Intervention de François Patriat

Réunion du 20 janvier 2010 à 14h30
Motion référendaire sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales — Rejet d'une motion référendaire

Photo de François PatriatFrançois Patriat :

Hier, j’ai entendu notre collègue Éric Doligé dire : « Le conseiller territorial, j’en ai rêvé, le Gouvernement Fillon l’a fait. »

Je vais répondre à M. Doligé et à vous-même, monsieur le ministre, qui avez dit hier vouloir donner un surcroît de légitimité aux collectivités et aux régions. Pour ce faire, j’évoquerai des faits vécus au quotidien dans la collectivité que j’ai l’honneur de présider.

Monsieur Doligé, ne rêvez pas ! J’ai été conseiller territorial et, aujourd’hui encore, j’en fais des cauchemars ! En 1978, j’étais en même temps conseiller régional et délégué à l’établissement public régional, l’EPR. À la fois conseiller général et conseiller régional, j’étais alors un conseiller territorial qui s’ignorait !

Je me souviens comment, à l’époque, opéraient ces élus qui vivaient ce que vous voulez nous faire revivre aujourd’hui : la chasse aux crédits pour tel ou tel rond-point, pour tel ou tel gymnase, pour telle ou telle église de leur territoire, exercice qui ne leur laissait aucun loisir pour s’occuper de la stratégie régionale.

Si nous défendons aujourd’hui une motion référendaire, monsieur le ministre, c’est parce que nous avons le sentiment – je le dis pour en avoir été le témoin – de vivre la revanche de 1981.

Vous déclarez que la décentralisation est notre bien commun. Permettez-moi de vous le dire, elle est un peu plus le bien commun de la gauche qu’elle n’est le bien commun de la droite.

Je me souviens en 1981 d’avoir eu à ferrailler, sous l’autorité de Pierre Mauroy et de Gaston Defferre, contre MM. Longuet, Madelin, Toubon, Léotard et même contre Philippe Séguin. Pendant des semaines et des semaines, les uns et les autres nous ont dit que la décentralisation, c’était la fin de la France !

Je me souviens des inaugurations intervenues le même jour, le 12 juillet 1992, sous l’autorité de Jean-Pierre Sueur ici présent : celle de l’Office universitaire de recherche socialiste, l’OURS, de Bretagne et celle de la première communauté de communes de France. C’était dans le droit-fil de la loi d’administration territoriale de la République du 6 février 1992.

Mon sentiment, c’est que nous avons voulu, par ce mouvement que nous tenions à impulser, redonner au peuple le pouvoir qu’évoquaient certains de nos amis à cette tribune hier.

Pour ne pas dépasser mon temps de parole, monsieur le ministre, je m’en tiendrai à l’exemple des régions.

Vous voulez, dites-vous, redonner de la légitimité aux collectivités territoriales, et notamment aux régions.

Certes, pour ma part, je ne partage pas tout à fait le sentiment, que j’ai entendu certains exprimer ici, selon lequel demain telle ou telle collectivité va disparaître. Non, les collectivités ne disparaîtront pas, mais, mises à part la commune et l’intercommunalité, sur lesquelles le consensus est réel, toutes seront affaiblies ! Ni la région ni le département ne disparaîtront, dans les termes, c’est vrai, mais ils seront affaiblis.

Ainsi, monsieur le ministre, personne ne peut contester que les régions se verront affaiblies financièrement : avec un budget affecté, une dotation de l’État, une part de la contribution complémentaire dont le taux sera voté par le Parlement, elles seront privées de toute autonomie fiscale et financière.

Elles seront également affaiblies dans leurs compétences, car les blocs de compétences que viennent d’évoquer avec talent Edmond Hervé et Jean-Pierre Sueur vont les entraîner demain à refuser à leurs territoires certains soutiens non démagogiques qu’elles leur accordent aujourd'hui.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion