Séance en hémicycle du 8 juin 2010 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • TPE
  • dialogue
  • patronale
  • prud’homale
  • représentativité
  • syndicale

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Guy Fischer.

Photo de Guy Fischer

La séance est reprise.

Nous poursuivons l’examen du projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.

Dans la discussion des articles, nous continuons l’examen des amendements déposés à l’article 6.

Par amendement n° 30, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement a pour objet de maintenir la rédaction actuelle du chapitre IV du titre III du livre II de la deuxième partie du code du travail, intitulé « Commissions paritaires locales ».

Nous sommes opposés à la volonté du Gouvernement de modifier cet intitulé, ainsi qu’à l’amendement déposé par M. le rapporteur, et adopté par la commission, qui vise à procéder à la même modification pour la section 1 de ce chapitre, en remplaçant, partout où il apparaît, le mot « local » par le mot « territorial ».

Cette substitution n’a pas en soi un effet juridique déterminant, car le mot « territorial » renvoie à la notion de territoire, qui est éminemment locale, sans contenir en lui-même de précision sur l’échelon géographique visé. En revanche, l’adjectif « territorial » est très flou et peut signifier tout et son contraire.

Sans doute espérez-vous limiter la portée de la création des commissions paritaires, restreindre leur rôle en leur affectant un champ de compétence sur une zone géographique assez vaste. Vous aurez compris que telle n’est pas notre position.

Vous voulez modifier le chapitre et la section existants, afin de les rendre compatibles avec votre vision étroite des compétences dévolues à ces nouvelles commissions.

Nous refusons cette logique, car nous considérons que ces commissions doivent pouvoir être créées au plus près des très petites entreprises, et en nombre suffisant pour pouvoir remplir leur rôle, déjà bien restreint par la loi. Il existe encore des bassins d’emplois à très forte concentration d’entreprises : dans ces zones, des commissions doivent être créées à un niveau « très local ».

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La commission, préférant l’expression « commissions paritaires territoriales », car elle est plus large et englobe mieux les différentes situations envisagées dans cette section du code du travail, émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Avis défavorable !

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 31, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer le mot :

territoriales

par le mot

locales

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps, dans un souci de cohérence, les amendements n° 31 et 32.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 32, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et ainsi libellé :

Alinéa 6

Après le mot :

paritaires

insérer le mot :

locales

Veuillez poursuivre, madame David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. Ces deux amendements s’inscrivent dans la continuité de l’amendement n° 30. J’ai bien entendu les arguments de M. le rapporteur et la réponse, très brève, de M. le ministre !

Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le code du travail prévoit que les commissions paritaires sont « locales ». Le Gouvernement et M. le rapporteur préfèrent la qualification de « territoriales », avec toutes les imprécisions que ce terme comporte. Ces amendements visent à revenir à la rédaction du code du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L’amendement n° 31 est analogue à l’amendement n° 30, des mêmes auteurs, qui a reçu un avis défavorable. Je ne peux donc, par coordination, qu’y être défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 32, comme je l’ai indiqué dans mon intervention liminaire, la commission ne souhaite pas que des commissions paritaires puissent être créées au niveau local, d’une part pour éviter la prolifération de ces structures et, d’autre part, afin qu’elles ne soient pas tentées de s’immiscer dans la vie d’une entreprise en particulier. Nous préférons que les commissions paritaires soient instituées à un niveau supérieur, éventuellement celui d’une interprofession.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Avis défavorable !

L’amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 1 est présenté par Mmes Le Texier et Schillinger, MM. Jeannerot, Kerdraon, Daudigny et Teulade, Mmes Ghali, Campion, Printz, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Alquier et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Desessard, Godefroy, Le Menn, Gillot, S. Larcher et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 13 rectifié est présenté par MM. Collin, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L’amendement n° 33 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 7

Remplacer les mots :

peuvent être

par le mot :

sont

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l’amendement n° 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Notre amendement tend à garantir dans la loi le principe de la création des futures commissions paritaires.

La législation actuelle prévoit qu’un accord collectif conclu entre une seule organisation patronale et un ou plusieurs syndicats de salariés ayant recueilli au moins 30 % des voix suffira pour constituer une commission. Les organisations non signataires de l’accord collectif pourraient donc ne pas être membres de cette commission. C’est tout un pan du dialogue social, appelé à se développer en raison des mutations de notre structure économique, qui se déroulerait alors en dehors de leur influence. Ce premier point revêt, vous le savez, une grande importance.

Par ailleurs, le projet de loi attribue une double mission aux commissions paritaires : « assurer un suivi de l’application des conventions et accords collectifs de travail » et apporter « une aide au dialogue social aux salariés et aux employeurs d’entreprises de moins de onze salariés ».

Il n’est écrit nulle part dans ce texte que des sections syndicales vont être créées dans les entreprises de moins de onze salariés, que les membres salariés des commissions paritaires vont entrer de force dans l’univers paisible des TPE pour y semer le trouble et la désolation. Personne n’y songe !

Comme l’a indiqué clairement M. Woerth afin de rassurer les députés de l’UMP, « on évite la représentation syndicale physique au sein de l’entreprise ». C’est ce que les élus de droite appellent un « texte équilibré » !

Mais que craint-on exactement ? Là où elles existent, en application de l’accord de 2001, les commissions paritaires régionales sont unanimement reconnues comme un facteur de progrès pour les salariés et de paix sociale pour les employeurs. Des expériences très appréciées sont menées en matière de prévoyance, d’octroi de chèques-vacances et de chèques-restaurant.

Les commissions paritaires sont donc un outil important de limitation des contentieux prud’homaux. À ce titre, elles doivent être développées, étendues, et non pas freinées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, pour présenter l'amendement n° 13 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Le caractère facultatif des commissions paritaires constitue un point d’opposition majeur entre les radicaux et les membres du RDSE, d’une part, et le Gouvernement, d’autre part. Nous considérons, pour notre part, que les commissions paritaires doivent avoir un caractère obligatoire.

L’opposition patronale est telle – nous venons de nous en expliquer – que la création obligatoire de commissions paritaires donnerait plus d’ambition et de force au présent projet de loi. Je comprends certes les difficultés auxquelles vous pouvez vous heurter, monsieur le ministre, mais je considère qu’il faut parfois savoir surmonter les obstacles.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 33.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Nous voulons rendre les commissions paritaires obligatoires. C’est le principal grief que nous avons contre ce projet de loi, qui affirme leur caractère facultatif.

Cet amendement nous paraît fondamental, car la portée de la présente réforme est tout entière conditionnée par le caractère obligatoire ou facultatif de ces commissions.

Dans la rédaction actuelle du projet de loi, la mise en place de ces instances dépendra de l’aboutissement de négociations collectives, soit, concrètement, des accords que trouveront les partenaires sociaux. Or certaines organisations patronales, qui ne sont d’ailleurs pas, je le rappelle, les plus concernées par le texte, – à savoir le MEDEF et la CGPME – ont d’ores et déjà montré une hostilité totale à l’installation de ces commissions, contrairement à l’Union professionnelle artisanale, l’UPA, à la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, la FNSEA ou encore à l’Union nationale des associations de professions libérales, l’UNAPL.

En d’autres termes, la rédaction actuelle du texte est une pure mascarade : un droit virtuel est annoncé, mais il ne trouvera jamais – ou très rarement – à s’appliquer.

La seule manière de faire vivre ces commissions paritaires est de les rendre obligatoires ! II y va du respect du principe constitutionnel contenu dans l’alinéa 8 du préambule de la constitution de 1946, prévoyant que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

Ce droit ne peut pas, dans les TPE, être abandonné au bon vouloir des organisations représentant les employeurs, surtout lorsque celles-ci ne sont pas les principaux interlocuteurs des TPE. Il y aurait là un très fort risque de rupture d’égalité des salariés quant à l’exercice de leur droit syndical.

Selon une idée largement répandue chez nos collègues de la majorité, il n’est pas souhaitable d’imposer des dispositions par la voie législative. Il vaut mieux privilégier la négociation entre partenaires sociaux.

Dois-je vous rappeler, chers collègues de la majorité, que le droit du travail est destiné à régir les rapports entre deux parties que la loi, elle-même, a placées sur un pied d’inégalité : l’employeur et le salarié ? En effet, en vertu du principe de subordination juridique, l’employeur peut donner des directives au salarié. Le droit du travail vise donc souvent à protéger le faible des éventuelles tentations du fort.

C’est pourquoi, vous le savez, une règle qui vise à protéger le salarié ou qui est créée à son avantage ne doit pas être facultative, sous peine de rester lettre morte. Prétendre le contraire est au mieux naïf, au pire symptomatique de votre vision de la société.

Comme l’a très bien écrit Henri Lacordaire, « entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ».

Cette phrase est toujours d’actualité : entre l’employeur et le salarié, la loi doit impérativement régir certains points, faute de quoi la liberté opprimera toujours le plus faible.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voilà un propos empreint d’une grande érudition.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

J’avoue être quelque peu troublé par les propos fort sympathiques de notre collègue communiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Certes, et agréable à ce stade du débat !

Pour autant, la commission n’est pas favorable à ces trois amendements identiques, dont l’objet est de rendre les commissions paritaires obligatoires alors que nous sommes attachés à leur caractère facultatif. Nous faisons confiance aux partenaires sociaux ; nous espérons qu’ils seront à même de créer une commission paritaire lorsque le besoin s’en fera sentir.

Monsieur Plancade, dans deux ans, le Parlement sera amené à dresser un bilan du fonctionnement de ce dispositif, mais dans un premier temps, laissons faire les acteurs de terrain.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je partage l’avis défavorable de la commission sur ces trois amendements identiques.

Je ne cherche pas à être désagréable par principe, mais j’estime que le dialogue social ne se décrète pas, qu’il est le fruit d’un accord entre les parties prenantes.

Les commissions paritaires territoriales étant légalisées, il sera désormais possible d’en créer à l’échelon départemental, régional, voire national. Si les parties ne parviennent pas à se parler, le dispositif ne pourra pas fonctionner. Si un accord se dessine entre employeurs et employés, une commission paritaire pourra être créée. Dans le cas contraire, il n’y aura pas de commission paritaire : un point c’est tout ! Le Gouvernement ne souhaite pas emprunter une voie médiane. Cette démarche correspond à l’état d’esprit qui est le nôtre en matière de construction du dialogue social.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 9 rectifié bis, présenté par M. Houel, Mme Mélot et MM. P. Dominati et Dassault, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

par accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 2231-1

par les mots :

par convention ou accord de branche étendu, notamment dans les secteurs de l'industrie, de la construction, du commerce et des services,

II. - Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les branches professionnelles où existent plusieurs organisations représentatives des employeurs du secteur, la convention ou l'accord de branche étendu mentionné à l'alinéa précédent, pour être valide, doit être signé par au moins deux organisations représentatives des employeurs

La parole est à M. Michel Houel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai simultanément les amendements n° 9 rectifié bis et 8 rectifié bis. Cela nous fera gagner un peu de temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 8 rectifié bis, présenté par M. Houel, Mme Mélot et MM. P. Dominati et Dassault, et ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer les mots :

par accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 2231-1

par les mots :

par convention ou accord de branche étendu, notamment dans les secteurs de l'industrie, de la construction, du commerce et des services.

Veillez poursuivre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

La mise en place de commissions paritaires pour les très petites entreprises implique, compte tenu de leurs spécificités et de l’existence d’un dialogue naturel et direct dans ces entreprises, de prendre un certain nombre de précautions.

Parmi celles-ci, figure l’obligation de créer ces commissions dans un cadre professionnel, et non au niveau interbranches ou interprofessionnel territorial ou national, de façon que leur action puisse respecter les caractéristiques du secteur professionnel concerné.

En outre, la mise en place des commissions paritaires régionales à l’intention des TPE présente un caractère sensible. Dans les secteurs professionnels où il existe plusieurs organisations représentatives des employeurs, la création de ces commissions devra disposer d’une assise large, donc d’un aval émanant de plusieurs organisations.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L’amendement n° 9 rectifié bis tend à prévoir que les commissions paritaires ne puissent être créées que dans le cadre d’une branche professionnelle et à requérir, pour cette création, la signature de deux organisations patronales.

L’adoption de cet amendement aurait pour effet de rendre beaucoup plus difficile la création des commissions paritaires, ce que nous ne souhaitons pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

C’est exact !

Par ailleurs, pourquoi se priver de la possibilité de créer des commissions couvrant un champ interprofessionnel ? Il peut exister des problèmes communs aux TPE dont les commissions paritaires pourraient utilement se saisir.

Si cet amendement était adopté, il serait possible de conclure un accord sur les salaires ou sur le temps de travail avec une seule organisation patronale, mais il faudrait l’aval de deux organisations pour créer une commission paritaire. Cela ne nous paraît pas très cohérent.

La commission émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 8 rectifié bis est un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 9 rectifié bis, mais il ne nous convainc pas davantage ! Il serait dommage de se priver de la possibilité de créer des commissions communes à plusieurs branches. Une commission paritaire couvrant les différentes branches de l’artisanat pourrait, par exemple, se pencher utilement sur les problèmes communs aux TPE artisanales.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le rapporteur a utilisé les bons arguments. Si ces amendements étaient adoptés, il suffirait de l’approbation d’une seule organisation patronale pour signer certains accords extrêmement importants, mais il faudrait l’aval de deux organisations pour mettre en place une commission paritaire ayant une simple mission de suivi. J’ajoute que l’on créerait ainsi une nouvelle condition de validité des accords, qui pourrait à terme se retourner contre les organisations patronales elles-mêmes.

Les positions des organisations patronales n’étant pas convergentes sur ce sujet, il me semble préférable de nous en tenir à la situation actuelle.

En outre, l’extension d’un accord aurait pour conséquence d’imposer les dispositions dudit accord aux partenaires sociaux qui n’en sont pas signataires. Je ne pense pas que ce soit ce que vous souhaitez, monsieur Houel.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Houel, les amendements n° 9 rectifié bis et 8 rectifié bis sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Après avoir écouté avec une grande attention les arguments de M. le rapporteur et de M. le ministre, je les retire.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 9 rectifié bis et 8 rectifié bis sont retirés.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 10 rectifié bis, présenté par M. Houel, Mme Mélot et MM. P. Dominati et Dassault, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Michel Houel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Il s’agit d’un amendement de coordination avec les amendements que j’ai précédemment défendus sur l’article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 34, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Ces commissions paritaires peuvent également se décliner au niveau local, départemental ou national, en vertu de l'accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 2231-1 du code du travail.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il s’agit d’un amendement de cohérence. Nous vous avions proposé de modifier l’alinéa 7 de l’article 6 pour rendre ces commissions paritaires obligatoires. Malheureusement, notre amendement n’a pas été adopté. Je maintiens néanmoins l’amendement n° 34 dans la mesure où, en dehors des commissions paritaires dont la création est obligatoire, d’autres commissions facultatives doivent également pouvoir se décliner au niveau local ou départemental, notamment dans les bassins d’emploi qui se caractérisent par une forte concentration d’entreprises. D’où la rédaction « ouverte » que nous proposons.

Sur ce point, nos visions sont diamétralement opposées, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre. Vous voulez, pour votre part, restreindre le rôle de ces commissions au plus petit dénominateur commun. Nous, au contraire, nous voulons l’étendre au maximum. Notez cependant que seule notre position respecte l’objectif de renforcement de la représentativité dans les TPE, qu’il s’agisse de la représentativité syndicale ou de celle des salariés.

C’est pourquoi, monsieur le rapporteur, nous sommes opposés à la suppression, dans l’alinéa 8, du mot « local » que vous avez fait adopter en commission. Cette suppression est, pour le coup, est bien plus grave que la suppression des alinéas précédents.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 3 est présenté par Mmes Le Texier et Schillinger, MM. Jeannerot, Kerdraon, Daudigny et Teulade, Mmes Ghali, Campion, Printz, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Alquier et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Desessard, Godefroy, Le Menn, Gillot, S. Larcher et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 14 rectifié est présenté par MM. Collin, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 35 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Après les mots :

au niveau

insérer le mot :

local,

La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

La suppression, dans le texte de la commission, de la possibilité de créer des commissions paritaires au niveau local reflète les craintes d’une partie du patronat, craintes que l’on a montées en épingle alors même que ce patronat-là n’est pas le plus directement concerné par lesdites commissions paritaires locales.

Cependant, du même coup, la rédaction du projet de loi devient étonnante : il serait possible de créer une commission paritaire au niveau du département de la Lozère, mais pas à ceux de la ville de Lyon, de l’agglomération de Rennes, du bassin d’emploi de Saint-Etienne ou de Romorantin.

Nous retrouvons ici la volonté d’éloigner les représentants éventuels des salariés des entreprises. Au demeurant, cela s’appliquerait aussi aux employeurs.

Nous estimons qu’il convient de laisser aux partenaires sociaux la possibilité de décider des niveaux de pertinence des commissions paritaires et demandons, en conséquence, le rétablissement du texte initial, voulu par les signataires de la lettre commune et repris par le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 14 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Dans la logique que nous avons soutenue, nous souhaitons que les commissions paritaires puissent être mises en place au niveau local.

La suppression, en commission, du mot « local » fait que ces commissions ne pourraient être créées qu’aux niveaux départemental ou national. Nous souhaitons donc faire réapparaître cet adjectif parce que cette suppression interdit que des commissions paritaires se créent à un niveau inférieur à celui du département. Or, dans certains départements, ces commissions doivent pouvoir être créées au plus près des entreprises.

Je crois devoir insister compte tenu du manque d’intérêt du rapporteur pour mon propos…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il n’y a aucun manque d’intérêt de ma part, madame David, mais reconnaissez que nous avons déjà évoqué cette question. Je salue néanmoins votre persévérance, qui est à mes yeux une indiscutable qualité !

L’amendement n° 10 rectifié bis présenté par Michel Houel est un amendement de coordination avec les amendements n° 9 rectifié bis et 8 rectifié bis. Par cohérence, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

Pour la même raison, je suis défavorable à l’amendement n° 34.

Je l’ai dit dans mon propos liminaire, la commission n’est pas favorable à la création de commissions au niveau local : d’abord, parce que nous ne voulons pas multiplier ces structures ; ensuite, parce que nous pensons qu’elles doivent couvrir un champ suffisamment étendu pour accomplir convenablement leurs missions. La commission est donc défavorable aux amendements identiques n° 3 et 35.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de la commission, en faisant siennes les raisons de cohérence qu’a invoquées le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 10 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

J’ai en effet présenté plusieurs amendements successifs pour exprimer notre volonté de réintégrer le mot « local » dans ce projet loi puisque, aujourd’hui, c’est le terme qui est employé dans le code du travail. Sans doute pouvons-nous donner l’impression d’être répétitifs, mais cela tient à ce que vous-même avez supprimé méthodiquement toutes les occurrences de ce mot dans le code du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il nous semblait donc important de proposer, tout aussi méthodiquement, de le réintroduire, alinéa après alinéa, et de vous expliquer pourquoi nous sommes attachés à ces commissions locales. C’est aussi le sens du débat parlementaire : il faut pouvoir exprimer son point de vue en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Michel Houel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Puisque M. le rapporteur et M. le ministre en appellent tous deux à la logique, je m’y plierai en retirant cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 4 est présenté par Mmes Le Texier et Schillinger, MM. Jeannerot, Kerdraon, Daudigny et Teulade, Mmes Ghali, Campion, Printz, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Alquier et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Desessard, Godefroy, Le Menn, Gillot, S. Larcher et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 36 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

L’alinéa 9 de l’article 6 a été ajouté sur l’initiative de notre rapporteur, dans une tentative de préservation des commissions paritaires qui se trouvent en butte à une violente hostilité. Cela l’amène à écrire des évidences, mais le fait même qu’elles soient écrites est lourd de sens.

Ainsi lit-on que « les commissions paritaires ne sont investies d’aucune mission de contrôle… » En effet, les commissions paritaires sont des instances de dialogue et non de contrôle ; elles ne sont pas une émanation de l’inspection du travail. Elles ont pour mission d’assurer le suivi de l’application des accords collectifs, ce qui implique une écoute, un dialogue, non un contrôle. Le texte est clair sur ce point : « apporter une aide en matière de dialogue social ».

La même observation vaut pour la crainte de voir des personnes extérieures à une entreprise y pénétrer sans l’accord de l’employeur : ce n’est certainement pas parmi les membres des commissions paritaires qu’on les trouvera ! Au contraire, la raison d’être des commissions paritaires est précisément de faire prévaloir le dialogue afin que l’on n’en arrive pas à des comportements extrémistes.

Il est dommage qu’une partie du patronat, pour des raisons corporatistes, ne mesure pas l’intérêt qu’il y a à favoriser une évolution des relations sociales dans les petites entreprises.

Cet alinéa doit, à notre sens, être supprimé parce qu’il traduit une méfiance à l’égard des salariés et de leurs représentants qui est en totale contradiction avec l’esprit de la lettre commune et du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 36.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Nous demandons également la suppression de cet alinéa 9, qui, adopté en commission, vise à un complet « phagocytage » des commissions paritaires, qui tend à réduire leurs missions à leur plus simple expression et à s’assurer que leurs représentants élus ne pourront pratiquement jamais pénétrer dans les TPE, sauf avec l’accord de l’employeur.

Cette disposition est vraiment l’illustration du résultat obtenu grâce aux peurs agitées par le MEDEF et la CGPME ainsi qu’aux fortes pressions que ces organisations ont exercées sur les élus à propos de ce texte.

Pourtant, les missions de ces commissions sont déjà définies à l’alinéa 7 de l’article 6 et, surtout, elles avaient déjà été strictement encadrées et limitées de manière à être validées dans leur principe par l’ensemble des partenaires sociaux. Finalement, vous revenez sur ce qui avait été inscrit dans la lettre commune avec l’accord des partenaires sociaux.

Ces missions avaient déjà été limitées à un simple rôle de conseil et de médiateur social C’est cet équilibre et les missions résiduelles qui avaient été confiées aux commissions paritaires que cet alinéa 9 vient remettre en cause. À cet égard, j’adhère pleinement à ce que disait à l’instant Raymonde Le Texier : c’est faire preuve d’une grande méfiance envers les organisations syndicales que de vouloir à tout prix faire entrer dans un texte de loi un alinéa qui ne fait que confirmer ce qui était déjà précisé deux alinéas plus haut.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mme David a parlé de « peurs » ; je parlerai de « réticences ». Il est vrai que les patrons des très petites entreprises étaient inquiets et voulaient connaître l’étendue réelle des pouvoirs des commissions paritaires. J’ai donc pris l’initiative d’introduire cet alinéa, suivi d’ailleurs en cela par la majorité de mes collègues de la commission des affaires sociales, afin de convaincre les responsables de petites entreprises que ce qu’ils avaient entendu n’était pas tout à fait le reflet de la vérité. Il serait donc dommage de revenir sur une disposition que les patrons de TPE ont perçue comme un signe d’apaisement.

Pour cette raison, je suis défavorable aux amendements identiques n° 4 et 36.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Il est clair que les membres de ces commissions n’ont pas de pouvoir de contrôle dans l’entreprise, et c’est un point que nous assumons parfaitement. Ils ont un pouvoir de contrôle sur l’application des accords d’une manière générale, mais pas dans l’entreprise. Nous ne sommes donc pas favorables à ces amendements.

Leurs auteurs sont certes en cohérence avec leurs convictions, mais nous le sommes aussi : en fait, manifestement, nous ne parlons pas du même texte !

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 6 rectifié ter, présenté par MM. Houel, Gilles, J.C. Gaudin et Cambon, Mmes Bruguière et Mélot et M. Dassault, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elles ne disposent pas du pouvoir de négocier des conventions et accords collectifs.

L'amendement n° 7 rectifié ter, présenté par MM. Houel, Gilles, J.C. Gaudin et Cambon, Mmes Bruguière et Mélot et M. Dassault, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elles ne disposent pas du pouvoir de décider de prélèvements et cotisations supplémentaires à la charge des salariés et des entreprises.

La parole est à M. Michel Houel, pour présenter ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Toujours par cohérence, je les retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 6 rectifié ter et 7 rectifié ter sont retirés.

Je mets aux voix l'article 6.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici le résultat du scrutin n° 223 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 37 rectifié, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

D'ici décembre 2010, le Gouvernement doit engager des négociations avec les partenaires sociaux en vue d'aboutir à un accord national interprofessionnel sur la représentativité patronale.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement vise à ce que s’engagent enfin des négociations entre partenaires sociaux sur la question de la représentativité patronale en France et, surtout, à ce qu’elles soient menées à leur terme.

En effet, comme la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale, le présent projet de loi se contente d’organiser la mesure de l’audience des organisations syndicales représentatives des salariés. Or l’autre partie, à savoir les employeurs, dispose elle aussi d’une multitude d’organisations professionnelles qui ont été créées pour défendre ses intérêts et la représenter lors des négociations collectives. En France, ces organisations sont très puissantes et leurs pouvoirs, visibles ou cachés, ne sont plus à démontrer : il n’est que de lire un certain nombre des amendements qui ont été déposés sur ce texte.

Pourtant, aucune négociation sur la mesure de la représentativité des organisations patronales n’a jusqu’à présent été menée à son terme. La rénovation de la démocratie sociale s’arrête-t-elle à des réformes qui ne concernent que les salariés ? Ne devrait-elle pas passer aussi par la mesure de la représentativité des organisations patronales ?

D’ailleurs, dans ce même hémicycle, il y a presque deux ans, lors du débat sur ce qui est devenu la loi du 20 août 2008, nous discutions de la question de la définition, dans les meilleurs délais, des critères pour parvenir à mesurer la représentativité des organisations patronales. Deux amendements avaient été déposés en ce sens ; assez étrangement d’ailleurs, aucun d’eux ne provenait de mon groupe. Quoi qu'il en soit, je ne résiste pas à la tentation de vous citer les propos qu’avaient alors tenus deux de nos collègues, car ils restent d’une brûlante actualité.

L’un des amendements avait été déposé par M. Gournac, qui, déjà rapporteur à l’époque, déclarait : « Il ne faut pas que les organisations patronales puissent être considérées comme moins représentatives que les organisations syndicales, ce qui affaiblirait le dialogue social et augmenterait le risque de contentieux autour des accords signés. » Rien n’est plus exact !

Quant à Nicolas About, alors président de la commission des affaires sociales, il s’interrogeait : « N’y aurait-il pas un véritable déséquilibre, au sein de la démocratie sociale, si l’on excluait les syndicats patronaux de la démarche de clarification des conditions de leur légitimité demandée aux syndicats de salariés ? » Eh bien si ! Malheureusement, en matière de démocratie sociale, nous en sommes restés à une représentativité « hémiplégique »…

Cet enjeu apparaît d’autant plus crucial que, outre le lobbying auquel ce texte a donné lieu, c’est clairement le MEDEF et la CGPME qui imposent leur vision à l’Union professionnelle artisanale ou à l’Union nationale des associations de professions libérales. Cette situation n’est pas acceptable et il est temps que cela change !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Chère collègue Annie David, vous avez une bonne mémoire : je me souviens parfaitement d’avoir tenu les propos que vous avez cités !

Cela étant dit, la commission n’a pas eu l’occasion d’examiner votre amendement dans sa version rectifiée, mais, à titre personnel, j’estime que la représentativité patronale est un vrai sujet et que nous ne pourrons éviter de l’examiner à moyen terme. Pour autant, l’actuel climat de tension entre organisations patronales ne paraît guère propice, c’est le moins que l’on puisse dire, à un débat serein.

Par ailleurs, il n’appartient pas au Gouvernement d’être, comme vous le proposez, moteur dans cette négociation. Laissons le dialogue social aux partenaires sociaux ! Il appartiendra ensuite au pouvoir politique de prendre ses responsabilités.

J’émets donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

La question de la représentativité patronale n’a été abordée dans la lettre commune, ce pourquoi le projet de loi initial n’en faisait pas mention. Il ne me semble pas opportun, en effet, de l’évoquer dans le texte, et j’émets donc également un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le ministre, je vous renvoie à l’article 8, relatif au report de deux ans des élections des conseils de prud’hommes, et que la commission a adopté ce matin sans le modifier : ses dispositions n’ont pas été non plus négociées par les organisations syndicales.

L’amendement que j’ai présenté s’inscrit dans la continuité de la loi de 2008. Le projet de loi que nous discutons aujourd'hui a pour objet, si j’en crois son intitulé, de compléter les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008. À l’époque, la question de la représentativité patronale avait été abordée. Je viens de le rappeler, deux amendements avaient même été défendus dans cet hémicycle. Ils n’ont finalement pas été adoptés, mais le vote s’était joué à une ou deux voix près, au point qu’il avait fallu procéder par assis et levé, la majorité étant très divisée à leur sujet.

Autrement dit, mon amendement a tout à fait sa place dans ce texte, contrairement à l’article 8.

Monsieur le ministre, si vous voulez véritablement mettre fin au climat délétère que l’on constate actuellement au regard de la démocratie sociale et donner du sens au dialogue social, si vous voulez que les représentants des salariés abordent avec confiance les négociations dans lesquelles vous les appelez à s’engager, il faudra bien adopter un texte sur la représentativité des organisations patronales.

On ne peut pas continuer à tout imposer aux salariés, sans jamais rien exiger des entreprises. Je sais bien que le CAC 40 fait aujourd'hui la pluie et le beau temps, mais il n’empêche que ces entreprises délocalisent à tour de bras et signent des accords comme elles l’entendent ! Or rien, dans notre législation, ne permet de mesurer la véritable représentativité des organisations patronales dans notre pays !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

L'amendement n'est pas adopté.

Dans les deux ans suivant la tenue de l’élection prévue aux articles L. 2122-10-1 et suivants du code du travail, le Gouvernement présente au Parlement un rapport établissant un bilan des accords prévus à l’article L. 2234-4 du même code et des résultats de la négociation interprofessionnelle sur la représentation du personnel. Ce rapport peut proposer des adaptations législatives éventuelles découlant de ce bilan.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. P. Dominati et Dassault, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, ma question est simple : ce bilan qui doit être dressé deux ans après l’élection ouvre-t-il la voie à une autre étape ? C’est en tout cas ce que redoutent tous les chefs des TPE. Vous avez dit que cette disposition n’engageait pas l’avenir, mais tous imaginent le contraire : donnez-nous des assurances à cet égard !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mon cher collègue, la commission ne partage pas les inquiétudes que vous avez exprimées. Il paraît au contraire plutôt sain de dresser un bilan de la mise en place des commissions paritaires, à la lumière des résultats de la négociation en cours sur la réforme des institutions représentatives du personnel. Il appartiendra bien sûr au législateur, au vu de ce bilan, de décider ou non d’éventuelles adaptations.

C’est, me semble-t-il, une bonne chose de regarder comment les choses se sont passées, dans quels domaines des blocages sont apparus, afin que nous puissions proposer des adaptations. Le législateur est là pour cela !

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Monsieur Dominati, le Gouvernement est également défavorable à votre amendement. Vous estimez qu’il ne doit pas y avoir de rapport ou que, s’il y en a un, il ne puisse pas provoquer une évolution législative dans un sens que vous ne souhaiteriez pas.

Lorsqu’une loi change les choses, et c’est le cas pour ce texte comme pour la loi de 2008, il faut en tirer les conséquences. Le rapport portera non seulement sur les commissions paritaires, mais surtout sur la représentativité. Il permettra au Parlement d’être éclairé, de savoir comment l’élection s’est passée. Le législateur ne sera pas « bloqué ». Le Gouvernement n’a pas d’évolution en tête : ce sujet est autonome, il doit avoir sa vie propre.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Je n’ai pas obtenu les assurances que j’escomptais.

On ne prévoit pas un rapport pour chaque loi qui est adoptée, tout de même ! À moins que ce ne soit une nouvelle pratique… Y aurait-il une intention sous-jacente ?

En tout cas, je prends note, et je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 20 rectifié est retiré.

L'amendement n° 38, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Dernière phrase

Supprimer cette phrase.

II. - Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

À l'issue de cette période, toutes les entreprises de moins de onze salariés visées par la présente section, devront avoir instauré une commission paritaire. Dans le cas contraire, le Gouvernement procédera par voie réglementaire à leur mise en place.

Un décret précise les modalités d'application de cette disposition.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement va tout à fait à l'opposé de celui de M. Dominati, qui vise à supprimer la clause de revoyure. Pour notre part, nous souhaitons que non seulement ce bilan soit maintenu, mais que le caractère facultatif des adaptations qu’il pourrait présenter soit supprimé. Dans cette optique, nous précisons le contenu des mesures qui devront être adoptées si, dans deux ans, on s’aperçoit que la loi n’a pas été respectée.

Notre idée n’est pas que l’État se substitue aux partenaires sociaux, mais que, si les négociations n’aboutissent pas, il rende la création des commissions paritaires obligatoire.

Cela étant, je ne vais pas développer à nouveau mon argumentation. Tout le monde a en effet bien compris que deux positions tranchées s’opposent de part et d’autre de l’hémicycle et que, au milieu, M. le rapporteur défend la position médiane.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Ma chère collègue, je tiens à vous féliciter. Quand vous avez un cap, vous vous y tenez !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

C’est une qualité !

Au demeurant, comme je vous l’ai dit à de multiples reprises au cours de ce débat, nous ne voulons pas rendre obligatoire la mise en place des commissions paritaires.

La commission a donc émis un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 7 est adopté.

La date du renouvellement général des conseils de prud’hommes est fixée par décret et, au plus tard, au 31 décembre 2015. Le mandat des conseillers prud’hommes est prorogé jusqu’à cette date.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Jarraud-Vergnolle

L’article 8, qui vise à reporter de deux ans les élections aux conseils de prud’hommes, est évidemment un cavalier. Quoique …

La lecture du rapport Richard nous apprend que la désignation des conseillers prud’homaux sur le fondement de la loi de 2008 ne serait ni pertinente ni opportune. Il existe deux raisons à cela : la représentativité des salariés dans les TPE doit être finalisée, ce qui est l’objet du présent texte, et il n’existe pas de mesure de la représentativité des organisations patronales.

En conclusion, il faut trouver un système pour contourner cet obstacle. C’est l’une des raisons de la proposition de suffrage indirect faite par le rapport. Il faut aussi se laisser le temps d’une concertation avec l’ensemble des organisations.

Au-delà de ces raisons, c’est toute la prud’homie qui est visée par les projets du Gouvernement. Ainsi, 62 conseils sur 271 ont d’ores et déjà été supprimés, soit 25 % de la capacité de jugement. En outre, le temps d’étude des dossiers par les conseillers a été plafonné et l’indemnité restreinte en conséquence par décret.

Le Gouvernement a aussi engagé des évolutions de procédure lourdes de conséquences.

Je pense au développement du règlement amiable des litiges avec l’application de la procédure participative, déjà adoptée par le Sénat dans le cadre de la proposition de loi traitant des auxiliaires de justice. Il s’agit de permettre aux parties de convenir de rechercher une solution amiable dans un délai déterminé avant de saisir le juge. Le problème est que cette procédure appliquée en matière prud’homale se substituerait à l’audience de conciliation, qui permet aux conseils de prud’hommes d’entendre les parties et d’intervenir activement, y compris pour l’instruction du dossier.

Le deuxième projet annonce un encadrement de la procédure, qui donnerait une plus grande place à l’écrit. Là aussi, la spécificité des juridictions sociales est largement ignorée. La procédure orale aux prud’hommes est importante pour une présentation humaine des faits.

Avec ces deux projets, on aboutit à une même conséquence : les plus fragiles, les moins argentés seront éloignés de l’accès au juge, parce qu’ils ne pourront s’exprimer et qu’ils devront prendre un avocat. On a déjà constaté que l’obligation de prendre un avocat spécialisé en cas de pourvoi en cassation dans une affaire prud’homale a entraîné une baisse consécutive de 30 % du nombre de pourvois dès l’année suivante.

Restreindre l’accès à la justice pour les plus faibles en supprimant des juridictions, entraver l’action des conseillers en plafonnant le temps indemnisé d’étude des dossiers sont des moyens détournés, mais efficaces, de réaliser des économies.

Un autre élément important doit être pris en compte : 80 % des jugements aux prud’hommes sont favorables aux salariés. Cela reflète malheureusement l’application du droit dans les entreprises, notamment les petites, où les employeurs n’ont souvent qu’une idée imprécise des droits des salariés.

Derrière les arguments de rationalisation et d’économies, l’application de ces réformes générales au droit du travail n’est pas innocente. Contrairement au droit des obligations, qui est fondé sur l’égalité des contractants, le droit du travail trouve sa spécificité dans la prise en compte de l’inégalité constitutive du rapport entre les employeurs et les salariés.

Restreindre l’accès aux prud’hommes et banaliser la procédure, c’est surtout obtenir moins de jugements rétablissant les salariés dans leurs droits. Ce n’est pas un hasard si tout cela se prépare sans concertation avec les syndicats de salariés.

Soyez assurés que nous serons très vigilants sur ce dossier !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 21 rectifié est présenté par MM. P. Dominati et Dassault.

L'amendement n° 39 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Je voudrais comprendre, car le délai de prorogation de deux ans ne me paraît pas, à moi non plus, justifié.

On a, semble-t-il, peur du manque de représentativité des conseillers prud’homaux qui seraient élus en 2013.

À moins qu’il n’y ait une autre raison. Le coût des élections prud’homales étant excessivement élevé et le taux de participation étant inférieur à 20 %, on profiterait de ce texte pour abandonner purement et simplement l’actuel mode de scrutin. Pour autant, nous ne disposons d’aucune information sur le nouveau mode de scrutin envisagé. Peut-être s’agira-t-il du vote par voie électronique ?

En ce cas, pourquoi ne le précise-t-on pas ? Pourquoi retarder une décision que l’on pourrait prendre immédiatement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 39.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. Pour le coup, je suis perplexe, car notre amendement est identique à celui de M. Dominati…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cependant, je ne me range pas à ses arguments, qui ne font que m’inquiéter davantage.

M. Dominati laisse entendre que le report de deux ans permettra de mieux prendre connaissance du rapport Richard. Or, pendant ce délai de réflexion, les élections prud’homales pourraient disparaître.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le rapport Richard envisage trois possibilités : une élection au second tour, la nomination par les organisations syndicales de leurs représentants aux prud’hommes et, celle qui me conviendrait le mieux, la modification du mode d’élection. En effet, dans ce dernier cas, les salariés participeraient toujours au vote, ce qui serait quand même normal. Je le rappelle, dans le cadre du collège des salariés, il s’agit d’élire des juges chargés de défendre les salariés.

Je le répète, ce report de deux ans nous inquiète. Nous avons peur du résultat de la réflexion qui est en cours. C’est pourquoi je rejoins volontiers Annie Jarraud-Vergnolle, qui souhaite éviter un tel report.

Si, une fois que le présent texte et la loi de 2008 seront pleinement entrés en application, la représentativité syndicale a complètement changé, il sera toujours temps de remettre les choses en ordre aux élections prud’homales suivantes. En attendant, ne mettons pas la charrue devant les bœufs, laissons se tenir ces élections prud’homales et réfléchissons à une éventuelle réorganisation, mais pas dans ces conditions.

En conséquence, nous demandons le maintien des élections prud’homales à la date initialement prévue.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je répondrai d’abord à nos collègues socialistes.

Oui, il y a embouteillage. En effet, 70 % des dossiers qui arrivent devant les prud’hommes sont dus à une mauvaise compréhension au sein des TPE. Il convient donc d’engager une réflexion si l’on veut éviter que tous ces dossiers convergent vers les prud’hommes et fassent du dégât, d’un côté comme de l’autre d’ailleurs.

J’en viens à l’amendement n° 21 rectifié.

La commission est favorable au report des élections prud’homales, pour deux raisons.

La première est que les élections prud’homales devraient normalement se tenir en décembre 2013. Or tout le monde sait que de nombreux scrutins seront organisés au premier semestre de 2014 – élections territoriales, municipales, européennes – et qu’un trop grand nombre de scrutins risque de démobiliser l’électorat.

La deuxième raison est que le Gouvernement a engagé une réflexion sur la réforme des élections prud’homales sur la base du rapport remis par le conseiller d’État Jacky Richard.

En ce qui me concerne, j’y suis tout à fait favorable. Moi qui suis maire, je sais l’organisation qu’une telle élection implique. Certes, c’est la démocratie, et je suis pour, mais mobiliser toute la journée du personnel de la mairie et des élus pour attendre quelques votants – je me souviens d’un matin où il y a eu neuf votants –, ce n’est pas satisfaisant. Nous devons réfléchir et nous demander si nous pouvons continuer à organiser ces consultations de cette manière.

Il faudra du temps pour rendre des arbitrages, peser le pour et le contre, puis mettre en œuvre la réforme qui aura été décidée.

J’ajoute, parce que cela n’a pas été dit, que le 31 décembre 2015 est une date butoir. Si une solution peut être trouvée avant, les élections prud’homales seront organisées plus tôt.

La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 21 rectifié ainsi que sur l’amendement identique n° 39, pour des raisons différentes.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je voudrais revenir sur plusieurs points concernant les élections prud’homales, afin d’éviter toute ambiguïté.

Tout d’abord, nous sommes évidemment favorables au maintien de la justice prud’homale.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

La question ne se pose donc pas.

Ensuite, tout ce qui concerne l’organisation, les indemnités ou la carte judiciaire fait partie de la réforme. Cependant, le cadre de cette réforme est loin d’être constitué. Le jour où il le sera, une concertation aura lieu avec le Conseil supérieur de la prud’homie. Rien n’est donc encore lancé et tout cela prendra un peu de temps. Pour l’instant, nous n’en sommes qu’au rapport Richard.

En outre, la réforme du mode de désignation des conseillers prud’homaux a un seul objectif : augmenter le nombre de votants. Personne ne peut se satisfaire, que ce soit dans votre mairie, monsieur le rapporteur, dans la mienne ou dans n’importe quelle autre, d’une si faible participation.

Il faut admettre qu’il y a un problème, d’autant que, à l’occasion des dernières élections prud’homales, l’État avait fait un effort de communication pour diminuer le taux d’abstention. Or, même en essayant de mettre les salariés devant leurs responsabilités, l’abstention a encore progressé.

Dernier point : si nous maintenons la date des élections prud’homales en 2013, il y aura collision entre deux élections faisant appel au corps électoral des salariés.

L’élection qui sera issue de la loi de 2008 et de la présente loi aura un impact certain car elle reposera sur une représentativité très large. Dès lors, les salariés participeront au vote, j’en suis persuadé.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Il serait tout de même paradoxal de ne pas tenir compte de cette nouvelle représentativité pour les élections qui vont avoir lieu. Les systèmes de représentativité pourraient quasiment se trouver en décalage, une organisation syndicale ayant un poids différent aux conseils de prud’hommes et dans le dispositif découlant de la loi de 2008 complétée par le présent texte. Évidemment, il ne faut pas en arriver là.

Il convient d’abord de promulguer ce projet de loi qui traite de la représentativité. Ensuite, il faudra se donner le temps de poursuivre la réflexion et la concertation approfondie sur les élections prud’homales et leur organisation, une date butoir ayant été fixée au 31 décembre 2015. Cette solution me semble à la fois sage et efficace.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le ministre, vous nous dites que la loi de 2008, complétée par ce projet de loi, s’appliquera en 2013. Pour ma part, il me semble que la loi de 2008 est déjà en application. Plusieurs élections dans de grandes entreprises se sont déjà déroulées selon les modalités de la loi de 2008, puisque le Haut Conseil du dialogue social, installé en 2009, est d’ores et déjà destinataire de procès-verbaux d’élections. Les élections telles qu’elles ont été définies en 2008 n’ont pas été bloquées en attendant 2013. Elles ont eu lieu aux dates prévues dans les entreprises. Les nouvelles règles de représentativité sont donc en train de se mettre en œuvre.

Les choses se mettent en place progressivement et, en 2013, l’ensemble des entreprises de plus de onze salariés auront mis en œuvre le texte. Dès lors, je ne comprends pas en quoi il y aurait « collision » entre les deux élections. Il me semble au contraire qu’en 2013 les élections constitueront l’aboutissement de la loi de 2008.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

La loi de 2008 est en cours d’application dans les entreprises, mais le résultat national, celui qui permettra de mesurer la représentativité dans les branches et au niveau interprofessionnel sera collecté en 2013. Ce qui compte dans une élection, ce n’est pas le fait de déposer un bulletin dans l’urne, c’est le résultat. Le risque de collision dont je parle concerne les résultats qui seront connus en 2013.

Nous sommes bien obligés de tenir compte d’un fait nouveau, à savoir l’arrivée dans le droit social d’une nouvelle manière de mesurer la représentativité. C’est extrêmement important, je pense que nous pouvons nous accorder sur ce point.

Si nous n’en tenions pas compte, cela signifierait que le nouveau mode de représentativité ne change rien, n’a aucun impact. Ce n’est évidemment pas le cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je n’ai pas dit qu’il n’avait pas d’impact !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Le Gouvernement essaie de prendre en considération les conséquences de cette nouvelle représentation du corps social.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 40, présenté par Mme David, M. Fischer, Mmes Pasquet et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Première phrase

Remplacer l'année :

par l'année :

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement de repli visait à limiter à une année la durée de prolongation du mandat actuel des conseillers prud’homaux.

Au vu des explications qui nous ont été données, je connais le sort qui lui sera réservé : je le retire.

L'article 8 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Gisèle Gautier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Gautier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 20 août 2008 a profondément réformé les critères de la représentativité syndicale dans les entreprises, remplaçant le système traditionnel, qui reposait sur une présomption de représentativité, par un nouveau système plus démocratique et plus performant, prévoyant la mesure de l’audience syndicale dans les entreprises.

Étant donné la réussite de cette première réforme, il paraissait évident de poursuivre l’expérience dans les très petites entreprises, les TPE, jusqu’alors exclues du processus de démocratisation sociale. N’oublions pas que ces TPE représentent plus de 4 millions de salariés. Leur intégration dans le processus de représentativité des organisations syndicales était d’ailleurs prévue par la loi que nous avons votée en 2008.

Le projet de loi est organisé autour de trois axes principaux : il organise la mesure de l’audience syndicale dans les TPE par correspondance et par voie électronique ; il apporte une aide au dialogue social par la création de commissions paritaires ; enfin, il reporte la date des prochaines élections prud’homales.

Reposant largement sur le dialogue social et ne représentant qu’une contrainte minime pour les TPE, ce projet de loi réalise un compromis tout à fait satisfaisant entre les attentes des partenaires sociaux et celles des organisations patronales.

Au cours du travail réalisé en commission, sous la direction de son rapporteur, notre excellent collègue Alain Gournac, le projet de loi s’est enrichi de plusieurs dispositions venant encadrer le scrutin mesurant l’audience des syndicats et préciser le fonctionnement des commissions paritaires.

Concernant les commissions paritaires, principal point de litige entre patronat et syndicats, la commission a adopté deux amendements forts pertinents. D’une part, la création de ces commissions ne pourra être envisagée au niveau local ; d’autre part, ces commissions ne pourront ni être investies de missions de contrôle ni pénétrer dans les locaux d’une entreprise sans l’accord du chef d’entreprise, ce qui me paraît tout à fait normal.

Notre assemblée a ainsi pris en considération la demande des petits entrepreneurs qui nous ont fait part de leurs craintes ces dernières semaines.

En conséquence, ce projet de loi représente un véritable progrès pour la démocratie sociale, parachevant la réforme de 2008 et respectant les liens existants entre patrons et salariés des TPE.

Le groupe UMP lui apportera donc tout son soutien.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous l’avez compris au travers de nos interventions et de nos amendements, ce texte ne soulève pas notre enthousiasme.

Plusieurs dispositions ne sont pas de nature à favoriser l’émergence d’un vrai dialogue social, que ce soit le vote sur sigles ou le caractère facultatif des commissions paritaires. En commission, notre rapporteur a voulu essayer de concilier des positions non pas différentes, divergentes ou adverses, mais férocement ennemies.

Les amendements qui ont été intégrés à l’article 6 ne clarifient pas non plus les choses. Pour le dire simplement, ces amendements font que le texte penche désormais dangereusement du côté où il risque de tomber… Nous savons déjà par la presse que le groupe UMP à l’Assemblée nationale, par la voix de MM. Copé et Bertrand, a décidé, contre le Gouvernement représenté par M. Woerth, de supprimer les commissions paritaires. Nous avons déjà dit ce qu’il faut penser de ce procédé.

Après une première étape difficile au Sénat, le MEDEF s’est retourné vers l’Assemblée nationale pour parachever le travail de sape et traiter ainsi le Sénat comme quantité négligeable.

Nous voici donc amenés à nous prononcer sur un texte qui pourrait bien être moribond, et ce parce que la représentativité des organisations patronales qui prétendent parler au nom de tous les patrons n’est plus indiscutable. Elle est même chaque jour de plus en plus discutée, au point que le débat sur l’ensemble de ce projet de loi en a été pollué.

Pour l’heure, nous devons revenir au texte, nous situer au niveau des principes et ne pas méconnaître les réalités de terrain. Aujourd’hui, les petites entreprises sont de plus en plus nombreuses. Ce sont elles qui créent des activités nouvelles et des emplois, même si elles sont trop souvent écrasées en tant que sous-traitantes.

Même si le texte qui nous a été présenté était largement perfectible, il n’en constitue pas moins un premier pas vers le développement d’un vrai dialogue dans toutes les entreprises. C’est ce que tous ceux qui sont directement concernés, sur le terrain, nous ont dit.

Le groupe socialiste entend montrer de manière indiscutable qu’il s’engage auprès des partenaires sociaux de bonne volonté en faveur du dialogue social et de la négociation collective. Nous accomplissons donc un geste d’ouverture vers l’avenir en décidant de nous abstenir sur ce texte dans sa rédaction actuelle. Nous refusons en effet de joindre nos voix à ceux pour qui rien, lorsqu’il s’agit de syndicats et de droits des salariés, c’est encore trop !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat, permettez-moi tout d’abord de remercier M. le rapporteur…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

… même si nous ne sommes pas toujours d’accord sur tout. Il connaît le texte par cœur et il a travaillé avec beaucoup de passion ; or j’apprécie les gens passionnés.

Permettez-moi également de remercier M. le ministre, qui a pris soin de répondre à tous les intervenants, qu’il soit ou non d’accord avec eux.

Permettez-moi enfin de remercier l’ensemble des intervenants, même si certains d’entre eux ont parfois paru un peu excessifs, et ce pas forcément dans le camp habituel ! Je pense à un tandem en particulier…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Les sénateurs du RDSE, plus précisément les radicaux de gauche, étaient prêts à voter ce texte, qui constitue la première pierre d’un édifice, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire. Toutefois, nous regrettons vivement que les commissions paritaires territoriales n’aient qu’un caractère facultatif alors qu’il était possible, selon nous, de les rendre obligatoires.

Pour cette raison, le groupe du RDSE s’abstiendra.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le groupe CRC-SPG s’abstiendra lui aussi sur ce texte, comme il s’est abstenu tout au long de l’examen des articles.

Certes, nous estimons également que ce texte constitue une avancée, mais nous regrettons de ne pas être parvenus à l’améliorer de façon à favoriser, comme nous le souhaitions, le dialogue social.

Si nous ne sommes pas satisfaits du dispositif de mesure de l’audience syndicale, qui se fera sur sigles, il n’en demeure pas moins que, dès que ce texte sera mis en œuvre, les salariés des très petites entreprises pourront voter lors des élections destinées à mesurer l’audience syndicale dans leur entreprise.

Je ne m’attarderai pas sur les commissions paritaires. Nous regrettons leur caractère facultatif, ainsi que l’encadrement très strict de leurs missions. Pour autant, il est vrai que leur inscription dans le code du travail constitue la première pierre d’un édifice. Ces commissions verront tout de même le jour, je fais confiance sur ce point à l’ensemble des partenaires sociaux.

Le seul article contrariant à nos yeux, c’est l’article 8, qui prévoit le report des élections prud’homales. J’espère sincèrement, monsieur le ministre, que, à l’issue de la réflexion que vous mènerez sur ce sujet, vous ne déciderez pas de supprimer cette élection, car, pour de nombreux salariés, elle constitue l’unique occasion d’élire les représentants qui les défendront.

Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous abstiendrons sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

J’informe le Sénat que j’ai été saisi de la question orale européenne avec débat suivante :

M. Pierre Fauchon demande à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes d’exposer au Sénat le sentiment du Gouvernement sur la politique d’élargissement de l’Union européenne. Quels sont les progrès vers l’adhésion et les difficultés restant à résoudre pour chacun des trois pays actuellement candidats ? Quelles sont les perspectives d’ouverture de négociations avec l’Islande ? Quels sont les objectifs à l’égard des pays des Balkans occidentaux ? Enfin, quels doivent être les rapports entre l’élargissement et la politique de voisinage qui, au sein de la Commission européenne, sont rassemblés en un même portefeuille ?

Conformément aux articles 79, 80 et 83 bis du Règlement, cette question orale européenne avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 9 juin 2010, à quatorze heures trente et le soir :

- Projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services (427, 2009-2010).

Rapport de M. Gérard Cornu, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (507, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 508, 2009-2010).

Avis de M. Éric Doligé, fait au nom de la commission des finances (494, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures.