Intervention de Michel Thiollière

Réunion du 27 novembre 2009 à 22h15
Loi de finances pour 2010 — Compte spécial : avances à l'audiovisuel public

Photo de Michel ThiollièreMichel Thiollière, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin d’année 2009, nous pouvons observer que le paysage audiovisuel a subi une profonde mutation. D’abord, parce que le choc des cultures s’est accéléré avec la mondialisation et la crise. Ensuite, parce qu’il y a une révolution technologique, la révolution du numérique. Enfin, parce que nous avons entrepris depuis quelques mois une action réformatrice profonde de l’audiovisuel, notamment avec la réforme de l’audiovisuel public, la gouvernance nouvelle de l’Audiovisuel extérieur de la France, la transposition de la directive « Services » de médias audiovisuels et bien sûr, on ne saurait l’oublier, les lois Hadopi I et Hadopi II.

Ce soir, j’ai le plaisir de vous annoncer que le projet de loi de finances pour 2010 conforte et soutient l’audiovisuel en maintenant un effort très élevé, en faveur de l’audiovisuel public notamment, avec une augmentation de plus de 2, 6 % des crédits par rapport à l’année dernière pour les organismes de l’audiovisuel public et de 6, 1 % pour l’audiovisuel extérieur, pour un montant total de 3, 848 milliards d’euros.

Grâce notamment à l’augmentation de la contribution à l’audiovisuel public, soutenue par la commission de la culture et le Sénat, l’étau budgétaire a ainsi en partie été desserré au service d’un développement harmonieux de l’audiovisuel public français.

Le groupe France Télévisions n’a jamais connu un financement aussi important, avec une dotation globale de 2, 55 milliards d’euros, en augmentation de 2, 4 % par rapport à 2009. Cette progression est conforme au contrat d’objectifs et de moyens et permettra au groupe de remplir ses principaux objectifs, et je vais les évoquer.

D’abord, il s’agit de la poursuite de ses investissements en faveur de la création, pour plus de 380 millions d’euros. En 2009, ce qu’on appelait le risque du guichet unique ne s’est pas réalisé : les commandes ont été nombreuses et le nombre de producteurs concernés ne semble pas avoir diminué, même si, à cause de la crise et de la restructuration de France Télévisions, nous devons rester vigilants et accentuer tous nos efforts en faveur de la création.

Ensuite, il s’agit de la réorganisation interne de France Télévisions, qui aura un coût mais elle devrait permettre au groupe, à moyen terme, de renforcer l’identité de ses différentes chaînes et de gagner en pouvoir de négociation vis-à-vis de ses interlocuteurs.

Enfin, il s’agit du maintien de ses ambitions en matière de diffusion de programmes culturels, notamment aux heures de grande écoute.

ARTE, dont nous apprécions tous le travail approfondi depuis de nombreuses années, notamment avec nos partenaires allemands, voit ses ressources augmenter de plus de 4 % pour atteindre 241, 9 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2010.

Cette dotation devrait lui permettre non seulement de poursuivre les objectifs assignés par le contrat d’objectifs et de moyens, mais également de faire face aux dépenses imprévues liées au coût de la diffusion en haute définition, ou HD, sur un canal plein et à sa participation au GIP France Télé numérique.

Notons toutefois que cette chaîne n’a pas pu remplir ses obligations en matière d’investissements dans les œuvres au cours de l’année 2009, en raison des surcoûts de diffusion qu’elle a subis. Il faut donc veiller, pour ARTE également, à assurer un financement suffisant à la création française.

La dotation allouée par le projet de loi de finances à Radio France s’élève, quant à elle, à 583, 9 millions d’euros, soit une progression de 4, 3 %.

Le défi culturel des prochaines années pour le groupe, c’est le renouvellement de son offre éditoriale et les évolutions liées au passage au numérique.

L’épreuve technique, c’est le chantier de réhabilitation de la Maison de la radio, projet lourd et complexe dont le coût financier n’a pas été évalué correctement au début des travaux.

Les moyens qui sont accordés au groupe en 2010 devraient lui permettre d’apporter des réponses satisfaisantes à ces deux enjeux.

L’Institut national de l’audiovisuel, l’INA, est également financé par la contribution à l’audiovisuel public à hauteur de 87, 2 millions d’euros en 2010, ce qui constitue une hausse de 1, 2 % de ses crédits par rapport à 2009, en parfaite conformité avec le contrat d’objectifs et de moyens négocié avec l’État.

Le budget de l’audiovisuel extérieur est, quant à lui, en progression de plus de 6 % dans le projet de loi de finances pour 2010 par rapport à la loi de finances de 2009. Le montant des crédits s’élève à 315 millions d’euros, dont 117, 5 millions sont issus de la contribution à l’audiovisuel public.

Je l’avais déjà dit l’an dernier, le financement de l’Audiovisuel extérieur de la France par la redevance me semblait contraire à l’esprit de cette taxe qui ne devrait financer que des organismes diffusant des programmes accessibles gratuitement aux Français redevables. Cette année, la part de la contribution à l’audiovisuel public dans le financement de l’AEF s’est encore accrue.

À moyen terme, monsieur le ministre, comment justifiez-vous le financement de plus en plus important de la société de l’audiovisuel extérieur par la contribution à l’audiovisuel public plutôt que par des crédits budgétaires ?

Je dois aussi parler rapidement du GIP France Télé numérique, qui ne sera pas financé par la contribution à l’audiovisuel public cette année, grâce à l’action de notre commission, mais par le budget général et la mission « Médias ».

Ce sont 40 millions d’euros qui sont budgétés pour que le GIP puisse mener à bien la campagne d’information nationale et les actions locales, ainsi que la gestion du fonds de soutien institué à l’article 102 de la loi de 1986.

Ce financement devrait être suffisant. Toutefois, les annonces du Premier ministre aux termes desquelles serait apporté un financement complémentaire pour les zones d’ombre sans condition de ressources n’ont pas encore été concrétisées. Sur ce point, monsieur le ministre, nous apprécierions de savoir comment seront prélevés les crédits permettant de tenir ces engagements.

Le soutien à l’expression radiophonique locale est enfin très important puisqu’il atteindrait 29 millions d’euros en 2010, soit une progression de 9, 5 % par rapport à 2009, afin de tenir compte de l’augmentation du nombre de radios associatives autorisées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, en modulation de fréquence et du soutien nécessaire au passage à la diffusion en mode numérique des radios associatives qui ont ou auront des autorisations en radio numérique terrestre le jour venu.

À cet égard, monsieur le ministre, combien de radios associatives le ministère subventionne-t-il avec les crédits inscrits sur le programme 312 ? Quel est votre sentiment sur l’augmentation régulière du nombre de ces radios ?

Avant de conclure, je ne peux pas ne pas évoquer la question de l’audiovisuel privé. Alors que les organismes de l’audiovisuel public, pour lesquels la ressource publicitaire représente une faible part de leur budget, sont dans une situation plutôt clémente, les chaînes privées souffrent d’une crise du marché publicitaire – ce point a déjà été évoqué dans cet hémicycle – au détriment de l’équilibre de notre paysage médiatique et de la création française, qui en a largement pâti en 2009.

Je proposerai donc en projet de loi de finances rectificative, ou PLFR, un amendement de modulation de la taxe que l’on a instituée il y a quelques mois, comme cela nous a été suggéré récemment par le ministre du budget.

Pour toutes ces raisons, notre commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à l’audiovisuel de la mission « Médias » et des crédits du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public ».

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