Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 19 octobre 2006 à 22h00
Secteur de l'énergie — Article 4

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

L'article 4, qui maintient les tarifs réglementés, constitue une bien faible parade devant l'envolée des prix de l'énergie, due à la déréglementation et aux logiques et pratiques auxquelles elle amène les entreprises.

Une étude de l'Observatoire international des coûts énergétiques, NUS Consulting, parue au 1er trimestre de cette année, souligne que l'écart se creuse entre les tarifs des marchés régulé et dérégulé, avec une différence atteignant 66 % au 1er avril dernier.

La marge à la hausse des prix libres est forte : si le prix du gaz naturel français était, en 2004, dans la moyenne des tarifs du G7, il était déjà 20 % plus cher en Espagne, 25 % aux Pays-Bas, 70 % au Portugal et 93 % au Danemark. C'est, d'une certaine manière, un hommage rendu à l'entreprise nationale et au service public !

L'étude de NUS Consulting souligne par ailleurs que ce sont principalement des PME et des PMI qui font les frais de l'envolée des prix, les grands groupes disposant des moyens de freiner les appétits des fournisseurs. Ce n'est donc pas un hasard si vous tentez de trouver des « pare-feux » en leur faveur, avec notamment cet article 4. À défaut d'être de grands actionnaires, ils sont peut-être parmi vos électeurs ! Vous ne proposez donc pas de suivre la Commission de régulation de l'énergie, qui avait recommandé, l'an dernier, la suppression des tarifs réglementés pour les entreprises, les professionnels et les collectivités territoriales.

Par ailleurs, NUS Consulting impute l'écart grandissant entre les prix des marchés régulé et dérégulé pour l'essentiel à la hausse des cours mondiaux du pétrole et du gaz, car, est-il précisé, les marchés libres de l'électricité y sont très sensibles.

Autrement dit, quand on nous parle de liberté, la liberté de choisir son fournisseur, n'est-ce pas, en réalité, celle de subir la constante hausse des prix, inhérente à la volatilité sur le marché spot ? N'est-ce pas la liberté de subir de plein fouet les conséquences de la déstabilisation d'un secteur aujourd'hui tout à fait viable et efficace dès le niveau de la production, avec un moindre recours aux contrats de long terme ?

Dans le domaine gazier, qui nous concerne ici au premier chef, les contrats de long terme sont en mesure de maintenir des tarifs réguliers, prévisibles. À l'inverse, le recours au marché spot fragilise ces contrats permettant une sécurité d'approvisionnement et une sécurité de l'amont de la filière, fragilisant ainsi une certaine stabilité des prix.

Une autre question se pose : la transparence des prix. Ces derniers mois ont montré combien il était facile d'augmenter rapidement les tarifs administrés vers les prix de marché, à partir du moment où leur fixation restait opaque et sans garantie. C'était d'ailleurs plus ou moins clairement prévu dans le contrat de Gaz de France. Cela confirme le bien-fondé de notre exigence qu'un bilan de la déréglementation soit établi avant toute décision qui ne serait que fuite en avant.

Je conclurai en rappelant que l'objectif de votre projet de loi restant bien de contenter avant tout les actionnaires, aucune de nos inquiétudes n'est levée et nous ne pouvons en aucun cas nous satisfaire du maintien des tarifs réglementés.

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