Intervention de Annie David

Réunion du 8 juin 2010 à 21h30
Démocratie sociale — Article 6

Photo de Annie DavidAnnie David :

Nous voulons rendre les commissions paritaires obligatoires. C’est le principal grief que nous avons contre ce projet de loi, qui affirme leur caractère facultatif.

Cet amendement nous paraît fondamental, car la portée de la présente réforme est tout entière conditionnée par le caractère obligatoire ou facultatif de ces commissions.

Dans la rédaction actuelle du projet de loi, la mise en place de ces instances dépendra de l’aboutissement de négociations collectives, soit, concrètement, des accords que trouveront les partenaires sociaux. Or certaines organisations patronales, qui ne sont d’ailleurs pas, je le rappelle, les plus concernées par le texte, – à savoir le MEDEF et la CGPME – ont d’ores et déjà montré une hostilité totale à l’installation de ces commissions, contrairement à l’Union professionnelle artisanale, l’UPA, à la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, la FNSEA ou encore à l’Union nationale des associations de professions libérales, l’UNAPL.

En d’autres termes, la rédaction actuelle du texte est une pure mascarade : un droit virtuel est annoncé, mais il ne trouvera jamais – ou très rarement – à s’appliquer.

La seule manière de faire vivre ces commissions paritaires est de les rendre obligatoires ! II y va du respect du principe constitutionnel contenu dans l’alinéa 8 du préambule de la constitution de 1946, prévoyant que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

Ce droit ne peut pas, dans les TPE, être abandonné au bon vouloir des organisations représentant les employeurs, surtout lorsque celles-ci ne sont pas les principaux interlocuteurs des TPE. Il y aurait là un très fort risque de rupture d’égalité des salariés quant à l’exercice de leur droit syndical.

Selon une idée largement répandue chez nos collègues de la majorité, il n’est pas souhaitable d’imposer des dispositions par la voie législative. Il vaut mieux privilégier la négociation entre partenaires sociaux.

Dois-je vous rappeler, chers collègues de la majorité, que le droit du travail est destiné à régir les rapports entre deux parties que la loi, elle-même, a placées sur un pied d’inégalité : l’employeur et le salarié ? En effet, en vertu du principe de subordination juridique, l’employeur peut donner des directives au salarié. Le droit du travail vise donc souvent à protéger le faible des éventuelles tentations du fort.

C’est pourquoi, vous le savez, une règle qui vise à protéger le salarié ou qui est créée à son avantage ne doit pas être facultative, sous peine de rester lettre morte. Prétendre le contraire est au mieux naïf, au pire symptomatique de votre vision de la société.

Comme l’a très bien écrit Henri Lacordaire, « entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ».

Cette phrase est toujours d’actualité : entre l’employeur et le salarié, la loi doit impérativement régir certains points, faute de quoi la liberté opprimera toujours le plus faible.

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