Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour apprécier le budget du ministère de la culture, le rapporteur pour avis de la mission culture que je suis dispose d’une pierre de touche : ce budget permet-il de faire progresser l’accès du plus grand nombre à la culture, de développer en France la démocratisation de la connaissance, de la découverte ou, d’une certaine manière, la démocratisation de la beauté ? Il s’agit là, en tout cas et plus que jamais, d’une ardente obligation.
À l’aune de ce critère, le budget pour l’année 2010 est incontestablement un très bon budget et, en tant que rapporteur pour avis depuis maintenant dix-sept ans de ce budget, je puis vous assurer que je n’ai pas dit cela tous les ans, monsieur le ministre ! Ce budget est un bon budget tant pour le programme « Patrimoines » que pour le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».
Cinq remarques me permettront d’en faire la démonstration.
La première porte sur un domaine qui est depuis de nombreuses années très important pour le Sénat : il s’agit des crédits du patrimoine. L’effort, considérable, est dans la droite ligne de l’engagement pris à Nîmes par le président de la République puisque 419 millions d’euros sont affectés à ce programme.
La mission d’information chargée d’étudier l’entretien et la gestion du patrimoine architectural, présidée par Philippe Richert et dont j’étais rapporteur, avait conclu à l’époque que, pour être un bon budget, celui du patrimoine devait se situer dans une fourchette de 350 millions à 400 millions d’euros par an. Nos espérances ont été dépassées ; cela est suffisamment rare pour que je le souligne aujourd’hui à cette tribune.
Cet effort permettra de rattraper le retard que connaissent, depuis de nombreuses années, les grands chantiers du patrimoine. Il permettra également, je l’espère, de poursuivre l’effort entrepris pour améliorer l’état sanitaire du patrimoine.
Il faut simplement souhaiter, et je le fais avec beaucoup d’ardeur, que, dans les années futures, cet effort soit poursuivi. Il y va de l’intérêt du patrimoine, mais aussi de l’attractivité de la France et de l’emploi dans notre pays. Je rappelle en effet que près de 250 000 emplois directs sont générés par le patrimoine.
Un seul souci explique les amendements que la commission de la culture a déposés : l’article 52 élargit les conditions de transfert du patrimoine aux collectivités territoriales.
Une première vague avait permis de transférer soixante-cinq monuments : cinquante-six l’ont été définitivement et neuf sont en cours de transfert. Le résultat était incontestablement positif, car les collectivités avaient consenti un effort financier important et fait de ces monuments un véritable symbole de leur territoire.
Il n’en demeure pas moins qu’il faut préserver un équilibre fondamental entre la nécessité de soutenir l’effort que font ces collectivités et celle de protéger l’intégrité du patrimoine transféré. C’est la raison pour laquelle je présenterai tout à l’heure, au nom de notre commission, des amendements qui permettront d’encadrer les conditions dans lesquelles sera transféré ce patrimoine.
Ma deuxième remarque porte sur les musées, auxquels sont consacrés 441 millions d’euros. C’est aussi un aspect fondamental de la démocratisation de la culture. Il faudrait peut-être inscrire sur le fronton de chacun de nos musées la citation de Paul Valéry qui figure sur celui du musée de l’Homme : « Ami n’entre pas sans désir » !
C’est en développant l’accès aux musées, leur démocratisation, que l’on arrivera à en faire un élément essentiel de l’accès de tous à la connaissance.
Un an d’expérimentation de la gratuité pour les moins de vingt-six ans : voilà une expérimentation encourageante, qui devrait permettre d’aller dans ce sens ; c’est le souhait que j’exprime dans mon rapport.
Je vous remercie, monsieur le ministre d’avoir poursuivi l’effort qui est important et nécessaire pour soutenir les musées des collectivités territoriales en même temps que la rénovation des musées nationaux.
Ma troisième remarque a trait aux bibliothèques. Indépendamment de l’effort qui est fait pour aider les collectivités à les multiplier, nous sommes face à un défi : celui de la numérisation à laquelle, récemment, notre commission s’est longuement attachée. Comme la langue d’Ésope, la numérisation est la pire et la meilleure des choses ! Elle doit permettre de s’adapter aux moyens par lesquels les générations nouvelles accèdent aujourd’hui à la connaissance.
Là encore, il faut simplement raison garder et préserver un équilibre. En effet, l’ouverture du livre à l’informatique est une perspective enthousiasmante, mais encore faut-il protéger les droits d’auteur et éviter l’uniformisation de la connaissance à travers la numérisation.
Si vous me permettez une confidence, monsieur le ministre, en matière d’informatique, je suis croyant, mais non pratiquant !