Séance en hémicycle du 20 janvier 2010 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • décentralisation
  • territorial
  • territoriaux

La séance

Source

La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

M. le président du Sénat a reçu de Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, en application de l’article D. 614-3 du code monétaire et financier, le rapport pour 2008 du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des finances et sera disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle l’examen de la motion (n° 206) de M. Jean-Pierre Bel, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de nos collègues tendant à proposer au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

La parole est à M. Jean-Pierre Bel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour nous tous, les premiers jours de janvier sont toujours l’occasion de rencontrer nombre de nos concitoyens. Pour ma part, je les ai sentis inquiets, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

... préoccupés par l’avenir, leur avenir, celui de leur famille, de leurs enfants : angoisse portant sur leurs conditions de vie, crainte face au retour massif du chômage, mais aussi peur de la précarité qui, malheureusement, obscurcit l’horizon de centaines de milliers de personnes qui n’ont plus droit à rien.

Dans ce contexte, vous avez choisi de consacrer plusieurs semaines, au Sénat, puis à l’Assemblée nationale, non pas aux souffrances dont je viens de parler, mais à la réforme de l’organisation territoriale de la France.

Bien sûr, il y a motif à aller plus loin sur ce sujet, à poursuivre la décentralisation, à adapter cette organisation aux nouvelles donnes d’un monde et d’une société qui bougent. Mais enfin, cette réforme territoriale est éminemment politique ; je dirais même qu’elle est, dans le vrai sens du terme, profondément « idéologique ».

Nous sommes nombreux à y voir un signe supplémentaire du démantèlement de l’État. Pour être plus précis, nous avons l’impression que l’État républicain s’efface derrière l’État manager. Nous avons bien compris aussi, compte tenu des cadeaux fiscaux que vous accordez aux Français les plus privilégiés, qu’il vous faut chercher de nouvelles marges de manœuvre : vous le faites en vous défaussant sur les collectivités locales.

Pour en revenir à la série de textes que vous nous proposez, j’observe que tous portent la marque d’une même volonté, d’un même objectif que je qualifierai presque d’obsessionnel : remettre en cause la décentralisation, le mouvement entamé par la gauche en 1982 avec François Mitterrand et Pierre Mauroy, ce qui a fait dire au même Pierre Mauroy que cette réforme « replongeait notre pays dans un passé révolu ».

Permettez-moi, au moment où l’on essaye de les désigner comme des boucs émissaires, de saluer les quelque 560 000 élus locaux, qui sont dans leur immense majorité des bénévoles et qui ne comptent pas leurs heures pour exercer un mandat conférant d’énormes responsabilités, sans bénéficier en contrepartie de véritables garanties. Oui, permettez-moi de les saluer, eux qui font vivre la démocratie dans notre pays et qui constituent de formidables leviers pour permettre à la France d’investir, d’innover et de se développer.

Nous affirmons, récusant ainsi tous les procès en conservatisme ou en immobilisme que l’on nous fait, que nous sommes pour la réforme ; nous faisons même des propositions très fortes et très précises, sur lesquelles le débat nous donnera l’occasion de revenir… Mais nous sommes partisans d’une réforme pour aller de l’avant, pas pour aller en arrière ! En tout cas, nous sommes clairement opposés à votre méthode, à votre mépris de l’écoute des élus locaux, de leurs associations, de leurs représentants parlementaires…

Vos projets sont incohérents ; ils suscitent la méfiance, voire la défiance, et remettent en cause tant de valeurs auxquelles les Français sont attachés que seul un référendum, et donc la consultation du peuple souverain, peut leur donner une légitimité.

Ils sont incohérents, tout d’abord, parce que vous avez voulu réformer la fiscalité locale avant même d’avoir clarifié les responsabilités de chaque échelon. La clause de rendez-vous de la réforme de la taxe professionnelle est, théoriquement, un ajustement. Mais si la clarification des compétences aboutit à des transferts de compétence, il faudra reprendre à zéro la réforme des finances locales.

Ils sont incohérents, ensuite, parce que le rapprochement des régions et des départements manifeste une profonde méconnaissance de la réalité locale, comme le juge avec pertinence le président de l’Association des régions de France.

Notre organisation territoriale repose fondamentalement sur deux niveaux. Le premier est celui de la stratégie. Il va de l’Europe à la région, en passant par l’État. La région est ainsi l’échelon de mise en œuvre des politiques stratégiques, économiques et de grands équipements, lancées et financées par l’État et l’Union européenne. Le second niveau est celui de la proximité. Il va du département à la commune, en passant par les intercommunalités. Le département est ainsi l’échelon de la solidarité sociale et territoriale, des politiques de proximité. Ce rapprochement illogique est bien le préalable à la fusion : nous savons tous que ce sera, inévitablement, l’étape suivante.

Vos projets sont incohérents, enfin, parce que la remise en ordre des compétences est renvoyée à plus tard. Alors que le rapport Balladur était intitulé Il est temps de décider, l’article 35 représente une capitulation devant la clarification des compétences : celle-ci est renvoyée à plus tard, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, c’est-à-dire pas avant la mi-2011 ; mais alors, l’élection présidentielle sera trop proche pour que l’on y procède.

Signes de dénégation au banc du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ce débat parlementaire reflétera, sans aucun doute, la crise de confiance qui oppose les élus locaux et ce gouvernement, une crise illustrée par le congrès des maires en novembre dernier et sur laquelle devraient s’exprimer fortement – tout au moins, je l’espère – des sénateurs de tous bords politiques.

Cette crise de confiance n’est pas nouvelle ; elle est latente depuis la décision prise en 2004 de ne pas compenser les transferts de compétence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Mais elle s’aggrave.

On peut comprendre les élus locaux : ils n’ont pas confiance dans la réforme de la taxe professionnelle et dans la compensation relais : on nous refait le coup de la compensation à l’euro près ! Le Gouvernement sait très bien que ce système est fragile, que ses conséquences sur les ressources des collectivités territoriales sont incertaines et que cette réforme ne s’attaque pas aux inégalités qui existent entre régions et entre départements.

Les élus locaux n’ont pas été entendus lors de la phase de préparation de la réforme.

Il est loin le temps où Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’intérieur, écrivait dans Le Monde du 26 mars 2009, dans un article intitulé Dialoguons pour réformer les collectivités, « une réformede cette ampleur conduit à la recherche duconsensus » et en appelait à la « concertation » !

Le Sénat a-t-il été lui-même entendu ? On peut en douter. Il a constitué une mission d’information pluraliste, qui a rendu un rapport le 17 juin 2009.

Que disait ce rapport, qui a fait l’objet d’un large consensus et était cosigné par M. Krattinger, socialiste, Mme Gourault, centriste, et M. Belot, de l’UMP ? Oui au renforcement de la coordination des exécutifs locaux au niveau régional et départemental, mais non au conseiller territorial ; oui au renforcement du chef de file des différentes collectivités territoriales, mais non à la remise en cause de la clause générale de compétence ; oui au renforcement de l’autonomie fiscale et à l’amélioration de la péréquation.

Pourtant, dès le débat du 30 juin 2009 au Sénat, en écho aux propos tenus par le chef de l’État devant le Congrès, vous annonciez, monsieur le ministre de l’intérieur, la création du conseiller territorial, la remise en cause de la clause générale de compétence…

Quant à la réforme de la taxe professionnelle, elle est loin d’avoir satisfait aux « exigences » du Sénat, y compris à celles des « sénateurs dissidents » de la majorité, qui sont rapidement rentrés dans le rang.

Je suis d’ailleurs curieux d’entendre, à ce propos, la position du ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire qui, lorsqu’il était sénateur, se disait « opposé au rapprochement des conseillers généraux et des conseillers régionaux », car il considérait que « le couple département-région n’était pas un couple pertinent, contrairement au couple département-commune », comme le révèle le rapport Belot !

Bref, il n’y a eu aucune prise en compte des propositions sénatoriales. Il n’est donc pas étonnant que les élus locaux, et de nombreux sénateurs, se méfient et se défient de cette réforme.

Par son importance, parce qu’elle met en cause des éléments fondamentaux de notre pacte républicain en portant atteinte à des principes constitutionnels, la réforme territoriale justifie, selon nous, le recours au référendum. Or vous repoussez le référendum…

Nous connaissons votre réticence à l’égard de la disposition qui, dans la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, a institué une procédure de référendum mélangeant l’initiative parlementaire et le soutien populaire. Nous attendons toujours la loi organique qui permettrait de l’appliquer…

Ce sont des questions de principe qui motivent ce recours au référendum, car le présent projet de loi pose une série de questions fondamentales, constitutionnelles et politiques, que seul le peuple souverain doit trancher. Le recours au référendum constitue une obligation constitutionnelle pour au moins cinq motifs.

Tout d’abord, nous considérons que les Français doivent se prononcer sur la poursuite ou l’arrêt du processus de décentralisation.

Alors que l’article 1er de la Constitution prescrit que l’organisation de la France est décentralisée, la politique conduite depuis 2007 à l’égard des collectivités locales se traduit par une recentralisation, comme en témoigne la suppression de la taxe professionnelle ou le projet de rapprochement des départements et des régions, malgré l’hostilité des associations d’élus locaux directement concernés.

Le « modèle » que le présent projet de loi s’apprête à imposer à notre pays est, en réalité, une concentration des pouvoirs : le chef de l’État détiendra tous les pouvoirs, notamment pour orienter les dépenses des collectivités locales et canaliser ainsi les investissements nécessaires à l’avenir de la France, de ses territoires et à l’activité de ses entreprises.

Cette tentation récurrente de la droite jacobine avait été dénoncée au mois de juin 2000, une fois encore par Michel Mercier.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

À l’époque, Michel Mercier précisait : « Forcé de s’adapter aux réalités de la mondialisation dans un cadre européen plus contraignant, l’État est tenté de faire des collectivités locales les instruments de ses politiques. Il cède trop souvent à la tentation récurrente de la recentralisation ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Recentralisation, disiez-vous, monsieur le ministre ? Ce constat est plus que jamais d’actualité !

Dans le texte qui nous est soumis, je prendrai pour seul exemple la rationalisation de l’intercommunalité, bien sûr nécessaire, voire indispensable. Mais pourquoi confier au préfet un pouvoir de contrainte exceptionnel ? C’est contraire à la notion même du principe, de valeur constitutionnelle, de décentralisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Bref, les Français doivent pouvoir se prononcer directement sur la recentralisation ou sur la poursuite de la décentralisation.

Le deuxième motif du recours au référendum tient à la fusion programmée des départements et des régions. Alors que l’article 72 de la Constitution prévoit que les collectivités territoriales « s’administrent librement par des conseils élus », et donc que chaque collectivité doit disposer d’une assemblée délibérante qui lui est propre, le projet de loi organise la fusion des conseils généraux et des conseils régionaux.

En effet, c’est bien cet enjeu qui est en cause : dans son ouvrage La France peut supporter la vérité, publié en 2006, François Fillon estimait que le conseiller territorial est le préalable à la fusion entre départements et régions. Selon lui, le conseiller territorial « aurait assuré la coordination des politiques de ces deux échelons en attendant leur fusion ». Il regrettait que cette proposition de l’UMP n’ait pas été reprise par Jacques Chirac en 2002. Aujourd'hui Premier ministre, il réalise enfin son projet ! C’est également la fusion entre les deux administrations, que M. Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, a appelée de ses vœux lors du débat avec François Hollande.

Avec le conseiller territorial, chaque niveau perdra sa spécificité : impulsion et coordination pour la région, proximité pour le département. L’un deviendra une simple structure d’accompagnement des politiques nationales ; l’autre préparera sa suppression programmée.

Je note en passant que ce conseiller territorial organise le cumul des mandats obligatoires – ce point a déjà été relevé –, alors que la démocratie locale a besoin d’une respiration, qui pourrait résulter d’une nouvelle étape dans la limitation du cumul des mandats. La réforme a créé un conflit d’intérêt permanent : si ce projet de loi est adopté, chaque élection fera l’amalgame de bilans et de projets contradictoires.

Les Français doivent pouvoir se prononcer directement sur la pérennité des départements et des régions ou sur leur fusion programmée.

Le troisième motif du recours au référendum est de permettre aux Français de se prononcer directement sur le principe de l’organisation territoriale française.

Alors que l’article 72 de la Constitution précise que « les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon », le projet de loi envisage de supprimer la clause générale de compétence, donc de priver les départements et les régions de la seule solution qui permet d’appliquer des politiques différenciées dans des territoires ayant des problématiques différentes.

Les Français doivent pouvoir se prononcer directement pour savoir si les collectivités locales doivent être cantonnées dans des compétences décidées par l’État ou s’il convient de maintenir leur compétence générale, afin notamment de répondre aux attentes des usagers des services publics locaux.

Le quatrième principe, et non des moindres, remis en cause par la réforme que nous soumet le Gouvernement est celui de la parité.

Alors que l’article 1er de la Constitution oblige la loi à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux, le projet de loi procède à une régression de la place des femmes au sein des futurs conseils territoriaux, compte tenu du recul du scrutin proportionnel.

En effet, selon le nouveau mode de scrutin proposé, 80 % des conseillers territoriaux seraient élus au scrutin uninominal à un tour dans le cadre des cantons – soit 2 400 élus –, les 20 % restants le seraient sur des listes paritaires départementales – soit 600 élus –, selon une organisation de report des voix parfaitement incompréhensible pour l’électrice ou l’électeur, fût-il des plus avertis.

Si l’on opère une projection des résultats des dernières élections régionales et cantonales avec ce nouveau dispositif, on peut raisonnablement s’attendre à compter, sur l’ensemble des conseillers territoriaux élus en 2014, 19, 3 % de femmes et 80, 77 % d’hommes !

Huées sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

De même, pour 3 000 conseillers territoriaux attendus, on peut effectuer la projection chiffrée suivante : 579 d’entre eux seraient des femmes – contre 1 381 aujourd’hui –, dont 285 élues au scrutin de liste à la représentation proportionnelle et 294 élues au scrutin uninominal, et 2 421 seraient des hommes – contre 4 462 aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ainsi, dans le processus de fusion des régions et des départements et de réduction du nombre des conseillers territoriaux, les femmes, qui verront leur effectif diminuer de 58 %, sont les grandes perdantes. Le présent projet de loi, au lieu de favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives, organise tranquillement et obscurément le recul de la parité. Au retour à la situation d’avant 1982, autrement dit avant la décentralisation, vous ajoutez un retour à la situation d’avant 1999, date à laquelle la parité a été inscrite dans la Constitution.

Les Françaises et les Français doivent pouvoir se prononcer directement sur le maintien, ou non, d’un mode de scrutin qui favorise la parité.

Enfin, le cinquième motif justifiant le recours au référendum est de permettre de valider, ou non, une « manipulation électorale » au profit exclusif de l’UMP, parti majoritaire.

Alors que l’élection, c’est-à-dire la désignation d’une femme ou d’un homme par le suffrage des citoyens, constitue un principe constitutionnel fondamental de la République, le projet de loi instaure un mode de scrutin dans lequel une partie des conseillers territoriaux élus à la proportionnelle le sera grâce aux suffrages obtenus par les candidats qui n’ont pas été élus au mandat de conseiller territorial mais qui se sont rattachés à une liste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Le mode de scrutin est d’une telle complexité qu’il a été récusé par le Conseil d’État en ces termes, dans une note du 15 octobre 2009 :…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

…« En rendant très difficile pour l’électeur, dont le choix est lié entre un candidat au scrutin uninominal et une liste au scrutin proportionnel, de prévoir si sa voix sera utilisée au profit du candidat ou de la liste, le dispositif envisagé est de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Pour ces motifs, le Conseil d’État a considéré que le dispositif proposé « était de nature à porter atteinte à l’égalité comme à la sincérité du suffrage compte tenu des modalités complexes de la combinaison opérée entre le scrutin majoritaire et le scrutin proportionnel dans le cadre d’un scrutin à bulletin unique ». Mieux encore, il a estimé que ce mode de scrutin pourrait permettre qu’« une liste ayant recueilli au niveau régional moins de voix qu’une autre puisse néanmoins obtenir plus de sièges qu’elle ».

Bilan politique de ce scrutin illisible, incompréhensible et injuste : il n’obtient pas de majorité au Sénat, si j’en crois les propos mêmes du président de la Haute Assemblée, Gérard Larcher !

C’est la raison pour laquelle nous considérons que les Français doivent pouvoir se prononcer directement sur le maintien, ou non, du principe républicain selon lequel un candidat est élu s’il a bénéficié du plus grand nombre de suffrages exprimés sur son nom.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Je conclus, madame la présidente.

Nous n’avons pas peur du référendum : il peut se révéler utile, combiné à la démocratie parlementaire.

Le débat que nous aurons lors de la première lecture du présent projet de loi doit pouvoir éclairer utilement les Français sur les enjeux de cette réforme territoriale. C’est la raison pour laquelle nous proposons, par le dépôt de la motion que nous examinons, de les consulter par référendum.

Le sujet est complexe, mais il faut que cette consultation aille à l’essentiel et s’articule sur une question simple autour de grands choix. Voulez-vous la poursuite de la décentralisation, son approfondissement ou la recentralisation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Voulez-vous étendre le cumul des mandats en le rendant obligatoire aux échelons départemental et régional ? Souhaitez-vous le recul de la parité au niveau local ? Voulez-vous la suppression du département ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

On le voit bien : la réforme territoriale proposée modifierait en profondeur l’organisation des pouvoirs publics. Elle porte la volonté de réduction d’un contre-pouvoir important, celui des collectivités locales, et de remise en cause des services publics au niveau décentralisé. Elle entraînerait un bouleversement d’une organisation façonnée par l’histoire et la pratique, où les mots « décentralisation », « libertés et démocratie locales » seraient remplacés par « centralisation », « négation de la libre administration », « recul de la démocratie et des solidarités locales ».

J’espère vous avoir convaincus, mes chers collègues, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. …de voter la motion référendaire pour soumettre au verdict suprême des Français un débat qui touche à des aspects fondamentaux de notre République.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vais essayer d’être plus concis que mon collègue, qui a dépassé son temps de parole, afin de rattraper le temps perdu.

Applaudissementssur les travées de l’UMP. –Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Nouveaux applaudissementssur les travées de l’UMP. –Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

En application de l’article 11 de la Constitution, nos collègues signataires de la motion demandent que soit soumis au référendum le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, non pas le projet de loi initial n° 60, mais le texte n° 170, résultant des travaux de la commission des lois, ce qui constitue une originalité. C’est ce qui est écrit dans le texte de la motion !

Vous invoquez cinq motifs et voulez poser autant de questions au référendum.

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Brouhaha sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Chers collègues, je peux, tout de suite et tout simplement, dire que je suis opposé à cette motion, cela nous fera gagner du temps…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mes chers collègues, laissez parler l’orateur ! N’engagez pas de dialogue !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Vous évoquez donc la recentralisation à laquelle aboutirait la politique conduite à l’égard des collectivités locales, la création des conseillers territoriaux, qui, pour vous, programme la fusion des départements et des régions, la suppression envisagée de la clause générale de compétence, le recul de la parité, enfin le mode de scrutin mixte retenu par le projet de loi n° 61, dont vous ne demandez pas, je le répète, qu’il soit soumis au référendum.

La réforme qui nous est présentée est pragmatique. Depuis hier soir, j’entends parler de « recentralisation ». Mais de quoi s’agit-il ici ? Tout simplement d’ajustements nécessités par la décentralisation qui a été instituée en 1982 et modifiée, depuis lors, à plusieurs reprises.

J’observe d'ailleurs que, à une seule exception près, mais qui est bien antérieure à 1981, aucun texte relatif à la décentralisation n’a jamais été soumis au référendum !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Ce projet de loi tend à opérer une réorganisation qui ne remet pas en cause les principes fondamentaux des réformes qui l’ont précédé.

Les préfets voient leur rôle renforcé, mais temporairement, pour achever et rationnaliser la carte de l’intercommunalité

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Certains critiquent l’intervention des préfets. Pardonnez-moi, chers collègues de l’opposition, mais si ceux-ci n’avaient pas été là depuis 1982, notamment pour mettre en place l’intercommunalité, les égoïsmes de certaines collectivités n’auraient pas permis d’avancer !

Mme Anne-Marie Escoffier applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

D'ailleurs, et avec votre accord, la commission des lois a mieux encadré les pouvoirs du représentant de l’État.

Le projet de loi n’implique pas la disparition à terme des départements et des régions. Je ne vois pas où ce point apparaîtrait dans les textes !

La création du conseiller territorial ne constitue pas une fusion programmée des départements avec les régions. Elle maintient deux assemblées délibérantes distinctes ; départements et régions demeureront administrés par des conseils élus séparés, et la spécificité de chaque échelon sera respectée.

Au contraire de ce que vous affirmez, chers collègues de l’opposition, le conseiller territorial favorisera la coordination des politiques menées par ces collectivités. D'ailleurs, M. Bel a très bien expliqué quelles missions devaient revenir à la région, qui ne s’occupe pas de proximité, ou au département. Il a aussi souligné la nécessité d’harmoniser les compétences de ces deux échelons de collectivités.

J’en viens à la suppression de la clause générale de compétence.

Tout d'abord, cette réforme doit être comprise non pas négativement, mais positivement.

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La gestion décentralisée implique que les collectivités territoriales soient dotées d’attributions effectives et exclusives. C’est déjà le cas, je le rappelle, quand une commune confie à l’intercommunalité une compétence, qui devient alors exclusive pour l’intercommunalité.

L’article 35 du projet de loi préserve ce principe et prévoit que les collectivités pourront prendre l’initiative dans les cas qui ne sont pas envisagés par la loi.

J’en viens au prétendu recul de la parité.

Certes, le mode de scrutin retenu par le projet de loi n° 61 entraînerait probablement une diminution sensible du nombre des femmes présentes dans les conseils généraux et pourrait ainsi remettre en cause les acquis de la parité.

Toutefois, la commission des lois a adopté ce matin un amendement dont les dispositions, à l’évidence, serviront de guide pour le futur scrutin. Nous aurons à traiter de la parité lors de l’examen du projet de loi n°61, sous le contrôle du Conseil constitutionnel – j’y insiste –, et nous pourrons alors opérer les modifications nécessaires, me semble-t-il.

Nous sommes à l’aube de la discussion parlementaire des différents projets de loi concourant à la réforme territoriale, qui a déjà fait l’objet de nombreuses réunions organisées à travers toute la France.

Hélas, si nos concitoyens sont informés, ils sont aussi parfois désinformés, à cause de la propagande gigantesque organisée par certains conseils généraux

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. … avec les fonds publics, avec l’argent des contribuables

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste. – Applaudissementssur les travées du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Povinelli

C’est faux ! Et vous n’avez pas le droit, à la tribune du Sénat, de proférer de tels mensonges… (M. Roland Povinelli saisit le microphone et essaie de prendre la parole ; sa voix est couverte par les protestations venant des travées de l’UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Povinelli

Je ne peux pas laisser dire cela, c’est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mon cher collègue, vous aurez la parole quand vous l’aurez demandée, mais, pour le moment, vous ne l’avez pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Povinelli

M. Roland Povinelli. Chers collègues de la majorité, vous êtes des godillots !

C’est vrai ! sur les travées du groupe socialiste. – « Vous aussi ! » scandent les sénateurs de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Veuillez poursuivre, monsieur le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. À l’évidence, certaines vérités fâchent nos collègues de l’opposition, mais elles n’en existent pas moins !

Applaudissementssur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La commission des lois a déjà profondément modifié le texte qui nous a été soumis, et le Sénat votera certainement d’autres amendements.

D'ailleurs, mes chers collègues, nos débats et nos échanges, quelle que soit notre sensibilité politique, ont été jusqu’ici de qualité, notamment en ce qui concerne l’intercommunalité et les métropoles. Nous devons continuer à faire notre travail, car c’est au Parlement qu’il appartient de traiter de questions aussi complexes.

C’est pourquoi il semble aujourd’hui prématuré d’interrompre le débat parlementaire pour renvoyer au référendum un projet de loi encore perfectible. De grâce, laissons le législateur exercer sa compétence, et la navette se poursuivre !

En outre, reconnaissons-le, pour pouvoir se prononcer en parfaite connaissance de cause, les Français doivent être pleinement informés, et non pas trompés par des caricatures !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

En effet, on lit dans certains documents que les services publics vont disparaître, tandis que des courriers sont envoyés à toutes les associations pour leur annoncer que, à cause de cette réforme, elles ne recevront plus de subventions !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais, bien entendu, il ne s'agit pas là de propagande…

Souriressur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La question soumise au référendum doit être simple et nette, ce qui n’est manifestement pas le cas ici – cela ressort même des propos de M. Bel –, car il s'agit d’un projet forcément très technique, qui aborde différentes questions et dont les conséquences et les articulations ne peuvent être appréhendées, me semble-t-il, que par le Parlement.

C’est pourquoi, mes chers collègues, au nom de la commission des lois, je vous propose de rejeter cette motion référendaire.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, comme Jean-Pierre Bel, je m’en tiendrai au principal, car c’est cela qui doit gouverner la forme.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Demander à nos concitoyens de se prononcer sur un sujet essentiel et prospectif constitue une preuve de respect, un acte de mobilisation et une marque de confiance. C’est aussi, pour le thème qui retient aujourd'hui notre attention, l’affirmation d’une foi en l’avenir.

Avant tout, notre proposition entre-t-elle dans le champ référendaire ? Oui ! Et cela pour trois raisons de droit, que je voudrais rapidement énumérer devant vous.

Premièrement, ce texte concerne bien l’organisation des pouvoirs publics, dont nos collectivités territoriales et leurs établissements sont parties prenantes. En effet, que seraient les pouvoirs législatifs, exécutif et réglementaire, ainsi que l’autorité judiciaire, sans les collectivités territoriales ?

Ce projet de loi touchant à leur existence même, à leurs compétences, à leurs rapports entre elles, à leurs relations avec l’État, et même, à cause de cette invention contradictoire et perfide du conseiller territorial, à l’élection de leurs assemblées délibérantes, vous voyez, mes chers collègues, que nous sommes au cœur de l’organisation des pouvoirs publics.

Les travaux qui ont précédé les débats de notre assemblée, ainsi que la discussion générale ouverte hier, ont montré clairement que nous nourrissions des conceptions différentes sur cette question, et c’est cette différence qui légitime l’appel au peuple.

En effet, le processus qui a été engagé en 1981 est bien remis en cause. Vous allez même, chers collègues de la majorité, jusqu’à rompre une tradition législative inaugurée par une grande loi, la « charte communale » de 1884, qui consistait à retenir, pour chaque collectivité, …

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

… une généralité de compétence, justifiée par la notion d’intérêt local.

Monsieur le président de la commission des lois, tous les grands textes intéressant la région, le département, la commune, ont suivi ce processus méthodologique que vous remettez en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Deuxièmement, ce projet a bien trait aux services publics.

Personne ne peut contester la part que nos collectivités territoriales prennent dans le domaine des services publics ; ceux-ci, par leur nature, leur nombre et leurs modalités jouent un rôle déterminant, qu’ils soient administratifs, industriels ou commerciaux, publics ou privés, portés ou non par d’autres organismes.

Suivant la façon dont les collectivités seront organisées et les moyens ou compétences dont elles disposeront, l’existence de ces services différera, tout comme la consistance des principes, que vous connaissez bien, mes chers collègues, principes de continuité, d’égalité, de neutralité, d’adaptabilité, de qualité, de transparence et de protection du consommateur.

Messieurs les ministres, chers collègues de la majorité, prisonniers d’une politique fiscale injuste et, par voie de conséquence, d’un déficit public qui bat tous les records, vous choisissez comme unique salut la diminution systématique de la dépense publique, sans vous préoccuper de ce qui se passera ensuite.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Vous appliquez cet impératif aux collectivités territoriales, en cherchant à diminuer le nombre de leurs échelons. Vous avez constaté qu’il n'existait pas de majorité pour supprimer le département, mais d’autres voies y mènent : enserrer les compétences de la région et du département, limiter l’autonomie financière des collectivités, à travers bien sûr la suppression de la taxe professionnelle, enfin réduire la dépense liée aux élus, en divisant par deux le nombre des conseillers généraux et régionaux.

Le résultat ne se fera pas attendre : les services à la population en feront les frais et la contribution fiscale et financière des ménages augmentera, ce phénomène étant rendu encore plus injuste par une fiscalité locale qui ne tient absolument pas compte du revenu des personnes.

Troisièmement, ce projet de texte concerne bien la politique économique, sociale et environnementale de la Nation.

Je prendrai tout d'abord l’exemple de la politique économique. Nous le savons, les trois quarts des investissements publics civils sont réalisés par les collectivités territoriales.

Mes chers collègues, messieurs les ministres, qu’aurait été le plan de relance si les collectivités territoriales, quelle que soit la sensibilité politique de leurs responsables, ne s’y étaient pas impliquées ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Que seraient l’insertion, la formation, le bâtiment, le logement sans les collectivités ? Des pans entiers de notre industrie dépendent de l’activité de ces dernières, notamment dans les domaines du transport, des travaux publics, de l’environnement, de la maîtrise de l’énergie, des communications.

J’en viens à la politique sociale.

Les départements en sont les chefs de file, mais je n’oublie pas les centres communaux d’action sociale. Le RSA n’aurait pas existé sans le RMI, et celui-ci n’aurait pas été créé par le Parlement si des collectivités territoriales, telles que les communes de Besançon et de Rennes, ne s’étaient emparées de ce dossier, bien avant que le législateur n’intervienne !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Enfin, en matière de politique environnementale, nos collectivités territoriales interviennent dans de très nombreux domaines, que vous connaissez bien, mes chers collègues. Ce sont elles qui sont aux avant-postes pour mettre en place les dispositions des différents Grenelles de l’environnement et répondre aux attentes nées du sommet de Copenhague.

La décentralisation nous a permis de réaliser des avancées importantes au cours des trente dernières années. Regrettons avec Jean-Pierre Raffarin qu’un bilan n’ait pas été établi ! Nous voulons poursuivre cette dynamique, au nom même des principes constitutionnels que nous nous sommes donnés.

C’est d’ailleurs parce que nous souhaitons que certains de ces principes soient respectés que nous proposons cette motion référendaire.

Je pense tout d’abord au principe de décentralisation. Qu’est la décentralisation sinon, dans le cadre de l’État, garant du pacte républicain et social, la recherche de la meilleure utilisation des ressources et des compétences pour répondre au mieux aux attentes ? Mes chers collègues, imaginez ce que serait l’université française aujourd'hui, si elle n’avait pas bénéficié des nombreuses décisions permises par la décentralisation, des contrats de plan État-région et du plan Université 2000 ? Il n’est qu’à le constater dans chacune de vos villes !

La décentralisation est la voie incontournable de la modernisation de nos structures et de nos procédures. Elle permet l’approfondissement de la démocratie, une plus grande démocratisation, une extension de la responsabilité.

Je pense aussi au principe de parité, comme à celui de libre administration.

Je pense encore au principe de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.

À ce titre, messieurs les ministres, je ne comprends pas les raisons qui vous poussent à vouloir enserrer les compétences de la région et du département. Au nom d’une économie essentiellement arithmétique, vous souhaitez les enfermer dans des blocs de compétences séparés par des cloisons étanches. Ce faisant, vous réinstituez le principe de la tutelle, vous empêchez la contractualisation entre les différentes collectivités locales et l’État. En définitive, vous tournez le dos à ce qu’est la décentralisation. Nous ne sommes plus au temps de la décentralisation transfert de compétences et de décisions : nous sommes au temps…

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

M. Edmond Hervé. … de la décentralisation de projets.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Je pense à la sécurité, à la défense nationale, aux relations internationales.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

L’examen de cette motion référendaire est aussi l’occasion de récuser certaines fausses vérités.

Nos régions ne seraient pas à la hauteur ?

Debut de section - Permalien
Une sénatrice du groupe socialiste

Une sénatrice du groupe socialiste. Surtout celles de gauche !

Rires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Or, que ce soit en raison de l’importance de leur population ou de la taille de leur territoire, elles ont des capacités analogues à celles d’autres régions européennes. Ce qui leur manque, ce sont les compétences et les capacités budgétaires.

Notre système institutionnel serait illisible ? Mes chers collègues, croyez-vous que l’article 2 de la loi de finances pour 2010 relatif à la suppression de la taxe professionnelle, qui compte 136 pages, le soit ?

Très bien ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Marques d’ironie sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Nous avons le devoir de nous intéresser à ce qui est important pour notre pays et d’en saisir nos compatriotes, donnant un véritable sens à la politique.

C’est pourquoi un grand débat doit avoir lieu.

Je veux saluer celles et ceux qui ont été les promoteurs de la décentralisation, en particulier Pierre Mauroy.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Mettons ces outils à profit au bénéfice de nos compatriotes et montrons-leur le véritable sens de la politique.

La décentralisation a été une belle réussite. À nous d’en faire un grand projet porté par la nation !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette motion référendaire présentée par le groupe socialiste est au cœur de nos discussions : il n’est qu’à voir la mobilisation et l’attention qu’elle suscite dans cet hémicycle.

Sur ce sujet, le groupe RDSE se trouve divisé. Si tous les membres de mon groupe s’opposent au projet de loi qui nous est soumis, certains estiment que le cœur de métier de la Haute Assemblée est de s’occuper de ce problème de la réforme des collectivités territoriales. Même si je ne partage pas cette opinion, je la comprends.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

M. François Fortassin. De plus, ils considèrent qu’un texte touffu, pour ne pas dire confus, pourrait être mal compris par nos concitoyens.

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Pour ma part, je voterai cette motion référendaire.

En effet, par certains côtés, ce projet de loi portant réforme des collectivités territoriales s’apparente à un déni de démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Et, lorsqu’il y a déni de démocratie, seul le peuple, souverain, est en droit de trancher.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Par ailleurs, ce texte crée une fragilité constitutionnelle, pour ne pas dire plus.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Dans la mesure où ce texte provoque une confusion entre le mandat de conseiller régional et celui de conseiller général, nos concitoyens, qu’ils soient simples électeurs ou candidats à l’une de ces fonctions, n’auront plus la possibilité de choisir.

On peut très bien imaginer qu’un citoyen – que ce soit de sa propre initiative ou parce qu’il a été désigné par la formation politique à laquelle il appartient – souhaite devenir conseiller général ou conseiller régional. S’il veut dans le même temps continuer à exercer sa profession, ne serait-ce que pour rester en contact avec un certain nombre de réalités, il ne pourra à l’évidence siéger dans les deux assemblées, même si les électeurs lui en donnent l’opportunité. Il s’agit donc, à l’évidence, d’une fragilité.

Par ailleurs, dans une certaine mesure, qu’on le veuille ou non, le Parlement est bafoué.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

C’est pour cela qu’on cherche à lui retirer en plus le soin de légiférer !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Nous sommes nombreux à avoir salué l’excellent travail réalisé par la mission Belot et par les rapporteurs Yves Krattinger et Jacqueline Gourault.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Toutefois, ils ont vu, lors de leur dernière réunion, tel un sanglier sortant du maquis, surgir le conseiller territorial. Jusque-là, il n’en avait jamais été question.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Cela s’apparente à un mauvais coup ! Tout laisse accroire qu’il ne fallait surtout pas révéler trop tôt l’existence de ce nouvel élu mais qu’il était préférable d’attendre le dernier moment !

Enfin, le mode d’élection de ce nouveau conseiller territorial n’est pas sans poser de problèmes. Je rappelle que les élections à un tour sont contraires aux usages de notre République !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

M. François Fortassin. Et la situation confine à l’insolite, au cocasse, au burlesque – pour ne pas dire à l’ubuesque – lorsque l’on prend conscience qu’un conseiller territorial élu à la proportionnelle pourra, sans avoir jamais vu la tête, la jupe ou même la vareuse d’une électrice ou d’un électeur, devenir président de conseil général ou de conseil régional, alors qu’aucun électeur ne se sera prononcé sur son nom !

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

De plus, qu’on le veuille ou non, il y aura recul de la parité.

Nouvelles marques d’approbation sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Certes, d’aucuns pourraient m’opposer que l’élection à la proportionnelle dans les communes de plus de 500 habitants suffira à assurer la parité. Il n’en reste pas moins qu’être conseiller régional ou conseiller général et élu d’une commune de plus de 500 habitants ce n’est pas la même chose ; il y aura donc en quelque sorte une parité à deux vitesses.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Excusez-moi, mesdames ! Au demeurant, chacun connaît empathie toute particulière que j’ai vis-à-vis du sexe féminin ; personne ne me fera donc grief.

Rires

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Enfin, et en développant ce dernier argument, je cours le risque de recueillir quelques sarcasmes bienveillants, je soutiens que les membres de l’UMP devraient être les premiers à voter cette motion référendaire.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Oui, c’est évident. C’est même le bon sens !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

La plupart d’entre eux – et c’est bien légitime – se réclament du général de Gaulle. Or, en 1969, sur la réforme des régions et la transformation du Sénat, celui-ci n’a pas hésité à engager sa responsabilité face au peuple.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

M. François Fortassin. Messieurs les ministres, si, comme vous le prétendez, vous jugez que cette réforme est excellente – et nous n’avons aucune raison de mettre en doute votre sincérité, même si nous ne partageons pas votre point de vue –, pourquoi auriez-vous peur du peuple ?

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Si vous refusez cette motion référendaire, c’est sans doute parce que vous êtes certains de la qualité de ce projet de loi, mais que vous êtes moins sûrs du jugement de nos concitoyens !

Debut de section - Permalien
Une sénatrice du groupe socialiste

Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

M. François Fortassin. En tout cas, pour ma part, si jamais je changeais de camp – la probabilité est mince, mais personne ne sait de quoi demain sera fait

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme vous le savez, nous soutenons cette motion référendaire. Nous souhaitons en effet que nos concitoyens soient saisis et puissent, au terme d’un débat national, se prononcer sur cette réforme.

La consultation du peuple, en application de notre loi fondamentale, est d’une légitimité bien supérieure à l’interprétation de ses sentiments, voire de ses pulsions. Dans les situations importantes, qui touchent à l’organisation de nos institutions et aux pouvoirs publics, la consultation populaire est une exigence démocratique.

D’ailleurs, nous avons fait valoir la nécessité de cette consultation dès l’annonce du projet du Président de la République, lors de la création du comité Balladur. Nous n’avons pas été entendus jusqu’ici mais il ne faut pas désespérer.

Les raisons de cette nécessité sont très simples. Comme l’ont dit les collègues qui m’ont précédée, elles tiennent à l’importance de ce projet dans l’organisation de nos institutions.

Certes, vous avez fait en sorte de ne pas être contraints de procéder à une nouvelle réforme constitutionnelle en ne supprimant pas, formellement, une collectivité, en ne créant pas, formellement, de nouvelles collectivités et en saucissonnant la réforme en plusieurs textes, pourtant fortement liés, nul ne le nie, y compris dans la majorité.

Néanmoins, personne n’est dupe, vous visez la suppression de deux échelons, la commune et le département, et vous créez de nouvelles entités qui ont tous les attributs des collectivités, les métropoles et des intercommunalités, devenant ou non – pour l’instant – des communes nouvelles, ce qui induit une redéfinition des compétences, qui n’est pas précisée globalement dans le projet, mais qui est déjà assez lourde. Ainsi, les collectivités territoriales existantes, départements ou régions, perdraient leurs compétences, non par délégation, mais, obligatoirement, au profit des métropoles.

Vous supprimez des élus en nombre et en compétence, les conseillers généraux et les conseillers régionaux, et vous créez un nouvel élu, le conseiller territorial, espèce inconnue jusqu’ici.

Vous revenez sur ce que vous avez fait inscrire dans la Constitution en 2002, « l’organisation décentralisée de la République », puisque vous engagez de fait une opération de recentralisation sous la houlette de l’État et de ses préfets.

Je ne peux m’empêcher de citer moi aussi M. Mercier, alors sénateur, aujourd’hui ministre et promoteur du projet de réforme actuel. Il déclarait en 2002 : « Il y a donc une clarification sur les niveaux, mais aussi une clarification sur la définition de ce qu’est une collectivité territoriale. C’est très important. Deux éléments en ressortent : d’une part, la libre administration par des conseils élus, d’autre part, le fait que cette libre administration n’existe que si les collectivités locales peuvent librement disposer de ressources propres. Ce dernier point constitue une avancée très forte de la décentralisation. »

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire

Pas du tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, la suppression de la taxe professionnelle et la réforme actuelle réunies contredisent vos propos sur l’organisation décentralisée de la République.

M. Longuet affirmait également à l’époque : « Nous aurions pu retenir au contraire quatre niveaux de territoires : la commune, le département, la région et l’intercommunalité. En faisant le choix de n’en retenir que trois, le Gouvernement nous rappelle simplement que, au-delà du devoir évident des collectivités locales, et particulièrement des 36 000 communes, de travailler ensemble, de constituer ensemble des réponses collectives face à des besoins immédiats comme l’intercommunalité rurale, les agglomérations et les communautés urbaines, il n’y a qu’une seule unité terminale qui permette la proximité pour le citoyen : la commune ».

Aujourd’hui, M. Longuet pense que le projet ne va pas assez loin quant aux métropoles et à leurs pouvoirs !

En vérité, il est difficile de le nier, certaines des dispositions de votre projet posent des problèmes au regard de la Constitution confirmée, en ce domaine, en 2008, c’est-à-dire postérieurement à l’élection présidentielle. Autrement dit, vous ne pouvez nous objecter qu’elles figurent dans le programme du candidat élu Président de la République depuis, dans la mesure où la révision constitutionnelle de 2008 n’en a pas décidé ainsi.

En effet, l’article 72 de la Constitution, notamment, n’est pas respecté sur plusieurs points. Cet article, malgré les explications gênées et excessivement complexes du comité de réforme des collectivités territoriales présidé par M. Balladur, pose sans ambiguïté le principe de la compétence générale des collectivités territoriales que sont la commune, le département et la région.

Cette clause de compétence générale est consubstantielle à la libre administration. En un mot, pas de démocratie locale sans compétence générale.

Supprimer la compétence générale, c’est réduire la capacité d’action des élus, au regard des citoyens qui les ont élus, c’est donc réduire la capacité des citoyens à agir sur la réalité de leur quotidien.

L’argumentation du comité Balladur sur ce point est surprenante. Il constate que la Constitution établit clairement par trois raisonnements la compétence générale. Premièrement, la compétence générale distingue une collectivité d’un établissement public. Deuxièmement, la Constitution établit clairement le lien entre libre administration et conseil élu pouvant exercer ses compétences. Troisièmement, la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 pose clairement que chaque collectivité locale a vocation à gérer ses propres affaires.

Or, de manière surprenante, le comité a estimé qu’« en l’absence de toute jurisprudence constitutionnelle tranchant clairement la question, il était raisonnable de penser que la modification, voire la suppression de la clause de compétence générale était possible ». Comprenne qui pourra…

Le comité Balladur, le Gouvernement et la majorité exercent un droit dont ils ne disposent pas : interpréter la Constitution à leur guise !

En fait, votre projet tend à changer profondément la conception des institutions telles qu’elles résultent de notre loi fondamentale.

Il en est ainsi de la création des conseillers territoriaux, déjà si souvent critiquée depuis le début de cette discussion. Chacun devine que leur instauration préfigure la fin du département. En outre, ils mettent à mal trois principes constitutionnels lourds : le fait que chaque collectivité dispose d’une assemblée propre élue, le principe de parité et le principe d’une représentation pluraliste. Nous aurons l’occasion de revenir sur ces questions avec la motion d’irrecevabilité.

Le mode de scrutin, qui, certes, n’est pas discuté aujourd’hui – c’est un comble ! – mais qui sera bien présent dans nos décisions, met à mal ces deux principes.

Il est donc logique que nos concitoyens soient consultés sur ce changement. Rappelons-nous, c’est lui, le peuple souverain, qui, il y a bien longtemps, par la force de son engagement, a forgé les institutions démocratiques de notre pays. Croyez-vous un seul instant qu’il puisse être mis à l’écart du débat qui s’ouvre ?

Pour nous, la consultation populaire est nécessaire sur les réformes institutionnelles, c’est une exigence démocratique. Il est évident qu’elle s’impose ici, comme elle aurait dû s’imposer lors de la révision constitutionnelle de 2008.

Le Président de la République n’y a pas eu recours alors, comme il ne juge pas nécessaire a priori de le faire pour la réforme territoriale.

Votre peur de la démocratie est très surprenante, alors que toute votre argumentation, monsieur le ministre, tente de nous convaincre que nos concitoyens attendent avec impatience cette réforme !

Notre groupe tout au contraire – il a déposé des amendements en ce sens, amendements que la commission a immédiatement rejetés – considère que les regroupements de collectivités et les modifications interterritoriales, dans la mesure où ils ont obligatoirement des conséquences sur les services rendus à la population, à la démocratie et à l’élection par nos concitoyens de leurs représentants à tous les échelons, doivent faire l’objet d’une consultation des assemblées élues des collectivités concernées – ce que vous refusez – et de la population concernée dans les territoires !

Il est donc logique que nous proposions une consultation populaire sur la réforme que vous voulez vous-mêmes comme structurante de la future organisation territoriale de notre pays.

C’est la raison pour laquelle nous soutenons cette motion référendaire.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, la Constitution, modifiée par la réforme de 2003, prévoit en son article 24 que le Sénat « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ».

Dans la logique de cette mission, l’article 39 souligne que « les projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat ».

En observant le titre et le contenu du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, je ne peux m’empêcher d’être perplexe : cette réforme est sans doute le texte consubstantiel à notre mandat de représentants des collectivités, et les sénateurs de l’opposition souhaiteraient que l’on s’en dessaisisse pour un référendum ?

Monsieur Bel, Madame Borvo Cohen-Seat, chers collègues de l’opposition, votre motion référendaire sur le projet de loi est un acte solennel prévu par la Constitution, qui connaît d’ailleurs des précédents. Je trouve simplement assez déplacé de l’utiliser précisément sur ce texte relatif aux collectivités territoriales, alors même que la norme suprême nous confie la mission de représenter les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Pour autant, je voudrais au moins tenter de comprendre l’opportunité de votre motion, et le fondement de votre démarche.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Peut-être voyez-vous dans la motion référendaire une opportunité politique.

Cette opportunité pouvait se comprendre pour le projet de loi portant changement de statut de La Poste, …

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous ne disiez pas la même chose à ce moment-là !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

… alors que la votation citoyenne avait déjà déformé la question de l’ouverture du capital à l’État et la caisse des dépôts…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Ce qui est curieux, c’est que vous refusez toute consultation populaire ! C’est malhonnête !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

… en une formule bien plus simple et populaire : « Êtes-vous pour ou contre la privatisation de La Poste ? ». (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Cette fois, il n’y a pas eu de manœuvre fallacieuse de ce type, qui aurait pu consister à recueillir l’avis de l’opinion publique sur une question du genre : « Êtes-vous pour ou contre la suppression des collectivités territoriales ? ».

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Vous n’avez pas osé tout de même !

En fait, le sujet de la réforme des collectivités locales recueille une opinion plutôt favorable auprès du public, notamment les sujets relatifs à la simplification du « mille-feuille territorial ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Je ne peux donc me résoudre à croire que cette motion, quitte à aller à l’encontre de l’esprit même de la Constitution, découlerait d’un quelconque opportunisme politique.

Le référendum serait-il alors l’expression de l’abdication des parlementaires de gauche sur le sujet de l’évolution de l’organisation des collectivités territoriales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Je ne le pense pas non plus. La gauche fut au contraire – et je veux croire qu’il en est encore ainsi – un bâtisseur de la décentralisation, avec les lois Deferre de 1982 et 1983.

La gauche avait marqué un bel essai en créant les établissements publics régionaux. Elle l’avait même transformé en faisant des régions des collectivités territoriales quelques années après.

La gauche est l’instigatrice de grandes réformes de l’intercommunalité, avec la loi relative à l’administration territoriale de la République, ou loi ATR, de 1992 et la loi Chevènement de 1999.

Un an après, le Premier ministre Lionel Jospin défendait, dans le cadre des orientations pour une nouvelle étape de la décentralisation, l’élection des délégués communautaires au suffrage universel.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur Mauroy, vous disiez hier vouloir aller de l’avant et non reculer. Vous affirmiez : « Nous participerons au débat avec la conviction et l’ardeur qui nous animaient en 1981. »

Alors, pourquoi cette motion aujourd’hui ? Pourquoi vouloir un référendum ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Pourquoi sacrifier une question aussi complexe que celle qui nous est présentée dans ces trente-neuf articles à une réponse aussi manichéenne que le « pour ou contre » que nous impose le référendum ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Le tableau français de la réforme des collectivités locales mérite une gamme de nuances un peu plus diversifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

La troisième justification possible à votre motion pourrait être la suivante : peut-être nos concitoyens seraient-ils plus légitimes que le Sénat et l’Assemblée nationale pour se prononcer sur le sujet particulier de la réforme des collectivités locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Vous semblez convaincus, en soulignant dans la motion que « le Gouvernement entreprend une profonde réorganisation administrative locale qui soulève des questions fondamentales, constitutionnelles et politiques, que seul le peuple souverain doit trancher ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Madame Borvo Cohen-Seat, je suis troublé par une telle méconnaissance de notre système.

Je ne crois pas une seule seconde à votre argument, pour deux raisons chères à notre tradition démocratique. D’une part, et c’était là mon premier propos, c’est aller contre l’esprit et la lettre de la Constitution que de vouloir dessaisir le Sénat de ce débat.

Faisons au moins honneur à la Constitution, qui fait de notre chambre le représentant des collectivités locales ! Qui mieux que le Sénat, composé d’une très grande majorité d’élus locaux, peut se prononcer sur ce texte ?

La création des conseillers territoriaux, l’organisation des collectivités, la création des métropoles, la démocratie locale avec l’élection au suffrage universel direct des délégués communautaires méritent, au contraire, toute notre attention et une approche constructive. C’est l’avenir de nos territoires qui se joue. Et vous souhaiteriez vous en défausser ?

D’autre part, j’estime que le recours au référendum doit rester une procédure législative exceptionnelle.

Elle est exceptionnelle, avant tout parce que notre tradition républicaine est fondée sur la démocratie représentative, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

… qui fait que nous, parlementaires, avons la légitimité et la responsabilité de proposer, discuter, amender et voter la loi, tout simplement.

Votre velléité de démocratie populaire

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Mes chers collègues, bien sûr, les membres du groupe de l’Union centriste, comme beaucoup de sénateurs de la majorité et de l’opposition, ont des réticences

Rires sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

, et non des moindres, sur un certain nombre de sujets.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Mais oui, mes chers collègues ! Mais notre groupe a aussi, et peut-être à la différence de vous, des propositions à soumettre.

Nouvelles exclamations et rires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Nous voulons, et cela ne semble pas être votre cas, le débat parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Et nous l’espérons serein et constructif et nous souhaitons qu’il s’instaure le plus vite possible au sein de cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous rejetons catégoriquement la motion référendaire qui nous est présentée.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, nos collègues de l’opposition ont décidé cet après-midi de déposer une motion référendaire sur le projet de loi que nous examinons depuis hier, dans le souci, en tous les cas tel qu’affiché, au nom de grands principes, de consulter la population française sur l’opportunité de réformer ou, plus exactement, de réorganiser nos collectivités territoriales.

L’organisation d’un référendum est un acte solennel. C’est une procédure importante, qui est d’ailleurs peu utilisée, même si elle existe depuis le début de la Ve République.

En l’occurrence, il me semble que le souci de consulter la population vise peut-être d’autres fins que celles qui ont été affichées jusqu’à présent à cette tribune.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

De deux choses l’une : soit nous sommes confrontés à l’utilisation d’un procédé dilatoire, au nombre de tous les moyens de procédure que nous donne le Parlement pour tenter de gagner du temps, …

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

… de bloquer les choses, d’alimenter sans fin un débat toujours renouvelé au travers des différentes interventions n’apportant pas d’éléments nouveaux, …

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

… soit il s’agit pour vous, après avoir tenté de susciter une certaine peur auprès des élus locaux ou de la population dans nos départements et nos collectivités, en leur tenant des propos souvent dénués de tout fondement et en dispensant un ensemble de contre-vérités, d’essayer par cette procédure de les rencontrer et d’espérer une sorte de réussite politique qui viendrait redorer votre blason aujourd’hui en difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet. Telle est, me semble-t-il, la réalité des choses et tel est bien l’espoir que vous nourrissez. Car, si l’on se réfère à certains sondages réalisés l’automne dernier – l’on pense ce que l’on veut des sondages, mais ils donnent tout de même une photo instantanée de l’état de l’opinion –, on constate que près de 80 % de nos concitoyens étaient favorables à une clarification, à une simplification de notre organisation territoriale.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Votre réforme rend les choses plus confuses !

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

C’est là une vérité qui sans doute vous dérange.

À moins que votre souhait de recourir à la procédure du référendum ne résulte de la volonté de protéger le pouvoir sur lequel vous êtes assis et que vous avez eu localement, ce que je peux comprendre, mais qui, en tous les cas, ne correspond pas à la volonté démocratique que vous affichez.

Sur le fond, vous pensez que ce texte remet en cause un grand nombre de principes, …

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

… en engageant une recentralisation alors que nous étions dans une logique de décentralisation, …

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet. … par une fusion annoncée des départements et régions

Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

, par une diminution des compétences exercées par les collectivités,

Eh oui ! sur les mêmes travées

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

, par une difficulté de mise en application de la parité.

Eh oui ! sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

J’ai même entendu dire tout à l’heure que la conséquence première de la réforme serait d’augmenter la pression fiscale des concitoyens.

Hélas ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Vous n’avez pas attendu la loi, me semble-t-il, pour avoir recours à ce moyen de façon prégnante dans les régions de France. Cela a été démontré partout, et nous savons que vous êtes assez professionnels dans la pratique de ce sport.

M. Paul Blanc applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Alors ne venez pas aujourd’hui énoncer de fausses vérités !

Alors que nous souhaitons réorganiser nos collectivités territoriales, personne ne peut dire que la recentralisation soit au cœur des débats et personne ne peut objectivement affirmer que la fusion entre les départements et la région soit un objectif annoncé de la réforme.

M. Jean-Pierre Bel proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Non, monsieur le président du groupe socialiste, cela n’est pas la vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Que l’on veuille simplifier, spécialiser les compétences pour certains niveaux de collectivités afin de rendre les choses plus claires pour l’ensemble de nos élus, cela me paraît d’une grande nécessité, et ne changera en rien la capacité de nos collectivités à agir sur le terrain et à continuer à répondre aux attentes de la population.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Certes, le projet a peut-être, pour vous, le défaut de pointer clairement la responsabilité de l’augmentation de la pression fiscale, ce qui vous obligera, le moment venu, à rendre des comptes aux électeurs lorsqu’ils seront appelés à se prononcer.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet. C’est sans doute cela qui vous pose des difficultés.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Les propos que vient de tenir M. About sont parfaitement justes : le Sénat tire sa légitimité des collectivités territoriales et leur représentation. Dans ce débat, nous sommes effectivement, comme le dirait le président Larcher, dans notre cœur de métier. C’est notre responsabilité première que de travailler sur l’organisation de notre territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

C’est bien pour cela, vous le savez tous – j’enfonce une porte ouverte – que le texte est examiné en premier lieu par notre assemblée.

C’est faire bien peu confiance à l’ensemble des élus qui siègent dans cette enceinte et se méfier de leur capacité de travailler sereinement à la réorganisation de nos collectivités locales, c’est faire peu de cas des débats qui ont eu lieu dans les commissions que de vouloir dessaisir ainsi notre assemblée de cette réforme. Or, le président de la commission des lois, ainsi que le rapporteur ici présent peuvent témoigner de la qualité des échanges qui ont eu lieu, entre des membres passionnés, désireux de faire avancer ce dossier.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Au demeurant, n’omettons pas de dire que nous sommes d’accord sur bien des points de ce projet de loi, même si le débat n’est pas fermé. En effet, tant en matière de parité que sur d’autres sujets particuliers, le temps doit être donné à la réflexion pour trouver la solution la mieux adaptée.

Dans ces conditions, sur un sujet aussi complexe, comportant diverses possibilités de légiférer, concernant des domaines à la fois technique et politique, le fait d’organiser un référendum et de demander à la population de se déclarer pour ou contre, c’est vouloir tenter le diable, en tous les cas, avoir la ferme volonté de faire capoter le projet. Ce n’est pas la nôtre !

M. David Assouline s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Oui, c’est tenter le diable, parce que, sachez, mes chers collègues, que nos concitoyens voudraient peut-être aller encore plus loin que le projet sur lequel nous sommes en train de travailler.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet. En toute hypothèse, le groupe UMP soutiendra fortement ce projet de loi et votera fermement contre la motion référendaire qui nous est présentée.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, le grand avantage de la proposition de notre ami Jean-Pierre Bel, c’est de nous inciter à revenir sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Les citoyens, la nation, le peuple sont vraiment étrangers, me semble-t-il, au débat qui a lieu dans cet hémicycle et à l’embrouillamini que vous nous proposez, vous le savez bien.

Il n’est plus question du chômage. Il faut parler de l’identité nationale. Il n’est plus question des difficultés des gens et de la nécessité où nous sommes de mobiliser les collectivités locales pour faire face à la crise, à la misère, à la précarité. Non, dans cette enceinte, nous parlons abstraitement, comme l’illustrent les propos tenus, notamment par M. About ou M. Buffet.

À vous entendre, monsieur Buffet, 80 % des Français soutiennent ce texte. Ne voyons-nous pas d’ailleurs les pétitions s’accumuler dans les mairies, les conseils généraux, réclamant un conseiller territorial ?

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Ne sommes-nous pas assaillis, chacune et chacun d’entre nous, par des manifestations et des délégations venant nous dire : « Mais enfin, le conseiller territorial n’est pas encore voté ? Vous n’entendez pas nos attentes ! Le peuple, à 80 %, veut un conseiller territorial ! ».

Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mais si les Français le veulent à 80 %, pourquoi n’organisez-vous pas un référendum ? Il serait historique, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… avec 80 % des Français se levant pour réclamer un conseiller territorial !

Or tout le monde voit bien que vous êtes dans le faux, dans l’artifice ! Personne ne croit vos affirmations. Vous n’y croyez pas vous-mêmes, et comme cela se voit, il y a un grand malaise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mais c’est très clair, mes chers collègues !

Nous avons besoin de régions fortes, face aux enjeux sur le plan tant européen que mondial. Les présidents de région présents dans cette enceinte, notamment François Patriat, se battent pour renforcer l’université, l’innovation, la science, l’aménagement du territoire, le rayonnement international de nos régions. Il faut donner à ces dernières le maximum d’atouts et d’efficacité pour leur permettre de faire face à la difficile compétition dans laquelle elles sont engagées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Comme l’a dit M. Fortassin, il suffit de lire les textes votés sur la taxe professionnelle pour voir à quel point les régions, privées de marge fiscale, sont maintenant à l’étroit, avec des budgets contraints.

Lors du débat sur les renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, un intervenant a déclaré : « Nous nous engageons à ne pas augmenter les impôts ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… puisque les régions n’auront même plus le moyen de décider de la fiscalité !

Vous alimentez la confusion en ôtant tout pouvoir fiscal aux régions tandis que vous dites dans le même temps : Vive la décentralisation !

M. Gérard Longuet a publié, dans le journal Les Échos, un article très intéressant auquel je tiens à rendre hommage, certaines remarques suscitant la réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

En particulier, mon cher collègue, à propos des régions et des départements, vous écrivez : « Si on avait utilisé la moitié des sommes consacrées aux giratoires à soutenir les nouvelles technologies, on serait peut-être champions mondiaux dans certains secteurs. »

Je comprends bien ce que vous voulez dire : la France compte un grand nombre de carrefours giratoires, ...

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… et l’on devrait consacrer les moyens à la technologie plutôt qu’aux carrefours giratoires.

Seulement, monsieur le ministre, vous nous proposez d’élire les conseillers régionaux sur une base cantonale, autrement dit de créer de gros cantons. Pensez-vous vraiment que c’est ce qui va faire bouger les régions, leur donner une force et une vitalité nouvelles ?

Ne pensez-vous pas que tel ou tel conseiller territorial, attaché à défendre son territoire, son secteur, son pays, sera tenté, lui aussi, de réclamer la création d’un giratoire au président de son exécutif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

C’est une compétence départementale, et non régionale ! C’est pour cette raison qu’il faut un texte clarifiant les compétences : le giratoire relève du département, la recherche de la région !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Avec votre système, en « départementalisant » les régions, en les « cantonalisant », vous allez instaurer la République des giratoires…

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. C’est mieux que la République des girouettes !

Sourires sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Comme vous, nous voulons, des régions vraiment puissantes, pas pour construire des giratoires, mais pour promouvoir le développement technologique, scientifique, économique et universitaire : voilà la différence entre vous et nous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Or cela ne sera pas possible tant que l’on entretiendra la confusion avec les départements, qui, eux, ont une mission de proximité, une vocation sociale ô combien nécessaire et éminente.

Il y a quelques années, M. Raffarin nous avait présenté le projet de loi dont il a été question comme un texte de nature à promouvoir la régionalisation. Résultat : ce fut un projet très départementaliste.

Aujourd'hui, en instaurant les conseillers territoriaux, vous allez en vérité affaiblir les régions de France, alors même que, sur les plans économique, scientifique, universitaire et technologique, nous avons besoin de les rendre beaucoup plus puissantes.

Monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, quelque chose ne va pas : vous voulez à toute fin imposer ces conseillers territoriaux et vous refusez obstinément, vous et M. Marleix, de répondre à une question simple relativement à leur future répartition sur l'ensemble du territoire. Si vous tenez à présenter loyalement le dispositif, il faut fournir à nos concitoyens l’information à laquelle ils ont droit !

Ce matin, en commission des lois, nous avons proposé un amendement visant à fixer à quinze le nombre minimum des conseillers territoriaux par département. Il nous a été répondu que ce n’était pas le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il nous a donc été dit que ce n’était pas le moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Au mois de décembre, lors de l'examen du projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, ce n’était pas le moment non plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Selon cette logique, monsieur Longuet, la répartition des compétences sera examinée par la suite, car, pour l’instant, ce n’est pas le moment.

La fixation du nombre de conseillers territoriaux dans chaque département, ce n’est pas le moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Non, cela sera étudié ultérieurement : le projet de loi a déjà été déposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J’entends bien, mais force est de constater que personne n’a le droit de déposer des amendements « électoraux » devant la commission des lois, à l’exception – on se demande pourquoi – de M. Nicolas About.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

En tout cas, mon cher collègue, je vous félicite ! Vous avez obtenu satisfaction ; nous, non : il doit y avoir une raison, nous cherchons laquelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le ministre, il n’est pas honnête, j’emploie ce mot à dessein, de proposer des conseillers territoriaux dans toute la France et de ne jamais dire combien il y en aura dans chaque département et dans chaque région.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Quand nous proposons quinze conseillers territoriaux par département, on nous rétorque : mais vous n’y pensez pas, on ne peut pas prendre un tel engagement, ce n’est pas l’heure !

Mais si un département compte effectivement quinze conseillers territoriaux, le département voisin, dans la même région, qui est dix fois plus peuplé, devrait en avoir cent cinquante. On est bien d’accord ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Or M. le Président de la République l’a dit, l'objectif est de passer de 6 000 conseillers généraux et régionaux à 3 000. Par conséquent, s’il y a un plancher, il y a aussi un plafond : autrement dit, le principe d’égalité devant le vote est bafoué !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Mais c’est le territoire que l’on défend !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Comment pourrait-on soutenir qu’un département dix fois plus peuplé qu’un autre n’aurait droit qu’au double de conseillers territoriaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Ou alors, baissez le seuil minimal de conseillers territoriaux dans un département à huit, six, voire cinq !

Toujours est-il, monsieur le ministre, qu’à cette question, posée chaque jour par les élus dans nos départements, vous n’apportez aucune réponse. Or vous n’avez pas pu imaginer un tel dispositif sans procéder, au préalable, à des calculs et à des simulations pour vous faire une idée du nombre de conseillers territoriaux à prévoir dans chaque département et région.

Nous avons droit à être informés de la nature réelle et concrète de vos projets. J’attends donc avec confiance et intérêt les réponses précises que vous nous apporterez !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, quelle est l’ambition affichée de cette réforme ? Pour la connaître, référons-nous aux propos que vous avez tenus, ici même, dans cette enceinte, pas plus tard qu’hier. Il s’agit, avez-vous dit, d’« engager le chantier de la clarification et de la simplification que, collectivement, nous n’avons pas su faire aboutir en près de trente ans ».

Même si la formule est quelque peu lapidaire et simplificatrice, comment, dans un premier mouvement au moins, ne pas partager une telle ambition, qui, finalement, dans ce qui est dit en tout cas, vise à permettre une meilleure lisibilité de l’action et, donc, du fonctionnement des collectivités ? Nous qui, avec François Mitterrand, Pierre Mauroy et Gaston Defferre, avons inventé la décentralisation, comment ne serions-nous pas favorables à une réforme aboutissant, au bout du compte, car tel est l’objectif à atteindre, à mieux faire fonctionner notre démocratie ?

Messieurs les ministres, c’est parce que nous sommes des femmes et des hommes de progrès et de mouvement que nous étions prêts à accompagner toute initiative de réforme. C’est aussi pour cette raison que nous nous étions engagés sans réserve, au sein de la mission temporaire sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales, présidée par Claude Belot, dans une réflexion jugée par tous comme audacieuse et « proactive ».

Le titre du rapport issu de ces travaux – Faire confiance à l’intelligence territoriale – a assigné, à lui tout seul, tout le sens de la démarche. Il n’y a rien d’étonnant, alors, à ce que les dispositions qui en sont issues soient, pour la plupart, innovantes, pragmatiques et porteuses d’une certaine méthode.

Au regard de votre ambition affichée, monsieur le ministre, on pouvait s’attendre à des convergences fortes avec les conclusions de ce rapport. Il n’en est rien. Où est l’erreur ?

Non seulement vos propositions ne servent pas les objectifs affichés, mais elles actent en outre un divorce absolu et contradictoire avec la position exprimée par la mission sénatoriale.

Après tout, les mots clés utilisés par le Président de la République pour justifier cette réforme – clarification, simplification, lisibilité, efficacité, optimisation –, nous pourrions les faire nôtres. Mais, là est le problème, ils ne connaissent aucune traduction effective dans les choix proposés. Entre vos dires et vos actes, la dichotomie est flagrante.

Qu’en est-il, par exemple, des compétences revisitées de l’État par rapport aux domaines transférés ? Il n’en est pas question, il n’en sera jamais question. Voilà pourtant un élément fondamental d’une réforme des collectivités territoriales. Quid de la clarification des compétences ? Elle est remise à plus tard. Quelle étrange logique !

Messieurs les ministres, dans le cadre de la discussion générale, déjà bien avancée, tout a été dit. La convergence des analyses devrait entamer votre certitude ou votre apparente sérénité – je ne sais comment qualifier votre état d’esprit.

Vous, monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui êtes un élu territorial, vous, monsieur le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, qui, comme moi, présidez un département, vous le savez bien, non seulement ce texte ne clarifie rien, n’optimise rien, mais il créera au contraire davantage de complexité et d’opacité, sans que jamais cela se traduise par des économies sur le plan financier.

Nul ne peut l’ignorer, ce texte, où tout n’est pas dit aujourd'hui, porte en germe des décisions susceptibles de mettre en cause la démocratie ; je pense évidemment au mode de scrutin.

Au-delà de tous ces arguments, deux raisons majeures me paraissent devoir être retenues pour justifier le recours à la voie référendaire.

La première a trait au choix du postulat, évoqué par de nombreux collègues, qui est au cœur de la réforme : le rapprochement entre la région et le département, d'une part, la création du conseiller territorial, d'autre part.

Ce faisant, vous dénaturez ces deux collectivités, vous niez la réalité du fonctionnement de nos territoires. Ce n’est pas seulement une erreur d’analyse, c’est un déni du réel. Vous le savez bien, notre organisation territoriale s’articule autour de deux grands types d’acteurs.

Il y a, d’abord, les acteurs de la stratégie : cela va de l'Europe à la région, en passant par l’État.

La région, c’est l’échelon de mise en œuvre des politiques stratégiques et économiques, des grands équipements, souvent engagés en partenariat avec l’État et l'Europe.

Il y a, ensuite, les acteurs de la proximité, issus du département, de la commune ou de la communauté de communes.

Monsieur le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, le département, c’est l’échelon des solidarités sociales, et il n’y a pas de solidarité sociale sans solidarité territoriale. Pour exercer ces compétences, la clause générale de compétence apparaît comme l’outil majeur.

Or la majorité s’en cache à peine aujourd'hui : il suffit d’écouter ce qu’en dit Jean-François Copé avec une tranquille assurance pour comprendre que tout prélude à une fusion certaine de ces deux collectivités.

En faisant un tel choix, vous allez immanquablement « rétrécir » les régions, qui, mon collègue Jean-Pierre Sueur l’a souligné, se trouveront engluées dans des politiques « cantonalistes » alors qu’elles ont à faire face à des enjeux stratégiques de première importance. Quant aux départements, avec des conseillers territoriaux qui passeront leur temps à sillonner les routes d’un territoire trop grand pour eux, ils s’éloigneront, à coup sûr, de toute réalité.

Mes chers collègues, hier, Philippe Adnot, avec lucidité et pertinence, a souligné le caractère inédit et unique du contenu de la réforme. Voici ce qu’il a déclaré à propos du choix d’instaurer un conseiller territorial, et je vous demande d’y être attentifs : « C’est la négation de l’existence pleine et entière des collectivités locales. Il n’y a pas d’exemple, nulle part ailleurs, de deux assemblées auxquelles on aurait imposé d’avoir les mêmes élus. » Je vous invite à entendre cette observation et cette analyse. Elle emporte, me semble-t-il, à elle toute seule, la nécessité de prendre le peuple à témoin.

Visiblement, d’autres l’ont dit plus éloquemment que moi et point n’est besoin de le développer davantage, c’est l'équilibre territorial qui est ici en cause, cet équilibre entre le monde rural et le monde urbain auquel nos concitoyens sont si attachés, non par conservatisme exacerbé, mais par la conscience qu’ils ont qu’une telle réalité « impacte » leur cadre de vie.

La seconde raison qui justifie le recours au référendum tient à la construction et à l’architecture mêmes du projet de loi. La remise en ordre des compétences est renvoyée à plus tard : aux termes de l'alinéa 1 de l'article 35, dans « un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, une loi précisera la répartition des compétences des régions et des départements ».

Comment comprendre et accepter une telle logique ? Vous définissez d’abord les modalités et présentez votre plan d’action. Mais vous ne dites rien de l’utilité supposée de votre dispositif ; vous renvoyez ce sujet à un débat ultérieur !

J’observe d’ailleurs que la commission des lois ne s’y est pas trompée, puisqu’elle a jugé « imprécises ou dépourvues de portée normative » un certain nombre de dispositions du texte.

La méthode, elle aussi, est inédite et justifie le recours au référendum. Nous aurions alors la garantie de pouvoir expliquer à nos concitoyens, ce qui est évidemment en la circonstance une exigence minimale, la portée et le sens exact des réformes engagées par le biais d’un document global et complet.

Mes chers collègues, puisque nous semblons nous accorder ici sur la nécessité d’une réforme, sur la nécessité de faire plus et mieux pour nos territoires, alors, n’ayons pas peur de prendre à témoin nos concitoyens ! N’ayons pas peur de la démocratie !

S’il est une assemblée qui devrait, au-delà même des clivages politiques, ne pas hésiter à convoquer le peuple, c’est bien celle qui représente les territoires !

Certes, cher président About, ce sont des élus qui nous ont délégués au sein de la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Nous représentons ici, nous ne l’oublions pas, et nous en avons même une immense conscience, les collectivités territoriales.

Mais seul le peuple qui vit dans les territoires est in fine légitime pour dire comment il souhaite que ses pouvoirs et ses responsabilités soient tout à la fois délégués et organisés.

Alors, chers collègues, tous ensemble, donnons raison ce soir au Premier ministre ! Donnons-lui raison lorsqu’il affirme, au moment où il présente ses vœux à la presse, vouloir prendre les Français à témoin sur cette réforme de la décentralisation !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les sénateurs, j’ai écouté avec la plus grande attention ce qui s’est dit depuis le début de cet après-midi sur la supposée nécessité qu’il y aurait à soumettre au référendum le projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

Je voudrais à présent, au nom du Gouvernement, vous faire brièvement part de quelques observations.

Bien que figurant dans le règlement du Sénat depuis 1959, la motion référendaire était, jusqu’à ce jour, une procédure rarement utilisée. Entre 1984 et 2006, c’est-à-dire en vingt-deux ans, elle n’a été utilisée qu’à cinq reprises. J’observe, néanmoins, que, depuis quelque temps, l’opposition semble redécouvrir cette procédure : c’est, en effet, la deuxième fois, en seulement deux mois, que la Haute Assemblée va devoir se prononcer sur une telle motion, la précédente, qui fut repoussée, ayant été présentée, par les groupes socialiste, CRC-SPG, RDSE, à propos du projet de loi relatif à La Poste.

À croire que ce qui était une procédure exceptionnelle semble devenir, dans l’esprit de certains, un effet de séance presque habituel !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

Pour ma part, je ne partage pas ce curieux raisonnement qui consisterait, pour un parlementaire, à souhaiter absolument se dessaisir de ses fonctions législatives !

Il ne s’agit naturellement pas pour moi de faire aujourd’hui le procès du référendum. Nous savons tous que l’article 3 de notre Constitution en fait l’un des moyens d’expression du peuple souverain : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »

Mais nous savons tous aussi que, dans notre tradition républicaine, la démocratie représentative est, en quelque sorte, la règle, quand la démocratie référendaire est l’exception.

J’ai à l’esprit la formule de Benjamin Constant, qui voyait dans la démocratie représentative « une procuration donnée à un certain nombre d’hommes par le peuple, qui veut que ses intérêts soient défendus ».

Cette formule reste pleinement d’actualité. Je crois profondément que le débat parlementaire constitue la garantie d’un examen exhaustif, par la sérénité qu’il apporte, autant que par l’expertise qu’il comporte.

Comment expliquer à nos concitoyens que les parlementaires qu’ils ont élus renonceraient à leur devoir de législateur ?

Comment expliquer, surtout, que des membres de la Haute Assemblée, dont la mission constitutionnelle consiste, précisément, à représenter les collectivités territoriales, souhaiteraient être dessaisis d’une réforme unanimement reconnue comme essentielle pour l’avenir de ces mêmes collectivités ? Convenez qu’il y a là, à tout le moins, un certain paradoxe !

M. le président Hyest, au nom de la commission des lois, comme M. Buffet, au nom du groupe UMP, et le président About, au nom du groupe Union centriste, ont été, à cet égard, particulièrement éloquents. Je n’y reviendrai donc pas.

Je voudrais insister sur un point qui me paraît essentiel. Là où le referendum n’offre, par définition, qu’une réponse binaire - soit oui, soit non - à une question fermée, la procédure parlementaire a l’immense avantage d’autoriser une discussion ouverte ! Des arguments sont échangés, des positions sont rapprochées, des amendements sont déposés.

Et ces amendements, je vous le dis très clairement au nom du Gouvernement, Michel Mercier et moi-même les appelons de nos vœux dès lors qu’ils sont utiles et qu’ils viennent encourager la démarche de réforme ; je veux parler de la vraie réforme, loin des mots qui ne sont que des alibis pour ne toucher à rien et maintenir le tout figé.

Comme vous le verrez à l’occasion du débat, nous ne nous sentons propriétaires d’aucun des alinéas de cette réforme !

Je n’imagine pas que les sénateurs socialistes et communistes, dont beaucoup sont simultanément des élus locaux, trouvent inutile de prendre part à cette discussion ! D’ailleurs, Jean-Pierre Sueur, tout en défendant la motion référendaire, nous encourage à lui répondre précisément dans le cadre de la discussion parlementaire.

Il faut être logique : vous qui avez exercé des responsabilités ministérielles – j’ai occupé les mêmes aux collectivités locales – devez cesser de demander tout et son contraire ! Choisissez entre la motion référendaire et le débat parlementaire !

Je crois qu’il faut dépasser les manœuvres d’obstruction et éviter les fausses querelles. Il faut aussi, si l’on veut que ce débat soit utile, se tenir éloignés des facilités, des caricatures ou des postures.

Ce que je souhaite, au nom du Gouvernement, c’est débattre sereinement avec le Parlement de cette question essentielle, l’organisation territoriale moderne de notre pays.

Adopter aujourd’hui, sur ce texte, en ces lieux, une motion référendaire, cela signifierait tout simplement interdire au Sénat de débattre d’une loi fondamentale pour les collectivités territoriales !

J’en viens au fond.

Si les orateurs, qui exercent des responsabilités et participent à la représentation nationale, sont de qualité, je trouve quand même littéralement « inopérantes », comme disent les juristes, les argumentations que Michel Mercier et moi-même entendons depuis le début de l’après-midi.

Non, ce projet de loi n’instaure en aucun cas une « recentralisation », contrairement à ce que vous essayez parfois d’insinuer ! Et je suis tout proche de rejoindre le président Hyest lorsqu’il a évoqué certains excès. Sans généraliser et aller jusqu’à dire que les faits se sont produits sur tout le territoire, j’ai en mémoire des situations dans lesquelles des responsables de collectivités ont utilisé, par exemple, des cars, des abris-bus afin de donner leur sentiment sur la réforme, et tout cela avec l’argent des contribuables !

Je pose des questions simples. Instituer un élu local puissant, le conseiller territorial, doté de nouveaux pouvoirs, pour simplifier, clarifier, mieux articuler nos collectivités, n’est-ce pas un facteur de décentralisation ? Il est quand même très difficile de soutenir le contraire !

Donner la liberté aux départements et aux régions de se regrouper volontairement, sans que la loi impose les contours de ces regroupements, est-ce une recentralisation ? Il s’agit, au contraire, en donnant plus de pouvoirs aux collectivités locales, de progresser sur la voie de la décentralisation !

Proposer que les conseillers communautaires soient demain élus au suffrage universel direct, est-ce de la recentralisation ? Non, c’est de la décentralisation !

Donner la liberté aux communes qui le souhaiteront de créer une métropole, non pas d’après une liste établie depuis Paris, comme je l’ai entendu hier sur vos travées, mais sur la base du volontariat et à partir d’une dynamique de territoires, c’est, non une recentralisation, mais une décentralisation !

Je voudrais m’arrêter un instant sur les préfets, au sujet desquels j’ai entendu certaines choses cet après-midi. Je pourrais vous citer quelques exemples de parlementaires qui s’inquiètent à juste titre de savoir quand arrivera le remplaçant du sous-préfet récemment muté ! On ne peut pas, d’un côté, critiquer le corps préfectoral, et en même temps, légitimement aspirer à ce que l’État soit présent !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Confier à nos commissions départementales de coopération intercommunale, composées d’élus, le pouvoir d’imposer au préfet des solutions alternatives dans le cadre de l’achèvement et de la rationalisation de la carte intercommunale, c’est tout, sauf une recentralisation ! C’est une vraie décentralisation !

Et lorsque vous citez l’article 72 de la Constitution, citez-le jusqu’au bout ! Je vous en rappelle les termes : « Les collectivités territoriales s’administrent librement par des conseils élus dans les conditions prévues par la loi. »

C’est bien là, mesdames et messieurs les sénateurs, que résident l’originalité et la spécificité de la décentralisation française : un modèle dans lequel le législateur, c’est-à-dire vous-mêmes, fixe et organise la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités.

La vérité, je l’ai dit hier – je n’ai pas changé d’avis – c’est que la décentralisation est notre patrimoine commun, que nous soyons de droite, de gauche ou du centre. Elle n’est la propriété d’aucun camp politique. Que vous le vouliez ou non, elle n’est pas figée pour l’éternité à ce qui s’est fait en 1982. La décentralisation, c’est le mouvement ! Et vous aurez du mal à nous convaincre du contraire !

Chercher à corriger ses faiblesses, que nous connaissons tous et que nous avons tous un jour ou l’autre décriées, ce n’est pas en faire le procès ou l’affaiblir, c’est, au contraire, la conforter, lui donner un nouveau souffle.

Je vous le dis très directement et très simplement, personne ne sera dupe de ce jeu de rôles !

Vous prenez la pose des défenseurs de la décentralisation. Pour être totalement crédibles, il eût mieux valu avoir voté- ce que, précisément, vous n’avez pas fait- la révision constitutionnelle de 2003, présentée par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, qui a consacré, à l’article 1er` de notre Constitution, « l’organisation décentralisée » de notre République.

Je souhaite me tromper, mais il me semble que la même logique d’opposition systématique est à l’œuvre aujourd’hui. Je le regrette, car ce n’est pas à la hauteur des enjeux désormais en cause !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Avant de mettre aux voix la motion de renvoi au référendum, je donne la parole à M. François Patriat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Hier, j’ai entendu notre collègue Éric Doligé dire : « Le conseiller territorial, j’en ai rêvé, le Gouvernement Fillon l’a fait. »

Je vais répondre à M. Doligé et à vous-même, monsieur le ministre, qui avez dit hier vouloir donner un surcroît de légitimité aux collectivités et aux régions. Pour ce faire, j’évoquerai des faits vécus au quotidien dans la collectivité que j’ai l’honneur de présider.

Monsieur Doligé, ne rêvez pas ! J’ai été conseiller territorial et, aujourd’hui encore, j’en fais des cauchemars ! En 1978, j’étais en même temps conseiller régional et délégué à l’établissement public régional, l’EPR. À la fois conseiller général et conseiller régional, j’étais alors un conseiller territorial qui s’ignorait !

Je me souviens comment, à l’époque, opéraient ces élus qui vivaient ce que vous voulez nous faire revivre aujourd’hui : la chasse aux crédits pour tel ou tel rond-point, pour tel ou tel gymnase, pour telle ou telle église de leur territoire, exercice qui ne leur laissait aucun loisir pour s’occuper de la stratégie régionale.

Si nous défendons aujourd’hui une motion référendaire, monsieur le ministre, c’est parce que nous avons le sentiment – je le dis pour en avoir été le témoin – de vivre la revanche de 1981.

Vous déclarez que la décentralisation est notre bien commun. Permettez-moi de vous le dire, elle est un peu plus le bien commun de la gauche qu’elle n’est le bien commun de la droite.

Je me souviens en 1981 d’avoir eu à ferrailler, sous l’autorité de Pierre Mauroy et de Gaston Defferre, contre MM. Longuet, Madelin, Toubon, Léotard et même contre Philippe Séguin. Pendant des semaines et des semaines, les uns et les autres nous ont dit que la décentralisation, c’était la fin de la France !

Je me souviens des inaugurations intervenues le même jour, le 12 juillet 1992, sous l’autorité de Jean-Pierre Sueur ici présent : celle de l’Office universitaire de recherche socialiste, l’OURS, de Bretagne et celle de la première communauté de communes de France. C’était dans le droit-fil de la loi d’administration territoriale de la République du 6 février 1992.

Mon sentiment, c’est que nous avons voulu, par ce mouvement que nous tenions à impulser, redonner au peuple le pouvoir qu’évoquaient certains de nos amis à cette tribune hier.

Pour ne pas dépasser mon temps de parole, monsieur le ministre, je m’en tiendrai à l’exemple des régions.

Vous voulez, dites-vous, redonner de la légitimité aux collectivités territoriales, et notamment aux régions.

Certes, pour ma part, je ne partage pas tout à fait le sentiment, que j’ai entendu certains exprimer ici, selon lequel demain telle ou telle collectivité va disparaître. Non, les collectivités ne disparaîtront pas, mais, mises à part la commune et l’intercommunalité, sur lesquelles le consensus est réel, toutes seront affaiblies ! Ni la région ni le département ne disparaîtront, dans les termes, c’est vrai, mais ils seront affaiblis.

Ainsi, monsieur le ministre, personne ne peut contester que les régions se verront affaiblies financièrement : avec un budget affecté, une dotation de l’État, une part de la contribution complémentaire dont le taux sera voté par le Parlement, elles seront privées de toute autonomie fiscale et financière.

Elles seront également affaiblies dans leurs compétences, car les blocs de compétences que viennent d’évoquer avec talent Edmond Hervé et Jean-Pierre Sueur vont les entraîner demain à refuser à leurs territoires certains soutiens non démagogiques qu’elles leur accordent aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Sans revenir sur le conseiller territorial et sur la « cantonalisation » des territoires induite par la réforme, je dois dire que l’on ne pourra pas empêcher que les régions soient aussi diminuées dans leur représentation.

Par ailleurs, mes chers collègues, quelles seront demain la légitimité, l’autorité d’un président de région qui aura en face de lui, dans l’hémicycle régional, les trois, quatre ou cinq présidents de département qui, la veille de l’examen du budget, se seront partagé l’argent de la région ? Il n’aura plus d’autorité ! Ce sera un président sous tutelle !

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Enfin, la région sera affaiblie dans son pouvoir de contractualisation lui-même, le projet de loi prévoyant explicitement qu’en l’absence d’accord, et donc de convention, entre une métropole et la région sur le partage des pouvoirs économiques, au terme d’un délai de dix-huit mois, les compétences économiques seront transmises unilatéralement et intégralement à la métropole !

Ne me dites pas, monsieur le ministre, que les régions, qui sont les territoires de l’avenir, ceux qui, aujourd'hui, font entrer, par l’université, par la recherche, par l’innovation, leur population dans l’économie de la connaissance, n’auront pas perdu demain leurs moyens d’action !

C’est cette France des libertés, face à la France des préfets et de l’autorité de l’État, qui est en danger. M. About disait tout à l’heure faire confiance au Sénat pour légiférer.

Certes, monsieur About, le Sénat a mené une réflexion – j’ai d’ailleurs moi-même participé à toutes les réunions, le mercredi, de la mission Belot-Krattinger –, mais ses travaux ont-ils été retenus dans le projet de loi ?

Oui ! sur certaines travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Non ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Non, ils ont été balayés d’un trait de plume par un amendement déposé le dernier jour ! Que l’on ne nous fasse donc pas croire que le Sénat pourrait seul renverser la tendance lourde à l’encontre des collectivités locales que traduit ce projet de loi.

Cependant, mes chers collègues, si nous appelons au référendum, ce n’est pas parce que nous sommes un syndicat de défense de ces collectivités : c’est tout simplement pour défendre nos concitoyens, leurs libertés au quotidien, leur santé, leur éducation, leurs déplacements…

Demain, si la réforme est adoptée, ils vont perdre sur tous ces plans et il est donc normal qu’ils soient appelés à se prononcer eux-mêmes par la voie du référendum !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix la motion de renvoi au référendum.

Je rappelle que, en application de l’article 68 du règlement du Sénat, l’adoption par le Sénat d’une motion de référendum suspend, si elle est commencée, la discussion du projet de loi.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Mes chers collègues, je voudrais vous informer que, à l’occasion de ce scrutin, nous allons appliquer pour la première fois les nouvelles modalités élaborées par le bureau, sur l’initiative du président du Sénat, avec le souci d’assurer le déroulement des scrutins publics dans les meilleures conditions possible de clarté et de sincérité.

Je voudrais vous exposer brièvement les « nouveautés ».

Pour solenniser et sécuriser davantage les opérations de vote, le président de séance veillera à ce que toute personne non directement concernée par le scrutin se tienne en dehors du demi-cercle au pied du plateau, à charge pour les huissiers de faire respecter cette règle.

Les opérations de vote se dérouleront à la tribune de l’orateur, où seront disposées les trois urnes « pour », « contre » et « abstention ».

Les opérations de vote seront supervisées par deux secrétaires du Sénat, le premier tenant les trois urnes, pour recueillir les bulletins de vote et les y déposer, le deuxième notant le nom des représentants des groupes, ainsi que les sénateurs votant à titre individuel.

Telle est, mes chers collègues, la nouvelle scénographie des scrutins publics, qui, je l’espère, apportera tous les apaisements sur les conditions de leur déroulement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. C’est l’apport de M. Pignard à la scénographie !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Ceux qui souhaitent voter « pour » la motion remettront au secrétaire un bulletin blanc.

Ceux qui souhaitent voter « contre » remettront un bulletin bleu.

Ceux qui souhaitent s'abstenir remettront un bulletin rouge.

Le scrutin sera ouvert dans quelques instants.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Plus personne ne demande à voter ?...

Chacun a-t-il pu exprimer son vote comme il l'entendait ?...

En l'absence d'observation, le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 122 :

Le Sénat n'a pas adopté.

En conséquence, la motion de renvoi au référendum est rejetée et le Sénat va poursuivre la discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales (projet de loi n° 60, texte de la commission n° 170, rapports n° 169 et 198).

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. René Vestri.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, le sujet que nous évoquons aujourd’hui, la réforme des collectivités territoriales, me passionne, comme il vous passionne tous, non pas seulement parce que je suis élu local, maire d’une petite commune et conseiller général d’un canton depuis longtemps, mais parce que je sais au fond de moi que l’identité nationale, comme les particularismes locaux qui font nos terroirs, sont au cœur de notre action.

Les amendements nombreux et pertinents reçus par la commission des lois, qui, d’ailleurs, en a intégré 151, soulignent à quel point ce texte est sensible.

La France, avec ses 36 000 communes, sa centaine de départements, ses vingt-deux régions, serait-elle ce pays où l’exigence de démocratie et de proximité est si forte si elle n’avait pas connu cette organisation territoriale originale et très dense ?

J’ai entendu qu’on ne pouvait plus conserver en l’état notre organisation territoriale et qu’il fallait donc « faire bouger les lignes ».

En l’occurrence, il s’agit des limites de nos communes, de nos anciennes paroisses, de nos départements, de nos villes, et, bientôt peut-être, du pays avec les collectivités de nature européenne.

Mais, sur ces territoires, vivent des femmes et des hommes. C’est pour eux que nous devons organiser les choses, et non pas pour répondre à une exigence technocratique, et c’est ce danger d’une réforme technocratique que nous devons écarter.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Je salue donc, et je soutiens, les amendements visant à renforcer les garanties de représentation librement déterminées par les communes au sein des organes délibérants des conseils communautaires.

Oui, nous devons réformer, mais en ayant présent à l’esprit les principes de base, et notamment celui qui devrait nous conduire à remettre le citoyen au cœur de nos idées de réformes.

Le citoyen est aujourd’hui contribuable, consommateur, utilisateur de services publics, certes. Or, il reste le sujet principal de nos efforts. C’est à lui que nous devons services et prestations publics, parce qu’il s’acquitte de droits, de taxes et d’impôts.

Notre histoire révolutionnaire nous rappelle l’attachement viscéral des Français à ce que ceux qui les dirigent et prélèvent l’impôt soient des représentants démocratiquement élus.

Alors oui, je souscris pleinement à la proposition de la mission temporaire du Sénat de voir élus les représentants territoriaux au suffrage universel direct.

À ce sujet, une interrogation me semble légitime de la part de nombre d’élus locaux : pourquoi enlève-t-on des compétences à un maire élu qui ne cumule pas de mandat – ce qui est le cas de l’immense majorité des 36 000 maires français –, pour les donner à un président de communauté cumulant souvent deux ou trois mandats et qui n’a pas été élu au suffrage universel direct par les citoyens communautaires ? Remplira-t-il mieux ses fonctions ?

On nous répondra qu’il a autour de lui des fonctionnaires, et c’est bien là que le bât blesse. L’État a supprimé 30 000 emplois en quelques années, les collectivités locales en ont créé davantage, faisant exploser les frais de fonctionnement nécessaires à l’exercice des compétences transférées. En effet, on l’observe aisément : les transferts de compétence ne s’accompagnent jamais d’une baisse du nombre des agents dont les compétences ont été transférées dans les communes d’origine.

Ainsi, la démonstration est faite qu’il y a transfert de compétences sans diminution des charges, ce qui était pourtant l’objectif premier de la réforme il y a quelques années.

Devons-nous d’abord réformer le fonctionnement des collectivités nouvellement créées avant de leur avoir donné leur représentation légitimement élue ?

Devons-nous créer une entité nouvelle et transférer des pouvoirs avant d’avoir cadré les transferts de compétences et donné une définition d’une compétence liée ou d’une compétence commune ou encore d’une compétence propre, chacun de ces termes pouvant se traduire dans une situation locale par une gestion locale d’équipements aussi divers que des ports, des remontées mécaniques, des espaces remarquables, des plans d’eau. On semble considérer qu’un port peut être de compétence communautaire dans des régions où deux ou trois communes sur une quarantaine en ont un... Mais entend-on ces prises de position pour des remontées mécaniques ou un téléphérique ?

Les compétences doivent être librement transférées, comme l’a rappelé le Premier ministre, M. François Fillon, lors des journées parlementaires du Touquet, après décision du conseil municipal et non pas de façon automatique, comme c’est le cas pour les communautés d’agglomération ou les communautés urbaines, en dehors de l’eau, l’assainissement, les transports, le traitement des ordures ménagères, les décharges publiques.

Alors oui, bien sûr, j’appelle de mes vœux la réforme. Il m’apparaît cependant, avec le retour d’expériences que je peux avoir dans mon département, que la sagesse serait de commencer par réfléchir aux transferts de compétences, d’abord, et de définir, ensuite, le fonctionnement des institutions nouvelles.

Que dire aussi de la possibilité pour un élu communautaire d’intervenir sur le PLU – plan local d’urbanisme – d’une commune dans laquelle il n’a jamais eu à partager le destin des habitants ? Ce droit est reconnu aujourd’hui aux seuls habitants d’une commune ?

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Oui, je souhaite que l’on harmonise la fiscalité des différentes entités administratives, mais rien n’est aisé en la circonstance.

C’est tellement évident que la commission des lois, dans sa sagesse, a décidé de rétablir les points suivants.

Le premier concerne l’institution de métropoles.

La commission a rétabli l’autonomie fiscale des communes au sein de la métropole et rendu facultatif le transfert de la dotation globale de fonctionnement.

Elle a prévu de maintenir aux communes membres la prise en charge des équipements de proximité.

Elle a décidé de maintenir aux maires des communes membres de la métropole leurs compétences en matière d’occupation et d’utilisation du sol.

Je souhaiterais, avec votre aide, mes chers collègues, que la définition de l’équipement de proximité soit laissée à la double appréciation conforme des conseils municipaux et communautaires.

Par exemple, le port de plaisance d’une petite commune est-il d’intérêt communautaire de facto ?

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Si c’est le cas, pourquoi a-t-on des communes qui, à l’intérieur d’un même département, gèrent elles-mêmes leur port, alors que la commune voisine devra le transférer à un groupement de communes ? Le transfert des équipements de proximité devra donc être accepté et non contraint.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Il vous faut vraiment conclure, mon cher collègue, je suis obligée de vous interrompre.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Madame la présidente, il est tout de même important que nous puissions nous exprimer. Nous ne sommes pas à la minute et à la seconde près…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Le temps de parole a été fixé pour chacun, je suis désolée, il vous faut arrêter là.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vestri

Permettez que je formule tout de même une dernière remarque et je m’arrêterai sans conclure.

Les collectivités locales doivent donc, quelle que soit leur taille, rester proches de leurs habitants en renforçant la démocratie et en définissant au mieux les responsabilités des uns et des autres. Si nous extrapolons, après la réforme, par la fusion des conseillers généraux et des conseillers régionaux sous le titre d’élus territoriaux, il y aura un élu pour 40 000 habitants.

Et pourtant, certaines communes de deux mille habitants ont dix-neuf élus, mes chers collègues ! Quel rôle auront-ils à part célébrer les mariages... jusqu’au jour où les notaires s’en chargeront ?

Je m’arrête là, mes chers collègues, ne pouvant conclure correctement mon intervention, et je vous remercie de votre attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Monsieur le ministre, le texte que vous nous soumettez constitue la deuxième étape d’une réorganisation des pouvoirs locaux qui suscite, chaque jour davantage, interrogations et émoi parmi les élus locaux et la population de nos territoires.

La mise en œuvre de la décentralisation résulte d’une volonté politique forte qui s’est toujours heurtée aux administrations centrales et à ce que l’on appelle communément « la technostructure ».

La réforme est-elle nécessaire ? Oui, nous l’affirmons haut et fort.

Oui, nous devons toiletter l’intercommunalité sous toutes ses formes, la réorganiser, supprimer de très nombreux syndicats, introduire partout où nous le pouvons des notions de performance, d’optimisation et de cohérence.

Le Sénat a d’ailleurs produit un très beau travail, les propositions du rapport Belot, qui en résulte, permettraient d’aller vers la troisième étape de la décentralisation, et ce dans le consensus.

Vous avez cependant choisi de ne reprendre aucune de ses propositions les plus importantes.

Vous avez préféré écouter les grands spécialistes qui n’ont jamais géré une collectivité de proximité et qui, au fond, n’ont jamais été décentralisateurs.

Président de conseil général d’un département rural, je joins ma voix à celle de très nombreux collègues, toutes sensibilités confondues, inquiets de la philosophie de votre projet de loi et de ses principales dispositions.

Je le dis sans détour : votre projet de loi est une hérésie. Le volet, dont nous avons débuté l’examen, en constitue la partie la plus visible par l’opinion, mais aussi la plus démagogique.

Arrêtez de donner en pâture à l’opinion ses élus qui, selon vous, gèrent mal, augmentent les impôts et sont trop nombreux. Ils prouvent le contraire au quotidien. Nos concitoyens le savent. Le taux de participation aux élections locales en témoigne.

Monsieur le ministre, que l’État nous donne l’exemple ! Qu’il supprime les services dans les secteurs de compétences transférées, les organismes qui n’ont pas prouvé leur efficacité et qui génèrent des frais de fonctionnement élevés.

Avant de modifier à l’emporte-pièce la donne territoriale, le Gouvernement aurait été mieux inspiré, me semble-t-il, de tirer sérieusement le bilan de la décentralisation et de poser les réels enjeux de son approfondissement.

Il aurait, par exemple, été judicieux de s’interroger sur le niveau pertinent d’exercice des compétences. Pour nombre d’entre elles, dans les zones rurales, le bon niveau est celui du département : il nous permet de faire de l’optimisation et de la péréquation.

Dans mon département, qui a la taille d’une agglomération moyenne – 170 000 habitants et 340 communes –, les élus communaux ont très vite pris conscience de leur incapacité de prendre en charge un certain nombre de responsabilités. S’il est un niveau auquel il faut laisser la compétence générale, c’est bien le département.

Contrairement à certains exemples que j’ai entendus évoqués au cours du débat, en Midi-Pyrénées, les relations départements région sont institutionnalisées.

Des conventions sur l’économie, la culture et le tourisme nous permettent de conduire sur la durée des actions de partenariat constructives.

Comme l’a fait Jean-François Copé, ayez la franchise de nous dire que votre objectif, à terme, est de fusionner les départements et les régions !

Je dirai quelques mots sur le mode de scrutin : n’éloignons pas l’élu du citoyen. J’ai bien entendu la proposition d’Hervé Morin : mélange de scrutin uninominal et de scrutin proportionnel à un ou à deux tours. Mais il s’agit, comme l’a fort bien dit François Patriat voilà quelques instants, d’un retour à l’établissement public régional, l’EPR.

J’ai moi aussi été un conseiller territorial sans le savoir.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Nous l’avons tous été !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Mais, à l’époque, que faisions-nous ? Nous allions à la région pour demander des financements pour les territoires dont nous étions les élus.

Monsieur le ministre, l’imagination du Gouvernement sur le sujet est débordante !

Aujourd’hui, nous avons la proportionnelle et la parité pour les élections européennes, régionales, municipales, et pour une partie des sénatoriales, le scrutin uninominal à deux tours pour les élections législatives et les cantonales.

Je m’inquiète beaucoup pour nos amis députés, eu égard aux perspectives que vous affichez aujourd'hui. En effet, nous ne pourrons pas garder des députés qui seraient les seuls à être élus au scrutin uninominal.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Qui a instauré la proportionnelle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

La seule solution qui s’imposera à nous, c’est la proportionnelle intégrale pour toutes les élections.

Ce ne sera pas très positif, me semble-t-il, pour augmenter le niveau de participation aux élections, mais quand je vois la facilité avec laquelle nous avons fait les listes régionales, mes chers collègues, je ne doute pas de l’efficacité d’un tel système…

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Quant aux conseillers territoriaux, c’est encore une invention technocratique ! Ils seront, au minimum, quinze conseillers pour les petits départements, nous dit-on ! Le mien en compterait donc quinze. La ville de Cahors – 20 000 habitants – compte trente-trois élus.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Cela fait beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Comment gérer un département, compte tenu de toutes les compétences que vous lui avez transférées, avec quinze élus ? Je considère, pour ma part, que c’est une mission impossible.

Pour la région Midi-Pyrénées, qui compte huit départements et qui est plus grande que la Belgique, vous prévoyez 182 conseillers territoriaux au minimum. Avec quel statut ? Compte tenu de la masse de travail et des compétences exercées, je ne vois pas d’autre solution que d’avoir des conseillers territoriaux retraités ou fonctionnaires.

Au plus haut niveau, on nous traite de ringards et de conservateurs. Donnez l’exemple, monsieur le ministre !

La suppression envisagée de la clause générale de compétence ne concerne pas les communes. Celles-ci, y compris les plus petites, pourront ainsi conserver leur budget social, dont je vous rappelle qu’il est alimenté par la vente des concessions funéraires…

Au moment où le Gouvernement prétend lutter contre les archaïsmes, cette survivance d’un autre âge lui apparaît sans doute résolument moderne !

Arrêtez d’agir ainsi et vous gagnerez en crédibilité !

Pour en revenir aux compétences des conseils généraux, je veux distinguer deux catégories de nature bien différente.

Je considérerai, d’abord, celles que je qualifierai de « plein exercice » assumées par les départements dans le cadre d’une large autonomie. Il s’agit de l’entretien et de la construction des routes, des collèges, des transports scolaires... Pour l’ensemble de ces missions, nous effectuons des investissements et nous mettons en place des services en fonction de nos choix et de nos moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

M. Gérard Miquel. Je vais conclure, madame la présidente, mais hier les orateurs ont largement dépassé leur temps de parole ! Donc je me permets, sur un sujet aussi important, de le dépasser également.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Ensuite, il y a les compétences, principalement en matière sociale, pour lesquelles nous sommes tributaires de tarifs et de montants définis par l’État sur le plan national.

Qu’on ne se méprenne pas : je ne m’insurge pas contre l’application de critères identiques en tout point du territoire national ; je demande simplement à l’État d’aller au bout de sa démarche et d’être cohérent !

Pourquoi attendez-vous des départements et des régions qu’ils participent au financement des routes nationales et des lignes à grande vitesse, alors qu’il s’agit de compétences de l’État ?

Nous sommes loin de l’autonomie financière prévue dans la loi !

Dans les domaines où l’État garde l’autorité de fixer les règles que les collectivités ont ensuite pour tâche de mettre en œuvre, il se doit de prévoir les compensations financières à l’euro près.

Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Ne soyez pas impatients, chers collègues, j’en viens à ma conclusion !

Les collectivités ont démontré, tout au long de ces décennies, leur capacité à gérer au plus près des citoyens, souvent bien mieux que l’État ne le faisait lui-même. Elles ont également su engager des actions innovantes, répondant aux besoins d’un large public.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

L’Histoire retiendra que des hommes visionnaires ont mis en œuvre la décentralisation : François Mitterrand, Pierre Mauroy et Gaston Defferre. D’autres l’ont approfondie, tel Jean-Pierre Raffarin.

Monsieur le ministre, avec nos propositions, nous voulons vous aider pour que vous ne soyez pas, demain, celui qui aura mis en terme à cette belle aventure humaine qu’est la décentralisation.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention en évoquant un sujet qui n’a été que très peu abordé jusqu’à présent, à savoir les pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

La majorité de ces pays fonctionnent bien, mais d’autres fonctionnent moins bien. Toutefois, ce n’est pas une raison suffisante pour envisager de les supprimer.

Au nom de la délégation parlementaire à l’aménagement et au développement durable du territoire du Sénat, qui existait encore voilà quelques mois, j’avais déposé, en juin 2006, un rapport d’information intitulé « Quel avenir pour les pays ? ». Ce rapport avait nécessité l’audition de plusieurs responsables de pays de tous horizons et de toutes tailles. Je tiens à rappeler les points incontestables que j’avais alors soulignés.

Les pays constituent un bon outil de réflexion, d’initiative et de coordination de projets pour un certain nombre de communautés de communes, auxquelles se joignent très souvent des communes isolées qui n’ont pas souhaité adhérer à un EPCI. Compte tenu d’un nombre d’emplois réduit, ils affichent un coût de fonctionnement extrêmement faible – avec très peu d’emplois – comparé à celui des communautés de communes, qui se sont souvent dotées de structures très étoffées et budgétivores.

Leurs champs de compétences sont variés et souvent pertinents : ils répondent aux besoins de la population d’un « bassin de vie » que la commune ou l’intercommunalité ne peuvent, seules, satisfaire et pour lesquels le département ou la région ne constituent pas un échelon suffisant de proximité.

On compte aujourd’hui en France plus de 350 pays, couvrant près de 80 % du territoire, généralement reconnus par les élus locaux comme les lieux d’exercice d’une « démocratie de proximité ».

Le texte prévoit de maintenir pendant un an les pays qui existent et d’empêcher la création de toute nouvelle structure. Toutefois, passé ce délai, on ne pourra contraindre les pays constitués sous forme d’association qui le souhaitent à passer des conventions avec les collectivités quand leurs compétences seront définies. Les associations, quelles qu’elles soient, pourront contractualiser avec les régions, les départements et les communautés de communes, comme elles le font aujourd’hui lorsqu’elles sont subventionnées.

Monsieur le ministre, il faut favoriser le maintien des pays, car les élus souhaitent la poursuite de leurs missions. Pouvez-vous me rassurer à cet égard ?

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Sans problème !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Par ailleurs, je tiens à vous livrer quelques-unes des réflexions dont m’a fait part mon collègue Jean-Claude Etienne, car il ne pouvait être présent cet après-midi.

À ses yeux, l’élu territorial constitue un point de cristallisation de ce texte. Jean-Claude Etienne a cependant le sentiment, après avoir entendu ses collègues, que c’est sur le mode de désignation de ce nouvel élu, à un ou deux tours, que porte l’essentiel de la problématique.

Il reste que, sur ce point comme sur toutes les questions à propos desquelles il existe une divergence entre majorité et opposition, le Gouvernement a fait preuve d’un esprit d’ouverture. La plupart d’entre nous, quelle que soit notre appartenance politique, avons, dans la tradition de la Haute Assemblée, la volonté de construire, et ce en dépit de toutes les difficultés qui peuvent se présenter.

Que le Sénat tout entier s’applique à dégager quelques convergences salvatrices pour notre territoire, et une fois encore la Haute Assemblée méritera le titre de « Grand Conseil des communes de France » que Gambetta lui avait décerné il y a plus de cent ans ! À cet égard, l’intervention de Philippe Richert a été à haute valeur ajoutée.

Un point qui pourrait sembler de détail mérite tout de même qu’on s’y arrête : la place et le rôle des petites communes dans ce qui fait le plus consensus ici, à savoir l’intercommunalité.

Si la commune demeure la pierre angulaire de la vie de nos territoires, l’intercommunalité en est devenue le prolongement opérationnel, destiné à pouvoir faire à plusieurs ce que la commune ne peut réaliser seule.

Vous l’avez rappelé hier en début d’après-midi, monsieur le ministre, pas plus aujourd’hui qu’hier on n’oppose commune et intercommunalité. Mais il est vrai que l’esprit intercommunal peut légitimement se nourrir d’autres attendus que le seul esprit communal, et l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel pour les communes les plus peuplées peut, de ce point de vue, être entendue favorablement.

Au moment où l’intercommunalité va se généraliser sur l’ensemble du territoire, vous devez être attentif aux quelques souffrances existentielles qui se sont fait jour chez les élus des communes les plus petites dans certains conseils communautaires. Tout pouvant se décider sans elles, ces petites communes ont parfois le sentiment d’être des laissés-pour-compte, les parents pauvres ou les oubliés de l’intercommunalité.

Dans la Marne, département à caractère rural marqué, il a été observé que plusieurs petites communes ne participaient même plus aux conseils communautaires.

M. le ministre s’étonne.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Tout récemment, le maire d’une de ces petites communes a saisi l’occasion des effluves médiatiques du cinquantième anniversaire de la mort d’Albert Camus pour le citer : « La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. » Il a ajouté : « Parce que minoritaires, nous avons parfois le sentiment de ne pas être protégés par l’intercommunalité, ce qui peut nous conduire à la rejeter. »

Certaines communautés de communes fortement touchées par cette conséquence délétère de l’intercommunalité mal vécue y ont remédié avec succès en créant au sein du bureau même de l’EPCI une vice-présidence dédiée aux petites communes et désignée parmi leurs représentants.

En ce qui concerne l’attribution maximale de 49 % des sièges à une seule commune, il conviendrait d’en ramener le taux à 33 %, préservant ainsi mieux les petites communes des accords orchestrés par les plus grandes. En l’occurrence, la voie réglementaire, plutôt que législative, ne pourrait-elle, sur ce point, monsieur le ministre, trouver matière à s’exprimer ? C’est en tout cas la question que se pose Jean-Claude Etienne.

Le développement intelligent de nos territoires, aux niveaux tant communal et intercommunal que régional et départemental, relève d’une bonne coordination, garantissant la cohérence des actions qui y sont menées. C’est dire combien cette réforme est digne du plus grand intérêt et peut prendre un relief porteur d’espoir dans la mesure où ce projet de loi bénéficiera des enrichissements rédactionnels que le Sénat tout entier lui apportera.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir sur l’impact globalement négatif que la réforme territoriale dont nous discutons ne manquera pas d’avoir pour ce qui concerne l’égal accès des hommes et des femmes aux mandats électifs et aux responsabilités politiques si le Gouvernement ne revient pas sur le mode de scrutin que, pour l’instant, il envisage d’appliquer à l’élection des conseillers territoriaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je placerai mon intervention – vous ne vous en étonnerez pas, mes chers collègues, de la part de la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ! – sous l’égide de deux femmes célèbres, l’une appartenant à l’Histoire, l’autre à la légende : Olympe de Gouges et Pénélope.

Olympe de Gouges, grande figure du féminisme, a été l’une des premières femmes à revendiquer l’égalité politique pour les femmes, avec cette formule frappante, inscrite à l’article 10 de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne : « La femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune. »

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Elle monta effectivement sur l’échafaud le 3 novembre 1793, mais n’eut jamais l’occasion de s’exprimer, en citoyenne, à la tribune.

Deux siècles plus tard, mesurons le chemin parcouru ! Je suis fière de pouvoir m’exprimer, en qualité de présidente de la délégation aux droits des femmes, à la tribune de cette assemblée, qui compte maintenant 22, 4 % de sénatrices. Vous pouvez apprécier la marge de progrès !

Est-ce à dire que la partie est gagnée ? Non, car rien n’est jamais acquis, et nous devons sans cesse remettre l’ouvrage sur le métier.

Qui ne connaît la figure de Pénélope, l’épouse d’Ulysse, qui défaisait la nuit le tissage qu’elle avait patiemment réalisé dans la journée, pour retarder l’échéance abhorrée où elle devrait se choisir, parmi les prétendants, un nouvel époux ?

J’ai l’impression que le Gouvernement est aujourd’hui dans la posture de Pénélope : d’une main, il propose de favoriser la place des femmes dans les conseils municipaux des petites communes, ainsi que dans les conseils communautaires, mais, de l’autre, il propose, pour l’élection des conseillers territoriaux, un mode de scrutin qui se traduira inévitablement par un recul de la place des femmes à l’échelon des régions, où la parité est pourtant devenue une réalité effective.

Et, contrairement à ce que certains ont été tentés d’affirmer, la progression des femmes dans les conseils municipaux des petites communes ne saurait en aucun cas compenser la régression de la place des femmes à l’échelon régional, encore moins la justifier.

Globalement, votre projet se traduira donc, monsieur le ministre, par une régression de la parité et ce triste constat est, vous le savez, très largement partagé.

Dès le 23 octobre 2009, Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale, Mme Françoise Vilain notre homologue au Conseil économique, social et environnemental, et moi-même avons diffusé un communiqué de presse commun pour nous inquiéter d’un projet qui aura pour effet quasiment mécanique d’exclure les femmes des responsabilités départementales et régionales.

Les évaluations auxquelles a procédé l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, service du Premier ministre, montrent en effet que les scrutins uninominaux ne se prêtent pas à des dispositifs contraignants garantissant la parité et qu’ils conduisent toujours les partis politiques à sacrifier les femmes. Regardez les résultats des dernières élections cantonales : 12, 3 % de femmes élues !

Le dispositif que vous proposez, qui fait la part belle à ce type de scrutin, permettra peut-être une légère amélioration de la participation des femmes au niveau du département, mais cela se traduira inévitablement par une forte régression au niveau des conseils régionaux, alors que ceux-ci sont aujourd’hui parvenus, avec 47, 6 % de femmes, à une parité effective. Cette régression n’ira-t-elle pas jusqu’à remettre en question la parité des exécutifs régionaux, pourtant garantie par la loi de janvier 2007 ?

Plus grave encore : comment concilier ce retour en arrière avec le principe capital introduit dans la Constitution en 1999, grâce au gouvernement Jospin : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives » ?

Je n’évoquerai qu’en passant le caractère très particulier, au regard de notre tradition politique, du mode de scrutin à un tour que vous envisagez. Ceux, et ils sont nombreux, qui fréquentent le Palais du Luxembourg ont peut-être remarqué, dans l’un des couloirs du sous-sol, au cœur d’une exposition consacrée aux représentations de Marianne, cette belle affiche où la République piétine le scrutin à un tour avec cette légende : « Le scrutin majoritaire à deux tours écrasera la réaction. »

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le ministre, nous vous invitons donc à revoir le mode de scrutin des conseillers territoriaux auquel une majorité de parlementaires est maintenant opposée, à cause de la parité, mais aussi pour bien d’autres raisons.

Nous souhaitons également vous inciter à aller jusqu’au bout de votre démarche pour assurer la parité dans les conseils municipaux et à prendre en compte la demande de l’Association des maires ruraux de France, qui propose d’élargir le scrutin de liste et l’obligation de parité à l’ensemble des communes de moins de 3 500 habitants.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Ainsi pourrions-nous enfin laisser Pénélope prendre un repos bien mérité et permettre aux femmes de monter à parité avec les hommes aux tribunes de nos différentes assemblées locales, comme l’avait souhaité Olympe de Gouges. §

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion générale de ce projet de loi a été de haute tenue ; je tenais à le dire d’entrée de jeu aux trente-cinq membres du Sénat qui se sont successivement exprimés à cette tribune. Je les remercie d’avoir apporté leur expérience, leur savoir-faire et témoigné de leur engagement dans une République décentralisée.

Je salue M. Pierre Mauroy, ancien Premier ministre, qui a été le premier à travailler sur le sujet. J’ai d’ailleurs eu l’honneur de faire partie, au titre des personnalités qualifiées, de la commission pour l’avenir de la décentralisation qu’il a présidée et animée, et au sein de laquelle nous avions travaillé ensemble dans de bonnes conditions. Je propose que nous fassions preuve, dans ce débat, de la même ouverture d’esprit et de la même disponibilité.

Je salue aussi M. Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre de l’intérieur, à l’origine de la loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale. Alors membre d’un gouvernement minoritaire au Sénat, vous aviez su faire preuve d’ouverture à l’égard du rapporteur, M. Daniel Hoeffel, dont je salue la présence dans la tribune officielle

Applaudissements

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

À l’occasion de cette discussion générale, la Haute Assemblée a parfaitement tenu le rôle que lui assigne spécifiquement la Constitution, à savoir la représentation des collectivités territoriales de la République.

Je remercie le rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois, de nous avoir fait bénéficier de sa connaissance d’élu local. S’il est aujourd’hui maire d’une grande ville, il a commencé sa vie politique dans un canton extrêmement rural, situé à la limite d’un département qui ne l’est pas moins !

Je le remercie également du soutien qu’il a apporté à la démarche et à l’ambition du Gouvernement en matière de décentralisation, soutien qui est pour nous d’un très grand prix. À travers les amendements que la commission des lois a acceptés, il a très clairement montré son souci de pragmatisme, de respect des libertés locales, de souplesse et de simplification.

Je me réjouis notamment du fait qu’il ait qualifié la création du conseiller territorial d’acte de confiance dans la démocratie locale ; c’est bien vrai !

J’ai entendu, comme il est normal, beaucoup de choses à ce sujet, mais le projet du Gouvernement est simple et cohérent. C’est le constat de ce qui existe, à savoir deux couples institutionnels qui agissent, le premier étant celui que constituent la commune et l’intercommunalité.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Ce n’est peut-être pas vrai chez vous, mais, dans les quatre-vingt-dix-neuf autres départements, les communes et l’intercommunalité sont actives. Cela ne pose donc aucun problème.

J’aime bien écouter tout le monde et je le fais toujours avec intérêt, mais j’espère être en mesure d’aller moi-même au bout de mon propos…

Je disais donc que les communes et l’intercommunalité forment le premier couple. C’est tellement vrai que ce sont les mêmes élus qui gèrent les deux et, si le projet du Gouvernement est adopté, ils seront élus ensemble le même jour.

Quant au second couple, celui que composent les départements et la région, il sera également animé et géré par les mêmes élus désignés le même jour.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur, vous avez tout à fait raison de dire que la création du conseiller territorial est un acte de confiance dans la démocratie locale et de renforcement de la décentralisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mais tout dépend de la façon dont il est élu !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je ne vous comprends pas, madame Gourault. Je croyais que vous étiez favorable à cette réforme puisque vous l’avez, avec moi, soutenue lors de l’élection présidentielle…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mais tout dépend, disais-je, de la façon dont ce conseiller territorial est élu !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

J’y viendrai tout à l’heure. Mais, d’une façon ou d’une autre, on est toujours élu !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Il en ira de même pour les conseillers territoriaux. Nous prendrons le temps qu’il faut pour en parler.

Comme l’a dit le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, le Gouvernement est, pour l’essentiel, favorable aux amendements que la commission a, le plus souvent, adoptés sur proposition de son rapporteur. Les seuls points sur lesquels il existe entre nous des nuances concernent les statuts des métropoles et des communes nouvelles, mais le débat est là pour nous permettre de trouver la bonne solution.

Je remercie M. Charles Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances, d’avoir démontré avec force et conviction la cohérence entre, d’une part, la réforme de la taxe professionnelle, que le Parlement a adoptée et que le Conseil constitutionnel a validée, et, d’autre part, la réforme institutionnelle des collectivités territoriales. Les amendements que cette commission a adoptés sur sa proposition viendront renforcer encore la cohérence entre ces deux démarches.

Je remercie M. Alain Lambert de sa contribution à nos travaux, à la fois comme ancien ministre du budget, comme président de la Commission consultative d’évaluation des normes et comme président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Je le remercie également d’en appeler tout à la fois au pragmatisme et à l’audace.

Je voudrais remercier aussi Mme la présidente Nicole Borvo Cohen-Seat, dont j’écoute toujours les interventions avec beaucoup d’intérêt, même si, vous le savez, madame, nous ne sommes pas très souvent d’accord… C’est ainsi !

Je l’avoue, madame la sénatrice, j’aurais aimé vous entendre formuler quelques propositions plus concrètes. Mais je suis sûr que les débats vous permettront d’en exposer. Je me réjouis néanmoins d’avoir pu trouver, parmi vos amendements, quelques rappels utiles. Je pense, notamment, à la consultation nécessaire des instances paritaires. En effet, c’est en associant les fonctionnaires territoriaux que nous réussirons la réforme. À cet égard, je m’inscris dans la continuité de la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, que le Parlement avait adoptée sur la proposition de M. Brice Hortefeux.

Monsieur Maurey, nous sommes absolument d’accord sur l’essentiel. Oui, nous avons un devoir collectif qui est de réussir ensemble une réforme que vous avez vous-même qualifiée d’indispensable et de nécessaire.

Je vous remercie du soutien que vous apportez au principe de la création du conseiller territorial, en soulignant qu’il s’agit de la clé de voûte de la réforme. C’est bien ce principe du conseiller territorial que le Gouvernement vous propose d’approuver en adoptant ce projet de loi puisqu’un second texte traitera spécifiquement de la définition du conseiller territorial et, surtout, de son mode d’élection.

Je suis sûr que, le moment venu, nous saurons définir ensemble le mode de scrutin répondant le mieux aux exigences qui doivent nous guider et que pratiquement tous les orateurs ont rappelées : la représentation de l’ensemble des territoires, la prise en compte des réalités démographiques, le respect du pluralisme et l’objectif de parité.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Nous ne sommes pas encore parvenus à un texte définitif, mais nous pouvons d’ores et déjà affirmer aujourd'hui les principes qui doivent nous guider dans la recherche du mode de scrutin à retenir pour l’élection du conseiller territorial.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Jean-Pierre Sueur, je vous remercie de vos multiples interventions dans ce débat. Comme toujours, elles sont frappées au coin du bon sens, de l’expérience. Même s’il nous arrive d’avoir des points de vue très différents, je sais que vous êtes un législateur attentif et précis. Par conséquent, dès lors que vous n’obéirez pas à un esprit de système et que vous ne pratiquerez pas l’opposition automatique, nous trouverons les moyens de progresser ensemble. C’est, en tout cas, ce à quoi je vous invite.

M. Jean-Michel Baylet n’a pu revenir cet après-midi, ce qui est très dommage pour nous tous. J’ai écouté attentivement son intervention, qui, je le sais, était inspirée par l’expérience de ses responsabilités locales. Je n’oublie pas non plus qu’il a été, voilà quelques années, secrétaire d'État aux collectivités locales.

Il a exprimé un désaccord de fond avec l’institution du conseiller territorial. J’en prends acte, mais j’espère que les débats permettront de rapprocher nos positions et de le convaincre que cette mesure renforcera la décentralisation, car, loin de nuire au département, cet élu enraciné dans une circonscription sera aussi ouvert aux enjeux généraux.

Je remercie M. Jean-Louis Masson d’avoir apporté un soutien très clair à plusieurs dispositions importantes du texte, inspirées par les travaux du comité Balladur, notamment l’aménagement de la clause de compétence générale et le conseiller territorial.

Je remercie le président Gérard Longuet d’avoir souligné la cohérence du calendrier de la réforme, ce qui me permet de répondre à l’ensemble des orateurs qui ont interpellé le Gouvernement sur ce thème.

Ce dernier avait deux options. La première était de proposer un texte unique, mais nécessairement très long et complexe, que l’on n’aurait pas manqué de qualifier de confus. La seconde consistait à proposer un ensemble de plusieurs textes liés entre eux, mais formant chacun une entité homogène. C’est cette solution qui a été retenue, avec le souci de la transparence et de la lisibilité puisque ces quatre textes ont été déposés en même temps sur le bureau de la Haute Assemblée.

Vous connaissez maintenant les intentions du Gouvernement et les choses sont claires. Il nous restera à travailler sur les compétences et les cofinancements. Chacun comprendra que nous ayons fait le choix de poursuivre la concertation. Toutefois, comme nous l’avons déjà indiqué, et le ministre de l’intérieur l’a encore rappelé hier à cette tribune, nous ferons en sorte que les principales orientations soient clarifiées au moment de l’adoption du présent texte. Ainsi sera assurée la cohérence de l’ensemble de la réforme. Au moment où la loi institutionnelle sera votée, tous les textes seront connus.

M. Longuet a très clairement expliqué la forte logique de cette réforme, l’organisation de nos collectivités autour de deux blocs, chacun scellé par l’unité de leurs élus. C’est là l’essentiel.

J’ai bien noté son attachement à une métropole dotée des moyens de ses ambitions et j’ai bien compris qu’il s’agissait d’une position personnelle, ne recouvrant pas nécessairement les choix de la commission des lois. Le Gouvernement a trouvé dans son projet, notamment en ce qui concerne les métropoles, un équilibre entre les positions des élus, exprimées notamment par les organisations d’élus, et les conclusions du comité Balladur. On peut aller plus loin ; le dialogue n’est pas fermé et il n’y a aucune opposition de principe de notre part. Il appartiendra alors aux parlementaires de faire évoluer les choses. Comme l’a dit ici même M. Brice Hortefeux, le Gouvernement vient devant le Parlement avec le désir d’avoir un vrai débat, dans un esprit de dialogue et d’ouverture.

J’ai retrouvé dans l’intervention de Mme Beaufils les mêmes critiques que dans celle de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais, après tout, il n’y a pas là de quoi être surpris. J’ai bien compris qu’aucune disposition ne trouvait grâce à ses yeux. La longueur des débats nous permettra peut-être d’avoir au moins un point d’accord. À défaut, nous devrons assumer nos désaccords !

Madame Gourault, vous avez d’abord rappelé que les travaux et les débats sur cette réforme avaient été nombreux, et qu’ils s’étaient déjà étendus sur plusieurs mois. Cela prouve que le Gouvernement ne cherche pas à passer en force, et je vous remercie de l’avoir ainsi souligné.

Pour élaborer de projet de loi, nous avons effectivement attendu la fin des travaux des associations d’élus, comme l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France et l’Association des régions de France, de la mission temporaire sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales, présidée par M. Claude Belot et dont vous avez été rapporteur avec M. Krattinger, et du comité Balladur.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je vous remercie d’avoir relevé le sens du dialogue et de la concertation dont a fait preuve le Gouvernement. Sachez que cet esprit restera présent en permanence. Je vous sais d’ailleurs gré d’avoir cité le Président de la République et le Premier ministre dans votre intervention. Tout au long de la discussion du texte, vous pourrez vérifier que le même esprit nous anime.

Monsieur Mauroy, c’est toujours avec grand intérêt que nous vous écoutons. D’ailleurs, l’hémicycle était plongé dans un silence, sinon religieux

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Pour tout dire, j’ai trouvé votre intervention un peu dure. Évoquer une contre-réforme, cela manquait peut-être de nuance ! J’en suis sûr, vous vous dites que différentes propositions peuvent être améliorées, sans rejeter, d’une façon générale et absolue, l’ensemble du texte.

Les critiques sont normales ; il faut les accepter, car elles nous permettent de progresser. Toutefois, il ne me semble pas possible de parler, concernant ce projet de loi, de « recentralisation ». En effet, recentraliser, je le dis très clairement, ce serait reprendre ce qui a été donné. Or le Gouvernement ne reprend rien ! Les collectivités locales garderont les compétences que différentes lois leur ont accordées au cours des vingt dernières années.

Le conseiller territorial sera un élu puissant. Comment peut-on prétendre que la création d’un élu puissant est un acte de recentralisation ? On peut s’opposer au principe de cette création, mais on doit néanmoins convenir que la libre administration des collectivités locales n’est, à aucun moment, remise en cause dans ce texte.

Je remercie M. de Montesquiou du soutien qu’il a apporté à la réforme. Le Gouvernement partage son diagnostic et nous parviendrons probablement à trouver des réponses communes. Son volontarisme faisait en tout cas plaisir à entendre !

M. Sido a eu raison de rappeler, en tant que président du groupe de la droite, du centre et des indépendants de l’Assemblée des départements de France, que les présidents de conseil général étaient nombreux à soutenir la création des conseillers territoriaux, la considérant comme une chance pour les départements. Le Gouvernement a entendu leur souhait de conserver une capacité d’initiative, laquelle représente un élément de souplesse : c’est l’objet de l’article 35 du projet de loi.

Monsieur Vera, vous dénoncez la mort des communes et des départements, alors que, précisément, le Gouvernement a souhaité conserver et conforter ces deux échelons en proposant une réorganisation de notre paysage institutionnel autour de deux pôles complémentaires qui conserveront et les communes et les départements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Vous le savez parfaitement, monsieur Peyronnet !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Mais bien sûr que non ! Tout le débat nous permettra de vous en convaincre !

Madame Goulet, vous souhaitez une réforme de la carte cantonale et une accélération dans la mise en place de l’intercommunalité. Ce sont précisément deux éléments très forts de la réforme que vous propose le Gouvernement. Je le rappelle, réforme ou pas, nous ne pouvons pas conserver la carte actuelle des cantons.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Il faudra procéder à un redécoupage. Dans une démocratie, ce sont d’abord les citoyens qui comptent. Bien sûr, d’autres critères, notamment celui des territoires, peuvent ensuite être pris en considération. Chacun ici, me semble-t-il, en sera d’accord.

Monsieur Collombat, je ne peux pas vous laisser qualifier ce projet de loi de « fric-frac électoral ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

C’est le président du Sénat qui a utilisé cette expression !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Vous avez dû mal comprendre !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

M. Pierre-Yves Collombat. Il est vrai qu’il ne la reprenait pas à son compte !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Quoi qu’il en soit, il n’y a aucun « fric-frac électoral » ! D’ailleurs, ce texte ne vise pas à déterminer le mode d’élection du conseiller territorial.

Encadrer les cofinancements ne signifie pas qu’il y ait un financeur unique. Il s’agit simplement d’organiser des « tours de table » plus simples, pour permettre aux élus de mettre en œuvre leurs projets pendant la durée de leur mandat, tout en évitant la mise en concurrence des collectivités que nous constatons tous sur le terrain.

Monsieur Mézard, vous vous êtes montré très sévère, mais il est toujours très difficile, pour l’avocat, de se transformer en procureur ! C’est un exercice auquel il n’est pas habitué et au cours duquel il est facilement amené à aller trop loin.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Il convenait donc de déceler dans le non-dit de vos propos vos appréciations positives sur la réforme.

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

C’est vrai, cette réforme suit un fil conducteur : notre volonté d’enraciner la décentralisation en la clarifiant et en la simplifiant.

Oui, le calendrier des différents volets de la réforme obéit à une cohérence, nous l’avons rappelé tout au long de la discussion générale.

Quant à votre souci de renforcer la péréquation, vous le savez, je le partage. J’ai d’ailleurs apprécié que le Président de la République ait rappelé cette exigence à l’occasion des vœux qu’il a présentés à la France rurale, la semaine dernière, à Mortagne-au-Perche.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Madame Goulet, vous avez témoigné ce jour-là d’un enthousiasme communicatif !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Adnot a évoqué la suppression de la taxe professionnelle. Le calcul de la compensation relais, puis celui de la garantie individuelle des ressources apportent à chaque collectivité l’assurance du maintien de ses ressources de l’année dernière, ce qui est tout de même appréciable en période de crise économique et à un moment où les recettes fiscales de l’État ont chuté de 25 % en 2009 : c’est dire l’importance de l’effort que consent celui-ci.

Si toutes les critiques sont admissibles, il convient de reconnaître au moins la volonté de l’État de garantir les ressources fiscales des collectivités locales, alors que les siennes se sont effondrées du quart de leur montant.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Voilà vingt ans que l’on nous sert cet argument ! En fait, c’est l’État qui organise son insolvabilité !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. J’ai raison, vous le savez parfaitement, monsieur Collombat ! J’espère que vous me citerez quand vous organiserez des réunions dans le Var !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Buffet, c’est avec plaisir que je vous ai entendu citer Alain. Oui, « l’optimisme est de volonté » : c’est bien ce qui nous anime dans cette réforme.

Je vous remercie d’avoir rappelé à votre tour, d’une part, la concertation intense à laquelle la réforme a donné lieu avant que le Sénat en soit saisi et, d’autre part, les principes autour desquels elle s’articule.

Je dirai que la métropole constitue un projet indispensable pour nos agglomérations. On parle de « fait urbain » ; il s’agit donc d’une donnée qu’il convient d’organiser. Cela ne signifie pas pour autant que nous n’allons pas renforcer les territoires ruraux. N’opposons pas les territoires les uns aux autres, réunissons-les ! C’est par l’alliance des territoires que la France sera forte.

Vous l’avez bien compris, notre volonté est d’adapter notre organisation institutionnelle à la diversité de nos territoires, tout en assurant leur solidarité.

Je souhaite rendre hommage au travail que M. Krattinger a accompli en qualité de rapporteur de la mission Belot, avant de le rassurer sur un point : oui, l’État se réforme avec une grande détermination, notamment en réorganisant ses services déconcentrés.

(Même mouvement.) Je note donc avec intérêt que vous ne souhaitez plus maintenir certains services !

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Tout à l'heure, monsieur Miquel, vous avez déclaré : « Que l’État commence par supprimer ses propres services déconcentrés ! » §Le problème, c’est que vous demandez systématiquement leur maintien lorsqu’ils sont menacés ! §

M. Krattinger a souligné un point très important, qui nous concerne tous mais qui représente un chantier extrêmement difficile : c’est vrai, il faut à tout prix adapter nos réglementations à la diversité des territoires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Les mêmes règles ne peuvent régir une commune rurale de quelques centaines d’habitants et une grande ville ; M. le Président de la République l’a également rappelé à Mortagne-au-Perche la semaine dernière. Concernant les modes de garde de la petite enfance, par exemple, le nombre d’enfants, les façons de faire et les horaires varient énormément d’un territoire à un autre.

Je souhaite que la préparation du projet de loi relatif à la répartition des compétences nous permette d’apporter des réponses à toutes ces questions.

M. Krattinger a fortement critiqué la création du conseiller territorial Beaucoup d’autres l’ont fait aussi, mais plusieurs ont avoué avoir été en même temps conseiller général et conseiller régional, comme ce fut d’ailleurs mon cas à une certaine époque.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Je ne suis pas sûr que vous soyez un spécialiste de la Contre-Réforme, monsieur Collombat !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Alors, nous pourrons organiser un colloque sur ce sujet, si vous le souhaitez !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Selon moi, le conseiller territorial s’affirmera par lui-même, par la puissance qui lui sera reconnue, comme un acteur dynamique de la décentralisation.

Monsieur Braye, je vous remercie d’avoir souligné le courage de cette réforme et la nécessité d’achever la couverture du territoire en structures intercommunales.

J’ai bien compris votre position s’agissant de la composition des conseils communautaires. Nous évoquerons cette question très importante au cours de la discussion des articles, mais, je voudrais le souligner dès maintenant, le fait que les conseillers communautaires soient désormais désignés directement par les citoyens le jour de l’élection municipale aura forcément des conséquences et il faudra obligatoirement tenir compte de la démographie.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Absolument, il faut en « tenir compte » !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

On ne peut pas rejeter le critère démographique, qui est le premier dans une démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Il faut en « tenir compte », mais pas par la proportionnelle !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Il faut en tenir compte proportionnellement !

Rires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Nous trouverons une solution au cours de la discussion des articles.

Mme Voynet a contesté la politique de réforme et son rythme. Elle reconnaît cependant que nous n’agissons pas dans la précipitation : la concertation a été longue et intense et le Gouvernement a fait le choix de ne pas engager la procédure accélérée sur ce texte, afin de laisser au Parlement tout le temps de trouver les bons accords, les justes équilibres et les solutions adéquates.

Fallait-il se lancer, a demandé M. Doligé, dans l’aventure de la réforme ? Le Gouvernement apporte la même réponse que lui : le statu quo n’était plus possible. Je le remercie du soutien qu’il nous apportera tout au long de cette discussion.

Comme M. Collomb, nous croyons à l’utilité du débat parlementaire et nous formons le vœu qu’il ne soit pas inutilement entravé.

Comme lui également, nous sommes soucieux de l’excellence de tous nos territoires, dans la diversité et la solidarité.

Enfin, le Gouvernement n’est pas hostile à l’idée d’aller encore plus loin concernant les métropoles. Représentant la collectivité qui serait seule concernée par une telle avancée, j’approuve, je le répète, à titre personnel, cette proposition.

M. Richert a rappelé, avec l’honnêteté qui le caractérise, que jamais l’État ne s’était engagé aussi loin dans la voie de la réforme. Il en tire une conclusion que j’approuve, à savoir que les collectivités ne peuvent rester au bord du chemin. Nous souhaitons adapter nos institutions à tous nos territoires, dans leur diversité, notamment à celui dont il est l’élu.

Que M. Lozach sache que nous n’enterrons personne et que nous ne déracinons pas les élus. Au contraire, nous revendiquons la décentralisation et nous voulons territorialiser tous les élus, c’est-à-dire les enraciner sur un territoire ; c’est même tout ce qui justifie l’institution du conseiller territorial : chacun reconnaît que le lien des actuels conseillers régionaux avec les territoires est trop faible.

Monsieur Bernard-Reymond, comme nombre de vos collègues et fort de votre expérience, vous confirmez la nécessité de cette réforme et je vous en remercie.

Vous avez fait part d’un certain nombre de réserves à propos du mode d’élection du conseiller territorial. Le Gouvernement a mis une proposition sur la table, mais nous ne considérons pas ce texte comme abouti. Nous sommes ouverts au dialogue, et nous discuterons avec tout le monde, notamment avec vous.

Par ailleurs, je suis sensible à votre souci d’équilibrer les zones urbaines et les territoires ruraux. Je sais tous les combats que vous menez pour que cet équilibre soit réel, concret, tangible. Naturellement, cet équilibre a besoin d’infrastructures.

Je pense que M. Bérit-Débat a satisfaction s’agissant du schéma départemental de coopération intercommunale puisque le texte proposé par la commission des lois assure un rééquilibrage des pouvoirs entre le préfet et la commission des élus.

Je remercie M. Jacques Blanc d’avoir souligné, à la lumière de sa très grande expérience d’élu local, toutes les perspectives de progrès, toutes les chances que cette réforme offre à nos territoires. Le Gouvernement est sensible à sa préoccupation quant à une représentation équilibrée des territoires et à l’instauration d’un seuil minimal de conseillers territoriaux.

Monsieur Anziani, vous nous dites que cette réforme ne serait pas au cœur des préoccupations des Français ; mais à voir la passion que vous mettez dans cette affaire, je me dis qu’elle ne peut être sans lien avec les attentes qu’expriment vos électeurs…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Ça se voit, et c’est très bien ! Mais il est passionné parce que ses électeurs le poussent !

M. Alain Anziani sourit.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Vous nous dites que cette réforme serait sans rapport avec les priorités de l’action publique. Or les collectivités locales sont au cœur de la lutte contre la crise économique : par la formation, par l’insertion, elles sont des acteurs incontournables pour aider notre pays à sortir de la crise. Et c’est parce qu’elles sont au cœur de cette action publique que la réforme est indispensable.

M. Vestri a fort justement rappelé la richesse que constituent nos communes et la créativité d’une réforme d’abord dictée par l’intérêt de nos concitoyens. Croyez bien que c’est dans cet état d’esprit que travaille le Gouvernement.

Monsieur Miquel, j’ai vu que nous partagions beaucoup de constats, qu’il s’agisse du diagnostic ou de la nécessité de réformer l’organisation territoriale, et j’espère que nous pourrons converger vers les mêmes solutions.

C’est vrai que l’État fait un très gros effort de réorganisation. Depuis le 1er janvier, vous avez d’ailleurs pu constater sur les territoires la réorganisation des préfectures.

J’aimerais revenir sur les reproches que vous avez formulés au sujet du mode de scrutin prévu pour les conseillers territoriaux. Vous avez beaucoup critiqué la proportionnelle, mais je crois me souvenir que ce n’est pas nous qui avions institué ce mode de scrutin pour l’élection des députés…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Si nous sommes d’accord c’est parfait ! Je souhaitais juste le rappeler, car vous aviez oublié de le faire tout à l’heure.

Nous voulons simplement un mode de scrutin qui permette à la fois de créer des majorités, de faire en sorte que les territoires soient représentés et d’assurer la parité.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je reconnais que c’est la quadrature du cercle !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Le problème est bien posé. On attend la solution !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Ce n’est pas parce que c’est difficile que le Gouvernement renoncera ! C’est parce qu’on a trop longtemps renoncé que la situation est problématique aujourd’hui ; il faut au contraire aller au-devant des difficultés et essayer de trouver des solutions.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Fouché, s’agissant des pays, notre souhait est clair : nous voulons favoriser le plus possible l’intégration des compétences exercées par les pays aux structures intercommunales, …

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

… mais nous n’empêcherons pas le maintien des pays existants.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Madame André, je vous ai déjà répondu, mais je le répète : la parité est pour le Gouvernement un but qu’il ne perdra pas de vue.

Nous pouvons considérer que nous avons fait de grands progrès sur ce plan pour les élections municipales, mais je reconnais que ce n’est pas de même nature. En tout cas, il nous faudra également trouver pour l’élection des conseillers territoriaux des mécanismes permettant de répondre à l’exigence de parité.

Mesdames, messieurs les sénateurs, après cette longue discussion générale et cette réponse qui l’était sans doute un peu trop, je veux dire à chacune et à chacun d’entre vous que nous abordons véritablement ce débat avec un souci à la fois de dialogue, d’ouverture et d’efficacité.

Le Gouvernement n’a probablement jamais autant voulu soutenir la décentralisation : c’est en réformant et en adaptant son fonctionnement et son organisation que nous lui donnerons demain plus de vigueur, plus de vie et que nous la ferons mieux accepter par l’ensemble de nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pour nous permettre d’assister à la cérémonie des vœux du président et du bureau du Sénat ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.