Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 25 novembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Action extérieure de l'état

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Madame le ministre d’État, c’est l’un de vos illustres prédécesseurs, membre de surcroît de la Haute Assemblée, François de Chateaubriand qui assurait : « Tout mensonge répété devient une vérité ».

Vous voilà, depuis onze jours, madame le ministre d’État, installée dans le bureau de Vergennes. Et nous savons tous combien il vous est difficile, en si peu de temps, de mesurer la complexité de votre tâche. Mais nous n’en attendons pas moins de vous la vérité sur notre diplomatie, la vérité sur l’emploi et l’ampleur des crédits que vous venez solliciter devant notre assemblée.

Sous l’autorité du Président de la République, et avec l’appui du Gouvernement, la France mène une politique attentive à nos partenaires européens, soucieuse de garantir la paix et la sécurité. La mise en place du service diplomatique européen va faire évoluer notre diplomatie. Je ferai simplement quelques remarques générales pour que nous puissions préserver quelques valeurs de cette diplomatie.

Dans l’Union européenne, l’amitié franco-allemande demeure depuis près d’un demi-siècle un maillon essentiel de la construction européenne. Elle a été lancée par Robert Schuman et Konrad Adenauer, suivis par le général de Gaulle et Konrad Adenauer.

Mais la nouvelle Entente cordiale qui semble naître du sommet de Londres du 2 novembre dernier, entre le Royaume-Uni et notre pays, est de bon augure. Et le débat de demain sur la défense sera une bonne occasion de l’expliquer.

C’est un autre centriste, Jacques Duhamel, qui fut à l’origine des accords de décembre 1971, lesquels permirent l’entrée de la Grande-Bretagne dans ce qui était encore la Communauté économique européenne.

Et c’est encore un autre centriste occupant avant vous le Quai d’Orsay, René Pleven, qui mena les négociations qui permirent au 1er janvier 1973 l’entrée de nos amis britanniques en Europe, sous l’autorité du Président Pompidou.

En Europe, sous l’autorité du Président de la République, la France a su – et c’est, à mon sens, très important – conforter, changer l’état d’esprit des relations avec la Russie de Dimitri Medvedev et de Vladimir Poutine. Le récent sommet de l’OTAN à Lisbonne, où vous étiez présente, précédé par la rencontre de Deauville, a démontré que Moscou prend conscience des menaces qui pèsent sur la sécurité du continent européen et se sent de plus en plus membre de la famille européenne.

Ce sommet a d’ailleurs tracé la voie à suivre pour l’Organisation. Elle reste le cadre transatlantique pour une solide défense collective et le forum essentiel pour les consultations et la prise de décision de sécurité entre alliés.

Avec les États-Unis, nos amis et alliés de toujours, les relations sont apparemment au beau fixe. Qu’il est loin, madame le ministre d’État, le temps où le général de Gaulle dénonçait, le 5 février 1965, le, sortait le 12 mars 1966 la France de l’OTAN et faisait sans grand ménagement quitter le 1er juillet 1967 du sol national des soldats américains et britanniques qui étaient venus verser leur sang pour le libérer !

En Méditerranée, le Président de la République a pris une excellente initiative avec l’Union pour la Méditerranée. Elle cherche autour de la terre et de l’eau à réconcilier les irréconciliables. C’est une politique qu’il faudra développer car elle souffre beaucoup actuellement de ses conflits internes.

L’Amérique latine a été trop longtemps négligée par nous-mêmes. Le Brésil est aujourd’hui une puissance émergente. Le Président de la République a raison d’en tenir le plus grand compte et chacun oublie trop souvent que ce pays est notre voisin et que nous avons une frontière commune : nos compatriotes de Guyane le savent bien, gardons-nous de ne pas nous en souvenir.

La vérité en diplomatie, c’est aussi ne pas négliger ces deux États antagonistes, rivaux et pourtant puissances émergentes indispensables à l’équilibre du monde que sont l’Inde et la Chine, qui changent complètement la donne au niveau diplomatique mondial.

Le contentieux – pour faire un peu d’histoire – entre l’Inde et la France a été refermé en 1954 avec la rétrocession de nos comptoirs à l’Union indienne. Pourtant, ce grand pays est encore négligé : c’est un partenaire commercial de première importance, ses capacités militaires sont importantes, son rôle dans la sous-région est de première grandeur. L’Union soviétique, son allié de toujours, n’existe plus et ce grand pays cherche sa voie. C’est un des éléments que la politique française devrait reprendre en compte et celle-ci devrait peut-être entraîner la politique européenne dans cet échange.

Rappelons-nous aussi les très anciens liens d’amitié qui nous unissent avec la Chine. Le Président Edgar Faure, dans sa mission préparatoire à la décision historique du 31 janvier 1964 de reconnaître le Gouvernement de Pékin, avait parfaitement cerné les contours de la mentalité chinoise. Quelle que soit la politique suivie, la Chine attend de la continuité, de la persévérance et de la patience.

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