels précédents, elle n’est soutenue par l’État. Pourtant, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur portant de 85 % à 95 % l’abattement sur les bases d’imposition de La Poste, ce qui se traduit par une augmentation de l’exonération consentie par les collectivités locales.

Le texte adopté prévoit que la perte complémentaire de recettes pour les collectivités locales est compensée par une majoration à due concurrence de la DGF.

En l’état actuel de ce projet de budget, rien n’indique que cet engagement sera tenu.

Je vous rappelle, madame le secrétaire d’État, que, si le Gouvernement n’accompagne pas financièrement La Poste à un niveau suffisant chaque année pour la présence postale et le transport de la presse – l’Union européenne l’autorisant à le faire pour ces deux missions de service public –, il pourrait bien apparaître nécessaire, dans quelques années, de procéder à une autre augmentation du capital de La Poste.

L’État et la Caisse des dépôts et consignations pourront-ils ou voudront-ils y consentir ?

À moins que le fait de couper ainsi les vivres à La Poste après l’avoir transformée en société anonyme ne soit le moyen pour le Gouvernement de préparer les esprits à la présentation ultérieure d’un projet de loi ouvrant le capital de la Poste à des intérêts privés !

Je dirai un dernier mot concernant La Poste : le Gouvernement a cherché à convaincre l’opinion – sans grand succès, semble-t-il – que l’avenir du groupe La Poste passait par sa transformation d’établissement public à caractère industriel et commercial, EPIC, en société anonyme. La gauche sénatoriale a largement développé les raisons pour lesquelles cette transformation n’était pas nécessaire, ce qui explique qu’elle s’y soit opposée.

Le changement de statut a, malgré tout, été adopté par la majorité sénatoriale et, malheureusement, il le sera probablement par l’Assemblée nationale.

Dans cette logique – celle du Gouvernement –le projet de budget pour 2010 devrait intégrer les 1, 2 milliard d’euros que l’État s’est engagé à apporter à La Poste, devenue une société anonyme.

Or, dans le « bleu » budgétaire, il n’y a pas la moindre inscription de crédit liée au changement de statut. On ne trouve aucune indication sur les 1, 5 milliard d’euros que la CDC est censée apporter sur ses propres crédits.

J’en viens à la partie relative aux télécommunications et à la société de l’information. Dans ce budget, des crédits de fonctionnement sont prévus pour l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, ainsi que des crédits d’intervention pour l’attribution de subventions à divers organismes internationaux et associations accompagnant le développement des télécommunications et de la société de l’information.

À ma connaissance, aucun crédit n’est prévu pour achever la couverture du territoire en téléphonie mobile et renforcer la desserte en haut et très haut débit.

Certes, a été lancée en 2009 une nouvelle phase de couverture de 364 nouvelles communes situées en zone blanche, avec la répartition des financements entre, d’une part, les opérateurs et, d’autre part, les maîtres d’ouvrage – conseils généraux ou communautés de communes, le plus souvent – ces derniers subventionnés par l’Union européenne, l’État et la région.

En revanche, reste entière à ce jour la question de la couverture des zones grises, c’est-à-dire celles qui sont desservies seulement par un ou deux opérateurs. Alors que le Gouvernement s’apprête à attribuer une quatrième licence, il est absolument nécessaire de traiter en priorité la question des zones grises.

D’ailleurs, dans son avis intitulé « Conditions pour le développement numérique des territoires », de janvier 2009, le Conseil économique, social et environnemental souligne que « ces zones n’ont pas bénéficié des interventions publiques et, de ce fait, se trouvent actuellement dans une situation moins favorable que les anciennes zones blanches ».

Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement est-il prêt à se saisir enfin de cette question ? Va-t-il enfin aussi s’engager à un niveau important pour la desserte en haut et très haut débit et ne pas laisser aux seules collectivités locales, comme c’est le cas actuellement, la responsabilité de cette action d’aménagement du territoire ?

Pour les raisons que je viens d’évoquer, le groupe socialiste votera contre les crédits du programme 134 puisque l’État n’assume pas ses obligations à l’égard du groupe La Poste et n’exerce pas réellement ses missions d’aménagement du territoire dans le domaine des télécommunications.

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