Intervention de Charles Gautier

Réunion du 9 janvier 2007 à 21h45
Prévention de la délinquance — Article 4 bis

Photo de Charles GautierCharles Gautier :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 4 bis fait obligation au procureur de la République d'informer les autorités mentionnées par l'article 40 du code de procédure pénale, dont le maire, de la teneur de la décision de justice ou, le cas échéant, de l'existence d'un appel, lorsque les faits dénoncés ou signalés par ces autorités ont donné lieu à un jugement. Or, vous vous en souvenez sûrement, nous avons déjà exprimé notre opposition à cet article, qui nous paraît inutile et inopportun.

D'ores et déjà, en vertu de l'article 40-2 du code de procédure pénale, le procureur de la République avise le maire des poursuites ou des mesures alternatives aux poursuites décidées à la suite de sa plainte ou du signalement. À notre sens, il convient donc de laisser le garde des sceaux adresser aux procureurs de la République une nouvelle circulaire, pour leur rappeler leurs devoirs s'ils ne les accomplissent pas comme ils devraient le faire.

Comme cela a déjà été dit, une telle disposition entraînera, de fait, une surcharge de travail pour les procureurs. Elle fait franchir un pas supplémentaire dans l'information du maire, en y intégrant la teneur même de la décision de justice. Mais, puisque la sanction est publique, qu'apportera de plus cette nouvelle mesure ? Si un appel a été interjeté, le procureur se limitera à l'indiquer au maire qui a signalé ou dénoncé les faits. La prévention aura-t-elle gagné en efficacité si le maire est placé en capacité de suivre le cours de la procédure pénale, alors qu'il peut déjà le faire ?

Nous l'avons précédemment dénoncé, voilà le type de dispositions qui entretient la défiance entre les acteurs publics actifs sur le terrain. Alors que le maire doit conserver son rôle de médiateur, cette mesure aura pour conséquence de l'intégrer aux yeux de ses administrés dans la chaîne répressive et, partant, de faire apparaître le concept de shérif ou de juge d'application des peines.

D'ailleurs, à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cette mesure, dont les motivations méritent d'être répétées ici : « [...] les suites [judiciaires] données au dossier de tout citoyen résidant dans une commune [...] ne regardent pas [nécessairement] le maire. [...]

« Il faut veiller à préserver le respect dû à tout homme, même condamné. Faire connaître à tout prix la situation de ces personnes ne change, au fond, pas grand-chose. Le fait que tout Français responsable dépositaire d'une parcelle d'autorité publique soit, en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale, tenu d'informer le Parquet d'un fait délictueux qui lui paraît justifier son intervention n'entraîne pas forcément le droit à réponse [qu'impose cet article]. »

Monsieur le ministre, mes chers collègues, tout est dit. Au nom de cet avis éclairé, nous vous proposons la suppression de cet article.

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