Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 8 juillet 2011 à 9h30
Médecine du travail — Article 3

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Une telle unanimité est d’autant plus significative qu’elle s’est rarement manifestement lors de l’examen au Sénat du projet de loi portant réforme des retraites. Il n’en est que plus regrettable que, à l’Assemblée nationale, la majorité n’ait pas retenu le dispositif adopté ici en première lecture.

Le texte, tel qu’il nous revient de l’Assemblée nationale, a l’apparence de l’équilibre, mais il n’en a que l’apparence. En réalité, le partage des fonctions qui nous est proposé ne change rien : le système demeure figé.

On nous dit que ce choix est lié à la responsabilité de l’employeur concernant la sécurité dans l’entreprise ; cela est vrai, mais seulement dans « son » entreprise ! Or c’est de services interentreprises qu’il est question. Et un employeur n’est pas responsable de ce qui survient dans une autre entreprise que la sienne. Le droit ne connaît aucune responsabilité collective des employeurs en matière de santé et de sécurité. L’argument n’est donc pas recevable.

Si l’on pousse à son terme le raisonnement qu’a tenu la majorité à l’Assemblée nationale, et que peut-être elle tient malheureusement ici, les SST, les services de santé au travail, ne devraient pas même disposer d’un conseil d’administration paritaire puisque les employeurs sont seuls responsables de la sécurité et de la santé dans les entreprises…

Mais, comme il faut bien maintenir les apparences, on a trouvé un biais, car il ne faut surtout pas abandonner la présidence du conseil d’administration ! Ainsi, le président choisit le directeur, lequel, aux termes de l’alinéa 2 de l’article 9 de la présente proposition de loi, « met en œuvre, en lien avec l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail et sous l’autorité du président, les actions approuvées par le conseil d’administration dans le cadre du projet de service pluriannuel ». Le médecin du travail n’est même pas mentionné ! Toute l’autorité est dans les mains du président, systématiquement issu des rangs des employeurs.

Il s’agit d’une caricature de paritarisme ! Le représentant des syndicats de salariés à qui va échoir le poste de trésorier sera pris dans un piège. Il n’aura aucune autonomie ; il n’aura que le droit de refuser sa signature, ce qui n’aura pas grande conséquence.

Sans doute la transparence sera-t-elle améliorée, et c’est déjà une avancée considérable au regard des pratiques que nous connaissons. Mais il n’y en a pas d’autre !

Le texte que nous avions adopté était à la fois juste et astucieux.

Juste, parce qu’une présidence tournante instaurait un vrai paritarisme, élément important de dialogue social et gage d’équilibre comme d’efficacité. Pourquoi ce qui vaut pour tant d’organismes paritaires à l’échelle nationale, comme l’assurance chômage, qui gère des milliards d’euros, ne pourrait-il pas valoir pour les services de santé au travail ?

Astucieux, parce que nous avions trouvé le moyen d’assurer une vraie parité et une vraie transparence, en soumettant également à l’alternance la fonction de trésorier : quand le président était un employeur, le trésorier devait être un salarié, et réciproquement.

Que restera-t-il de cette réforme ? La conviction que, pour certains, rien ne doit troubler un système bien établi ! Pourtant, derrière cette question, en apparence purement administrative, ce qui est en jeu, c’est la santé et la sécurité des travailleurs.

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