Intervention de Michèle André

Réunion du 19 mars 2009 à 15h00
Politique de lutte contre les violences faites aux femmes — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Michèle AndréMichèle André, présidente de la délégation aux droits des :

Quand aura lieu le prochain rendez-vous, madame la secrétaire d'État ? En 2010 ou en 2011 ? Le compteur repart-il à dater d’aujourd'hui ?

En complément de cette remarque, j’observe, plus globalement, que la loi du 4 avril 2006, bien loin de rejoindre l’assortiment déjà trop vaste de textes peu ou pas du tout appliqués, a enclenché une véritable dynamique. Deux indices en témoignent.

D’abord, du point de vue législatif, un an après le vote de cette loi du 4 avril 2006, une avancée complémentaire, également suggérée dans la proposition de loi de Roland Courteau, a été apportée par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.

Elle concerne le suivi socio-judicaire des auteurs de violences familiales élargi par l’article 222-48-1 du code pénal pour permettre au juge d’obliger à s’y soumettre non seulement le conjoint ou le concubin de la victime, ou le partenaire lié – lié ou non ; le médiateur vient de nous inciter à réfléchir sur le sujet – à celle-ci par un pacte civil de solidarité, mais aussi l’ancien conjoint, l’ancien concubin ou l’ancien partenaire lié à la victime par un PACS ainsi que, lorsque l’agression concerne un mineur de quinze ans, l’ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou toute autre personne ayant autorité sur la victime.

Corrélativement, il semble bien qu’aujourd’hui tous les magistrats – certains savaient déjà faire face à ces problématiques, mais avec un dispositif différent – aient trouvé dans ce texte des outils préventifs et répressifs.

Faut-il aller plus loin dans le perfectionnement du code pénal ? Le Gouvernement estime-t-il pertinent aujourd’hui, notamment sur la base de la pratique judiciaire qui a suivi l’adoption de cette loi, d’introduire une incrimination spécifique des violences habituelles, physiques ou psychologiques au sein du couple ? C’est la question de principe que nous vous posons, madame la secrétaire d’État. Il y a eu un long débat sur cette question !

Voilà trois ans, cette incrimination que nous préconisions dans notre proposition de loi avait suscité des objections. Ainsi, dans le rapport n° 228 de M. Henri de Richemont, établi au nom de la commission des lois, à laquelle j’appartenais à l’époque, il est précisé que « les violences au sein du couple apparaissent presque toujours comme des violences habituelles. », ou encore que cette incrimination risquait de soulever de réelles difficultés, en particulier quant aux « imputations de causalité », entre le fait générateur et le préjudice.

Les esprits ont-ils évolué sur ce point ? Je rappelle qu’un tel dispositif existe en Espagne. En France, la notion de violences habituelles figure d’ores et déjà dans le code pénal pour protéger les mineurs de quinze ans, sans que ce texte ait suscité, semble-t-il, des difficultés d’application insurmontables.

L’essentiel est de rappeler ici que certaines agressions légères et isolées sont difficilement punissables. Accepterons-nous de reconnaître et d’inscrire dans la loi que leur répétition peut, à la longue, rendre la vie de couple insupportable ?

Le Gouvernement peut-il nous faire part des réflexions du groupe de travail interministériel qui, si nous nous référons aux travaux actuels de l’Assemblée nationale, semble avoir été constitué sur ce thème le 2 juillet 2008 ?

J’en viens à des aspects plus pragmatiques, mais qui ont tout autant d’importance à nos yeux, sinon plus.

S’agissant tout d’abord de la mesure des phénomènes, madame la secrétaire d'État, n’ayons pas peur pour l’instant des chiffres qui explosent. L’effort de dénombrement des violences familiales est naturellement le bienvenu. Toutefois, pour nous, élus de terrain, je signale que l’embarras de l’Observatoire national de la délinquance pour interpréter la croissance verticale des violences faites aux femmes en 2007 – 47 500, soit 30 % de plus qu’en 2004 – a une dimension quelque peu irréelle.

En effet, à de très nombreuses reprises, la délégation a relayé les témoignages relatifs à la difficulté de faire enregistrer une plainte par la gendarmerie ou la police. Soyons réalistes ! Ce sont non pas les violences familiales qui ont augmenté de 30 %, du moins je l’espère, mais les faits enregistrés par la police ou la gendarmerie.

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