Séance en hémicycle du 25 novembre 2010 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle une déclaration de politique générale du Gouvernement, suivie d’un débat et d’un vote, en application de l’article 49, alinéa 4, de la Constitution.

Monsieur le Premier ministre, au nom de l’ensemble des sénateurs, je vous souhaite la bienvenue dans notre hémicycle, où vous allez, pour la deuxième fois, solliciter du Sénat l’approbation d’une déclaration de politique générale, en application de l’article 49, alinéa 4, de la Constitution.

Ce moment est solennel : depuis le début de la Ve République, c’est donc la dix-septième fois que le Sénat est amené à se prononcer sur une telle déclaration, et la quinzième fois qu’il le fait parallèlement à l’Assemblée nationale.

La Constitution assure une place particulière au Sénat au sein de nos institutions. C’est pourquoi elle a prévu que vous puissiez vous exprimer de façon spécifique devant nous.

Vous faites vivre ainsi, monsieur le Premier ministre, un bicamérisme différencié et vous illustrez la pleine part que prend le Sénat à la définition de l’avenir de notre pays.

Nous sommes sensibles et attentifs à cette marque de considération envers notre assemblée, qui porte sur l’action politique un regard souvent différent, que d’aucuns disent sage.

Je tiens à saluer également, au nom du Sénat, les ministres et secrétaires d’État qui nous font l’honneur et le plaisir d’être présents parmi nous. Chacun comprendra que nous ayons une pensée particulière pour Philippe Richert, qui vient de faire son entrée au Gouvernement, et que nous saluions la nomination de Michel Mercier, comme garde des sceaux, et celle de Henri de Raincourt, comme ministre chargé de la coopération.

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le Premier ministre, soyez assuré de notre volonté commune de travailler ensemble, dans un esprit d’écoute, de compréhension, de recherche constante de l’intérêt général. Les relations nouvelles entre le Parlement et le Gouvernement instituées par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 sont de nature, je le souhaite, à faciliter ce travail en commun.

Enfin, permettez-moi de former, à titre personnel, tous mes vœux républicains de réussite pour le gouvernement que vous venez de constituer.

Monsieur le Premier ministre, vous avez la parole.

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de vous remercier de ces propos et des encouragements que vous avez adressés au Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne vous infligerai pas une nouvelle lecture du discours qu’a prononcé devant vous, hier, Alain Juppé, ministre d’État, ministre de la défense et des anciens combattants, par lequel je vous ai livré les ambitions du Gouvernement.

Au côté du Président de la République, nous avons choisi un parti, celui de la persévérance. La cohérence, la clarté, la responsabilité : le général de Gaulle voyait dans ces qualités la raison d’être du gouvernement. Nous considérons comme lui que ce gouvernement doit obéir « à l’intérêt national et non pas à la dernière passion qu’il a subie ».

Ce nouveau gouvernement est investi d’une double mission.

La première, c’est naturellement de prolonger l’œuvre de modernisation engagée en 2007. Nous avons, au travers de l’élection du Président de la République et d’une majorité parlementaire, un mandat clair, pour cinq ans. Nous le mettons en œuvre. C’est le respect que l’on doit à la démocratie et au choix de nos concitoyens.

Nous avons une seconde mission, qui est de gérer les rebondissements d’une crise économique internationale que nous avons reçue en partage, malgré nous.

Moderniser la France, maîtriser la crise, accompagner sa sortie. C’est la ligne stratégique du Gouvernement et c’est là que se trouve la continuité de l’action des gouvernements que j’ai dirigés.

Si la récession est derrière nous, la crise n’est pas terminée. Ses séquelles sont les déficits, qu’elle a contribué à creuser, la dette et, naturellement, les conséquences sur l’emploi.

Par ailleurs, vous le voyez notamment ces derniers jours, cette crise inédite continue à muter, s’attaquant désormais aux dettes souveraines et aux banques centrales.

Nous avons donc le devoir, l’ensemble des pays européens, notre communauté nationale, de combattre les dangers que cette crise fait peser sur nos sociétés, et les combattre avec les valeurs et les principes qui sont ceux de la France : la coopération internationale et la cohésion nationale.

À la tête du G20 pendant une année, notre pays va continuer à faire avancer les solutions coopératives, afin d’éviter le plus possible les guerres commerciales et, surtout, les guerres monétaires, afin, aussi, de donner des institutions et des règles stables à l’économie mondialisée, qui en a bien besoin.

Nous continuerons de même, en coordination avec l’Allemagne, à renforcer la gouvernance de l’Union européenne et de la zone euro.

Chaque jour qui passe montre à quel point nous avons besoin d’une véritable politique économique européenne et d’une coordination des politiques nationales à l’intérieur de la zone euro, que, pour le moment, les institutions et leur pratique ne nous permettent pas de réaliser avec la meilleure efficacité.

Sur le plan national, nous continuerons, avec votre aide, à cicatriser les plaies creusées par la récession.

Notre politique économique est équilibrée : c’est l’investissement, c’est la discipline budgétaire et c’est l’emploi.

Nous allons investir 35 milliards d’euros sur les secteurs d’avenir, suivant en cela les recommandations du rapport de Michel Rocard et d’Alain Juppé.

Nous allons réduire les déficits par deux d’ici à 2013, parce que ces déficits menacent notre croissance et notre indépendance.

Nous allons renforcer nos actions sur l’emploi des jeunes et des seniors en tendant la main aux partenaires sociaux, parce que, après le temps des différends, le temps du dialogue est revenu.

Pour moi, la réforme des retraites ne se solde pas par des vainqueurs et des vaincus. Aucun de nos concitoyens n’est coupable d’avoir des convictions. Il n’y a pas un peuple de droite et un peuple de gauche. Il n’y a que des Français.

Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste et du RDSE.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Il n’y a que des Français, avec leurs doutes, doutes que je ne sous-estime pas, avec leurs espoirs, si difficiles, parfois, à combler, des Français plongés dans une période d’immenses bouleversements : le basculement du centre de gravité du capitalisme vers l’Asie, la diversité et le vieillissement de nos sociétés, où vont cohabiter désormais cinq générations au lieu de trois.

C’est en rassemblant nos concitoyens, c’est en les mobilisant sans démagogie que nous parviendrons à faire en sorte qu’émerge, au bout de cette crise, une France plus forte, une France réconciliée avec l’Europe et réconciliée avec la société ouverte du XXIe siècle.

Pour cela, mesdames, messieurs les sénateurs, la réforme reste nécessaire.

On a souvent dit, par le passé, que cette réforme était, chez nous, impossible : impossible en raison de l’histoire de la France et de du caractère français ; impossible en raison de la crise ; impossible en raison de la proximité des élections.

Eh bien, cette réforme prétendument impossible, nous l’avons faite et nous la poursuivrons ensemble !

Ce n’est pas maintenant que nous allons nous excuser ou nous repentir de faire simplement notre devoir.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Nous allons ouvrir le chantier de la fiscalité.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Nous allons dégager des solutions face au problème de la dépendance.

Je veux indiquer devant le Sénat que, naturellement, ces solutions doivent d’abord apporter une réponse à la question de la dépendance, mais qu’elles doivent aussi, en même temps, permettre de répondre à cette question difficile et urgente qui est celle du financement des conseils généraux.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Nous allons moderniser le fonctionnement de la justice.

Comme toujours dans les périodes de tourmentes historiques, les Français se tournent vers l’État. Ils attendent de lui qu’il fixe un cap et qu’il construise un espoir.

Notre cap, c’est la République et ses valeurs.

La France n’a pas cédé à la panique sous le choc de la crise. La France ne s’est pas laissé séduire par les extrémistes.

À l’heure où les spectres du protectionnisme, du populisme, de la xénophobie ressurgissent ici ou là en Europe, la France s’est tenue au-dessus de ces ornières boueuses.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Cette maturité nationale nous commande, plus que jamais, de conforter les deux piliers de la République : l’autorité de l’État face à la violence, l’égalité des chances par l’éducation et la formation.

Quant à notre espoir, il est que, dans un monde chaotique, un monde peuplé de 6 milliards d’habitants assoiffés de réussite, les 65 millions de Français continuent encore de faire entendre leur voix, et ce sans renoncer à la spécificité de leur modèle social.

L’honneur des gouvernements que j’ai conduits, l’honneur de la majorité qui les a épaulés et à laquelle je veux rendre hommage, c’est de ne pas avoir trompé notre peuple sur cette réalité mondiale.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

C’est de ne pas avoir renié l’élan de 2007, c’est de ne pas avoir tremblé devant les résistances, c’est de ne pas s’être égarés dans les moments décisifs où l’équilibre international et européen ne tenait qu’à un fil.

La force d’une nation repose sur sa capacité à regarder la vérité en face ; c’est pourquoi, cet honneur, je veux le partager avec les Français, qui, tout au long de nos réformes, tout au long de la crise, ont fait preuve de responsabilité.

La conjugaison de nos actions et de leurs efforts n’a pas été vaine.

Notre taux de croissance en 2010 sera supérieur à 1, 5 %, alors que nos prévisions, au début de l’année, étaient largement inférieures.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Désormais, la cible des 2 % en 2011 est atteignable. Notre économie a recommencé à créer des emplois depuis le début de l’année.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Ce n’est pas maintenant qu’il faut mettre le pied sur le frein.

Il n’y aura pas de pause, parce que cette année est, pour nous, non pas une année préélectorale, mais une année de plus pour servir la France.

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Murmures sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Pour mener cette nouvelle étape de notre action, le Gouvernement doit pouvoir s’appuyer sur l’expérience et sur la mobilisation des élus des collectivités territoriales, de métropole comme d’outre-mer.

En posant la question de confiance à l’Assemblée nationale et en sollicitant l’approbation de la Haute Assemblée aujourd’hui, il ne s’agit pas de réécrire le quinquennat à coups d’annonces intempestives.

Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, Premier ministre

Non, il s’agit plus simplement, mais finalement plus fondamentalement, d’assumer ensemble, et ce jusqu’au terme de notre mandat, l’élan de réforme et de modernisation de la France.

Mesdames, messieurs les sénateurs, loin de la politique spectacle, loin des embardées médiatiques, il s’agit de donner au principe de la continuité politique ses lettres de noblesse.

Pour cela, j’ai besoin de votre soutien.

C’est ainsi que, conformément à l’article 49, alinéa 4, de notre Constitution, je me tourne vers celles et ceux qui, parmi vous, sont décidés à donner à la France la volonté et la durée pour se moderniser et se redresser !

Mmes et MM. les sénateurs de l’UMP, ainsi que MM. Claude Biwer, Jean Boyer, Pierre Fauchon et Jean-Jacques Pignard se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en venons aux interventions des groupes politiques.

La conférence des présidents a attribué un temps de parole de dix minutes à chaque groupe politique et de trois minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Puis, les groupes socialistes et UMP disposeront d’un temps supplémentaire de dix minutes, avant la réponse du Premier ministre.

Dans le débat, la parole est à M. Jean-Pierre Bel.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur le Premier ministre, nous avons écouté avec attention votre discours de politique générale, hier et à l’instant.

Vous avez évoqué plusieurs sujets graves, qui concernent l’avenir de notre pays : la régulation mondiale, la guerre en Afghanistan, l’Asie, qui est en train de devenir le nouveau centre de gravité du monde.

Vous nous avez donné votre perception de la crise, la pire crise mondiale, en effet, depuis les années trente.

Pourtant, comment ne pas voir le décalage entre votre vision des choses et ce que vivent les Français tous les jours ?

Non, monsieur le Premier ministre, un diagnostic lucide ne peut pas faire l’impasse sur la situation de l’emploi, alors que le chômage est toujours aussi présent, notamment chez les jeunes, et que ceux qui ont la chance d’avoir un emploi en ressentent, chaque jour un peu plus, le caractère précaire et incertain.

Monsieur le Premier ministre, les Français ne ressentent pas les choses comme vous. Lorsque vous prononcez le mot « rigueur », cela préfigure pour eux de nouvelles disparitions des services publics dont ils ont tant besoin. Lorsque vous prononcez le mot « réforme », édifiés par le passé récent, ils entendent « injustice » : injustice dans la répartition de l’effort, injustice entre les territoires, où les inégalités s’accroissent.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Alors que vous parlez de « modernisation », ils constatent que la régression gagne du terrain.

Monsieur le Premier ministre, les Français ne vous entendent pas quand vous leur dites que l’insécurité a largement reculé. Cela ne correspond à rien dans leur vie quotidienne. C’est même un échec retentissant pour celui qui dirige les forces de l’ordre, en droit ou en fait, depuis maintenant près de neuf ans.

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Rien, en réalité, ne s’est amélioré à cet égard. Tous les chiffres le prouvent, même les statistiques officielles. Le vécu de nos concitoyens confirme votre échec absolu en matière de lutte contre l’insécurité.

Monsieur le Premier ministre, vous avez enfin fait l’éloge du pacte républicain.

Je m’interroge pourtant : le républicain que vous êtes peut-il cautionner les mauvais coups permanents que le Président de la République porte à ce même pacte ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Comment pouvez-vous passer sous silence la stigmatisation de pans entiers de la population, jugés pour ce qu’ils sont, et non pour ce qu’ils font ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Comment accepter la remise en cause, désormais totalement assumée, de la laïcité, qui fait partie intégrante des principes fondateurs de notre République ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Oui, il y a bien un problème entre vous et les Français ! Car nos concitoyens souffrent aujourd’hui et craignent pour demain.

Dans votre discours, vous avez également esquissé le contour de quelques-unes des politiques à venir.

Vous nous avez dit, d’abord, que vous alliez poursuivre les réformes jusqu’au dernier jour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Vous vous êtes présenté comme une incarnation du courage et de l’esprit de réforme, comme si tous vos opposants étaient des adversaires acharnés du progrès, et même des lâches !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Quelle intolérance dans vos propos ! En effet, quels sont les actes concrets de votre action qui ont apporté une amélioration significative dans la vie des Français ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Où est l’inspiration humaniste et progressiste dans les mesures que vous avez prises et dans celles que vous avez annoncées ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Où est le courage dans la décision de supprimer l’impôt sur la fortune ?

Comment réformer, alors que vous avez laissé exploser les déficits jusqu’à atteindre, aujourd’hui, la somme astronomique de 150 milliards d’euros ?

Vous promettez aussi de ne pas augmenter les impôts. Mais qui ne voit pas que les prélèvements augmentent déjà, et ce dès le projet de loi de finances pour 2011 ?

Seules deux catégories de contribuables peuvent raisonnablement se sentir à l’abri. Ce sont, d’abord, les plus riches, les amis du président, qui ont bénéficié depuis 2007 de cadeaux fiscaux inédits !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ce sont aussi ceux qui composent votre clientèle traditionnelle, à qui vous avez octroyé des avantages fiscaux sans aucune contrepartie pour l’économie et pour l’emploi !

Nous le savons tous ici, car nous sommes, de par la Constitution, les représentants des collectivités territoriales : si vous pouvez afficher la stabilité de certains impôts nationaux, c’est grâce aux transferts de charges incessants que vous faites subir aux autres collectivités publiques §Ces dernières subissent les effets collatéraux de votre politique !

À ce sujet, qu’en sera-t-il de la politique de la dépendance ?

Oui, l’allongement de la durée de la vie, les progrès de la médecine ou le vieillissement démographique exigent la mobilisation de tous autour de ce nouveau risque des sociétés modernes.

Comment ne pas voir, aussi, que les grandes annonces doivent être suivies par de grands moyens, si nous ne voulons pas, demain, accroître encore les inégalités et les injustices face au grand âge ?

Comment ne pas craindre que, demain, selon que l’on vive dans un département riche ou pauvre, l’on n’ait pas les mêmes droits, les mêmes prestations parce que l’État ne jouera pas son rôle de garant des solidarités ?

Vous nous avez effectivement habitués à de telles disparités : aujourd’hui, avec une réforme des finances locales pleine d’incertitudes et porteuses de nombreux reculs pour les collectivités ; demain, avec une réforme territoriale mal engagée, tournant le dos à la péréquation et à la solidarité entre les territoires.

Ainsi nous faut-il aller plus loin, beaucoup plus loin, que le discours de politique générale que nous avons entendu.

Là où vous avez racketté les offices HLM de 340 millions d’euros §et de un milliard d’euros en trois ans, nous proposons une vraie politique du logement. Là où vous parliez de service minimum, vous avez construit le service public minimum. Cela, nous ne pouvons l’accepter. Nous proposons donc des services publics de qualité, non seulement dans les beaux quartiers, mais aussi dans ce que l’on appelle « les quartiers » et, bien sûr, dans notre ruralité.

Pour financer notre projet, nous mènerons une nouvelle politique fiscale, guidée par le souci de justice sociale et d’efficacité économique.

Le bouclier fiscal était immoral lorsqu’il a été mis en place. Il est, de plus, devenu anachronique, en déphasage complet tant avec les besoins du pays qu’avec le cycle économique.

Nous refusons les fausses promesses au sujet des impôts. Nous proposons que la fiscalité marche sur ses deux jambes, pour qu’elle ne se transforme pas progressivement en une fiscalité pesant sur les seuls ménages et les revenus du travail.

Oui, nous préconisons une grande réforme de la fiscalité des revenus et du patrimoine, au niveau national, mais aussi de la fiscalité locale, pour mettre un terme à la « redistribution à l’envers » aujourd’hui à l’œuvre.

Monsieur le Premier ministre, nous avons bien compris que le remaniement permet au Président de la République de resserrer le dispositif sur sa garde rapprochée, au détriment, m’a-t-il semblé, de ceux qui, dans la majorité, pouvaient exprimer des sensibilités différentes. Cela vous appartient, ce sont vos affaires et celles de vos amis.

Vous allez garder le cap, nous dites-vous. Eh bien, soyez-en assuré, le nôtre est aujourd’hui clairement fixé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous nous battrons pour la défense des grands principes de notre République, celle des Françaises et des Français qui attendent cela de nous.

Pour ce qui nous concerne, ici au Sénat, nous mettrons tout en œuvre afin que notre assemblée, aujourd’hui bafouée, désavouée, retrouve toute sa place, tout son rôle et le respect qui lui est dû au cœur des institutions.

Oui, nous allons travailler, avec d’autres, sans relâche, à un autre projet pour nos compatriotes : un projet crédible, un projet courageux, un projet de justice. Tel est le chemin que, dans les semaines et les mois à venir, avec mon groupe, je propose de suivre.

Les défis auxquels la France doit faire face sont immenses et nombreux.

Notre responsabilité est grande.

La politique que vous vous obstinez à poursuivre n’est pas la bonne.

Demain, il y aura le grand rendez-vous avec les Français. C’est donc à nous qu’il revient de redonner confiance et de permettre l’espoir !

Applaudissements nourris sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, selon la tradition de la Ve République, la nomination d’un nouveau gouvernement inaugure une phase nouvelle dans l’action des pouvoirs publics.

Vous le savez, la particularité de notre groupe centriste est de réunir des parlementaires qui considèrent qu’au-delà des lignes de partage des partis il peut se trouver des Français capables de se rejoindre sur certains choix fondamentaux pour la vie de la nation.

Ces Français sont ceux qui souhaitent favoriser l’avènement d’une France moderne ; …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

… une France qui favorise l’initiative et l’innovation, pousse des entreprises dynamiques, rayonne dans le monde par sa puissance économique et commerciale, par son génie technique et par son message humaniste ; une France qui assure son indépendance énergétique, met au service de tous les technologies nouvelles – le numérique, un réseau à très haut débit couvrant l’ensemble du territoire, la télévision connectée –, lutte contre l’isolement des entreprises et des Français, notamment les plus fragiles d’entre eux.

Monsieur le Premier ministre, parmi les nombreux sujets que vous avez évoqués, je me concentrerai sur ceux auxquels les centristes sont attachés, en premier lieu la réforme fiscale. Vos propos, et ceux du Président de la République la semaine passée, nous inspirent un seul mot : enfin !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Cela fait déjà de nombreuses années que le groupe Union centriste la défend. La réforme de la fiscalité du patrimoine qui a été annoncée ressemble tellement à notre proposition que nous nous en réjouissons.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

La suppression d’un bouclier fiscal dont les modalités ont été, dès sa conception, altérées, en faisant un symbole d’injustice fiscale ? C’est bien ! La suppression de l’ISF au profit d’un impôt sur les revenus et plus-values du patrimoine ? Nous en sommes heureux !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il s’agit bien d’assurer une juste répartition de l’effort que chaque Français doit consentir pour redresser nos finances publiques, et donc pour améliorer la situation sociale du pays.

Dans une démocratie, la légitimité de l’impôt repose non seulement sur sa justice, mais aussi sur son exemplarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Les plus fortunés d’entre nous doivent participer à l’effort général de hausse des prélèvements et de réduction des déficits publics.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Par le biais de la suppression de l’ISF ? Quelle logique !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Nous saluons aussi le soutien que vous apportez à une autre proposition portée par les centristes depuis longtemps : l’inscription dans la Constitution d’une règle d’or interdisant tout déficit budgétaire en dehors des investissements.

La question de la justice sociale nous amène à celle du cinquième risque et de la dépendance. Une société se juge, au moins en partie, à la manière dont elle s’occupe de ses anciens, qui lui ont permis de se développer.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Ai-je besoin de rappeler que nous avons été parmi les premiers à construire une politique de la dépendance, avec la création de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, en 2002, qui a permis de développer le maintien à domicile ?

Protestations sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Ce serait une erreur de se focaliser uniquement sur le financement, car, même si ce point est incontournable, il ne constitue qu’un aspect parmi d’autres de la dépendance.

De nombreux problèmes restent en effet à résoudre : le manque de places en établissements par rapport aux besoins ; le coût de l’hébergement avec un reste à charge élevé compte tenu du niveau de certaines retraites ; la médicalisation et la prise en charge de la dépendance, qui restent insuffisantes ; enfin, le manque de personnel pour dispenser le service d’aide à la personne et le manque de personnel médical et paramédical prêt à dispenser les soins aux personnes dépendantes.

Actuellement, pour les personnes âgées ou handicapées, il est difficile, voire impossible, de trouver un infirmier ou un kinésithérapeute en mesure d’intervenir régulièrement au domicile.

Se pose également le problème de la délégation de soins, qui nécessite d’avoir le courage de dépasser les réticences des corporations : il faut permettre de déléguer certains soins, certains actes techniquement simples, à la personne intervenant auprès d’une personne âgée, malade ou handicapée. Il ne s’agit nullement de porter atteinte à l’exercice de quelque profession que ce soit ; il s’agit simplement de garantir aux personnes qui le veulent la possibilité de vivre à leur domicile en dépit de la maladie ou de la situation de handicap. Il n’est pas acceptable que, pour ces personnes, l’alternative soit l’hôpital, l’illégalité ou l’insécurité à domicile.

La couverture d’un cinquième risque ne peut se faire ni par un simple toilettage de l’APA ni par une incitation à contracter une assurance privée ; elle doit être assurée par la solidarité nationale.

Il incombe au Gouvernement, aux partenaires sociaux et au Parlement, par le dialogue, de s’entendre sur un mode de financement juste, pérenne et équilibré.

Permettez-moi de vous livrer une réflexion personnelle. Je suis très réservé face au recours sur succession.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il apparaît comme une double peine pour des familles qui souffrent déjà d’avoir des parents dépendants, dont elles ont longtemps assuré la charge, et qui se verraient de nouveau punies par la privation d’un héritage, fût-il modeste.

Il en va de même pour les personnes handicapées, doublement punies par leur handicap et par l’impossibilité qui leur serait faite de pouvoir transmettre un patrimoine à leurs proches.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il faut donc réfléchir à l’éventualité de n’autoriser le recours sur succession qu’au-delà d’un plafond raisonnable. C’est une question éthique, philosophique.

Cela pose le problème de la solidarité entre les générations, qui est au cœur des enjeux de la société actuelle : je veux parler de la politique en faveur de la jeunesse.

Les actions prioritaires du Gouvernement doivent porter sur le retour au plein-emploi et l’intégration professionnelle des nouvelles générations. Beaucoup de jeunes, parfois même diplômés, dès lors qu’ils n’ont pas le soutien de leur famille, se retrouvent dans des conditions inférieures à celles que connaissait la classe ouvrière des années soixante-dix. Pour dire les choses crûment : en 1968, les pauvres étaient les vieux ; aujourd’hui, les pauvres sont les plus jeunes, surtout s’ils n’ont pas d’attache familiale. Pour la première fois de notre histoire, en période de paix, la situation de la jeune génération est plus difficile que celle de ses parents.

Alors, que faire ? La vraie rupture serait de sortir enfin de tous ces dispositifs spécifiques par catégories d’âge. Le véritable enjeu est d’organiser un parcours d’entrée dans le monde du travail, de construire ce moment fragile de transition entre études et travail.

Dans bien des secteurs, nous avons suivi une politique contraire aux intérêts des jeunes. C’est notamment le cas dans le domaine de la santé. Du fait d’un numerus clausus abusif, combien de nos brillants étudiants en médecine échouent en première année, une fois, deux fois, et sont contraints d’aller se former à l’étranger !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Et ce alors que nous organisons l’arrivée de praticiens étrangers n’ayant que rarement le niveau de nos jeunes médecins.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Et ce alors que des pans entiers de nos territoires risquent de devenir des espaces sans couverture médicale, où l’absence d’offre de soins ne permettra plus le maintien à domicile de nos aînés ; l’on rejoint ici la question de la dépendance.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Peut-être, en effet !

Au-delà des contrats d’engagement de service public proposés par les agences régionales de santé aux étudiants en médecine s’engageant à exercer dans des zones sous-denses, une révision profonde du numerus clausus s’impose donc.

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l’UMP et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

En outre, parmi les réformes d’ampleur que vous avez annoncées, monsieur le Premier ministre, celle de la justice revêt une importance toute particulière.

Nous partageons votre objectif de rapprocher nos concitoyens de leur justice. Pour autant, l’introduction des jurés populaires, tant en matière correctionnelle que dans l’application des peines, est une évolution à conduire avec prudence.

En aucun cas cette réforme ne doit apparaître comme une défiance à l’égard des 8 000 magistrats de notre pays. Nous souscrivons à l’annonce faite par votre garde des sceaux d’une large concertation sur ces questions. Nous y prendrons toute notre place, afin de promouvoir une justice toujours plus efficace et en phase avec notre société.

Avant de conclure, je tiens à le rappeler, les centristes sont attachés à ce que le Parlement joue pleinement le rôle qui lui est imparti par la Constitution de 1958 : l’objectif doit être un équilibre raisonnable conciliant efficacité du pouvoir et contrôle démocratique. Le groupe Union centriste souhaite démontrer que la représentation nationale peut être autre chose qu’une figuration nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

C’est pourquoi nous vous invitons, monsieur le Premier ministre, à faire vivre, à poursuivre le dialogue au sein de la majorité. Vous le savez, la majorité n’est pas une organisation unique, c’est une alliance de personnalités et de partis d’opinions parfois différentes, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. … vous avez raison, mais qui partagent des objectifs communs et se rejoignent sur l’essentiel : le soutien au Président de la République et au projet gouvernemental.

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Nous nous rejoignons aussi sur ce qui est nécessaire pour adapter notre pays au monde du XXIe siècle, sur le fait que la puissance de notre pays n’a de sens que dans l’intégration européenne et que le progrès technologique doit être concilié avec le développement durable.

En décembre 1962, Pierre Pflimlin, alors président du groupe centriste de l’Assemblée nationale, répondait ainsi à la déclaration de politique générale du Premier ministre Georges Pompidou : « Soucieux de préserver notre liberté de jugement et d’action, nous sommes en même temps conscients de nos responsabilités envers ceux qui nous ont envoyés ici et vers la nation tout entière. Au-dessus de toute préférence idéologique nous placerons toujours l’intérêt national, c’est vous dire que nous serons prêts à soutenir vos projets chaque fois qu’ils nous paraîtront conformes à l’intérêt du pays et à la justice sociale. »

Monsieur le Premier ministre, en nous inscrivant aujourd’hui dans cet état d’esprit, nous souhaitons que l’avenir nous donne raison d’avoir, en ce jour, approuvé votre politique !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Monsieur le Premier ministre, cher François Fillon, nous vous soutenions à la veille de votre démission, le samedi 20 novembre. Au lendemain de votre nomination, nous vous soutenons encore, avec la même conviction, la même loyauté et la même certitude de faire pour notre pays le meilleur investissement !

Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

J’adresse un mot amical et je forme des vœux de succès pour trois de nos collègues auxquels vous avez confié d’éminentes responsabilités : Michel Mercier, Philippe Richert et, naturellement, Henri de Raincourt.

Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

En qualité de président du groupe UMP, je dois aussi vous dire que nous retrouvons avec plaisir Hubert Falco, Valérie Létard et Jean-Marie Bockel. Ils ont servi très loyalement votre précédent gouvernement et enrichiront par leur présence les travaux de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

En dix minutes, il est tout simplement impossible de reprendre l’ensemble des sujets qui sont à l’ordre du jour. Mais, monsieur le Premier ministre, nous avons trop l’habitude de travailler ensemble en séance publique, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. … le matin, l’après-midi et la nuit, en commission, en groupe de travail, pour découvrir aujourd’hui l’action que vous avez menée au service du pays depuis quarante-deux mois, la signant de votre caractère : le sens de la responsabilité, le goût des réalités et, pourquoi ne pas le dire, une passion de la France profonde que vous exprimez avec pudeur, en des termes qui nous ont tous touchés, hier, lorsqu’ils ont été prononcés devant nous par votre ministre d’État, Alain Juppé.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Le mot principal est bien évidemment celui de continuité. Et comment pourrait-il en être autrement sur les deux rendez-vous que vous fixez : adapter notre vieux pays à un environnement plus exigeant et combattre nos petites facilités, nos compromis inutiles, nos faiblesses ? Vous nous invitez à vous accompagner, comme nous l’avons fait pendant trois ans. Nous n’avons aucune raison de ne pas vous suivre de nouveau, et avec le même enthousiasme, pour réformer notre cher et vieux pays.

Mais vous apportez sur votre action un éclairage nouveau. Vous soutenez, certes, que les réformes sont indispensables, et nous partageons cette conviction. Mais vous considérerez qu’elles ne doivent, en aucun cas, remettre en péril le formidable effort de redressement qui a été engagé et qui est une condition absolue de la garantie de la construction européenne et, en son sein, de la place de notre pays. Vous l’affirmez clairement, il est exclu d’affaiblir cet effort de redressement, quelle que soit par ailleurs l’urgence des réformes.

Nous aurons donc à conduire ensemble des réformes d’autant plus difficiles qu’elles seront enserrées dans une double contrainte : la nécessité et un environnement budgétaire extraordinairement difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

J’évoquerai donc la méthode qui devra être suivie et les raisons pour lesquelles le groupe UMP, à l’unanimité j’en ai la conviction, soutiendra votre action.

Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement doit aujourd’hui, et plus encore demain, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

… respecter, renforcer, partager la pratique parlementaire de coopération. Votre gouvernement, vos ministres et votre majorité devront travailler de manière solidaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Sur chacun des chantiers qui sont aujourd’hui à l’ordre du jour, et qui revêtent tous un caractère prioritaire, la culture du Sénat, l’attitude de la majorité seront au service de votre gouvernement dès lors que ce dernier acceptera de s’appuyer sur cette richesse.

Monsieur le Premier ministre, ces dix-huit derniers mois, la presse politique, et c’est son rôle, annonçait comme impossibles des réformes que vous avez pourtant, avec notre soutien, conduites à leur terme. Elles étaient impossibles ; nous avons réussi alors même qu’il n’y a pas dans notre assemblée, et d’une certaine façon nous en sommes fiers, de majorité absolue. Pourquoi en sommes-nous fiers ? Parce que, bien qu’étant le groupe principal, le groupe UMP a d’abord et avant tout la culture de l’ouverture, du dialogue, du respect des autres.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Vous aurez besoin de la culture du Sénat sur trois sujets importants.

Le premier est la prise en charge de la dépendance.

Le deuxième est de promouvoir une fiscalité compatible, entre, d’une part, les exigences en termes de croissance et d’investissement, et, d’autre part, le respect dû aux revenus et aux patrimoines acquis par une vie de travail.

Le troisième, vous l’avez évoqué indirectement, mais peut-être pas avec suffisamment de force, car il est au rendez-vous de l’avenir de notre pays, est d’offrir une force de travail accrue à notre pays. Trop longtemps nous avons été en Europe le pays où l’on commençait le plus tard, où l’on s’arrêtait le plus tôt, où l’on travaillait le moins de semaines par an et le moins d’heures par semaine.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous sommes un des pays qui travaille le plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Votre gouvernement et notre majorité ont eu le courage, pour la première fois depuis trente ans, de voter une disposition législative qui rappelle cette évidence simple : un pays n’est riche que de la richesse des habitants qui y travaillent. Lorsque l’on prend en charge une dépense sociale, comme nous le faisons avec les retraites, et que nous demandons à tous nos compatriotes de faire un effort supplémentaire, nous créons une richesse collective ; et c’est parce que nous aurons créé cette richesse que nous pourrons enfin la partager !

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Monsieur le Premier ministre, la valeur ajoutée du Sénat est indéniable. Elle nous permettra de contribuer à l’élaboration des futurs textes législatifs et d’être au rendez-vous que nous proposeront les membres de votre gouvernement.

La culture du Sénat, tenez-en compte, s’articule autour de trois idées simples très largement partagées.

La première est l’équilibre des finances publiques, et M. Arthuis ne me contredira pas en cet instant.

Plus gravement, la deuxième idée tient au souci des libertés individuelles. L’on est parfois, c’est vrai, tenté d’apporter des réponses rapides à des problèmes immédiats. Monsieur le garde des sceaux, adossez-vous sur la culture de la liberté individuelle, sur ce sens du droit édifié par deux siècles de jurisprudence républicaine et de construction législative.

La troisième idée c’est que, depuis la réforme constitutionnelle de 2003, la République est plus décentralisée.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

Non, recentralisée !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

N’hésitez pas à vous appuyer en permanence sur cette décentralisation.

C’est cette culture du Sénat que nous vous offrons et nous vous suggérons de l’enrichir par la collaboration entre le Gouvernement et sa majorité.

Nous devons aussi faire comprendre à nos compatriotes que, lorsque nous réformons notre pays, il ne s’agit pas de céder à la pression ou aux exigences des agences de notation et des marchés qui imposeraient une discipline absurde, contraignante pour nos compatriotes, et sans finalité.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il y a en vérité, au terme de plus d’un demi-siècle de construction européenne, une immense richesse partagée par la plupart des peuples d’Europe, mais non pas par la totalité.

Cette richesse partagée, c’est une monnaie commune, qui exprime un projet commun.

Monsieur le Premier ministre, vous avez placé sous l’angle de la réflexion franco-allemande l’éclairage que vous entendez donner à votre réforme fiscale.

Au-delà de la solidarité de ces deux vieux pays, sans lesquels la construction européenne n’existerait pas, je voudrais que nous réfléchissions ensemble à ce que Français et Allemands pourraient offrir aux nouveaux membres de l’euro, qui est en quelque sorte un bien commun.

Ces pays n’ont pas la chance d’avoir bénéficié de cette « Lotharingie industrielle » des XIXe et XXe siècles, qui ont placé la « banane bleue » – cette expression n’est pas très élégante, mais les géographes savent ce qu’elle signifie – au cœur de la richesse européenne, laissant des régions périphériques sans les moyens industriels, économiques, technologiques et financiers de partager toutes les contraintes de l’euro.

Nous avons, Français et Allemands, non seulement à construire notre convergence, mais à offrir aux autres partenaires de l’euro la certitude qu’ils ont une place dans notre construction.

Cette vision de la France n’est pas celle d’un pays résistant à une turbulence extérieure ; c’est bien celle d’un architecte de la construction européenne, permettant à notre continent de faire entendre sa voix dans un système mondial particulièrement violent, mais auquel nous sommes en mesure d’apporter plus de paix, de sérénité, d’équilibre et d’harmonie. Nous avons effectivement l’expérience de la construction collective, après avoir connu tant de siècles d’affrontement.

Monsieur le Premier ministre, je voudrais terminer

Ah ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

… par cette dernière qualité qui est la vôtre, sans laquelle il est impossible de réaliser de grands projets lorsqu’on a le grand bonheur et l’immense responsabilité de présider au gouvernement de la France.

Il est bon d’instaurer des règles pour le dialogue. Considérer la France comme l’architecte de la construction européenne est assurément indispensable dans une économie mondialisée, où l’égoïsme de très grandes puissances pourrait laisser l’Europe de côté.

Je voudrais surtout que nous utilisions cette passion commune que vous avez exprimée avec force, qui est tout simplement la passion de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le président, le temps de parole est dépassé !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Vous dites que la France est une miraculeuse affaire de volonté, une succession de rêves aboutis. Eh bien, faisons en sorte que notre génération porte sa part dans la construction de cette longue chaîne de rêves aboutis, d’espérances construites, de courages affrontés, et de réussites, qui résulte de la volonté que nous avions de nous rassembler plutôt que de nous affronter !

Mmes et MM. les sénateurs du groupe UMP se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur plusieurs travées de l’Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il n’a pas cité une seule fois le Président de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Plusieurs sénateurs de l’UMP quittent l’hémicycle.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

Soyez corrects !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà la correction des sénateurs de la majorité !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Huées sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le Premier ministre, vos propos, ceux d’hier et d’aujourd’hui, comme le remaniement ministériel, s’adressent à votre majorité, que vous voulez rassemblée. Vous avez vos raisons, vous êtes en campagne ; vous avez le pouvoir, et vous voulez le garder !

Depuis 2002, la droite est au pouvoir, et elle fait une politique contre le peuple : les plus riches se sont enrichis, les pauvres sont plus nombreux. Le pouvoir d’achat et les conditions de vie d’une grande partie de la population se sont dégradés, le modèle social est peu à peu cassé, et vous proposez de continuer !

C’est ce que la grande majorité de nos concitoyens a exprimé avec force en soutenant les mobilisations de millions de salariés et de jeunes contre votre réforme des retraites. Ils l’ont fait, parce que l’injustice de cette réforme était le symbole de toute votre politique.

Alors, vous continuez, comme M. Woerth l’a fait, à enfoncer le clou : votre politique est la seule possible ; tous ceux qui la contestent n’agitent que fausses idées, mirages désastreux !

Au fond, monsieur le Premier ministre, rêver de progrès humain fait partie de nos vieux démons ! Pourtant, ce sont les progrès humains arrachés de haute lutte depuis le XIXe siècle qui ont fait de la France un pays de haute compétitivité et de grande culture. §

La « real politique », c’est la dictature des marchés financiers !

On voit le résultat ! Le chômage, en progression avant et après la crise, a atteint 9, 9 % en France métropolitaine et outre-mer, 25 % chez les jeunes. L’emploi précaire ne cesse de se développer. Les femmes et les jeunes en font les frais. Près de 145 000 emplois ont été supprimés en 2008, et 255 000 en 2009 ; 8 millions de nos concitoyens, soit 13 % de la population, vivent avec moins de 949 euros par mois.

En revanche, le nombre de personnes ayant un revenu de plus de 500 000 euros a augmenté de 70 % ! Vous avez fait des choix depuis 2002, et vous entendez continuer !

Vous avez multiplié les niches fiscales : leur montant atteint 172 milliards d’euros par an. Vous avez créé le bouclier fiscal, diminué les impôts des plus riches, été inactifs contre l’évasion fiscale. Vous avez multiplié par deux la dette de l’État !

(Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Les marchés financiers n’ont ni frontières ni lois : ils dictent leur politique aux États. Les gouvernements européens, sous la houlette du FMI, ont sauvé les banques et les actionnaires en faisant payer les peuples, pour que tout continue comme avant !

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Voilà votre bilan, et la crise financière est le résultat des politiques ultralibérales menées en France, en Europe et aux États-Unis. §

Votre gouvernement a ouvert, en 2008, un crédit de 360 milliards d’euros aux banques sans contrepartie.

La BNP Paribas a augmenté ses gains de 93 % en 2009, les entreprises du CAC 40 ont fait 50 milliards d’euros de profits, et les membres de leurs conseils d’administration ont vu leur rémunération augmenter de 18 % un an après la crise. Parallèlement, elles ont supprimé 40 000 emplois depuis cinq ans.

Les mêmes recettes produisent les mêmes effets en Grèce, en Italie, en Espagne, au Portugal. En Irlande, le peuple subira une austérité drastique, mais l’impôt sur les sociétés restera le plus bas en Europe.

Les peuples paient la concurrence généralisée, le dumping social et fiscal : baisse des salaires, recul des protections sociales, des services publics, hausse du chômage et de la précarité. Ils paient pour que la rentabilité du capital soit encore plus forte, et donc les dividendes toujours en hausse !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous vous engagez à continuer !

Comment croire que, demain plus qu’hier, les baisses d’impôt des entreprises et des plus riches favoriseront l’emploi et l’investissement à long terme ? Renault met 3 000 personnes en préretraite, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est sans doute ce que vous appelez restaurer les conditions d’une politique industrielle.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Comment croire que le gel des dépenses publiques, le recul de la protection sociale et la privatisation des services publics préserveront la solidarité et l’égalité des chances ?

Comment croire que l’étranglement financier des collectivités locales n’aura pas de conséquences désastreuses sur la cohésion sociale, les services rendus à la population et l’investissement utile, qu’elles financent aujourd’hui pour plus de 70 % ?

Comment croire au dialogue entre l’État et les élus locaux, quand vous avez sonné le glas de la décentralisation par une réforme menée au pas de charge, sans consulter les assemblées élues dans les territoires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Comment croire au dialogue social, quand vous avez imposé une réforme des retraites brutale, contre l’avis de l’ensemble des organisations syndicales ?

Monsieur le Premier ministre, en 2007, le futur Président de la République a fait campagne sur le thème de la rupture.

Nos concitoyens ont vu ce qu’il en était : ils ont constaté que leur situation s’était détériorée, que « le travailler plus pour gagner plus », autrement dit la promesse du pouvoir d’achat, avait fait long feu !

Nos concitoyens ont vu que votre gouvernement, sous la houlette du Président de la République, a mis en œuvre, point par point, le programme du MEDEF que Mme Parisot avait rendu public pendant la campagne électorale présidentielle, avec son petit bréviaire Besoin d’air.

D’ailleurs, celle-ci se targue d’avoir, avec son livre, imposé le débat économique dans la campagne présidentielle et d’être à l’origine de « décisions économiques majeures prises par le Gouvernement » : la réduction de l’ISF pour investissement dans une PME, le renforcement du crédit d’impôt recherche, la réforme de la taxe professionnelle ou encore la suppression de la clause de compétence générale des collectivités territoriales – elle avait pensé à tout ! –, et maintenant la réforme des retraites, puisqu’elle qualifiait la retraite à soixante ans d’erreur historique ! Elle s’est d’ailleurs félicitée de votre reconduction à la tête du Gouvernement !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nos concitoyens ont constaté que le Président de la République et son gouvernement, dont vous étiez et restez le Premier ministre, a beaucoup agité les peurs, l’insécurité, la délinquance, les immigrés, dans des amalgames scandaleux et dangereux !

Aujourd’hui, la violence augmente, la cohésion sociale éclate, le pacte social se délite.

Vous avez le pouvoir, vous avez une majorité, mais le fossé se creuse entre le peuple et les institutions.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La dérive monarchique a fait des dégâts. Elle a porté des coups à la démocratie. Elle a sérieusement entaché la politique.

Quand on mène une politique contre le peuple, contre les intérêts populaires, on ne peut se prévaloir éternellement de sa légitimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous refusez toute proposition alternative.

Pour notre part, nous proposons, sans complexe, de rémunérer plus le travail que les actionnaires, pour revenir à un partage travail-capital plus favorable au travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous proposons d’assurer le financement de la protection sociale, y compris la dépendance, en faisant cotiser les revenus du capital au même niveau que les revenus du travail.

Nous proposons, sans complexe, de recruter des enseignants, des personnels dont nos services publics ont tant besoin, y compris pour assurer la sécurité de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous proposons une politique publique du crédit qui favoriserait l’investissement productif des entreprises.

Nous proposons une réforme de la fiscalité qui soit juste et efficace : la suppression du bouclier fiscal, une augmentation de la taxation sur les gros patrimoines, une modification importante du barème de l’impôt pour renforcer la contribution des hauts revenus.

Nous proposons que la France se dote d’une justice indépendante du pouvoir politique, conformément aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, d’une justice disposant – vous qui aimez les comparaisons européennes – de moyens aussi importants que dans d’autres pays européens, pour lui permettre d’être efficace.

Nous proposons une politique judiciaire où la délinquance financière, aujourd’hui peu à peu dépénalisée, serait sévèrement sanctionnée.

Nous proposons de rétablir les libertés publiques et d’élargir les droits des citoyens tant dans les institutions qu’au sein des entreprises.

Nous proposons de respecter les droits des migrants, de rétablir le droit du sol et d’instaurer enfin une citoyenneté de résidence.

Monsieur le Premier ministre, partout en Europe, les victimes des marchés financiers expriment leur colère. Hier, le Portugal a connu une grève historique de 3 millions de salariés.

Les peuples l’ont bien compris : ce que vous mettez en œuvre avec les autres dirigeants, c’est une régression sans précédent en Europe. Il est temps de revenir sur les institutions européennes !

C’est votre conception de la réforme et de la modernité. Vous proposez de continuer « droit dans vos bottes ». Vous faites la politique du pire.

Bien évidemment, notre groupe votera contre votre déclaration de politique générale ! §

Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le remaniement, sans cesse annoncé et toujours repoussé, devait être synonyme de changement et de nouveau souffle. Force est de constater qu’il laisse à tous un sentiment de « déjà vu » et, même parmi les plus zélés soutiens du Chef de l’État, le goût amer de la déception et de la désillusion.

Il faut bien reconnaître que ce remaniement a déjà produit certains effets, puisque le Président de la République a réussi à porter le mécontentement dans son propre camp, au sein même de sa majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Un remaniement qui divise et dessine des failles au sein de la majorité parlementaire : voilà qui est tout de même inédit !

Pendant ce temps, nos concitoyens attendent toujours que leurs difficultés et leurs inquiétudes deviennent enfin les seules et uniques préoccupations des membres du Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, je vous ai bien sûr écouté avec la plus grande attention, hier comme aujourd’hui. Je reconnais volontiers que votre déclaration de politique générale se veut volontariste et ambitieuse.

Vous projetez de délivrer notre pays de la peur du changement, de moderniser notre économie pour la rendre plus compétitive, de créer un dialogue social pragmatique et respectueux, de renforcer notre pacte républicain, de donner à notre jeunesse confiance dans l’avenir, de réformer notre fiscalité pour la rendre plus juste, ou encore de consolider l’unité de la nation. Très bien !

Je vous en donne acte, et je partage avec les membres de mon groupe le même dessein pour notre pays et pour nos compatriotes. Mais je ne peux qu’être perplexe – c’est un euphémisme – devant ces grandes déclarations d’intention au regard de la politique pratiquée par vos deux précédents gouvernements.

Comment, aujourd’hui, vous croire, alors que le niveau de la dette publique n’a jamais été aussi élevé, au risque d’altérer nos capacités d’emprunt et de réduire nos marges de manœuvre ?

Comment vous accorder notre confiance, alors que vous déterminez et conduisez la politique de la nation depuis trois ans et demi, et que notre pays est au bord de l’implosion sociale ?

Comment, enfin, penser que vous réussirez en un an et demi ce que vous n’êtes pas parvenu à faire depuis quarante-deux mois, alors que les inégalités n’ont jamais été aussi criantes et que votre programme se résumait ce matin dans la presse en deux mots : rigueur et austérité ?

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Vous avez fait appel à la lucidité du pays pour justifier votre volonté de ne pas infléchir votre ligne. C’est donc bien la preuve que la continuité prime sur le changement.

Monsieur le Premier ministre, je fais solennellement appel à votre lucidité, et à celle de votre majorité.

Il vous faut entendre les justes doléances des Français, inquiets d’un pays rongé par le chômage, la peur du déclassement social et la violence du monde du travail ; d’un pays qui n’arrive plus à donner vie à l’égalité des chances et à l’idéal républicain du progrès social et de la liberté individuelle ; bref, d’un pays en crise, qui traverse une crise économique doublée d’une crise morale.

Oui, un libéralisme économique sans scrupule menace aujourd’hui de mettre des États membres de l’Union européenne en cessation de paiement, au risque de faire exploser la zone euro.

L’Irlande vient d’obtenir une aide de 100 milliards d’euros pour sauver quatre banques en faillite, mais la France a-t-elle exigé que l’Irlande augmente son taux d’imposition sur les bénéfices des sociétés, aujourd’hui à 12, 5 %, quand le nôtre est à 33 % ? Quelle Europe voulons-nous ? À quand la coordination des politiques économiques européennes, seul remède face à la crise ?

Plus de régulation et de redistribution pour moins d’égoïsme des États et des individus, voilà le credo que nous défendons de façon unanime au sein du RDSE, en prônant la taxation des transactions financières.

C’est aussi dans cet esprit de vigilance et de proposition que nous attendons la réforme fiscale. Oui, notre système fiscal est illisible, injuste, et constitue un frein à la compétitivité économique de notre pays. Et si le statu quo est impossible, cela ne signifie pas qu’il faille promettre tout et son contraire.

La responsabilité d’un dirigeant, monsieur le Premier ministre, est de dire la vérité au peuple, en l’occurrence qu’il est impossible d’envisager, sans hausse des prélèvements obligatoires, la réduction de la dette publique dès 2012, comme vous l’avez pourtant annoncé.

La justice fiscale commande de remettre à plat notre fiscalité et d’instaurer, enfin, une vraie progressivité, pour permettre une vraie redistribution des revenus. Progressivité, redistribution : voilà des mots que nous aurions aimé vous entendre prononcer, monsieur le Premier ministre, hier et aujourd’hui !

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Comment également ne pas évoquer la réforme de la justice, ce symbole de la puissance publique aujourd’hui en triste état après des années de budgets trop modestes et une politique obsessionnelle du chiffre ?

Les membres de mon groupe s’inquiètent de votre réforme de la garde à la vue, qui continuera à nous mettre en porte-à-faux avec le droit européen, au mépris du droit à un procès équitable.

Il en est de même de votre réforme pénale, tuée dans l’œuf par la Cour de Strasbourg il y a deux jours à peine. Dès lors, pourquoi poursuivre la fuite en avant en lançant la création de jurys populaires en correctionnelle ?

Monsieur le Premier ministre, je prends par ailleurs acte de votre volonté de faire de la dépendance l’une des priorités de votre gouvernement. Croyez bien que nous nous associerons à ce chantier dans un état d’esprit constructif, mais que nous n’hésiterons pas non plus à nous élever contre toute tentative déguisée de privatisation.

J’ose croire que vous ne ferez pas preuve de la même surdité qu’avec la réforme des retraites ou celle des collectivités territoriales. Ces deux textes sont les plus récentes illustrations d’une méthode de gouvernance que ma famille politique réprouve avec force, car située aux antipodes du consensus et de la concertation !

Ainsi, pour la réforme des collectivités territoriales, l’avis du Sénat a été littéralement ignoré par votre gouvernement. Au travers de cette atteinte à la dignité de la Haute Assemblée, vous avez adressé un message de mépris et de défiance à l’ensemble des élus locaux, ceux-là mêmes qui œuvrent au quotidien pour satisfaire l’intérêt général, non sans difficultés, surtout dans les territoires ruraux.

Territoires ruraux, ruralité, aménagement du territoire : autant de mots absents de votre discours de politique générale. Nous le regrettons vivement !

Vous ne pouvez qualifier de concertation une méthode de gouvernement qui fait du passage en force sa caractéristique première. Nos compatriotes l’ont d’ailleurs bien compris en exprimant massivement leur désarroi dans la rue, un désarroi que l’opposition parlementaire a le devoir de relayer et de faire entendre.

Aussi, monsieur le Premier ministre, comme je ne peux accepter que vous qualifiiez la voix de l’opposition de « brouhaha » – c’est le terme que vous avez employé –, j’appelle les forces qui la composent à se rassembler au plus vite autour d’un programme moderne et responsable, en se gardant bien de promettre l’impossible, mais en recherchant toujours le consensus, car c’est bien de dialogue, d’écoute et d’espoir que les Français ont besoin aujourd’hui !

Or, monsieur le Premier ministre, je crains qu’un remaniement, une déclaration de politique générale et, enfin, un vote de confiance ne suffisent pas à vous mettre de nouveau en situation, vous et le Président de la République, de redonner espoir aux Français, et crédibilité à notre pays.

André Maurois écrivait : « Quand on veut justifier une mauvaise action, on trouve toujours de bons arguments ! » Si, globalement, je partage plusieurs de vos arguments, je n’approuve pas votre action, tant pour les années écoulées que pour les mois à venir.

Les mutations du monde et de nos sociétés européennes nécessitent de mener une politique radicalement différente, et d’avoir le courage de s’attaquer aux injustices et à l’affairisme. C’est ainsi que les citoyens retrouveront espoir en l’idéal républicain cher au RDSE, et c’est pourquoi, au-delà de notre composante radicale de gauche, nombreux seront ceux qui ne pourront pas approuver votre déclaration de politique générale !

Applaudissements prolongés sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je serai bref.

Comme chacun sait, les sénatrices et les sénateurs n’appartenant à aucun groupe ne prennent pas de position collective dans ce genre de scrutin. Chacun d’entre eux s’exprimera en son âme et conscience au travers de son vote.

Pour ma part, j’ai longuement hésité, et j’avais envisagé de m’abstenir pour protester contre la réforme des collectivités locales, que je désapprouve, comme nul ne l’ignore dans cette assemblée. J’espère qu’il vous sera encore possible d’apporter quelques améliorations à ce texte et je vais donc finalement voter en faveur de votre déclaration de politique générale.

Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Voilà qui valait bien cinq minutes de temps de parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Je ne confonds pas la globalité des problèmes de la France et l’un des éléments de votre politique, fût-il à mes yeux d’une importance capitale.

Monsieur le Premier ministre, parce que c’est essentiel pour nos concitoyens, parce que l’équilibre de l’Europe en dépend, parce qu’il est nécessaire que notre pays puisse faire entendre sa voix dans le concert mondial, je souhaite, comme vous, que la France réussisse à sortir renforcée de cette période troublée et difficile.

Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Monsieur le Premier ministre, c’est sur la continuité que vous avez été nommé car, dites-vous, « les allers-retours fragilisent l’action publique ».

Permettez donc que les écologistes rappellent vos volte-face : après le grand spectacle du Grenelle, nous avons entendu le Président de la République déclarer, au salon de l’agriculture : « L’environnement, ça commence à bien faire ! » Quant à vous, monsieur le Premier ministre, vous avez décidé de revenir sur la taxe carbone au salon de l’automobile.

Vous ne joignez pas le dire et le faire.

La suppression de l’ISF et la réforme des retraites n’avaient pas été annoncées aux Français, mais vous les faites. La taxe poids lourds et la clause de revoyure pour les finances des collectivités avaient été promises, mais vous ne les faites pas !

Un projet porté par les Verts, l’instance spécifique de garantie de l’indépendance de l’expertise, a subi le même sort. Pourtant, la gestion de la grippe A/H1N1 et ses 2, 6 milliards d’euros d’argent public gaspillé, comme le scandale du Mediator, prouvent bien l’urgence de revisiter nos modes d’expertise.

Curieuse démocratie que celle qui ne met pas en œuvre les mesures votées par le Parlement ! Au final, il nous reste une écologie mercantile, de toilettage.

Vous avez tout justifié par la « crise ». Mme Lagarde a fait une relance bétonneuse, sanctuarisé les revenus du capital. Tout au plus glissa-t-elle quelques recommandations. Le MEDEF sourit.

On brade l’argent public sans conditions : l’amendement écologiste qui demandait la traçabilité des fonds de sauvetage des banques et leur exclusion de tout circuit passant par les paradis fiscaux fut repoussé, et les restaurateurs ont englouti sans effets la baisse de TVA.

Les conséquences de la RGPP minent les services publics comme des termites rongeant des poutres charpentières. L’État n’est plus en mesure d’assurer correctement ses compétences.

Faute d’encadrement suffisant, à l’école on gère les élèves par l’autorité, et les différences par les fichiers et les évaluations brutales.

Mobilisée dans la chasse aux sans-papiers et les contrôles d’identité, dont certains se font encore au faciès, la police, qui voit ses effectifs diminuer, ne peut plus garantir la sécurité de base.

L’hôpital public est au bord de la crise de nerfs.

Mme Marie-Thérèse Hermange s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Universités, grand emprunt, chiffres de Pôle emploi, vous n’avez que la compétitivité à la bouche. Vous lorgnez sur l’Asie, oubliant le pillage des forêts, le travail des enfants, la répression des dissidents, les contaminations des produits, qui franchissent d’autant plus allègrement nos frontières que les douanes et feu la direction de la concurrence et des prix ont été décimées.

L’image écornée de notre pays nous vaut la consternation, quand ce n’est pas l’indignation des autres : affaires au plus haut niveau de l’État pour lesquelles la préservation d’intérêts privés n’a d’égale que l’intimidation de la justice ; interventionnisme dans l’audiovisuel public ; circulaire ethnicisée sur les Roms, pourtant citoyens européens ; record d’Europe des actions policières contre la presse ; casse du fret ferroviaire et de La Poste ; attitude internationale bavarde et arrogante.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Et vous voulez continuer ?

C’est le passé qui vous inspire : vous rêvez de productivisme débridé dans un État dérégulé. C’est vous qui n’avez pas vu que le monde a changé. Pas un mot pour les pauvres, les chômeurs, les expulsés, les gens en difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Pas un mot pour les classes moyennes, qui voient avec effarement le maintien des privilèges des plus riches, qui, eux, ne travaillent pas et ne se lèvent pas tôt. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Pas un mot pour la diversité culturelle, qui est notre richesse.

Il nous faut du lien : vous mettez les associations au pain sec.

Il nous faut de la solidarité : vous privatisez les dispositifs sociaux : hier la réalité de la retraite par répartition, demain la sécurité sociale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le Premier ministre, les écologistes, en harmonie avec le groupe socialiste, voteront contre votre déclaration de politique générale, d’autant que les services rendus par la nature sont liquidés par le favoritisme du ministère de l’agriculture, complaisant avec les pesticides !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. –Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Monsieur le Premier ministre, j’ai écouté avec attention votre déclaration de politique générale et, à vrai dire, je n’ai rien entendu de nouveau. : ni pour les territoires de la République en général ni pour ceux de l’outre-mer en particulier.

Aussi, je m’efforcerai aujourd’hui d’être le porte-parole de l’outre-mer.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Je m’y efforcerai, madame, même si, une fois encore, je crains que ce gouvernement, tellement semblable au précédent, ne soit également sourd et aveugle aux problèmes de cette France trop éloignée des cabinets parisiens.

Ce que nous, élus de l’outre-mer, n’avons de cesse d’attendre, c’est que le Gouvernement n’envisage pas nos pays comme des terres lointaines et exotiques, génératrices de charges pour la collectivité nationale.

Ce que nous voulons, c’est que vous compreniez réellement l’importance de leur singularité et de leurs apports spécifiques dans l’originalité de la construction du modèle français.

Ce que nous espérons, c’est que vous preniez enfin conscience que notre identité constitue non pas une menace, mais un atout pour la nation française et pour l’Europe.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Si j’insiste sur votre difficulté à comprendre l’outre-mer, c’est au regard de votre inaptitude à construire une vision et un dessein, à définir avec nous un projet pérenne, en vue du développement de ces territoires.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Or, ce projet est plus que jamais une urgence.

Les départements d’outre-mer cumulent un certain nombre de disparités économiques et sociales, et les inégalités avec la métropole demeurent importantes.

Je ne citerai que quelques chiffres.

La moitié des foyers dispose d’un revenu mensuel inférieur de 38 % à la moyenne nationale.

La proportion des personnes vivant sous le seuil de pauvreté est en progression et concerne un ménage sur cinq.

Le taux de chômage, deux à trois fois plus élevé dans nos régions que dans l’Hexagone, touche particulièrement les jeunes et s’établit pour ces derniers, en 2009, à environ 60 %.

La situation des seniors est également très préoccupante.

Ce sinistre tableau, largement aggravé par la sévérité de la crise mondiale, a eu un impact particulier dans nos régions déjà fragiles.

La mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer, que j’ai eu l’honneur de présider, a mis l’accent sur les grands défis à relever pour et par les outre-mer. Elle a conclu sur cent propositions, dont s’est d’ailleurs largement inspiré le Conseil interministériel de l’outre-mer, le CIOM.

L’outre-mer est donc entendu, me direz-vous ! En apparence, oui. Mais le problème du rapport de l’État à l’outre-mer, ce n’est pas tant l’absence d’écoute : c’est l’inconstance !

Ainsi, en 2003, a été votée la loi Girardin, qui devait durer quinze ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucette Michaux-Chevry

Mme Lucette Michaux-Chevry. Vous ne l’avez pas votée !

Mme Christiane Hummel applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

En 2008, cinq ans plus tard, le dispositif d’exonération des charges sociales et de défiscalisation est revu à la baisse, et ce sans évaluation préalable !

En 2009, la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, réécrit une nouvelle fois ces dispositifs. Et aujourd’hui, un an plus tard, ils sont remis en cause dans le projet de la loi de finances pour 2011, que nous examinons actuellement.

Il s’agit non plus de rabotage, monsieur le Premier ministre, madame la ministre de l’outre-mer, mais d’un véritable sabotage.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Je peux également citer l’exemple de la ligne budgétaire unique, la LBU, démantelée petit à petit alors qu’elle devait être sanctuarisée, le logement social demeurant l’une des priorités absolue pour les départements d’outre-mer.

Ce que nous demandons au Gouvernement, c’est que soit enfin mise en œuvre une politique lisible et, oserais-je dire, « durable » pour l’outre-mer, une politique qui ne place pas les acteurs, notamment les acteurs économiques, dans une situation d’insécurité juridique permanente.

D’ailleurs, ce sont souvent nos collectivités territoriales qui doivent pallier les insuffisances de l’État.

Ce que nous demandons au Gouvernement, c’est une politique prenant réellement en compte la caractéristique de la situation financière difficile de nos collectivités territoriales, qui est la faiblesse de la fiscalité locale directe eu égard à notre retard de développement.

Je tiens à rappeler ici que j’ai demandé que soient organisés des états généraux des finances locales dans nos régions, ce thème n’ayant pas été traité dans le cadre des états généraux de l’outre-mer.

J’attends une réponse du Gouvernement à ce sujet.

Nous serons également extrêmement vigilants quant à votre capacité à nous défendre ou non dans le cadre européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

M. Longuet, lui, a dépassé de deux minutes !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Dans le contexte actuel des accords andins et de l’ouverture intégrale du marché européen aux États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, les ACP, ce sont l’ensemble des productions agricoles des départements d’outre-mer qui sont menacées de disparition : la banane, le sucre, le rhum et le riz guyanais.

Pour conclure, monsieur le Premier ministre, j’ai dit ce que les outre-mer attendent, mais leurs élus, que je représente, et, au-delà, leurs populations ne peuvent accorder leur confiance à un gouvernement dont les orientations et les actes démontrent qu’il n’y a rien, en tout cas pas grand-chose, à espérer !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le Sénat va procéder au vote sur la déclaration de politique générale du Gouvernement.

En application de l’article 39, alinéa 2, du règlement, le scrutin public est de droit.

En application de l’article 60 bis, alinéa 3, du règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune, dans les conditions fixées par l’article 56 bis du règlement.

J’invite MM. Alain Dufaut et Daniel Raoul, secrétaires du Sénat, à superviser les opérations de vote.

Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l’appel nominal.

Le sort désigne la lettre J.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le scrutin sera clos quelques instants après la fin de l’appel nominal.

Le scrutin est ouvert.

Huissiers, veuillez commencer l’appel nominal.

L’appel nominal a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le premier appel nominal est terminé.

Il va être procédé à un nouvel appel nominal.

Le nouvel appel nominal a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Plus personne ne demande à voter ?...

Le scrutin est clos.

J’invite MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici le résultat du scrutin n° 110 :

Nombre de votants334Nombre de suffrages exprimés333Majorité absolue des suffrages exprimés167Pour l’adoption180Contre 153Le Sénat a approuvé la déclaration de politique générale du Gouvernement.

Mmes et MM. les sénateurs de l ’ UMP se lèvent et applaudissent. – M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

J’informe le Sénat que M. le président du Sénat a reçu une lettre, en date du 25 novembre 2010, par laquelle M. Philippe Richert, qui a été nommé, par décret du 14 novembre 2010, ministre chargé des collectivités territoriales, lui a fait connaître sa décision de se démettre de sa fonction de questeur du Sénat.

La conférence des présidents fixera la date à laquelle il sera procédé à son remplacement dans cette fonction.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle la suite du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).

Nous en sommes parvenus aux dispositions de la seconde partie du projet de loi de finances.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Nous allons commencer l’examen des missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » (et article 67).

La parole est à M. le rapporteur spécial, éminent rapporteur spécial !

Mme Nathalie Goulet applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Madame le ministre d’État, je veux vous dire le plaisir que j’ai à vous retrouver au banc du Gouvernement en tant que ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes…

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. … et l’honneur qui m’est fait de rapporter votre premier budget à ce titre.

Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

En ces temps de rigueur budgétaire, un premier regard sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » pourrait donner l’impression que le ministère des affaires étrangères et européennes est relativement privilégié, ce qui serait pour vous, madame le ministre d’État, une bonne chose.

En effet, à périmètre constant, les crédits de la mission progressent de 2, 1 % en autorisations d’engagement, pour s’élever à 2, 962 milliards d’euros, et de 3, 7 % en crédits de paiement, pour atteindre 2, 965 milliards d’euros.

Cependant, ce constat mérite d’être relativisé.

Tout d’abord, le Quai d’Orsay, qui a commencé à réduire ses effectifs dès 2006, soit trois ans avant l’application de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, à l’ensemble des ministères, poursuit son effort en la matière. Pour l’année 2011, il sera dans la norme commune : avec 160 suppressions d’emplois, ce qui correspond à environ la moitié des départs en retraite prévus cette même année, soit 282 équivalents temps plein travaillés, dits emplois ETPT. Mais, bien que ce ministère ait déjà perdu 10 % de ses effectifs, il ne sera pas exonéré de la deuxième vague de la RGPP. Ainsi, il devra supprimer 450 nouveaux emplois sur les deux années 2012 et 2013.

Permettez au rapporteur spécial de la commission des finances de saluer une nouvelle fois la démarche du ministère et la volonté de rigueur qui l’anime depuis plusieurs années. Il y avait du chemin à parcourir, et un grand chemin a été parcouru.

Ces suppressions d’emplois se sont accompagnées d’importantes réorganisations, que j’ai déjà eu l’occasion de décrire devant vous. Mais, pour la seconde fois, je me demande néanmoins – je sais que vous serez attentive à cette observation, madame le ministre d’État – si nous n’allons pas bientôt atteindre les limites de l’exercice, voire si nous ne les avons déjà pas atteintes. Des marges de progression existent sans doute encore, peut-être au sein du réseau culturel, voire dans le réseau consulaire, certains postes pouvant être supprimés en ce qu’ils correspondent à une réalité qui est maintenant dépassée.

Cela dit, si l’on persistait en ce sens, la question du maintien de l’universalité du réseau, à laquelle vous connaissez tous, me semble-t-il, mon attachement, se posera inexorablement à moyen terme.

D’ailleurs, selon les informations qui m’ont été communiquées, si les réductions d’effectifs de la trentaine de « postes de présence diplomatique » sont sur le point d’être finalisées – l’effectif moyen de ces « ambassades » au format réduit se situe entre 11 et 12 ETPT –, la redéfinition des missions de ces postes n’est pas encore, à ma connaissance, intervenue. Or elle est essentielle. Il ne s’agirait pas d’avoir les mêmes objectifs et les mêmes ambitions et de vouloir offrir le même type de prestations qu’auparavant, simplement dégradées du fait de la diminution des emplois. Mieux vaut, madame le ministre d’État, analyser clairement la situation et redéfinir les missions de ces ambassades.

Sur les autres crédits du programme « politique » du ministère – programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde –, le mouvement le plus notable – je tiens à le souligner pour m’en réjouir – concerne les participations de la France aux organisations internationales, OI, et aux opérations de maintien de la paix, OMP.

Les crédits affectés à ce titre passent de 738, 6 millions d’euros en 2010 à 842, 6 millions d’euros en 2011, soit une hausse de plus de 14 %, ce qui est significatif. La principale cause de ce « recalibrage » est la prise en compte d’un taux de change euro/dollar beaucoup plus réaliste : 1, 35 dollar pour un euro au lieu de 1, 56 dollar auparavant. Actuellement, l’euro doit fluctuer entre 1, 35 et 1, 42... J’ai assez insisté dans le passé sur la nécessité de présenter des chiffres sincères pour ne pas me féliciter de cette prise en compte du taux de change.

Toutefois, il s’agit là de crédits contraints, reflétant des obligations auxquelles la France ne saurait se soustraire et dont le Quai d’Orsay ne peut bien sûr disposer librement. Il ne faut donc pas que l’augmentation de ces crédits fausse la vision que nous avons des moyens du ministère.

En matière culturelle, plusieurs points sont à signaler que je veux rappeler, sans trop insister car j’ai eu l’occasion de le faire dans le passé.

En premier lieu, la maquette et le nom du programme 185 ont été modifiés. On parle non plus de Rayonnement culturel et scientifique, mais de Diplomatie culturelle et d’influence.

En outre, ce programme rassemble tous les crédits dédiés à cette politique, alors qu’auparavant seuls les crédits culturels destinés aux pays « OCDE » y figuraient, les actions conduites dans les pays en développement relevant alors du programme 209. Le nouveau découpage me paraît, je tiens à le dire, plus pertinent et je souscris à ce changement.

En termes opérationnels, l’année 2011 verra la mise en place concrète des deux établissements publics créés par la loi de juillet dernier relative à l’action extérieure de l’État.

Le premier d’entre eux est l’Institut français, qui succédera à CulturesFrance. Il y a eu dans cette assemblée des débats extrêmement importants, fructueux et riches que je n’ai pas besoin de rappeler.

J’ai depuis longtemps plaidé pour une réforme profonde de notre politique culturelle extérieure ; je ne peux donc que me féliciter de ce changement dans notre paysage administratif.

Néanmoins, comme pour toute réforme, la mise en œuvre effective est au moins aussi importante, sinon plus, que le cadre législatif que nous avons fixé ici.

En l’occurrence, je tiens à le rappeler, pour que la réforme produise son plein effet et pour que le nouvel Institut français ait donc réellement l’efficacité que nous attendons, madame le ministre d’État, il faut que votre ministère affirme et montre constamment son intérêt – ce dont je ne doute pas – et son engagement en faveur de cet institut.

Mais il faut aussi – c’est là l’originalité – que d’autres ministères s’engagent à vos côtés : je veux citer une nouvelle fois le ministère de la culture et, bien entendu, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ils ont déjà – je le sais car cela nous avait été dit par votre prédécesseur, madame le ministre d’État, et peut-être pourrez-vous nous le confirmer – marqué leur volonté d’avancer dans ce domaine-là en mettant à votre disposition un certain nombre d’emplois, de crédits aussi, ils sont décidés, semble-t-il, à sortir de leur magnifique isolement. Mais je souhaite que ce point-là soit affirmé, parce que c’est l’une des conditions du succès.

Je veux rappeler que le Sénat, unanime je crois, a souhaité le rattachement le plus rapide possible du réseau à la nouvelle agence.

Pour l’heure, la loi prévoit la mise en place de l’expérimentation, sur trois ans, d’un tel rattachement, dans une dizaine de pays, mais les volontaires étant plus nombreux que prévu, semble-t-il, l’expérimentation pourrait être menée dans un plus grand nombre de pays. Vous nous le confirmerez ou vous nous l’infirmerez, madame le ministre d’État.

Le second établissement public qui a été créé est CampusFrance, qui regroupera l’association Egide et l’actuel GIP CampusFrance.

Après l’audition organisée le 13 octobre dernier par la commission des finances, je me contenterai de souscrire une nouvelle fois aux recommandations de la Cour des comptes.

Dans l’immédiat, il convient d’assurer au mieux les conditions matérielles de la fusion, en particulier le choix du siège. Les relations financières de l’opérateur avec l’État devront ensuite être redéfinies dans un cadre conventionnel et de manière appropriée. Enfin, les tutelles de l’opérateur, qui ne devront être que deux – il avait été question d’une troisième tutelle, à laquelle, je le dis tout de suite, je ne suis pas pour ma part favorable –, devront apprendre à travailler ensemble sur un sujet d’importance qui est l’attractivité de notre enseignement supérieur. Madame le ministre d’État, permettez-moi d’appeler votre attention et votre vigilance sur ce dossier.

Je dois vous le dire, l’audition que nous avons faite des parties concernées par ce nouvel opérateur nous a démontré qu’il y avait beaucoup de chemin à parcourir, tellement il paraissait ignorer l’objectif que pourtant le Parlement avait clairement fixé. Mais je sais que votre vigilance et votre fermeté s’exerceront aussi dans ce domaine-là.

S’agissant de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, sa subvention reste fixée à 420, 8 millions d’euros. Comme je l’ai détaillé dans mon rapport écrit, ce niveau, élevé dans l’absolu, ne permet pas à cet opérateur d’absorber une charge pour pensions civiles qui devrait passer de 142 millions d’euros à près de 160 millions d’euros en 2013.

En conséquence, une forte dynamisation des ressources propres, en particulier de la participation à la rémunération des résidents, en d’autres termes une contribution adossée aux frais de scolarité, paraît inéluctable.

En l’état actuel des estimations de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’accroissement devrait être de près de 24 %, ce qui représente un effort considérable en recettes et affecte la croissance de ladite recette à la couverture de la pension civile, au détriment d’autres besoins de dépenses de l’Agence, en particulier immobiliers. Il s’agit, je tiens à le dire, de besoins qui sont substantiels et qu’il convient évidemment de prendre en compte.

Nous aurons à examiner tout à l’heure un amendement de M. André Ferrand qui a été cosigné par un certain nombre de collègues et qui devrait nous permettre d’aborder la question de la capacité d’endettement de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger pour faire face à ses missions. Puisque l’État a confié à l’Agence la responsabilité de l’immobilier, il faut bien qu’elle puisse exercer sa mission. Cela exige quelques précautions ou quelques entorses à un principe auquel, en effet, nous tenons ; nous y reviendrons tout à l’heure.

À propos du programme 151, Français à l’étranger et affaires consulaires, je me contenterai de souligner la progression continue de la prise en charge des frais de scolarité, la PEC, et des bourses.

Le coût total devrait passer de 107 millions d’euros à 119 millions d’euros l’an prochain. Cette hausse continue, tirée notamment par la forte augmentation des frais pratiqués par les établissements, apparaît difficilement supportable dans un cadre budgétaire contraint.

Nous en reparlerons lors de la discussion des articles, tout comme nous évoquerons la prise en charge des adhésions dites « de troisième catégorie », dont peuvent bénéficier les plus défavorisés de nos compatriotes établis hors de France, à la Caisse des Français de l’étranger. C’est un sujet dont notre collègue Jean-Pierre Cantegrit nous parlera tout à l’heure. Les amendements nous donneront la possibilité de revenir sur toutes ces questions importantes.

Je terminerai cette présentation par quelques mots sur le programme 332, Présidence française du G20 et du G8, dont la création est proposée par le présent projet de loi de finances.

Comme son nom l’indique, ce programme doit permettre de retracer les dépenses engagées au titre de la préparation et de la tenue des sommets, sur le modèle de ce qui a été fait, au sein de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », pour la présidence française de l’Union européenne en 2008.

Hors dépenses de sécurité, qui resteront à la charge du ministère de l’intérieur, le budget prévu s’élève à 60 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 50 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui semble raisonnable, voire ambitieux dans le sens de la rigueur ; on y reviendra peut-être.

Il s’agit d’un budget relativement modique et, madame le ministre d’État, la gestion du Quai d’Orsay devra être rigoureuse, afin de rester au sein de cette enveloppe.

Au terme de cette analyse, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, je vous invite à adopter sans modification les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ». En revanche, je le dis tout de suite, je vous proposerai deux amendements sur les articles rattachés.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, les principaux éléments de l’action diplomatique sont regroupés dans le programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde. Il augmente de 6, 6 % pour 2011. Cette progression est, pour l’essentiel, consacrée à un meilleur financement des opérations de maintien de la paix, OMP, menées dans le cadre des Nations unies. En effet, sur les 112, 4 millions d’euros supplémentaires affectés à l’ensemble de ce programme, 80 millions leur sont consacrés.

L’an dernier, j’avais souligné combien la croissance des financements requis par ces opérations de maintien de la paix, comme par les contributions obligatoires dues aux organisations internationales, pesait sur les ressources du programme 105. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite d’une meilleure prévision budgétaire, dès la loi de finances initiale, du montant financier d’engagements auxquels la France ne peut se soustraire.

Je rappelle que la France participe, par l’envoi de personnels, à neuf des seize opérations de maintien de la paix déployées et qu’elle en est le cinquième contributeur, à hauteur de 7, 5 % du financement.

Les contributions obligatoires et les opérations de maintien de la paix ont représenté, en 2009, 70 % de la consommation des crédits du programme 105, hors dépenses de personnel, avec une part respective de 36 % et de 34 %.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se félicite également de la stabilisation des crédits d’intervention affectés à la coopération de sécurité et de défense, à 35 millions d’euros, alors qu’ils avaient été réduits en 2008 et 2009.

Les priorités géographiques de cette coopération sont, tout d’abord, et pour des raisons évidentes découlant de l’actualité récente, les pays de la zone sahélienne : Niger donc, Mauritanie et Mali.

Parmi les seize écoles militaires existant en Afrique, consacrées à la formation du maintien de la paix, la France soutient particulièrement celles qui sont installées au Mali, au Bénin et au Cameroun.

Il s’agit là d’une coopération de long terme, appuyant des écoles nationales, qui ont un rayonnement régional, et dont le coût est inférieur à la venue de stagiaires en France.

Les crédits affectés au programme 151, Français à l’étranger et affaires consulaires progressent de 5, 4 %. L’offre d’un service public de qualité aux Français de l’étranger, qui regroupe l’action consulaire, progresse de 6, 6 % et représente près de 54 % du montant total du programme. Ces sommes sont consacrées à l’accès aux services administratifs pour nos compatriotes de l’étranger, à l’aide sociale qui peut leur être apportée en cas de besoin et à l’animation du réseau consulaire, qui s’appuie, de façon croissante, sur nos consuls honoraires.

Vous trouverez dans mon rapport écrit une analyse de la restructuration de ce réseau consulaire, marquée par l’émergence de « pôles régionaux » ayant vocation à concentrer les tâches de gestion les plus lourdes.

C’est l’accès des élèves français au réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, AEFE, qui bénéficie de la plus forte augmentation, avec 13, 5 millions supplémentaires, soit une croissance de 13 %. L’élément problématique contenu dans cette action touche, vous le savez, à la prise en charge par l’État des frais de scolarité des élèves français des classes de lycée.

La commission des finances du Sénat a souhaité, dès l’origine, l’encadrement de cette mesure ; nous l’avons soutenue dans cette démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Cette exigence de réalisme a conduit à l’instauration d’un moratoire qui limite actuellement cette prise en charge aux seules classes de lycée.

Pour obtenir une présentation plus précise des crédits, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté un amendement visant à établir une distinction entre les crédits affectés à cette prise en charge et ceux qui sont destinés aux bourses scolaires, alors qu’ils sont aujourd’hui confondus au sein d’une même ligne budgétaire.

J’en viens maintenant au problème complexe de l’immobilier à l’étranger. Vous le savez, la France possède un grand nombre d’implantations à l’étranger, qui ne sont pas toujours situées de façon optimale au sein des villes ou des pays, et dont l’entretien est rarement assuré de façon correcte.

Depuis le 1er janvier dernier, le produit des cessions de nos biens à l’étranger est devenu le moyen de financement unique des opérations immobilières à l’étranger du ministère des affaires étrangères et européennes, le MAEE. Les futures opérations de rénovation et d’achat dépendent de la remontée, qui demande un délai souvent supérieur à un an, du produit des cessions vers le ministère. Vous trouverez dans mon rapport la liste, parfois tout à fait étonnante, des implantations proposées à la vente.

Dans la perspective d’une meilleure organisation et gestion des implantations à l’étranger, le principe même de ces cessions me semble positif, puisque le produit en sera entièrement affecté au ministère. Cependant, chacun le sait, le marché immobilier est marqué par une forte volatilité. Pour ne prendre que le seul exemple d’un pays voisin, il n’est pas très facile actuellement de vendre non pas des châteaux, mais des maisons ou des établissements en Espagne.

C’est pourquoi il serait souhaitable que des crédits budgétaires, même limités, soient mobilisables pour financer des opérations urgentes d’entretien. En effet, si certains de nos immeubles à l’étranger faisaient l’objet de dégradations, l’image de notre pays risquerait d’être affectée par l’existence de bâtiments peu ou mal entretenus.

Je terminerai ce tour d’horizon par l’évocation, après M. Gouteyron, du programme 332, qui regroupe les sommes destinées à financer les présidences françaises du G20 et du G8. Sont ainsi inscrits dans ce projet de loi de finances 60 millions d’euros au profit du ministère des affaires étrangères et européennes, qui est chargé de leur organisation.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » pour 2011.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Monsieur le président, madame le ministre d’État, monsieur le ministre, mes chers collègues, malgré une nouvelle maquette budgétaire, dont nous sommes très satisfaits, et le maintien de la « rallonge » budgétaire, la baisse des crédits consacrés à notre diplomatie culturelle et d’influence devrait se poursuivre au cours des trois prochaines années.

L’aspect le plus préoccupant de ce budget tient toutefois à la situation financière difficile de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

Je rappelle que le réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger, qui compte plus de 280 000 élèves, dont 60 % sont étrangers, joue un rôle essentiel en termes de présence, d’influence et de rayonnement de la France dans le monde.

Son financement repose, pour une large part, sur les droits de scolarité acquittés par les familles françaises et étrangères.

Or ce réseau est aujourd’hui menacé de trois manières.

Tout d’abord, l’État a transféré à l’Agence la prise en charge des cotisations patronales des pensions des personnels détachés, mais sans accompagner cette mesure d’un transfert équivalent de subventions. Or cette charge devrait augmenter fortement au cours des trois prochaines années, en raison de la progression du taux de pension.

L’Agence estime ainsi qu’elle devra augmenter de 25 % ses ressources propres, ce qui entraînera inévitablement une forte progression des droits de scolarité payés par les familles et, par conséquent, des demandes de prises en charge et de bourses scolaires.

Ensuite, l’Agence est confrontée à l’évolution des aides à la scolarité, que constituent la PEC – la prise en charge – et les bourses sur critères sociaux.

La « cristallisation » préconisée par nos collègues Geneviève Colot et Sophie Joissains est, à mes yeux, une mesure à la fois injuste et insuffisante.

Elle est injuste, car elle ne tient compte ni des fortes variations du taux d’inflation d’un pays à l’autre – je rappelle que le Venezuela connaît une inflation à deux chiffres – ni des différences importantes entre les établissements s’agissant des droits de scolarité. Surtout, un tel système peut s’avérer pénalisant pour les établissements qui se sont engagés depuis 2007 ou qui s’engageront dans des programmes de rénovation immobilière essentiellement financés par les familles, engendrant des augmentations des droits de scolarité.

Elle est insuffisante, car, madame le ministre d’État, d’après les données de votre propre ministère, le déficit de financement de la prise en charge, « cristallisation » incluse, devrait atteindre, comme l’a très bien dit M. Gouteyron, 11 millions d’euros en 2012 et 40 millions d’euros en 2013.

Enfin, ma dernière préoccupation concerne la politique immobilière de l’Agence, sujet également abordé par notre collègue Gouteyron.

Depuis 2005, l’AEFE a réalisé un programme de construction et de réhabilitation immobilière dont le coût s’est élevé à 200 millions d’euros. L’emprunt a permis de mobiliser 97 millions d’euros, remboursables sur quinze ans par les établissements. L’Agence contracte des emprunts qui sont ensuite remboursés moyennant une augmentation des frais de scolarité acceptée par les familles. Aucune rénovation immobilière n’est effectuée dans le réseau de l’AEFE sans que les droits de scolarité soient augmentés sur une dizaine d’années.

Ce sont donc les parents d’élèves qui financent pour moitié au moins la construction et l’entretien de ce patrimoine de l’État. Bien qu’une telle solution ne soit pas tout à fait satisfaisante – surtout du point de vue des parents d’élèves –, elle est préférable à celle qui consisterait à laisser tomber en ruine les établissements ou à les fermer, faute de les avoir adaptés aux normes de sécurité du pays dans lequel ils sont implantés.

Tous les emprunts sont contractés sur une longue durée, à savoir environ quinze ans, pour ne pas faire exploser les droits de scolarité.

Or l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2013 pourrait conduire, s’il était adopté en l’état, à interdire à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger de contracter des emprunts sur une période supérieure à douze mois. Bien sûr, seuls quelque 800 ODAC, organismes divers d’administration centrale, sont concernés par cet article. Toutefois, pour l’AEFE, il s’agit presque d’une question de vie ou de mort : pourra-t-elle continuer à supporter la charge croissante des investissements immobiliers ? Si la réponse à cette question était négative, il ne faudrait plus parler d’Agence pour l’enseignement français à l’étranger

M. Jean-Louis Carrère opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

C’est la raison pour laquelle la commission des affaires étrangères m’a mandaté pour vous demander, madame le ministre d’État, de vous assurer auprès de votre collègue chargé du budget que l’AEFE ne sera pas concernée par ce dispositif et qu’elle pourra continuer à souscrire des emprunts sur des périodes de quinze ans. Nous comptons donc beaucoup sur vous pour que l’AEFE ne figure pas dans la liste, fixée par arrêté après adoption de la loi, des organismes concernés.

Alors que l’Agence devrait recevoir prochainement la gestion immobilière directe de l’ensemble des établissements, il serait paradoxal de lui interdire de souscrire des emprunts, dans la mesure où le coût de leur rénovation est évalué entre 140 millions et 350 millions d’euros.

En conclusion, la commission des affaires étrangères a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission. À titre personnel, je ne voterai pas ce budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Robert Hue applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

Il est vrai, madame la ministre d’État, que nous comptons beaucoup sur vous ! En effet, sous tous les gouvernements, le ministère des affaires étrangères a toujours eu du mal à se défendre contre ses amis du ministère du budget, qui considèrent que les affaires étrangères n’ont pas à se plaindre.

Dans le même temps, ce ministère fait l’objet d’une affirmation politique très forte, M. le Premier ministre ayant lui-même évoqué tout à l’heure la « voix de la France ».

Nous devons aujourd’hui dresser le bilan d’une telle contradiction. Le ministère des affaires étrangères, longtemps avant les autres, c'est-à-dire depuis l’époque de M. Védrine, puis de M. Juppé, a fourni des efforts considérables. Il s’est ensuite vu appliquer, dans un contexte de réformes, des règles très dures.

Aujourd’hui, – mes collègues l’ont dit, et en particulier M. Gouteyron, qui, en tant que membre de la commission des finances, est plus qualifié que moi, à cet égard – nous en sommes arrivés à une situation véritablement dangereuse.

Les réductions programmées des crédits du ministère atteindront 5 % en 2011, puis 7, 5 % en 2012 et 10 % l’année suivante. Honnêtement, à ce rythme-là, nous ne tiendrons pas ! Ce réseau exceptionnel, qui, dans une certaine mesure, est la voix de France et porte notre diplomatie culturelle, sera profondément fragilisé.

Reconnaissons toutefois que la création, soutenue par le Sénat et l’Assemblée nationale, de l’Institut français constitue un progrès important. Notre commission de la culture, de l'éducation et de la communication y tenait beaucoup, car elle estimait nécessaire de professionnaliser ce réseau, afin de l’affranchir d’une gestion administrative un peu lourde et de donner des perspectives de carrière aux agents, dont la mobilité trop rapide nuisait à l’élaboration dans le temps de leur projet professionnel.

L’Institut français sera mis en place avec un budget relativement modeste de 38 millions d’euros, dont nous prenons acte. En la matière, il faut d’ailleurs rendre hommage à votre prédécesseur, qui s’est battu pour cette nouvelle agence, souvent contre sa propre administration, laquelle redoutait de perdre ainsi une partie de son propre personnel.

En tout état de cause, madame le ministre d’État, malgré les demandes de notre commission, le réseau culturel français subira encore l’année prochaine une diminution importante de ses moyens.

Votre prédécesseur avait obtenu un abondement de 20 millions d’euros sur trois ans. En réalité, ce « plus » n’existe pas car, lorsque le ministère du budget a vu cette somme, il a retiré une somme équivalente ailleurs. Nous sommes ainsi revenus à notre point de départ, ce qui a profondément déçu la commission.

J’évoquerai également l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, afin de redire ce qui a été dit. En apparence, le budget est gelé à hauteur satisfaisante ; en réalité, cette agence, qui souhaite, comme beaucoup d’autres, établir un contrat d’objectifs et de moyens, ne le peut pas, compte tenu des incertitudes qui ont été évoquées. Ainsi, des incertitudes pèsent sur les frais de scolarité, je ne reviens pas sur ce point. Un amendement déposé par notre collègue Gouteyron vise à stabiliser la situation, mais ne règle pas l’affaire de manière définitive. Nous serions partisans, pour notre part, d’un système de bourses, qui serait plus juste et qui permettrait de se dégager de l’opération en question.

Par ailleurs, comment passer sous silence la question très grave et très injuste de la prise en charge par l’AEFE des pensions civiles des personnels titulaires de l’État ? Madame le ministre d’État, c’est le seul établissement public à ne pas avoir bénéficié, au-delà de la première année, d’une compensation à la suite du transfert d’une telle charge ! Les autres établissements publics bénéficient en effet, chaque année, d’une compensation à l’euro près.

En l’occurrence, la compensation dont l’Agence a bénéficié la première année a été versée une fois pour toutes. Ce sont donc les parents qui paient, par le biais de la contribution de 6 % assise sur les frais de scolarité. Franchement, c’est vraiment choquant ! Notre commission a demandé la remise par le Gouvernement, avant le 30 juin 2011, d’un rapport sur ce sujet, pour rendre compte de l’évolution de cette mesure. Il faut en effet savoir comment l’AEFE pourra faire face à cette charge, qui augmente tous les ans.

Sur la question immobilière, je formulerai les mêmes observations que mes collègues. L’État, après avoir transféré en dotation à l’AEFE un certain nombre d’établissements lui appartenant, a complètement changé de pratique en décidant de louer les bâtiments. À quel prix ? On n’en sait rien ! Dans quel état seront-ils loués ? Les estimations pour la remise en état des locaux varient entre 150 millions et 300 millions d’euros.

L’Agence prélève une partie de la contribution de 6 %, soit environ 10 millions d’euros par an, pour entretenir les bâtiments, ce qui, bien évidemment ne permettra pas de faire face à la situation !

C’est d’autant plus désolant, madame la ministre d’État, qu’il y a une augmentation très forte de la demande en matière d’enseignement du français. Elle est estimée à 4 % par an, ce qui est très positif.

Les services du budget peuvent toujours dire que, puisque la demande croît, il suffit de faire payer les intéressés. Une telle attitude serait dangereuse et fragiliserait le système.

L’AEFE s’inquiète aussi beaucoup du risque de voir se ralentir la mise à disposition des fonctionnaires de l’éducation nationale, qui serait la conséquence des baisses d’effectifs dans l’éducation nationale. Faute d’obtenir des enseignants en nombre suffisant, l’AEFE devrait aller chercher des enseignants je ne sais où, au risque de compromettre la qualité de l’enseignement qui fait la réputation des établissements. Il faut absolument que sur ce plan, l’Agence continue à avoir une relation claire avec l’éducation nationale.

Au sujet de l’Agence culturelle, un autre problème se pose, celui de la contribution des autres ministères à la politique culturelle. Cette année, compte tenu de la rigueur, le budget du ministère de la culture n’est pas si mauvais que cela. Quant au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, son budget fait même envie aux autres !

Alors que votre ministère est durement frappé, il vous faut absolument, madame la ministre, utiliser toute votre force de conviction et votre autorité politique pour obtenir une aide substantielle de ces deux autres ministères. L’Agence culturelle n’aura pas d’avenir si elle n’est pas interministérielle !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Raffarin.

Applaudissements sur plusieurs travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Monsieur le président, madame la ministre d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, et lui souhaiter un prompt rétablissement.

Je voudrais également vous souhaiter, madame la ministre d’État, la bienvenue en tant que ministre des affaires étrangères. C’était, je tiens à vous le dire comme je le pense, une bonne nouvelle de ce gouvernement. À un moment où on parle beaucoup de diversité politique, il se trouve que je me sens, en matière de politique étrangère comme de pratique des institutions, assez gaulliste, je pourrais même me dire chiraquien. Aussi, que vous ayez cette responsabilité me paraît donc tout à fait heureux, je tiens également à vous le dire comme je le pense.

C’est une responsabilité majeure, très importante pour notre pays. Je voudrais, en quelques minutes, évoquer deux axes qui me semblent essentiels.

D’abord, que le ministre porte une politique, celle qui est pensée avec le Président de la République, c’est normal. Il faut aussi que le ministre défende et protège le ministère. Notre ministère des affaires étrangères a besoin d’être soutenu. Notre diplomatie a besoin d’être renforcée. Et dans ces périodes où on redistribue beaucoup de moyens, souvent, ceux qui sont les plus lointains sont ceux qui souffrent le plus. Et je ne crois pas que ce soit un investissement toujours très stratégique que d’affaiblir certaines représentations dans des pays qui sont particulièrement stratégiques.

Si je retenais une seule chose de trois ans passés à Matignon, c’est sans doute que la France a trop les volets clos. Ce n’est certainement pas en fermant ou en affaiblissant des représentations françaises dans un certain nombre de pays stratégiques que l’on renforce notre diplomatie. Contrairement à ce que pense le citoyen, il ne suffit pas que deux présidents se téléphonent ou que deux first ladies se rencontrent pour que la diplomatie avance. La diplomatie, c’est un travail en profondeur, c’est un travail de culture, c’est un travail professionnel. Et nous devons être au côté de nos diplomates pour renforcer leur action !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam ainsi que MM. Jean-Pierre Cantegrit et Jacques Blanc applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je sais que vous êtes bien équipée. Pour avoir vécu des débats budgétaires avec vous, madame la ministre d’État, je vous sais organisée et je sais que vous serez parfaitement à la hauteur de cette mission.

Mais, quand on examine attentivement l’exercice gouvernemental actuel, on se rend compte de certaines fragilités importantes de nos institutions ministérielles et de nos grandes administrations. De nombreux ministères sont aujourd’hui en voie de paupérisation dans un certain nombre de secteurs.

Il n’y a plus de très grands ministères régaliens, qui sont toujours très organisés. Notre ministère de l’intérieur, notre ministère des finances, notre ministère de la défense sont des ministères solides. Notre ministère des affaires étrangères peut encore rester un ministère solide, pour peu qu’on ne le démantèle pas et qu’on en fasse une priorité pour notre diplomatie. La France en a besoin. C’était, madame la ministre d’État, mon premier message.

Mon second message, c’est pour souligner le mot que vous allez remettre dans votre fonction : le mot « francophonie », puisque vous en êtes en charge et que la francophonie a besoin de vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Partout dans le monde, un certain nombre de citoyens veulent qu’on parle français. Et pour eux, nous avons un devoir d’intransigeance francophone.

Je suis allé à Bruxelles défendre le français. À Bruxelles, le président de l’Union parle français, le président de la Commission parle français, beaucoup d’acteurs parlent français. Mais dans la salle de presse, quand on parle français, quand un journaliste veut poser une question en français, il y a un brouhaha, comme des reproches, comme si on perdait du temps quand on parle français ! C’est inacceptable !

Il est tout aussi inacceptable que, dans certaines circonstances, de grandes personnalités françaises abandonnent l’usage de leur langue, lorsqu’elles s’expriment dans des institutions où le français est reconnu comme langue officielle ou langue de travail.

Applaudissements sur plusieurs travées de l ’ UMP et du groupe socialiste. – M. Robert Hue applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Voilà fort longtemps qu’il n’y avait eu autant de Français, autant de francophones au FMI, à l’OMC, à l’OCDE, à l’Organisation mondiale de la météorologie, à la FAO, par exemple. Or, pour faire plus moderne et faire montre d’aisance, il arrive souvent que nos amis francophones délaissent leurs discours en français pour parler en anglais.

Pensez à ces fonctionnaires, à ces enseignants, à tous ceux auxquels on demande, partout dans le monde, de faire les efforts nécessaires pour défendre la langue française, et qui voient nos grands responsables abandonner leur langue !

Ne perdons pas cet état d’esprit ! Aujourd'hui, nous avons reçu, avec M. le président Larcher, le Premier ministre du Québec. Il faut avoir l’âme québécoise pour défendre la francophonie et l’intransigeance francophone !

Mme Nathalie Goulet marque son désaccord.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Il faut aussi bien mesurer, madame la ministre d’État, que, contrairement à ce qu’on entend ici ou là, il n’y a pas un déclin du français dans le monde. Je me réfère aux propos du Président Abdou Diouf, il n’y a pas un déclin du français dans le monde, il y a un déclin de l’offre de français. Il faut en être bien conscient. La demande de français ne faiblit pas. Ouvrons des lycées, ouvrons des écoles et les classes seront remplies du jour au lendemain !

Il y a une grande demande de français dans le monde, mais nous n’avons pas suffisamment d’offre francophone, de français, qu’il s’agisse d’enseignement du français ou d’enseignement en français. Il me paraît très important de mener ce combat. Il faut soutenir l’AEFE. Il faut soutenir tous ceux qui militent pour cette demande de français.

Je voudrais évoquer une action que nous avons été quelques-uns ici à tenter. Si elle n’a pas vraiment été couronnée de succès, il n’est peut-être pas trop tard pour la relancer. Je veux parler du grand emprunt pour les grands sujets d’avenir. Or, s’il y a un sujet important et stratégique pour l’avenir de notre pays, c’est bien l’investissement en français !

On parle d’investissement d’avenir. Mais l’investissement en français, y compris en français scientifique, en français culturel, en français historique, nous en avons grand besoin ! Il faut aller très loin sur ce sujet.

Je vois l’importance que prend la Chine aujourd'hui. Voilà une dizaine d’années, elle n’était pas particulièrement repérée dans les réseaux de grandes écoles ou de formation supérieure. Or, en quelques années, la Chine a installé un classement, le classement de Shanghai.

Jacques Legendre a fait au Sénat un colloque très important sur ce sujet. Le classement de Shanghai ne reconnaît pas les communications scientifiques en français. Il demande des communications scientifiques en anglais.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Or, il ne s’agit pas simplement d’écrire le français. Il s’agit de permettre à nos médecins, à nos ingénieurs de penser en français. La science a besoin de la pensée en français. Et ne plus penser la science en français serait affaiblir la francophonie.

Et de ce point de vue, il faut, avec les investissements d’avenir et les moyens que nous avons, essayer de faire en sorte que l’on aide, peut-être même parfois à travers les traductions, un certain nombre de communications afin de permettre aux cerveaux les plus brillants de penser et s’exprimer en français.

Mme Nathalie Goulet s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Voyez le succès de la médecine française partout dans le monde ! Dans une ville comme Wuhan où vivent 30 000 Français, je suis frappé de voir que le français est défendu grâce à l’hôpital, grâce aux quelque 500 médecins francophones qui y travaillent. Pourquoi ? Parce que nos facultés de médecine, nos grands professeurs et notre industrie pharmaceutique se sont employés à faire de la médecine une discipline dans laquelle on pense encore aujourd'hui en français dans le monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

C’est un sujet très important pour nous tous ! Voilà pourquoi il faut penser à cette défense de l’intransigeance francophone. Il faut aussi, madame la ministre d’État, penser à la demande de français et au soutien à l’offre de français.

Je terminerai en disant que, dans un monde complexe, notre politique étrangère a besoin d’une lisibilité renforcée. Nous devons y travailler les uns et les autres. L’action du Président de la République est remarquable dans un grand nombre de domaines. Aujourd’hui, le problème, c’est que la globalisation est complexe.

Le week-end dernier, à l’OTAN, vous avez réfléchi à la définition d’un concept stratégique. Je pense que l’une des missions d’un jeune ministre des affaires étrangères, ambitieux et compétent, est d’essayer de clarifier ce concept de la diplomatie française pour l’expliquer et le faire partager à nos concitoyens. Il est très important d’ouvrir les fenêtres de la France.

Et dans ce concept, les mots clés sont le respect de la diversité, la diversité culturelle, le respect des indépendances, de la liberté des peuples à décider d’eux-mêmes.

Ce respect des diversités fait partie de notre héritage. Mais nous sommes aussi les héritiers des républicains qui ont inventé l’unité, une unité forgée autour de valeurs essentielles qui entendaient rassembler.

Cette unité, elle est maintenant planétaire. Le monde attend le message de la France. Il nous revient de diffuser ces valeurs de paix, de développement durable, qui sont aujourd'hui des valeurs de rassemblement pour donner à la diversité une force nouvelle, une force française !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, je vous incite à la concision si nous voulons terminer cette discussion avant le dîner.

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Madame le ministre d’État, c’est l’un de vos illustres prédécesseurs, membre de surcroît de la Haute Assemblée, François de Chateaubriand qui assurait : « Tout mensonge répété devient une vérité ».

Vous voilà, depuis onze jours, madame le ministre d’État, installée dans le bureau de Vergennes. Et nous savons tous combien il vous est difficile, en si peu de temps, de mesurer la complexité de votre tâche. Mais nous n’en attendons pas moins de vous la vérité sur notre diplomatie, la vérité sur l’emploi et l’ampleur des crédits que vous venez solliciter devant notre assemblée.

Sous l’autorité du Président de la République, et avec l’appui du Gouvernement, la France mène une politique attentive à nos partenaires européens, soucieuse de garantir la paix et la sécurité. La mise en place du service diplomatique européen va faire évoluer notre diplomatie. Je ferai simplement quelques remarques générales pour que nous puissions préserver quelques valeurs de cette diplomatie.

Dans l’Union européenne, l’amitié franco-allemande demeure depuis près d’un demi-siècle un maillon essentiel de la construction européenne. Elle a été lancée par Robert Schuman et Konrad Adenauer, suivis par le général de Gaulle et Konrad Adenauer.

Mais la nouvelle Entente cordiale qui semble naître du sommet de Londres du 2 novembre dernier, entre le Royaume-Uni et notre pays, est de bon augure. Et le débat de demain sur la défense sera une bonne occasion de l’expliquer.

C’est un autre centriste, Jacques Duhamel, qui fut à l’origine des accords de décembre 1971, lesquels permirent l’entrée de la Grande-Bretagne dans ce qui était encore la Communauté économique européenne.

Et c’est encore un autre centriste occupant avant vous le Quai d’Orsay, René Pleven, qui mena les négociations qui permirent au 1er janvier 1973 l’entrée de nos amis britanniques en Europe, sous l’autorité du Président Pompidou.

En Europe, sous l’autorité du Président de la République, la France a su – et c’est, à mon sens, très important – conforter, changer l’état d’esprit des relations avec la Russie de Dimitri Medvedev et de Vladimir Poutine. Le récent sommet de l’OTAN à Lisbonne, où vous étiez présente, précédé par la rencontre de Deauville, a démontré que Moscou prend conscience des menaces qui pèsent sur la sécurité du continent européen et se sent de plus en plus membre de la famille européenne.

Ce sommet a d’ailleurs tracé la voie à suivre pour l’Organisation. Elle reste le cadre transatlantique pour une solide défense collective et le forum essentiel pour les consultations et la prise de décision de sécurité entre alliés.

Avec les États-Unis, nos amis et alliés de toujours, les relations sont apparemment au beau fixe. Qu’il est loin, madame le ministre d’État, le temps où le général de Gaulle dénonçait, le 5 février 1965, le, sortait le 12 mars 1966 la France de l’OTAN et faisait sans grand ménagement quitter le 1er juillet 1967 du sol national des soldats américains et britanniques qui étaient venus verser leur sang pour le libérer !

En Méditerranée, le Président de la République a pris une excellente initiative avec l’Union pour la Méditerranée. Elle cherche autour de la terre et de l’eau à réconcilier les irréconciliables. C’est une politique qu’il faudra développer car elle souffre beaucoup actuellement de ses conflits internes.

L’Amérique latine a été trop longtemps négligée par nous-mêmes. Le Brésil est aujourd’hui une puissance émergente. Le Président de la République a raison d’en tenir le plus grand compte et chacun oublie trop souvent que ce pays est notre voisin et que nous avons une frontière commune : nos compatriotes de Guyane le savent bien, gardons-nous de ne pas nous en souvenir.

La vérité en diplomatie, c’est aussi ne pas négliger ces deux États antagonistes, rivaux et pourtant puissances émergentes indispensables à l’équilibre du monde que sont l’Inde et la Chine, qui changent complètement la donne au niveau diplomatique mondial.

Le contentieux – pour faire un peu d’histoire – entre l’Inde et la France a été refermé en 1954 avec la rétrocession de nos comptoirs à l’Union indienne. Pourtant, ce grand pays est encore négligé : c’est un partenaire commercial de première importance, ses capacités militaires sont importantes, son rôle dans la sous-région est de première grandeur. L’Union soviétique, son allié de toujours, n’existe plus et ce grand pays cherche sa voie. C’est un des éléments que la politique française devrait reprendre en compte et celle-ci devrait peut-être entraîner la politique européenne dans cet échange.

Rappelons-nous aussi les très anciens liens d’amitié qui nous unissent avec la Chine. Le Président Edgar Faure, dans sa mission préparatoire à la décision historique du 31 janvier 1964 de reconnaître le Gouvernement de Pékin, avait parfaitement cerné les contours de la mentalité chinoise. Quelle que soit la politique suivie, la Chine attend de la continuité, de la persévérance et de la patience.

M. Jean-Pierre Raffarin opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Enfin, la vérité sur notre diplomatie, c’est affirmer haut et fort la politique française au Moyen-Orient. La prolifération nucléaire est dangereuse, chacun le voit bien avec le nouvel et grave incident de frontière entre la Corée du Nord et la Corée du Sud. La politique menée par Téhéran est un faux-semblant. Le Président de la République l’a souligné. La fermeté, là aussi, doit prévaloir : tout recul de la position des Six serait considéré comme un encouragement à une intransigeance de plus en plus grande. Même si le pouvoir iranien est aujourd’hui plus que jamais divisé, le sentiment national est très marqué et une maladresse pourrait retourner une opinion publique intérieure aujourd’hui lassée de son Gouvernement et une jeunesse que nous espérons avide de connaître des lendemains meilleurs.

Voilà quelques remarques très générales, madame le ministre d’État, sur la politique étrangère de la France et j’espère qu’elles pourront toutes être reprises dans la politique et la diplomatie européennes que vous allez avoir à aborder. C’est une des révolutions que nous connaîtrons, je l’espère du moins.

Je n’aurai garde d’oublier, madame le ministre d’État, la raison essentielle de votre présence aujourd’hui au banc du Gouvernement. Vous sollicitez 5 016 millions d’euros en autorisations d’engagement, en hausse de 14 millions d’euros, soit 0, 3 %, par rapport à 2010 et 5 100 millions d’euros en crédits de paiement, en augmentation de 183 millions d’euros, c’est-à-dire 3, 7 %, par rapport à 2010.

Ma collègue Nathalie Goulet entrera bien plus dans le détail de ces mesures, mais sachez que le groupe de l’Union centriste vous apportera son soutien et vous souhaite bon travail dans ce ministère, qui est difficile, pour accompagner la politique de la France.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, au-delà du dynamisme et du volontarisme affiché, notre politique étrangère s’avère souvent brouillonne et ses résultats – je crois qu’on peut le dire – aléatoires. Avec des accents presque altermondialiste dans les discours, de plus en plus clairement atlantiste dans les actes ; tantôt pourfendant les dictatures, tantôt les épargnant ; régulateur à l’étranger, notamment dans les instances du G8 et du G20, ultralibéral dans sa politique intérieure ; très bavard sur les droits de l’homme pendant la campagne électorale, muet depuis ; condamnant à juste titre la Françafrique, le temps d’une campagne présidentielle, puis s’en accommodant et même s’y engouffrant : par son inconstance, par sa fébrilité sur la scène internationale, le chef de l’État mine la crédibilité de la politique étrangère de la France.

Madame le ministre d’État, vous avez été nommée en plein débat budgétaire, ce dernier étant marqué pour votre ministère par l’assèchement des crédits – cela a été dit – et la diminution des effectifs. Votre nouveau collègue, ministre d’État et ministre de la défense, avait protesté avec raison, dans un article du journal Le Monde signé cet été avec Hubert Védrine, contre cet « affaiblissement disproportionné », des économies « marginales », un effet « dévastateur ».

Jean-Louis Carrère montre l’article en question

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Je profiterai de cette intervention pour vous adresser trois messages : nous avons besoin de gouvernance mondiale ; la France doit affirmer sur la scène internationale ses valeurs et son message hérité des Lumières ; notre diplomatie doit renouer avec une politique euro-méditerranéenne ambitieuse.

L’annulation à la dernière minute du sommet de Barcelone qui aurait dû avoir lieu le 21 novembre dernier montre combien celle-ci s’est embourbée. Vous nous direz certainement comment vous comptez la sortir de l’ornière.

La nécessité de régulation est d’abord financière. Il a fallu la brutalité de la crise bancaire pour faire comprendre aux libéraux que le monde d’aujourd’hui ne pouvait plus être gouverné comme avant ; que les cartes de la puissance économique et politique avaient été largement redistribuées ; que, pour le dire vite, le Nord sans le Sud, ça ne fonctionne pas.

On le sait, aucun pays, de nos jours, ne peut se prétendre le centre d’une planète multipolaire. La tempête financière a accéléré une prise de conscience : les marchés ne créent pas la stabilité. Il revient aux États de bâtir des régulations capables d’encadrer une finance devenue folle. Pourtant, selon moi, la France n’apporte pas de réponses efficaces à cette nouvelle situation. Notre diplomatie est, dans ce domaine, celle du discours, et non des actes.

À cet égard, le bilan du G20 de Séoul n’est pas vraiment acceptable. Le monde ne peut plus se contenter de déclarations de principes. La guerre des monnaies menace. La planète a besoin d’échanges plus équilibrés, de stabilité monétaire et d’une plus juste répartition des richesses, notamment par la taxation des transactions financières.

La régulation, c’est aussi l’objectif d’une gouvernance politique mondiale. Commençons donc avec nos alliés, sur le terrain de la sécurité, et d’abord en nous tournant vers les États-Unis.

Le retrait d’Afghanistan n’est plus une question taboue, mais une question de calendrier. Cependant, l’absence de prise sur une stratégie entièrement décidée à Washington conduit à donner raison à vos interrogations de 2009 sur notre retour dans l’OTAN. En effet, l’un des arguments avancés par les partisans de la réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN était une influence à hauteur de notre investissement au sein de l’Alliance. Or, il faut bien reconnaître qu’au niveau stratégique cette influence est aujourd’hui inexistante. Traumatisé par son audace dans l’affaire iraquienne, notre pays ne cesse depuis 2003 de vouloir se racheter auprès de notre allié quitte à perdre toute voix originale et toute capacité d’initiative. La France doit formuler aujourd’hui des propositions pertinentes dans le cadre de la stabilisation de l’Afghanistan, notamment en proposant avec ses partenaires européens une participation des États de la sous-région.

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Je veux également évoquer une réalité méconnue, sans doute secondaire eu égard à l’immensité des enjeux de ce conflit, mais la France ne fait pas « que » la guerre dans ce pays. En effet, elle contribue, par une action pacifique, à la reconstruction démocratique des assemblées parlementaires grâce à une coopération initiée en 2005 par notre assemblée. Un fonctionnaire du Sénat était encore cette semaine à Kaboul pour former ses homologues afghans au bon fonctionnement du Parlement.

La régulation mondiale, c’est aussi se donner les moyens de prendre les bonnes décisions face à l’urgence climatique. La « déception de Copenhague » a été durement ressentie. Il faut que Cancún aboutisse à des accords contraignants afin de rendre notre planète vivable pour les générations à venir. Il s’agit là d’un sujet majeur de notre politique étrangère ; ce n’est pas une mode, ou un caprice des pays riches. Il concerne tous les peuples et avant tout les États les plus pauvres. Mais la responsabilité est surtout la nôtre puisque nous avons les moyens d’un autre développement économique et social.

C’est à la France de porter la proposition de création, urgente, d’une organisation mondiale de l’environnement capable d’incarner une conscience collective planétaire sur les questions environnementales et de faire respecter les accords internationaux en la matière.

C’est dans le cadre des Nations unies que l’ordre international doit être défini, d’autant plus que les défis qui s’annoncent sont, par essence, globaux. Les oubliés d’aujourd’hui seront les conflits de demain.

La France, c’est aussi un message universel des droits de l’homme. Si nous ne portons plus ces valeurs, nous ne serons plus écoutés du monde. Sommes-nous encore cet exemple, ce modèle démocratique que l’on disait si séduisant ?

La manière dont nous traitons les étrangers, le déclin dramatique de notre politique d’accueil et de formation des élites du Sud, qui préfèrent aujourd’hui Montréal à Toulouse, affaiblissent notre discours et notre politique étrangère au moment où tant de défis appelleraient au contraire à notre présence renforcée. C’est bien de saluer la libération de Mme Aung San Suu Kyi, combattante pour la liberté en Birmanie, prix Nobel de la paix en 1991. Cependant, dans d’autres circonstances, à une autre époque, la France aurait proposé des sanctions à l’égard des pays ne respectant pas les droits de l’homme. Pourquoi tant de mansuétude, de silence, à l’égard des militaires birmans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Quelles mesures comptez-vous prendre pour faire pression sur le Gouvernement de la Birmanie ?

De même, il n’est pas possible que les droits de l’homme soient absents de la relation franco-chinoise, notamment, car il n’est pas de développement pérenne sans respect des libertés fondamentales. Tout en respectant la Chine dans ce qu’elle peut apporter de très important au monde, la France doit oser – et je crois qu’ils comprennent comme cela – lui parler franchement, directement, des droits de l’homme, et par exemple de la libération du prix Nobel de la Paix, Liu Xiaobo. Si elle ne le fait pas, quel autre pays le fera ?

Enfin, je voudrais vous interpeller au sujet de nos objectifs dans la zone méditerranéenne. La France pèse insuffisamment dans le conflit Israël-Palestine ; elle est muette sur le conflit du Sahara occidental ; elle n’a rien vu venir de la montée de l’insécurité au Sahel, qui est pourtant dans notre zone traditionnelle d’influence ; elle n’arrive pas à donner un contenu fort à notre relation avec la Turquie. Or, peut-on réellement se couper de ce grand voisin, essentiel à la stabilité de la région ?

L’élargissement de l’Union européenne à la Turquie – on peut en penser ce que l’on veut – est, malgré tout, une perspective et celle-ci doit être présentée en toute honnêteté comme telle aux Français. Il ne sert à rien, quelle que soit l’idée que l’on peut avoir, de jouer avec les peurs.

Source de frustrations du côté de la rive sud, de désintérêt du côté de la rive nord, a fortiori depuis l’élargissement de l’Union européenne à l’est, l’Union pour la Méditerranée illustre une nouvelle fois la méthode de Nicolas Sarkozy en matière d’affaires européennes. Il s’agit de créer l’illusion que ses propositions sont nouvelles et sont siennes tout en faisant financer par l’Europe une ambition française. Cela ne peut qu’irriter nos partenaires européens, et accroître la frustration des pays de la rive sud de la Méditerranée. En outre, les postulats sur lesquels cette entreprise est fondée, et notamment l’idée de croire que l’on pourrait contourner les conflits de la région, se sont avérés illusoires.

Or, Nicolas Sarkozy a été un fervent supporter du nouvel accord d’association de l’Union européenne avec Israël, envoyant par là un signal pour le moins incompris des pays arabes. On évoque une remise à plat du projet et une clarification sur la façon, nécessairement plus collective, de gérer l’Union pour la Méditerranée du côté européen. Quelles sont les intentions du Gouvernement à cet égard ?

Pour nous, les grands axes de réorientation de la politique euro-méditerranéenne sont les suivants : réaffirmer son cadre conceptuel en vue de la construction d’une communauté de valeurs, d’intérêts et de destins ; afficher une véritable politique de démocratisation et de promotion des droits de l’homme au moyen d’un soutien visible aux sociétés civiles et aux formations politiques démocratiques de la rive sud ; lancer un agenda de coopération économique régionale et sous-régionale pour résorber les disparités sociales et économiques entre les deux rives et ancrer la région dans la mondialisation ; assurer une dimension parlementaire au processus ; faire de la dimension sociale l’axe principal de la politique euro-méditerranéenne ; considérer l’immigration, l’intégration sociale et la justice dans le cadre d’une approche solidaire fondée sur le strict respect de la dignité et des droits de l’homme.

L’échec de l’Union pour la Méditerranée ne condamne pas l’idée de politique méditerranéenne et ne remet pas en cause la nécessité impérieuse d’en mener une ; bien au contraire ! Mais il impose de reprendre la réflexion sans éviter la question des droits de l’homme et de la démocratie, qui est bien absente des arrangements actuels.

Le consensus qui existait sur les grandes lignes de notre politique étrangère a été détruit depuis 2007. Notre diplomatie était indépendante, ouverte au monde, forte des valeurs de la République. Notre alignement au sein de l’OTAN, la fermeture de notre politique migratoire, ainsi que l’oubli et le mépris des droits de l’homme ont banalisé notre politique extérieure.

C’est pourquoi nous ne voterons pas le projet de budget que vous nous proposez aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, certains d’entre vous souhaiteraient que nous poursuivions ce débat jusqu’à son terme, sans interrompre la séance.

J’en appelle au sens des responsabilités des orateurs. Nous en sommes d’ores et déjà à 30 % de dépassement du temps de parole, exception faite de M. Pozzo di Borgo, qui a été exemplaire.

La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

Madame le ministre d’État, votre nomination au poste de ministre des affaires étrangères a été bien accueillie.

Vous avez une certaine idée de la France et l’expérience de trois ministères régaliens : tout cela vous prépare à l’exercice des fonctions emblématiques de ministre des affaires étrangères et européennes, mais vous sensibilise aussi, certainement, à la difficulté de la tâche.

Vous héritez d’un ministère dont les marges de manœuvre n’ont eu de cesse de se resserrer du fait de la croissance de nos engagements multilatéraux et de la réduction de ses moyens propres, sous l’effet de la révision générale des politiques publiques, la RGPP.

Est-il raisonnable d’appliquer à tous les ministères la discipline indiscriminée que flétrissait déjà la Cour des comptes à l’époque où elle était présidée par Philippe Séguin ? Vous êtes tout de même la voix de la France !

Notre réseau de postes diplomatiques et consulaires est un atout majeur : il emploie des personnels de grande qualité, auxquels je veux rendre hommage. Peu de pays disposent d’une telle diplomatie à vocation mondiale.

Madame le ministre d’État, il vous faut convaincre le Président de la République de la nécessité d’épargner notre outil diplomatique et de l’exonérer des effets de la RGPP II pour les années 2012 et 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

Il vous faut donner du sens à votre action !

Au mois de mai dernier, nous avons voté la création de l’Institut français, que vous devez désormais mettre en place.

Le succès dépendra beaucoup des synergies qui seront trouvées avec le ministère de la culture et l’audiovisuel extérieur. Il y a là un défi à relever. Il ne faut pas que cela se traduise par l’amaigrissement de notre réseau culturel, comme cela s’est déjà produit en Europe d’une manière choquante et préoccupante.

Je n’ai pas grand-chose à ajouter aux excellents propos de M. Raffarin sur la question de la langue française et de la francophonie.

Mais vous devriez sensibiliser certains de vos collègues à ce problème, madame le ministre d’État. Cela permettrait d’éviter, par exemple, que l’anglais ne se diffuse comme langue d’enseignement dans certaines universités et grandes écoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

De même est-il tout à fait essentiel d’inciter nos responsables à parler français !

En 2050, il y aura plus de 700 millions d’habitants dans les pays francophones. C’est un atout formidable, à condition de soutenir le développement des systèmes éducatifs sur place, ce que nous ne faisons pas suffisamment à l’heure actuelle. Votre ministère devrait donner des instructions en ce sens. Savez-vous que l’alphabétisation de la jeunesse n’est réalisée qu’aux deux tiers dans ces pays ? C’est là une belle tâche qui vous attend...

Je ne m’étendrai pas sur le rôle essentiel que joue CampusFrance pour le rayonnement de la France.

Je partage l’avis de Mme Cerisier-ben Guiga concernant l’AEFE. Il serait plus efficace et juste de revenir à un système de bourses sur critères sociaux. En revanche, la prise en charge des frais de scolarité est tout à fait contreproductive.

Tout n’est pas dans les moyens, madame le ministre d’État. Ce n’est pas à vous que je l’apprendrai, lorsque les moyens manquent, c’est le message qui compte.

Vous portez la voix de la France, mais il y a plusieurs manières de décliner son message. Nous comptons sur vous pour le faire de manière stricte.

L’héritage que vous devez assumer est lourd : le retour de la France dans les structures militaires intégrées de l’OTAN, l’intervention en Afghanistan et, depuis quelques jours, le bouclier antimissile de l’Organisation atlantique, à laquelle nous nous sommes ralliés en dépit de toute notre tradition diplomatique depuis 1984.

La dissuasion nucléaire française ne peut manquer d’être affectée par cette décision : financièrement, d’abord – où trouvera-t-on l’argent ? – ; dans sa crédibilité ensuite, car le bouclier antimissile montre que, au fond, nous ne croyons pas vraiment en la dissuasion ; politiquement enfin : pensez-vous que les pays européens membres de l’OTAN, qui réclament déjà le retrait des armes tactiques américaines, ne vont pas contester de plus en plus notre dissuasion stratégique ? Vous savez bien que si !

Tout se tient : en signant le traité de Lisbonne de 2008 modifiant le traité sur l’Union européenne, nous avons accepté que les pays membres de l’OTAN fassent de celle-ci « l’instance d’élaboration et de mise en œuvre de leur défense ». La défense européenne a ainsi été renvoyée au magasin des accessoires !

J’attire votre attention, madame le ministre d’État, sur la crise de l’euro, dont nous ne sommes qu’au début et qui aura de nombreuses conséquences.

Ainsi, la pression exercée par certains de nos voisins risque d’être si forte que nous serons conduits à réduire notre effort en matière de dissuasion.

Je souhaite que les crédits d’études amont dans le domaine de la dissuasion ne soient pas amputés. Je sais que cela n’est pas du ressort du ministère des affaires étrangères, mais il faut faire preuve d’une grande vigilance sur ce point.

Vous aurez également à faire face au problème de la politique d’austérité que nous sommes contraints de mener sous la pression de l’Allemagne et des marchés financiers. Vous ne devez pas oublier que la re-règlementation des marchés financiers est sans doute la seule manière de desserrer l’étreinte qu’ils exercent et de surmonter – peut-être ! – la crise de l’euro.

Oui, l’héritage est lourd, madame le ministre d’État, et l’OTAN coûte cher, trop cher ! Pourtant, même en son sein, vous pouvez toujours faire entendre la voix de la raison !

En Afghanistan, il faut réduire nos objectifs à ce qui est raisonnable, c’est-à-dire la dissociation de l’élément pachtoune du terrorisme international d’Al-Qaïda.

Il faudra parvenir à une solution négociée sur l’Iran. Il faut le dire, les initiatives de la diplomatie américaine vont dans le bon sens. Certes, nous aimerions être mieux associés. Encore faudrait-il pour cela que nous ne jouions pas les boutefeux. Il y a un ton à trouver ! Sinon, cela ne ferait que pousser à terme l’Iran dans les bras de la Chine. Beau résultat d’ne politique qui, depuis vingt ans, et après l’écrasement de l’Irak, a fait de ce pays la puissance dominante de la région du Golfe !

Le seul objectif raisonnable que nous puissions nous assigner sur le bouclier antimissile de l’OTAN est la défense de théâtre, et non la défense de territoire ; c’est objectif fixé par le président Obama. J’aurai l’occasion de revenir sur le sujet lors de l’examen des crédits de la défense et du débat prévu sur cette question.

En matière européenne, le traité de Lisbonne crée une diplomatie commune à travers le Service européen pour l’action extérieure, le SEAE. Celui-ci devrait compter entre 5 000 et 6 000 agents. Quelle sera la part de la France ? Où trouverez-vous les postes nécessaires ? Comment empêcherez-vous l’écrémage de la diplomatie française ? Vous êtes-vous avisée du régime indemnitaire dont bénéficieront les membres de ce service ? Il est très important de se pencher sur toutes ces petites choses !

J’en viens à l’euro. Madame le ministre d’État, les affaires européennes sont au cœur de vos compétences. Selon moi, nous ne nous en sortirons pas sans une initiative de croissance, qui redonnera de l’air aux pays aujourd’hui en difficulté. Vous devez vous saisir de cette question : ce n’est pas seulement l’affaire de Bercy ; c’est l’avenir même de la construction européenne qui en dépend !

Vous avez donc, madame le ministre d’État, un lourd héritage, mais aussi une grande tâche !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Monsieur le président, madame la ministre d’État, mes chers collègues, quels sont le rôle, la fonction et la finalité du budget de l’action extérieure de l’État ? Entendons-nous bien, il s’agit de définir les moyens donnés par la France afin de défendre ses intérêts : les valeurs de notre pays, notre culture, notre langue, ainsi, bien sûr, que nos intérêts commerciaux !

Dans ce contexte de restriction budgétaire, la hausse de 4, 8 % des crédits pourrait être louable si elle n’était pas due, comme d’habitude, à des agrégats comptables.

Au sein du programme consacré au rayonnement de la France combiné à la recherche française, la coupe est nette. Les crédits s’élèvent à 110 millions d’euros, soit une baisse de 5 %, contre 116 millions d’euros dans le budget pour 2010, ce qui était déjà – je l’avais indiqué – inadmissible. Comment donner aux acteurs concernés les moyens nécessaires pour atteindre leurs objectifs ? Quelle magie va donc s’opérer ? Je crains une nouvelle fois qu’ils ne soient laissés pour compte et que le rayonnement de la France ne soit de nouveau terni.

Pourtant, le 12 novembre dernier, la France a pris la présidence du G20. Le 1er janvier, elle prendra celle du G8. Ce serait là l’occasion pour notre pays d’être une force de proposition et d’innovation ou de porter des compromis dans plusieurs domaines. Dans ce contexte, il est plus que jamais nécessaire de disposer d’un outil diplomatique efficace. Mais ne nous leurrons pas : j’ai bien peur que ce costume ne soit un peu grand pour le Président de la République !

M. Jean-Louis Carrère applaudit

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

À l’heure actuelle, nous n’avons pas les moyens de maintenir cet outil. En effet, avec les récents événements nationaux, qui ont eu un fort retentissement au-delà de nos frontières – je pense à la bataille sur les retraites ou à la stigmatisation d’une partie de la population –, notre aura n’est plus.

Il est de notre devoir de restaurer les moyens de notre outil diplomatique. « Il y a un moment où le quantitatif, comme le disait le philosophe, pose un problème qualitatif. Nous avons atteint ce stade. » Ces propos ne sont pas de moi ; ce sont ceux d’un député de la majorité. Probablement ignorait-il qu’il citait Karl Marx ! §

Dans une tribune parue le 7 juillet dernier dans le journal Le Monde – notre collègue Jean-Pierre Bel y a fait référence –, Alain Juppé et Hubert Védrine tiraient la sonnette d’alarme sur l’affaiblissement du Quai d’Orsay. Selon eux, il faut « adapter l’appareil diplomatique, comme l’État tout entier, mais cesser de l’affaiblir au point de le rendre d’ici à quelques années incapable de remplir ses missions, pourtant essentielles. »

Et d’en revenir aux fameuses RGPP I et RGPP II, qui suppriment à l’aveuglette des moyens qu’il faudrait absolument garder.

Rappelons qu’en vingt ans le ministère a connu une diminution, sans équivalent dans l’administration, de 20 % de ses effectifs, qui les effectifs ont été réduits de 2 600 postes depuis 2006. Quelque 160 suppressions seront programmées cette année, et 700 sur la période 2009-2011, sur un effectif total de 15 500 personnes, dont 5 000 titulaires.

Voilà comment une présentation comptable et un brin mensongère permet de présenter avantageusement, c’est-à-dire en augmentation, un budget qui, en fait, ne l’est pas.

Votre prédécesseur n’avait pas exclu, en son temps, des licenciements secs en « dernier recours ». Qu’en est-il, madame le ministre d’État ?

Pouvez-vous rassurer les personnels du ministère et les agents consulaires, qui, confrontés à un flou incroyable depuis maintenant trois ans, sont particulièrement inquiets pour l’avenir ? Croyez-vous que l’influence de la France dans le monde se trouve grandie par tant de reculs ?

Comment oublier le goût amer qu’a laissé la dernière Conférence des ambassadeurs ? Un diplomate, en parlant d’un possible changement permettant de redorer l’image de la France, comme l’arrivée d’un nouveau ministre, disait : « On l’espère plus que l’on n’y croit ». Tout est dit !

Entre 2011 et 2013, le ministère, dont le budget représente à peine plus de 1 % de celui de l’État, sera encore contraint de raboter ses dépenses de 10 %. Les subventions des 140 instituts culturels français à travers le monde correspondent pourtant seulement à la dotation annuelle du l’Opéra de Paris ! Tout cela nous donne l’image d’un ministère fortement marginalisé.

J’en viens maintenant à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

Comme je le soulignais l’année dernière, l’AEFE, asphyxiée financièrement, ne peut pas répondre à la croissance des besoins. La deuxième priorité du Livre blanc est le développement du réseau des établissements. Malheureusement, la subvention décroît. Comment régler le problème du déficit chronique avec seulement 421 millions d’euros ? Nous avons déjà cinq ans de retard en la matière !

Mes chers collègues, j’attire notamment votre attention sur l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, qui interdit tout emprunt remboursable sur une durée supérieure à douze mois. L’inquiétude est grande au sein de l’AEFE, alors que les entreprises se désengagent partiellement du paiement des frais de scolarité et que les contribuables français pallient les défaillances du système.

Pour faire face à une telle situation, une augmentation des frais de scolarité a été instaurée l’année dernière. Cette disposition, parfaitement discriminatoire pour de nombreuses familles, signe de fait le désengagement, fortement contesté, de l’État en la matière.

En réalité, les parents d’enfants non français ont tendance à ne plus scolariser leurs enfants dans des établissements français. La finalité première de la création de l’AEFE, à savoir développer ou, du moins, stabiliser l’emploi de la langue française dans le monde, est sérieusement menacée. M. Raffarin le rappelait d’ailleurs tout à l’heure.

Madame le ministre d’État, comment pourrions-nous envisager une modernisation urgente de ces formes de financement ?

Force est de constater que la crédibilité de la France sur la scène internationale s’étiole. L’attitude agitée d’un chef d’État qui est à la fois président, ministre des affaires étrangères, ambassadeur et qui parcourt la planète sans grand succès, même s’il a un nouvel avion

MM. Jean-Pierre Raffarin et François Trucy s’exclament

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Pour illustrer mon propos, j’évoquerai le deuxième échec de la tentative de réunion du sommet de l’Union pour la Méditerranée, six mois après le premier. « La France ne renoncera pas au projet d’Union pour la Méditerranée » vient d’assurer Nicolas Sarkozy. Pourtant, ces deux tentatives avortées sonnent comme un échec retentissant. Mais il est vrai que, pour le Président de la République, le processus de décolonisation est confronté à une difficulté résultant d’un problème de méthode, et non de fond politique… Cela soulève plusieurs questions !

J’aurais l’occasion d’évoquer en détail l’Afrique lors de l’examen des crédits de la mission « Aide publique au développement ». Mais nous n’avons aucune visibilité sur la nature des rapports que la France doit entretenir avec les pays africains, à l’exception des ouvertures de marchés bénéficiant à des entreprises privées. Nous y poursuivons une politique d’un autre âge, qui peut se révéler dangereuse.

Nous sommes dans le repli le plus total. Les termes « valeurs boursières », « marchés financiers » ou « rentabilité » sont employés bien plus fréquemment que les expressions « rayonnement », « présence française à l’étranger », « aide aux pays les plus pauvres ». Et que dire des accords de gestion des flux migratoires, dont l’une des dispositions a récemment été mise en cause par le Conseil Constitutionnel ?

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas ce projet de budget, qui ne nous donne aucun moyen, aucune garantie pour assurer la présence et la grandeur françaises dans le monde.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Madame le ministre d’État, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous connaît bien, puisqu’elle vous a déjà accueillie alors que vous étiez ministre de la défense. C’est avec le même plaisir qu’elle vous recevra en votre nouvelle qualité. Le groupe UMP se réjouit également de votre présence au banc des ministres.

Vous êtes ministre sans discontinuer depuis 2002, et vous êtes depuis quelques jours la première femme à détenir le portefeuille des affaires étrangères et européennes. Les diplomates m’ont fait remarquer ce point. Je leur ai rappelé que vous étiez aussi la première femme à avoir occupé non seulement le poste de ministre de la défense, mais également celui de ministre de l’intérieur avant d’avoir été ensuite ministre d’État, garde des sceaux. De même, vous êtes la première personnalité politique de la Ve République à avoir dirigé consécutivement quatre ministères régaliens, et ce sous l’autorité de deux Présidents de la République et de trois Premiers ministres.

Il était donc tout à fait logique de vous retrouver aujourd’hui à votre nouveau poste.

En tant vice-président de la commission des affaires étrangères, je vous souhaite la bienvenue parmi nous. Je vous exprime également la grande satisfaction des Français de l’étranger, car ils savent que vous avez toujours été attentive à leurs demandes.

Les grands thèmes de politique étrangère ont été abordés, notamment par MM. Raffarin et Chevènement.

M. Josselin de Rohan, le président de la commission, exprimera ses vues sur le G20, le G8, l’Afghanistan et différents dossiers d’actualité en d’autres temps et d’autres lieux.

Madame le ministre d’État, au sein de votre ministère, la gestion de crise et, d’une manière générale, la sécurité des Français de l’étranger sont des priorités.

Je sais que l’on ne peut pas aborder dans le détail la situation des otages actuels – néanmoins, toute information que vous pourriez nous communiquer serait la bienvenue –, car le sujet est très délicat.

Nous sommes réservés sur le budget global contraint, malgré une légère augmentation des crédits. Comme l’a fort bien indiqué le rapporteur spécial Adrien Gouteyron, nous pensons qu’il a atteint une limite et qu’il devra être conforté à l’avenir.

Toutefois, nous sommes satisfaits d’avoir obtenu les crédits nécessaires à la poursuite dans de bonnes conditions de l’aide à la scolarité des élèves français fréquentant les établissements d’enseignement français à l’étranger.

Le rapport de nos collègues parlementaires Geneviève Colot et Sophie Joissains – certains l’ont critiqué, tandis que d’autres le trouvent excellent – rappelle, si besoin était, l’accueil très favorable que les familles françaises bénéficiaires ont réservé à la prise en charge des frais de scolarité des lycéens.

Je n’engagerai pas un long débat sur le sujet.

Cependant, comme les détracteurs de la PEC prétendent que la mesure provoque l’éviction des élèves étrangers, je souhaite rappeler deux éléments.

D’une part, la mission première de l’AEFE est d’assurer l’éducation des enfants français.

D’autre part, les effectifs d’élèves étrangers scolarisés dans les classes de lycée où la PEC est en vigueur non seulement n’ont pas baissé, mais ils ont même augmenté de 4, 9 % l’année dernière. Les élèves étrangers y sont même deux fois plus nombreux que les Français : 31 365 contre 16 631 ! Vous voyez bien qu’il n’y a pas d’éviction !

J’en viens au coût de la PEC, sujet qui appelle de la transparence. Comme le rapport l’a démontré – cela a d’ailleurs été confirmé par l’Inspection générale des finances –, ce coût a été artificiellement gonflé.

En 2007, le Parlement a accordé 5 millions d'euros pour un coût réel de la PEC de 1, 8 million d'euros. En 2008, les crédits s’élevaient à 20 millions d'euros pour un coût réel de 8, 4 millions d'euros. En 2009, ils atteignaient 30 millions d'euros pour un coût réel de 19 millions d’euros. En 2010, leur montant était de 42 millions d'euros pour un coût réel 30 millions d'euros. Et le coût affiché cette année est supérieur de 25 % au coût réel. Ce sont les chiffres de l’AEFE. Alors que l’on ne nous dise pas que la PEC coûte trop cher !

Rassurez-vous, mes chers collègues, le solde n’a pas été gaspillé par l’Agence, qui a le mérite de bien gérer, puisque les crédits ont été attribués aux bourses scolaires. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Le Président de la République avait d’ailleurs demandé que le budget consacré aux bourses soit augmenté. Ces trois dernières années, ce budget a connu une hausse moyenne de 13, 5 %.

Que l’on ne nous dise pas que la PEC est financée au détriment des bourses scolaires ! C’est exactement le contraire !

Et la PEC n’a pas non plus fait s’envoler les frais de scolarité ! Certes, ils ont augmenté – tout augmente ! –, mais dans des proportions similaires à celles qui avaient été observées les années antérieures, à l’exception de la hausse mécanique de la contribution à l’Agence en 2009 et en 2010.

Relevons que les hausses varient selon les écoles. À Bruxelles, les deux lycées gérés directement par l’AEFE ont augmenté leurs frais de scolarité de 25 %, alors que le lycée de New-York a revu les siens à la hausse de 16 %. Les coûts de fonctionnement sont évidemment différents à New-York, Rabat, Casablanca ou encore à Madagascar. Mais l’enseignement dispensé est identique ! Le principe d’égalité devant la loi s’apprécie en fonction du résultat, et non des moyens mis en œuvre pour y parvenir.

D’aucuns soutiennent que la PEC pousserait les entreprises à se désengager du financement des frais de scolarité. Il convient d’être prudent sur ce point. Selon les termes du rapport, sur les quelque 200 entreprises du Cercle Magellan, seules 5 se sont désengagées depuis 2007. Madame le ministre d’État, nous en convenons avec vous, les entreprises qui le peuvent doivent participer à ce financement. Vous avez des idées. Nous attendons vos propositions.

Cela dit, il est effectivement indispensable de contribuer aux efforts d’économies budgétaires de notre pays. C’est pourquoi nous sommes obligés de mettre en place un mécanisme de plafonnement de la prise en charge des frais de scolarité ; je le répète chaque année. En 2011, il ne sera pas possible d’étendre la mesure au-delà des classes de lycée. Tout le monde, y compris le Président de la République, s’accorde sur ce point.

Nous souhaitons que les élus à l’Assemblée des Français de l’étranger, véritables experts de terrain, …

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

… soient étroitement associés à la détermination de ce plafond. Nous en reparlerons lors de l’examen des amendements.

Madame le ministre d’État, je voudrais maintenant attirer votre attention sur la disposition du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 qui prévoit l’interdiction pour les administrations publiques centrales d’emprunter au-delà de douze mois. Certes, cette mesure est justifiée, mais elle est inapplicable à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, qui ne peut pas rembourser sur cette période des emprunts de plusieurs millions d’euros.

Nous avons cosigné un amendement d’André Ferrand tendant à remédier à cela. J’ai cependant quelque inquiétude quant à son efficacité. En effet, le dispositif proposé vise à introduire dans le code de l’éducation une mesure spécifique à l’Agence qui ne serait pas applicable en cas d’adoption du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Cela étant, la démarche initiée par notre collègue est importante.

On pourrait peut-être tout simplement ne pas faire pas figurer l’AEFE dans la liste des organismes auxquels s’appliquera l’interdiction d’emprunter au-delà de douze mois, d’autant plus facilement que cette liste, qui doit être définie par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et du budget, n’est pas encore établie. Madame le ministre d’État, nous comptons sur votre forte capacité de persuasion pour convaincre vos collègues. Je souhaiterais obtenir de votre part des assurances sur ce sujet.

J’évoquerai enfin le budget consacré aux élections des députés des Français de l’étranger, qui doit être à la hauteur des enjeux. Il faut donc engager les crédits suffisants dans le budget tant pour 2011 que pour 2012.

Madame le ministre d’État, nous vous faisons confiance, car nous savons à quel point vous vous êtes battue pour obtenir gain de cause lorsque vous défendiez le budget de la défense, suscitant notre admiration. Nous comptons sur vous pour en faire autant sur le budget des affaires étrangères.

Le groupe UMP, qui connaît votre expérience, vos compétences et votre engagement républicain, votera le projet de budget de la mission « Action extérieure de l’État » pour 2011.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Madame le ministre d’État, jusqu’à présent, l’examen des crédits de votre ministère donnait traditionnellement lieu à des échanges enflammés sur la politique étrangère. Force est de constater que la situation a bien évolué depuis trois ans.

Grâce à Gérard Larcher, le président du Sénat, et à Josselin de Rohan, le président de la commission des affaires étrangères, des débats sur la politique extérieure ont eu lieu au Sénat. Aussi pouvons-nous aujourd'hui examiner le présent projet de budget sans évoquer les malheurs du monde, qui sont d’ailleurs nombreux.

Mon intervention est un peu une « victoire de l’optimisme sur l’expérience », comme le disait Henri VIII à son sixième mariage ! §

Notre diplomatie en général et notre rayonnement culturel en particulier ont des difficultés à se satisfaire d’un budget de crise. Mais notre diplomatie d’influence et le rayonnement de la France commencent aux portes de nos consulats et de nos ambassades.

C’est pourquoi il faut, me semble-t-il, veiller scrupuleusement à la qualité du recrutement des personnels de nos ambassades. Pourquoi envoyer des ambassadeurs non arabisants dans les pays arabes et des arabisants dans les pays anglophones ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Nous savons à quel point les relations culturelles et universitaires sont essentielles au soutien des relations économiques. On ne dira jamais assez les effets majeurs de l’implantation de la Sorbonne et du Louvre à Abou Dhabi ou de Saint-Cyr en Arabie Saoudite.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Notre action extérieure n’est pas une agence de recyclage pour des amis en mal d’exotisme, pour des parlementaires ayant perdu leur circonscription ou pour d’anciens ministres, par ailleurs notoirement non anglophones, propulsés au plus haut d’organisations internationales !

Alors que les débats des commissions des affaires culturelles et des affaires étrangères, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, insistent sur la nécessité de procéder à des recrutements locaux pour une meilleure efficacité des services rendus, et alors que les recrutements locaux sont, selon une expression bien française ou, plus exactement, québécoise, beaucoup moins dispendieux pour le budget en période de RGPP, les procédures anciennes perdurent, au mépris des besoins et de la réalité du terrain.

Ainsi, notre ambassade des Émirats arabes unis avait besoin d’un attaché de presse. On lui a envoyé un homme tout à fait remarquable venant de CulturesFrance, de CampusFrance ou de dieu sait où, mais ne parlant ni arabe ni même anglais !

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

C’est vrai qu’il est un peu difficile de trouver un attaché de presse dans un pays comme les Émirats arabes unis, surtout avec un statut d’expatrié et le salaire qui va avec… Et il a fallu toute l’inventivité et la créativité de notre ambassadeur pour créer un poste de secrétaire général de notre ambassade !

En période de RGPP, il faut faire preuve d’un peu de prudence quant à ce type de poste !

(Sourires.) Il est probable que sa nomination soit due à une erreur de copier-coller…

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Au sultanat d’Oman, il y a un nouvel attaché culturel qui vient du Yémen. On pourrait, certes, penser que c’est une bonne nouvelle et que la personne connaît bien la région. Simplement, au Yémen, elle était chargée de l’agriculture, et non de la culture ! §

Je ne parle pas de cet ambassadeur d’un pays essentiel dans le conflit du Proche-Orient dont la seule qualité est d’avoir été un médecin en charge d’opérations humanitaires et qui non seulement ne parle pas arabe, mais parle même très mal l’anglais !

Combien de temps la diplomatie française poursuivra-t-elle encore de telles erreurs de casting, dont la France n’a pas, ou plus, les moyens ?

L’argent public pourrait être employé beaucoup plus astucieusement, avec beaucoup plus d’efficacité, en multipliant les recrutements locaux. C’est le sens de la campagne que je mène.

Nous pourrions très bien imaginer, notamment en matière culturelle, un recruté local pour l’ensemble des pays du Golfe persique, en excluant l’Iran, qui mérite un statut particulier. Il serait possible, me semble-t-il, de réaliser des économies. A-t-on vraiment besoin de cinq attachés culturels, dans cinq ambassades, qui nouent des contacts la première année, travaillent la deuxième et recherchent déjà leur affectation suivante la troisième ?

Madame le ministre d’État, je crois sincèrement que les recrutés locaux pourront mettre à profit toute leur connaissance du terrain et être beaucoup plus efficaces pour les relations culturelles de la France.

Vous souhaitez rapprocher votre ministère des entreprises ; vous aurez à cet égard tout mon soutien, comme celui des membres du groupe auquel j’appartiens.

D’ailleurs, lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie, j’avais plaidé pour la création, en partenariat avec les professionnels français du barreau, les experts-comptables et les commissaires aux comptes, d’un pool de consultants volants qui officieraient dans des postes ciblés à forte capacité d’investissement.

En effet, il existe de nombreux exemples de pays à forte capacité contributive dont les ressortissants n’ont aucune information quant aux possibilités d’investissement en France et où le moindre conseil fiscal est simplement inexistant.

À mon sens, « l’équipe France » doit marcher dans le même sens, sous la direction de l’ambassadeur, et sous votre autorité, qu’il s’agisse du département culturel, économique ou diplomatique. Elle doit parler d’une seule voix et avoir une seule tête, la vôtre, madame le ministre d’État.

Voilà quelques semaines, j’ai entendu avec beaucoup d’intérêt, à New York, le discours du président Barack Obama sur les objectifs du millénaire. Il a déclaré en substance qu’en continuant ainsi, nous ne pourrions pas être présents partout, et a rappelé que si nous ne fixons pas de priorités, nous n’en atteindrons aucune !

C’est bien le problème qui se pose aujourd’hui avec ce projet de budget. Nous n’avons pas les moyens de notre politique. Sans mécène, pas d’école française à Tbilissi. Sans la banque de Sharjah, pas de lycée français à Dubaï !

Madame le ministre d’État, les défis qui nous attendent sont nombreux. Vous l’avez compris, je crois aux actions transversales.

Il s’agit non pas d’envier la réussite du British Council ou du Goethe Institut, mais de changer les mentalités. Je suis certaine que vous porterez bien la voix de la France !

Je voudrais conclure en saluant les maires de la Vienne, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. … qui sont venus en nombre pour assister à ce débat.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. J’espère qu’ils auront l’occasion de rester pour entendre votre réponse, madame le ministre d’État.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, ce soir, pour la dix-neuvième et dernière fois, je participe au débat sur le budget du ministère des affaires étrangères, et je mesure avec regret la régression.

Pendant les premières années de mon mandat, on ne parlait guère de finances. Le débat portait alors sur la politique internationale et se terminait par un vote unanime de soutien à l’action du ministre, quelle que soit la majorité gouvernementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

C’est vous, chers collègues de la majorité, qui avez commencé à voter contre les crédits du ministère !

Depuis dix ans, les réductions de crédits et d’emplois ont tant frappé que les finances sont devenues le sujet central des débats et que la presse en fait ses grands titres.

Je mesure également la régression s’agissant des Français de l’étranger, que je représente. En 1999, à la suite de mon rapport au Premier ministre intitulé L’exclusion sociale dans les communautés françaises à l’étranger, le Gouvernement avait renforcé ou initié des mesures d’action sociale, et non pas d’aide, en faveur des Français et des communautés françaises, qui avaient perdu pied dans l’aventure de l’expatriation : formation professionnelle pour la réinsertion, appui à la recherche d’emploi, santé, et j’en passe…

Les moyens ont été méthodiquement rognés ou supprimés. Aujourd’hui, il ne reste pratiquement que la charité publique ou privée.

La troisième catégorie aidée de la Caisse des Français de l’étranger, ou CFE, qui avait inclus les Français de l’étranger dans la solidarité nationale à partir de 2002, n’est plus financée par l’État. Elle est donc vouée à disparaître à plus ou moins long terme.

Au total, la citoyenneté des Français à l’étranger tend à se réduire à sa dimension électorale. Nous devenons des électeurs que l’on flatte, que l’on séduit, mais dont on refuse de considérer la situation réelle.

Mme Claudine Lepage applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Présidente du groupe d’information internationale France-Territoires palestiniens du Sénat, je placerai mes propos dans la suite des paroles d’un grand témoin, le père Manuel Musallam, curé de la paroisse catholique de Gaza jusqu’à la fin de 2009, qui déclarait ceci : « Pour nous, en Palestine, il est évident que ce n’est pas de pitié dont nous avons besoin, mais de justice. Nous sommes dans une histoire où l’injustice règne en maître. La seule véritable expression de la justice, face à cela, c’est la mise en œuvre des droits fondamentaux de la personne humaine et du droit international. »

Madame le ministre d’État, depuis trois ans, le Gouvernement français abreuve le peuple palestinien de pitié. On apporte une « aide humanitaire » aux Palestiniens victimes du blocus de Gaza et de l’occupation militaire en Cisjordanie.

Or, en Palestine, le problème n’est pas du tout humanitaire. La misère résulte d’une politique raisonnée systématique de « dé-développement », menée par le Gouvernement israélien, son armée et les colons.

Nous sommes tous informés de l’asphyxie économique et sociale de Gaza, de l’israélisation de Jérusalem-Est, qui s’effectue d’ailleurs au mépris du droit international, et des exactions quotidiennes contre les biens et les personnes des Palestiniens. Madame le ministre d’État, nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Aux Palestiniens, la France et l’Union européenne font l’aumône de leur coopération et de leurs financements. Simultanément, dans le plateau israélien de la balance, la France met sa coopération militaire, ses échanges commerciaux, l’entrée dans l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, et le rehaussement du partenariat avec l’Union européenne, qu’on continue à négocier secrètement.

Est-ce ainsi que l’on défend le droit ? Défend-on le droit en apportant tout son appui à un État qui viole systématiquement la légalité internationale ?

La France est membre du conseil de sécurité de l’ONU. Comment comptez-vous en faire respecter les résolutions ? Que ferez-vous pour qu’Israël applique la quatrième convention de Genève en Cisjordanie et mette fin au blocus de Gaza ? Accepterez-vous de recevoir les défenseurs de Salah Hamouri, prisonnier politique français en Israël ?

Oui à la compassion envers les Palestiniens, mais pas pour masquer le déni de droit et l’injustice !

Face à un tel déni de droit, les sociétés civiles palestinienne, israélienne et internationale recourent à la lutte non violente dans toutes ses modalités connues. En France, un certain nombre de personnes sont ainsi poursuivies devant les tribunaux. Si cela doit être mon cas, je l’assumerai et j’en serai fière !

Mais c’est à l’État de faire respecter la légitimité internationale. Il est grand temps que la France revienne à ses fondamentaux diplomatiques au Proche-Orient !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Madame le ministre d’État, je soulignerai d’abord que vos fonctions antérieures de ministre de la défense, puis de l’intérieur, vous rendent les problèmes internationaux familiers.

« Cessez d’affaiblir le Quai d’Orsay ! » Cette injonction de deux anciens ministres des affaires étrangères compétents et respectés, MM. Alain Juppé et Hubert Védrine, ne peut pas être ignorée.

Votre budget, qui s’élève à 3 milliards d’euros, n’est pas substantiel. Faisons en sorte qu’il soit utilisé efficacement !

La recherche de performance, alliée aux contraintes budgétaires et au non-renouvellement des effectifs, est mise en œuvre de manière exemplaire et courageuse, car parfois humainement douloureuse, par le Quai d’Orsay.

Le comité interministériel des réseaux internationaux de l’État, le CORINTE, est un succès. L’ambassadeur coordonne enfin l’ensemble de l’action extérieure et lui donne sa cohérence.

Néanmoins, la rationalisation pourrait être plus audacieuse. Européen convaincu, j’appelle depuis des années à la mutualisation des services consulaires des pays de l’Union.

En effet, je crois à une citoyenneté européenne qui s’exprimerait à l’étranger par une représentation consulaire commune, au moins aux États de l’espace Schengen, et par la suppression des consulats au sein des pays de l’Union. Ces décisions seraient logiques, symboliques, économiques et d’autant plus légitimes que le service européen pour l’action extérieure, le SEAE, est en cours d’installation. Sous peu, Lady Ashton sera à la tête d’une diplomatie européenne forte de 3 000 agents, dirigée par Pierre Vimont.

Madame le ministre d’État, le droit communautaire prévaut sur le droit national. Qu’en est-il de l’action extérieure ? Quel équilibre de répartition des responsabilités et des tâches comptez-vous définir ?

Si nos collègues Adrien Gouteyron et Jean-Louis Carrère, dans leur rapport d’information, sont réservés sur les missions diplomatiques communes avec nos partenaires de l’Union européenne, ils relèvent 26 collaborations réussies en matière consulaire, 19 centres communs de réception de visas, 3 centres administratifs et 3 projets en cours.

Madame le ministre d’État, comptez-vous intensifier ce mouvement ? L’Allemagne est notre partenaire presque exclusif grâce à l’accord entré en vigueur en 2008. Qu’en est-il d’une collaboration avec d’autres pays de l’Union ?

Le redéploiement des effectifs, sur lequel j’insiste lors de chaque examen des crédits de cette mission, est indispensable et stratégique. Or les chiffres que j’ai lus cette année m’ont sidéré !

Quelque 19 % des agents expatriés sont déployés en Europe, c’est-à-dire chez nous – on en compte 154 en Allemagne et 148 en Belgique –, et 35 % le sont en Afrique, et même pas principalement dans les pays émergents. Pourquoi ? Mes chers collègues, comparez les effectifs : 207 agents au Sénégal, mais 160 en Chine ; 127 à Madagascar, mais 123 en Russie ; 83 au Burkina Faso, mais 110 en Inde ; 80 au Mali, mais 104 au Brésil !

Certains chiffres sont encore plus aberrants : 14 agents aux Seychelles, 14 à Sainte-Lucie, 10 à Trinité-et-Tobago, 10 aux Fidji, 8 à la Jamaïque, 27 à Maurice ! Le bronzage serait-il une obsession de notre diplomatie ?

Exclamations.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Madame le ministre d’État, un budget exprime des choix stratégiques, une vision politique à long terme. Les chiffres étonnants sur la répartition des effectifs vous semblent-ils efficaces pour une action extérieure stratégique et ciblée vers des pays d’avenir ?

L’examen des crédits de l’action extérieure de l’État étant un « moment décisif où nous pouvons passer en revue objectifs, stratégies, modalités d’action, réformes en cours et critiques », je souhaite vous interroger sur quelques points qui me préoccupent : le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, le Moyen-Orient et l’Afghanistan.

Le retour de notre pays au sein du commandement intégré de l’OTAN avait provoqué de vives réactions. Certains n’y étaient pas favorables, mais y discernaient, comme moi-même, le moyen de mettre en place une défense européenne. Nous l’avons donc voté. Beaucoup de nos partenaires de l’Union n’en voyaient pas la nécessité, considérant cette défense européenne comme inutile en raison de leur appartenance à l’OTAN.

Le Président de la République avait conditionné le retour de notre pays dans l’OTAN au renforcement de la défense européenne. Où en est-on de ce point de vue ?

M. Jean-Louis Carrère s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

L’alliance avec les États-Unis dans ce cadre ne nous prive-t-elle pas d’une option alternative concertée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

M. Aymeri de Montesquiou. Il semble de plus que les États-Unis soient toujours décisionnaires pour les grandes opérations

Mme le ministre d’État le conteste

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Lors d’un déjeuner, j’interrogeais l’ambassadeur des États-Unis afin de savoir si son pays condamnerait un jour Israël pour une de ses atteintes répétées au droit international. Il ne m’a pas répondu.

Notre appartenance à l’OTAN amollie-t-elle nos positions au Moyen-Orient, héritées du général de Gaulle ?

Mme le ministre d’État fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le Président de la République, dans son discours à la Knesset, a exhorté Israël à adopter une politique plus conforme au droit international. Est-ce le cas ?

Au mois de janvier 2009, en réaction à des tirs de roquette, certes inacceptables, mais qui n’ont heureusement pas fait de morts, l’opération « Plomb durci » a fait 1 400 victimes, dont une majorité de civils. L’arraisonnement dans les eaux internationales de la flottille partie de Turquie a fait 9 morts. Toutes ces exactions provoquent haine et tensions avec le monde musulman.

Madame le ministre d’État, allez-vous proposer des mesures soulignant notre volonté qu’Israël respecte le droit international ou vous contenterez-vous de simples paroles ?

Je connais l’Afghanistan depuis 1994. J’ai vécu, en particulier, quinze jours chez le commandant Massoud durant l’été 2001. J’y suis retourné à plusieurs reprises après la chute des talibans. En 2002, on circulait à pied sans protection à Kaboul.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Si, madame le ministre d’État ! En 2002, on circulait à pied sans protection à Kaboul.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

À pied, oui, mais pas sans protection !

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Aujourd’hui – je m’y suis rendu deux fois cette année –, on ne se déplace plus qu’en convoi blindé. N’est-ce pas la démonstration que notre politique n’est pas la bonne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Quelle nouvelle orientation comptez-vous lui donner ? Le chef d’Al-Qaïda liant la présence française en Afghanistan à la menace terroriste en France, nous devons expliquer notre action dans ce pays à nos compatriotes, qui, pouvant se sentir menacés, la comprendront et soutiendront nos sacrifices en connaissance de cause : le respect des droits fondamentaux, ainsi que la lutte contre la barbarie et le projet taliban visant à transformer en émirats les pays d’Asie centrale, une zone stratégique.

J’ai été interpelé dan un petit village par un vieil Afghan qui m’a dit en russe – il était donc instruit –, « вы тожэ ухлют », c'est-à-dire : « Vous aussi, vous partirez ».

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Sera-t-il prophète ?

L’importance de nos contributions internationales et notre participation aux opérations de maintien de la paix partout dans le monde prouvent que « rien de ce qui est humain ne nous est étranger ».

C’est la raison pour laquelle notre pays est toujours « une puissance d’influence mondiale ». Il le restera s’il opère des choix justes et visionnaires, s’il demeure vigilant sur l’adaptation et la modernisation de sa diplomatie et attentif aux personnels qui la composent. Dans cet esprit, madame le ministre d’État, je voterai les crédits de cette mission.

Applaudissements sur quelques travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C’est dommage ; j’aurais applaudi votre discours si vous n’aviez pas indiqué que vous voteriez les crédits !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Cantegrit

Madame le ministre d’État, permettez-moi tout d’abord de vous dire combien je suis satisfait de votre nomination à la tête du ministère des affaires étrangères, ministère de tutelle des Français de l’étranger, que je représente.

Je sais l’attachement qui est le vôtre à l’expatriation française dans le monde. J’ai participé à de nombreux colloques concernant les Français de l’étranger dont vous étiez l’invitée d’honneur, et vous avez toujours su faire comprendre à nos compatriotes expatriés combien vous étiez proche de leurs préoccupations.

Je vous le dis d’autant plus volontiers que je m’occupe particulièrement, au Sénat, de la couverture sociale des 2, 5 millions de Français vivant à l’étranger.

Deux sujets me tiennent à cœur : d'une part, les crédits du pôle social, que gère votre ministère, pour nos compatriotes les plus défavorisés ; d'autre part, la Caisse de sécurité sociale des Français de l’étranger, la CFE, que je préside et qui est l’organe de rattachement à la sécurité sociale de nos compatriotes expatriés.

Sur le premier point, c’est avec une véritable stupéfaction que nous avions appris l’année dernière, lors de la présentation des crédits de la mission, que le fonds d’action sociale géré par votre ministère – créé en 1977, il intéresse les personnes âgées nécessiteuses, les handicapés majeurs et mineurs, l’enfance en détresse et les personnes en butte à des difficultés passagères –, serait diminué d’un tiers au cours des années 2010, 2011 et 2012.

J’avais eu l’occasion de préciser à votre prédécesseur qu’une telle mesure était inenvisageable et inadmissible, et que, s’il était louable de s’occuper d’actions humanitaires comme il l’avait fait, les Français de l’étranger les plus défavorisés ne devaient pas être traités de la sorte !

C’est pourquoi, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, j’avais soutenu un amendement déposé par mon excellent collègue Adrien Gouteyron pour modifier la répartition des crédits à hauteur de 1, 5 million d’euros et maintenir à peu de chose près le budget de l’année précédente.

Je constate avec satisfaction que le Gouvernement a décidé de consacrer au pôle social un budget de 19, 8 millions d’euros pour 2011 et de maintenir l’enveloppe à ce niveau pendant la durée du nouveau triennium.

En revanche, le second problème que je souhaite soulever lors de mon intervention, celui qui concerne la Caisse des Français de l’étranger, ne me paraît pas résolu.

Madame le ministre d’État, permettez-moi de vous rappeler que la Caisse de sécurité sociale des Français de l’étranger constitue, depuis sa création en 1984, un élément essentiel de la couverture sociale de nos compatriotes. La CFE protège 200 000 Français dans le monde. Ses adhérents sont de plus en plus nombreux.

La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale avait prévu qu’une aide gouvernementale serait mise en place au profit de la troisième catégorie de cotisants, c’est-à-dire de ceux dont les revenus sont les plus faibles, permettant ainsi à certaines familles qui n’en ont pas les moyens de payer la cotisation volontaire demandée par la Caisse et d’être couvertes. Le financement de la couverture de cette catégorie est complexe.

Dans un premier temps, la CFE devait puiser dans ses réserves à hauteur de 50 millions de francs, puis être relayée par une ligne budgétaire de l’État. C’est votre ministère qui a été choisi pour assumer cette dépense.

Depuis la fin de 2006, et après l’épuisement du préfinancement propre à la CFE que j’ai évoqué, c’est donc votre ministère qui prend en charge le coût de cette troisième catégorie aidée, comme il l’a encore fait pour l’année 2010.

Mme Geneviève Colot, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale, qui a d'ailleurs remis un excellent rapport, a fait voter un amendement tendant à instituer un cofinancement à parts égales entre la caisse et votre ministère. Cette initiative faisait d’ailleurs suite à une délibération du conseil d’administration de la CFE qu’avait souhaitée votre ministère.

Cet amendement a été adopté contre l’avis de M. Jean-François Mancel, rapporteur spécial, qui a présenté de manière inexacte les conséquences de l’article 19 de la loi de modernisation sociale. Il a prétendu que c’était la CFE qui devait financer l’intégralité du dispositif. Or c’est tout le contraire qui était prévu, puisque le financement était à la charge de l’État, la CFE n’émettant qu’une première avance !

Toutefois, un problème subsiste. Si, comme je l’ai indiqué, le cofinancement à parts égales a été voté à l’Assemblée nationale, son abondement n’est pas assuré, car un second amendement de Mme Colot tendant à compléter la ligne budgétaire initiale prévue n’a pas été adopté. Il faudra donc que le Sénat mette de la cohérence là où les votes de l’Assemblée nationale sont contradictoires.

Ainsi, cette troisième catégorie aidée pourra continuer à exister, ce qui permettra à nos compatriotes dans l’incapacité d’assurer la totalité de la cotisation compte tenu de leurs ressources de bénéficier de cette couverture sociale.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, depuis son élection en 2007, le Président de la République a affirmé vouloir placer au premier rang de ses priorités la politique étrangère, une ambition que nous ne pouvons que partager.

Si le chef de l’État a, certes, beaucoup voyagé et beaucoup proposé au cours des trois dernières années, les faits, qui, eux, ne trompent pas, sont moins parlants.

Je voudrais d’emblée repréciser le contexte dans lequel s’inscrit notre action. Avec la fin de la guerre froide, le bilatéralisme américano-soviétique s’est évanoui. Les événements des années quatre-vingt-dix et, surtout, 2000 ont également montré que l’unilatéralisme d’une toute-puissance états-unienne n’était ni soutenable ni souhaitable.

Le monde s’est donc engagé dans la voie du multilatéralisme, avec une multiplication des pôles d’influence et une redistribution des cartes en direction de l’Asie et de l’Amérique du Sud.

Dans ce contexte, les Nations unies devraient avoir un rôle déterminant à jouer. L’ONU a pourtant montré bien peu d’autorité lors des récentes crises internationales, et son secrétaire général peine à faire entendre sa voix depuis sa nomination. Il lui est d’autant plus difficile de se faire entendre que bon nombre d’États, dont le nôtre, accordent malheureusement assez peu d’importance à l’avenir de cette institution.

Nous devrions pourtant prouver notre attachement au multilatéralisme, tout en nous efforçant de défendre nos principes dans le cadre des institutions internationales. Pour cela, il est nécessaire de soutenir l’ONU de toute notre énergie et d’être, au sein de cette institution, une force de proposition.

Si le G8 et le G20 ne sont pas à négliger, ils restent des clubs très fermés, et nous ne devrions pas les laisser outrepasser les prérogatives onusiennes. Pourtant, tout se passe aujourd’hui comme si ces groupes, ainsi que l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, et le Fonds monétaire international, le FMI, étaient les seules structures à même de décider de l’avenir de notre planète. La seule enceinte légitime au plan mondial reste l’ONU. C’est pour cette raison qu’il faut militer en faveur de sa réforme, afin que l’institution soit mieux adaptée aux nouveaux enjeux globaux. Par exemple, quelle place doit revenir à l’Union européenne dans ses instances ?

Cela passe nécessairement par un élargissement du Conseil de sécurité.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Vous êtes donc d'accord avec le Président de la République ! Je vous en remercie.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Nous ne sommes plus en 1945. Les équilibres d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. Afin de pouvoir agir avec efficacité et rapidité, l’ONU devrait pouvoir disposer de moyens militaires et civils d’intervention permanents.

D’une manière plus générale, c’est la légitimité de l’organisation qui doit être réaffirmée avec force. L’ONU doit chapeauter l’ensemble des organisations internationales et assumer avec ambition des tâches civiles et même, le cas échéant, militaires, avec un mandat précis et des moyens adéquats.

La France doit porter ce projet. Pour cela, elle doit sensibiliser ses voisins européens, notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni, sur le sujet. Qu’a fait le Président de la République depuis 2007 pour relancer l’ONU ? Votre ministère entend-il s’attaquer au défi du multilatéralisme ? Plus que des réponses verbales, nous attendons des actes !

Des actes, c’est également ce que nous souhaitons sur le dossier du désarmement. La huitième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ou TNP, qui s’est tenue à New York au mois de mai dernier, n’a malheureusement pas permis de dégager une position française claire.

Quelques mois plus tôt, le Président de la République, s’exprimant au sujet de la feuille de route de Barack Obama, avait déclaré : « Nous vivons dans un monde réel, pas dans un monde virtuel ». Un monde réel ne mérite-t-il pas justement que ses dirigeants traitent le sujet du désarmement avec moins de négligence ? Il ne s’agit pas, pour mes amis et moi, de remettre en cause le principe français de la dissuasion nucléaire indépendante.

Cependant, nous estimons que, par responsabilité envers les générations futures, nous ne pouvons pas nous soustraire à l’objectif, certes de très long terme, d’un monde dénucléarisé. À cet égard, la position du Président de la République n’est pas très claire. Une telle ambiguïté place d’ailleurs notre pays en porte-à-faux sur la scène diplomatique internationale.

D’ailleurs, il serait intéressant que le nouveau ministre d’État, ministre de la défense et des anciens combattants, M. Alain Juppé, puisse expliquer au Président de la République le contenu de la tribune qu’il avait cosignée dans le journal Le Monde le 14 septembre 2009 : « Pour un désarmement nucléaire mondial, seule réponse à la prolifération anarchique ».

Concrètement, la France devra reprendre un rôle d’impulsion dans tous les débats sur le désarmement et la non-prolifération des armes de destruction massive. Mais, encore une fois, il n’incombe pas uniquement à la France de faire avancer ce dossier. Le désarmement est toujours un horizon souhaitable, et c’est, me semble-t-il, au niveau européen que notre pays doit porter cette proposition. De quelle manière entendez-vous défendre le dossier à Bruxelles, madame le ministre d’État ?

En particulier, comment soutenir les bonnes initiatives tendant à une réduction des armements conventionnels les plus déstabilisants et les plus dangereux pour les populations ? Je pense en particulier aux armes de petit calibre, qui font aujourd’hui des ravages dans les conflits africains.

Madame le ministre d’État, avant de conclure, je souhaiterais vous interroger sur un domaine d’action plus précis et qui me tient tout spécialement à cœur : la lutte contre la piraterie maritime.

Je dois admettre que la France a tenté d’agir en la matière au cours des derniers mois, notamment au moyen du projet de loi relatif à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer.

Malgré tout, les bonnes intentions affichées ne résolvent pas l’ensemble des problèmes qui se posent. Le député Christian Ménard reconnaissait le 4 novembre dernier que l’opération Atalanta, si elle avait donné dans un premier temps quelques résultats, montrait aujourd’hui ses limites. Les actes de piraterie sont en effet en pleine recrudescence dans le golfe d’Aden, et les pirates sont de mieux en mieux armés et organisés.

De plus, même si nombre d’entre eux ont été arrêtés, des difficultés se posent toujours pour les suites judiciaires à donner à leur arrestation.

Enfin, et je terminerai sur ce point, nous savons tous que la piraterie perdurera tant que les causes politiques, économiques et sociales qui la provoquent n’auront pas disparu. Aussi, madame le ministre d’État, pouvez-vous nous indiquer de quelle manière la France entend venir en aide à la Somalie, qui vit depuis bien trop longtemps dans une situation anarchique ?

Sur ce dossier comme sur bien d’autres, la France doit bien sûr faire entendre sa voix, mais surtout retrousser ses manches !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

M. Roger Romani remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Madame le ministre d’État, permettez-moi tout d’abord de vous exprimer à mon tour ma satisfaction de voir pour la toute première fois une femme à la tête du Quai d’Orsay.

Votre nomination constitue un beau témoignage de l’évolution de votre ministère, qui s’emploie à tous les échelons à diffuser l’image d’une France dynamique, ouverte sur le monde et pionnière sur tous les grands enjeux de notre temps.

Nous comptons sur vous pour aider notre pays à développer son action en préservant au mieux son budget et pour défendre au mieux les intérêts de nos compatriotes expatriés.

Je note beaucoup d’éléments positifs dans le projet de budget qui nous est présenté cette année. Malgré les indispensables restrictions budgétaires, le budget global de la mission « Action extérieure de l’État » progresse de près de 5 % et la dotation du programme 151 augmente de près de 5, 5 %.

Cet accroissement permettra de développer le service public en faveur de nos compatriotes expatriés, ce qui s’inscrit parfaitement dans la volonté du Gouvernement de rapprocher les citoyens de leur administration, ainsi que l’a récemment rappelé M. le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale.

L’enjeu est de taille. En expatriation, plus encore qu’en métropole, l’accès à l’information est vital. Je pense bien sûr aux situations de catastrophe naturelle ou de crise politique, mais aussi, comme cela a été rappelé lors du débat sur les retraites, à l’importance pour les expatriés d’être informés des conséquences de leur expatriation en matière de droits sociaux, afin de mettre en place des stratégies de prévoyance, ou encore aux parents confrontés à un conflit avec leur ex-conjoint au sujet de l’attribution de l’autorité parentale. En l’occurrence, la méconnaissance du droit international et des dispositifs institutionnels peut conduire à des erreurs dramatiques.

Une véritable campagne de communication doit être menée sur le sujet. À cet égard, je salue l’engagement du personnel du Quai d’Orsay.

Je voudrais souligner aussi le rôle encore trop méconnu, y compris parmi nos communautés expatriées, des élus de l’Assemblée des Français de l’étranger, l’AFE. Ils constituent un maillon essentiel pour assurer la transmission des informations au sein des multiples réseaux qui structurent notre diaspora, dont de nombreux membres n’entretiennent – hélas ! – pas ou peu de relations avec les consulats.

L’enveloppe allouée à l’AFE, à la télé-administration et aux services administratifs ne représente que 3, 9 % des crédits du programme 151. Son renforcement pourrait permettre d’accroître l’efficacité de ces ressources, encore insuffisamment mobilisées.

Il nous faut absolument mobiliser nos réseaux à l’étranger, car ils constituent un vivier de compétences et d’expertise qui mériterait d’être mieux utilisé au service du rayonnement économique, stratégique et culturel de la France, et ce pour un coût quasi nul.

Les conseillers à l’AFE constituent le support irremplaçable de la mobilisation de ces ressources, mais ils ont besoin que leur rôle soit mieux accepté et promu localement par le réseau diplomatique et consulaire.

La double échéance électorale de 2012 constitue un bon levier pour mobiliser et stimuler nos compatriotes, mais c’est dès maintenant que nous devons y travailler. Je me réjouis qu’un vrai budget de près de 600 000 euros soit enfin alloué à la mise à jour des listes électorales, au financement de campagnes d’information et à l’amélioration des procédures de vote par correspondance. Par ailleurs, une somme d’un million d’euros sera consacrée à l’amélioration des conditions de mise en œuvre du vote électronique.

L’enseignement est évidemment un autre enjeu majeur pour nos compatriotes vivant à l’étranger. L’AEFE joue un rôle essentiel dans la formation des élites internationales et françaises et consolide notre influence dans plus de 130 pays. Il est indispensable de lui donner les moyens de poursuivre cette double mission. Nous y reviendrons lors de l’examen des amendements.

Mais deux tiers des élèves français résidant à l’étranger et nombre d’étrangers francophones n’ont pas accès à ces établissements d’excellence. Notre stratégie de diffusion de l’enseignement en français et « à la française » doit mieux les intégrer.

Cela passe par un appui renforcé aux petites écoles de français langue maternelle, ou FLAM, par la labellisation de cursus francophones au sein d’établissements étrangers, par l’envoi de volontaires internationaux dans ces structures en soutien à la francophonie et par le développement de la diffusion audiovisuelle en français dans les médias étrangers.

Le financement de telles actions est actuellement dispersé entre de multiples lignes budgétaires, et il est notamment menacé par la diminution de 17, 4 % des crédits d’intervention du programme 185.

Madame le ministre d’État, je voudrais vous exhorter à travailler avec nos partenaires francophones dans les pays étrangers – je pense bien sûr au Québec – pour coordonner nos actions en la matière.

La proposition que j’avais formulée à cette même tribune au mois de décembre 2005 me semble plus que jamais d’actualité : une fondation pour la présence française à l’étranger favoriserait le développement des initiatives et de financer ces actions, que le budget de l’État ne peut plus réellement prendre en charge dans divers domaines. Cette structure pourrait s’appuyer sur des branches de droit local permettant aux expatriés de profiter de conditions de fiscalité avantageuses sur les dons et legs dans différents pays.

Ma principale réserve sur le budget qui nous est présenté aujourd'hui concerne l’aide sociale. En effet, si les crédits du pôle social augmentent très légèrement, c’est surtout du fait d’un élargissement de son périmètre.

La troisième catégorie de la CFE, la Caisse des Français de l’étranger, qui concernait 3 744 adhérents en 2009, est indispensable. Pour autant, le débat sur son financement ne doit pas éluder la réflexion sur les autres dispositifs d’aide sociale.

Alors que la population française à l’étranger continue d’augmenter de 3 % à 4 % par an, les crédits dévolus aux sociétés françaises de bienfaisance, centres médico-sociaux et autres organismes d’assistance diminuent. Pourtant, nous devrions soutenir ces structures et les encourager à accroître la portée de leur action avec des partenariats privés. Je pense par exemple à une maison de retraite qui a été ouverte au Paraguay.

Les 16 millions d’euros d’aide aux personnes alloués via les comités consulaires pour la protection et l’action sociales ne suffisent pas à couvrir les besoins de nos compatriotes de l’étranger âgés ou handicapés ou confrontés à des situations de détresse ponctuelle. Nous devons y remédier.

Je rappellerai que le coût mensuel moyen est de 258 euros par bénéficiaire, à comparer aux 677 euros mensuels versés au titre de l’allocation de solidarité aux personnes âgées en France.

La réticence à permettre à la solidarité nationale de s’étendre à nos compatriotes de l’étranger est profondément ancrée en métropole, comme en atteste la récente polémique sur la fiscalité des Français de l’étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Il est de notre devoir de faire évoluer les mentalités, afin que nos expatriés soient considérés comme des membres à part entière de la nation.

Nonobstant cette mise en garde, je voterai ce budget, qui va dans la bonne direction, même si je souhaiterais qu’il soit plus important.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, j’aborderai d’abord la gestion du patrimoine immobilier de l’État à l’étranger.

La politique en la matière consiste à financer l’entretien du patrimoine existant – nous en avons besoin – et les acquisitions nouvelles par les produits de cession. Malheureusement, et j’avais déjà soulevé le problème l’an dernier, elle connaît des difficultés dans sa mise en œuvre.

Tout d’abord, l’agence foncière à l’étranger, qui devait gérer l’ensemble du patrimoine immobilier de l’État à l’étranger, n’a toujours pas été mise en place, pas plus que l’embryon de structure destiné à gérer quatre ou cinq des sites.

Plus grave encore, comme vous le savez sans doute, c’est un marché de dupes. En effet, les prévisions de cessions d’immeubles réalisables à l’étranger d’ici à 2012 sont estimées à 368 millions d’euros. Cet argent est intégralement restitué au ministère des affaires étrangères pour les missions que je viens d’indiquer.

Toutefois, en réalité, en tout cas jusqu’à l’an dernier, le ministère des finances gardait l’essentiel des produits de cession. En 2009, pour 70 millions d’euros de cessions, Bercy n’avait restitué que 7 millions d’euros au ministère des affaires étrangères, soit seulement 10 % du total.

Les choses ont peut-être changé depuis ; j’espère que, sous votre conduite énergique, il en sera ainsi, madame le ministre d’État. Toutefois, si la situation perdure, ce sera vraiment, je le répète, un marché de dupes. Aucun d’entre nous ne pourra l’accepter.

En outre, nos ambassades et nos consulats dans certains pays ont un besoin urgent de crédits pour la réfection et l’entretien lourd tant leur dégradation progressive finirait par les faire passer pour des établissements de pays du Tiers-monde !

D’une manière générale, les dispositions de la RGPP applicables au ministère des affaires étrangères sont trop brutales et ont pour conséquence d’amoindrir la qualité des services rendus aux usagers sans que de véritables économies soient réalisées pour autant.

Par exemple, vous allez supprimer 450 équivalents temps plein travaillés, ou ETPT d’ici à 2013, alors que 883 ETPT ont déjà été supprimés entre 2006 et 2008 et 700 ETPT entre 2009 et 2011. Au total, 2 000 ETPT ont été supprimés au ministère des affaires étrangères en sept ans !

Pour un ministère de taille modeste – il compte près de 16 000 fonctionnaires, voire entre 25 000 et 30 000 employés en tout si l’on intègre les contrats locaux –, c’est énorme ! Cela correspond à presque 10 % des effectifs.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

La RGPP n’a que deux ans ; on ne peut pas tout lui faire porter !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Votre ministère l’avait en quelque sorte anticipée, sans doute par vertu. Mais nous voyons que la vertu n’est jamais récompensée ; 2 000 postes ont disparu en sept ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous savons tous que nous sommes, si vous me permettez l’expression, « à l’os ».

Si les consulats fonctionnent, c’est parce que le consul travaille 70 heures par semaine, vient le samedi et le dimanche pour traiter les demandes de visas et de passeports. Cette situation ne tiendra pas ! Le tissu est déjà en train de craquer !

J’avais fondé quelques espoirs dans la coopération européenne en matière consulaire. Chaque année, il en est question. Pourtant, nous ne progressons pas du tout dans cette voie : nous ne voyons aucune réalisation concrète, ou très peu, par exemple la création de quelques postes exotiques, comme à Oulan-Bator.

Pourtant, il serait facile de mettre en place une telle coopération en matière, par exemple, de délivrance des visas Schengen. Or on continue à voir jusqu’à dix guichets côte à côte dans certaines villes, alors que, dans d’autres, on n’en trouve aucun ! Une telle situation ne me satisfait guère. J’aimerais connaître votre opinion sur ce point, madame le ministre d’État.

À mon avis, le dogme de l’universalité du réseau sera remis en cause. Je sais que ce choix a été fait voilà trois ans à peine, mais nous voyons bien que nous n’y arrivons plus. Si les moyens en personnels sont ceux que j’ai indiqués, nous qui sommes les représentants des Français établis hors de France, nous ne pouvons pas nous en réjouir. Nous souhaitons le maintien d’un réseau, car les consulats sont, en quelque sorte, nos mairies, nos préfectures.

Madame le ministre d’État, à la suite de certains de mes collègues, je souhaite vous interroger sur la mise en œuvre du Service européen pour l’action extérieure. Combien de Français sont en passe d’être recrutés ou le sont déjà ? Par ailleurs, le SEAE peut-il être le cadre d’une coopération européenne ?

Je rejoins mes collègues pour faire remarquer que, en matière de protection sociale, la diminution de la dotation à la CFE de 2 millions d'euros pour le financement de la troisième catégorie aidée n’est pas satisfaisante. Nous déposerons un amendement tendant à y remédier.

Je voudrais à présent évoquer la francophonie, au nom de notre collègue Jean Besson.

À la lecture du projet de loi de finances pour 2011, un constat s’impose : la francophonie risque d’être une fois de plus réduite à la portion congrue, et ce malgré tous nos appels pour que l’on porte haut les couleurs de la France et que l’on réponde à une demande forte en la matière.

Je crains que, diluée dans les différentes missions de l’action extérieure de l’État, la francophonie ne reste désespérément la variable d’ajustement de plusieurs ministères. Il ne faudrait pas que la France, le pays du français, devienne paradoxalement le pays le moins volontariste sur le plan de la francophonie !

Ainsi, notre politique restrictive en matière de délivrance des visas pousse les étudiants vers d’autres pays plus ouverts. En valeur absolue, la France attire deux fois moins d’étudiants étrangers que l’Allemagne et trois fois moins que le Royaume-Uni !

Notre pays souffre également de l’absence de véritable programme d’échanges scolaires et de la diminution drastique du nombre des alliances françaises et des instituts culturels, véritable clef de voûte de notre action francophone et culturelle à l’étranger.

Les subventions aux alliances françaises locales passeront de 7, 2 millions d'euros en 2010 à 6, 6 millions d'euros en 2011, ce qui représente une baisse de 10 %, malgré le travail tout à fait remarquable qu’accomplissent partout ces hommes et ces femmes, jusque dans les plus petites villes du monde.

Certes, le président du groupe France-République populaire de Chine se réjouit du travail réalisé par les alliances françaises de Pékin, de Wuhan et de Tianjin, mais il ne peut pas occulter la baisse des subventions de 20 % à 30 % en moyenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je conclurai en citant François Mitterrand, qui qualifiait la francophonie de « merveilleux rempart contre l’uniformisation », exigeant « une volonté puissante et profonde d’être ce que chacun de nous éprouve profondément ».

Nous craignons qu’il n’en soit pas ainsi. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ces crédits.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Madame le ministre d’État, je m’associe tout d’abord aux compliments amplement mérités qui viennent de vous être adressés à la suite de votre nomination au ministère des affaires étrangères et européennes.

Je rappelle que la France est le seul pays à avoir fait le choix d’un dispositif d’enseignement à l’étranger, vecteur primordial de coopération bilatérale pour les communautés françaises expatriées.

Que l’on en juge : quelque 470 établissements scolaires implantés dans 130 pays, 280 000 élèves, dont plus de 100 000 Français, 6 500 titulaires de l’éducation nationale, expatriés ou résidents et 12 000 recrutés locaux représentent un budget annuel de plus de 1 milliard d'euros, dont la moitié relève de la participation de l’État, le reste, c’est-à-dire plus de 500 millions d'euros, étant assumé par les contributions des parents d’élèves.

Madame le ministre d’État, le succès pédagogique du réseau est tel que l’AEFE, sous tutelle de votre ministère, n’arrive plus à satisfaire les demandes d’inscription des familles, faute d’investissements nécessaires pour y répondre. Une entreprise en croissance qui ne peut pas investir court à terme de grands périls.

Le problème est devenu crucial. Un rapport de la mission d’évaluation et de contrôle pointe les très importants besoins de l’AEFE, en particulier pour la mise en conformité de l’immobilier et le financement des charges patronales de pension des fonctionnaires qui lui sont détachés et dont l’État employeur a « refilé » le paiement aux établissements scolaires à l’étranger, de droit public local.

Madame le ministre d’État, je souhaiterais obtenir des réponses concrètes sur deux points spécifiques, le volet immobilier et le recrutement d’enseignants titulaires, même si je suis conscient des contraintes budgétaires de l’État. Je tiens en effet à rappeler l’importance capitale du réseau éducatif français à l’étranger, qui est d’ailleurs le prolongement du réseau national.

La question immobilière est centrale pour l’AEFE, du point de vue tant de ses missions que de son financement. Dans ce débat, deux sujets méritent toute notre attention.

Le premier sujet concerne les nouvelles règles de gestion des domaines de l’État. L’AEFE devra passer des conventions d’occupation des bâtiments avec tous les établissements scolaires en gestion directe, qui sont des services déconcentrés de cette Agence. Celle-ci devra ainsi s’acquitter d’un loyer et provisionner les charges pour entretien.

Je voudrais vous interroger sur un point précis. Comment l’AEFE, qui est déjà structurellement sous-financée, peut-elle faire face à ces charges nouvelles, sachant que les familles qui contribuent déjà beaucoup aux opérations immobilières sont réticentes à apporter leur concours à ce que l’État aurait dû financer depuis quarante ans ?

En l’absence d’une réponse claire, nous pourrions nous poser des questions sur l’inadéquation entre des discours publics volontaristes et le manque de moyens financiers correspondants. Certes, la contrainte budgétaire nous oblige à travailler autrement et à revoir, le cas échéant, l’organisation d’une tutelle unique de l’AEFE, mais aussi à mission interministérielle. L’exemple en a été donné au mois de juillet dernier par la création de l’Institut français au sein du réseau culturel extérieur. Si cette structure relève de votre ministère, une participation significative du ministère de la culture et de la communication est pour la première fois prévue.

N’est-il pas devenu opportun de réfléchir sérieusement au redéploiement des ressources publiques en matière d’offre éducative extérieure ? Des conventions renouvelées avec l’éducation nationale qui préciseraient les orientations stratégiques ne relèvent plus d’une vue de l’esprit ; nous nous inscrivons dans une perspective plus réaliste, avec une mutualisation des moyens ministériels mobilisés.

Le second sujet de préoccupation concerne le recrutement d’enseignants titulaires dans le réseau. C’est évidemment indispensable au maintien d’une offre pédagogique de qualité, force d’attractivité auprès des familles.

Ces personnels sont en constante diminution depuis plusieurs années. Les missions essentielles de coordination et de formation pédagogique qui sont assumées localement par les enseignants titulaires détachés entraînent bel et bien un risque de dégradation pédagogique à l’étranger.

La subvention de l’État au titre du programme 185 a été confirmée, et l’AEFE a inscrit dans son plan d’orientation stratégique l’objectif de maintenir environ 50 % de titulaires enseignants de l’éducation nationale.

Cependant, nous souhaitons avoir l’assurance que l’AEFE pourra continuer à l’avenir à pourvoir ses postes d’enseignants titulaires dans le réseau, en lien avec le ministère de l’éducation nationale. Nous voyons bien le rôle capital, car complémentaire, de ce dernier dans la réalisation du projet pédagogique et éducatif français à l’étranger.

Nos craintes sont pourtant fondées. Les tensions croissantes sur la gestion des personnels du ministère de l’éducation nationale poseront des problèmes dès l’année scolaire 2011-2012.

Madame le ministre d’État, comment convaincrez-vous votre collègue chargé de l’éducation nationale d’envisager le maintien des détachements d’enseignants titulaires dans le réseau de l’AEFE pour conforter l’image de qualité de notre enseignement à l’étranger, source à terme de créations de richesses multiples pour notre pays et nos concitoyens ?

En conclusion, je souhaite me faire l’interprète d’une revendication ancienne de la commission de la culture.

Nous regrettons profondément que l’effort de mise en cohérence de la maquette budgétaire de votre ministère n’ait pas également porté sur les crédits de la francophonie multilatérale, qui continuent de relever du programme 209 de la mission « Aide publique au développement ».

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

J’aurai l’occasion d’y revenir le 3 décembre prochain.

La commission de la culture a plaidé à l’unanimité pour le rattachement des crédits de la francophonie à la mission « Action extérieure de l’État », …

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

… plus précisément au programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde, qui regroupe les contributions de notre pays à un grand nombre d’organisations internationales.

La francophonie ne doit plus s’entendre comme la chasse gardée du ministère de la coopération. Ces temps sont révolus. Madame le ministre d’État, nous vous demandons de le montrer dans la nouvelle architecture du budget. Pouvez-vous nous indiquer si la francophonie sera enfin rattachée à la mission « Action extérieure de l’État » et nous garantir que vous assumerez vous-même directement la pleine responsabilité de notre politique francophone ?

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, les années se suivent et se ressemblent.

Je veux à mon tour vous alerter sur la situation financière extrêmement préoccupante de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

L’adoption de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État pouvait augurer un avenir moins sombre pour notre « diplomatie culturelle et d’influence », dont l’AEFE est l’un des acteurs.

Le projet de loi de finances pour 2011 a rapidement dissipé toute illusion.

Les crédits du programme 185, Diplomatie culturelle et d’influence, sont amputés de 1, 8 % par rapport à l’année dernière, et le projet de loi de programmation des finances prévoit encore des baisses sensibles sur la période 2011-2013. Et si le programme 151 apparaît en progression significative, c’est essentiellement en raison de la hausse du coût de la prise en charge des frais de scolarité des lycéens français à l’étranger.

Plus précisément, si la subvention de l’État à l’AEFE est reconduite à l’identique pour 2011, et même « sanctuarisée » pour la période 2011-2013, son insuffisance demeure manifeste au regard des charges nouvelles qui lui incombent.

L’ampleur, la vigueur et l’excellence de notre réseau font l’unanimité. Le Président de la République appelle régulièrement à son développement. Mais les déclarations incantatoires n’y changent rien. Il s’agit aujourd’hui pour l’État de prendre ses responsabilités.

Au cours de ces dernières années, l’AEFE a vu le nombre d’élèves progresser régulièrement. La tendance s’est accentuée ces trois dernières années, avec un pic de 10 000 élèves supplémentaires l’an dernier.

Une telle hausse des effectifs est positive. Cependant, il faut y apporter un bémol. On constate une prédominance des élèves français au détriment des étrangers, pourtant principaux pourvoyeurs du financement par les droits d’écolage et garants du rayonnement de notre culture.

Cet accroissement devrait donc s’accompagner d’une augmentation des moyens financiers. Mais qu’en est-il en réalité ? La relative stabilité des ressources s’accompagne d’une explosion des charges.

Chaque année, ou presque, nous réserve ainsi sa « nouvelle charge surprise » insuffisamment compensée par l’État.

Je mentionne ainsi le transfert de la compétence immobilière sur les établissements en gestion directe fin 2003, le transfert de la part des cotisations patronales sur les pensions des personnels détachés fin 2007, la prise en charge progressive des frais de scolarité depuis 2007 et le décret qui devrait conduire, au mieux à cinq ans, au transfert de la gestion de la totalité des établissements scolaires français à l’étranger au mois de décembre 2008.

Que nous a réservé la cuvée 2011 ? L’interdiction pour l’AEFE, du fait de l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, de contracter un emprunt sur plus de douze mois. Comme cela a été indiqué à plusieurs reprises, si l’arrêté le confirme, les effets d’une telle disposition seraient désastreux pour l’Agence, qui finance par un emprunt à quinze ans la grande partie de ces opérations immobilières, à savoir la construction de nouveaux établissements et la réhabilitation des anciens.

Je souhaite m’attarder sur la prise en charge des frais de scolarité, la PEC, véritable « cauchemar budgétaire », comme le relève si justement notre collègue Yves Dauge.

Il est inutile d’expliquer une telle mesure, qui, depuis sa mise en place voilà trois ans, revient périodiquement sur le devant de la scène parlementaire

Ce fut une nouvelle fois le cas voilà trois semaines, lors de la remise au Président de la République du rapport de la députée Geneviève Colot et de notre collègue sénatrice Sophie Joissains, qui dressent un bilan extrêmement positif de la PEC, contrairement aux conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances de l’Assemblée nationale, déposées au mois de juin dernier.

La plus remarquable de leurs préconisations réside la cristallisation de la PEC des frais de scolarité de l’année 2007-2008 pour l’ensemble des établissements du réseau.

Cette recommandation aurait donc pour effet, à terme, d’offrir à toutes les familles de lycéens, qu’elles en aient besoin ou non, une partie des frais d’écolage, laissant à leur charge un « ticket modérateur » toujours plus important.

En dénaturant totalement la mesure brandie par Nicolas Sarkozy, cette proposition révèle l’incongruité même de la gratuité. Mais, surtout, elle ne comble aucunement le profond sentiment d’injustice suscité par la PEC et exacerbé encore par ses « dommages collatéraux », notamment le durcissement des critères de bourses, qui est consécutif à la hausse des demandes, elle-même provoquée par l’augmentation des frais d’écolage.

La véritable et indispensable équité, qui fait tant défaut à l’action de l’État ces derniers mois, ne peut résider que dans un retour à une aide à la scolarité fondée exclusivement sur des critères sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

À défaut de suspendre la PEC au profit d’un mécanisme de bourse, il faut en encadrer l’attribution par un double plafonnement.

L’enseignement français à l’étranger est indispensable pour nos compatriotes expatriés et essentiel pour le rayonnement de la France. Notre réseau, extrêmement riche, varié et dynamique, est en danger.

II faut agir, et agir vite, avant qu’il ne soit trop tard !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Béteille

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, dans un rapport que j’avais présenté lors de la XXe Assemblée régionale Europe de la francophonie à Skopje au mois d’octobre 2007, j’avais établi des comparaisons entre les principaux dispositifs de promotion des langues européennes. De ce fait, j’avais également proposé un certain nombre de pistes d’amélioration en matière de promotion de la langue française et la culture francophone à l’étranger.

M’étant rendu dans plusieurs capitales, j’avais rencontré les responsables de plusieurs organismes, comme le British Council ou le Goethe Institut, ce qui m’a amené à appeler de mes vœux plusieurs évolutions.

La première consistait à rationaliser le réseau français, qui est très disparate, et à regrouper sous un label unique les centres culturels, les instituts français, les alliances françaises, afin de renforcer ce qui nous paraissait manquer, c'est-à-dire la visibilité de la présence française culturelle et linguistique à l’étranger.

Sur ce point, la création de l’Institut français par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’Etat me semble aller tout à fait dans le bon sens. Elle doit nous permettre de donner un élan à notre action culturelle extérieure.

Bien entendu, cela ne pourra pas se faire sans que soit mise en œuvre ma deuxième recommandation : le dispositif culturel français à l’étranger doit bénéficier des moyens nécessaires.

À cet égard, j’avais noté en 2007 que le réseau français ne disposait que d’un budget annuel de 133 millions d’euros, contre 250 millions d’euros pour le Goethe Institut.

M. Jean-Louis Carrère s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Béteille

C’est dire la performance réalisée par les personnels. Œuvrant pour la défense de la langue française et la culture à l’étranger, ils parviennent à effectuer un travail presque équivalent à celui de nos amis allemands à partir d’un budget deux fois moindre !

M. Jean-Louis Carrère acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Béteille

Cependant, l’exercice a évidemment ses limites. Certes, et nous devons aujourd’hui l’admettre, la crise est intervenue. Mais il est vraiment nécessaire de faire en sorte que les moyens soient à la hauteur des besoins dans un domaine où le rayonnement de la France est particulièrement en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Béteille

Par ailleurs, dans mes conclusions, j’avais appelé à un rapprochement avec nos partenaires européens, en me fondant sur un constat. Dans un certain nombre de capitales, des projets communs, notamment sur le plan immobilier, avaient été envisagés entre les instituts culturels français et le Goethe Institut, mais tous avaient capoté pour des raisons d’incompréhension, me semble-t-il, entre nos représentants respectifs.

Madame le ministre d’État, de tels partenariats immobiliers avec des pays européens pourraient-ils être développés pour permettre de rassembler et d’utiliser en un même lieu les moyens dont nous disposons les uns et les autres ?

Enfin, j’avais également souhaité un renforcement des synergies entre les différents acteurs francophones.

Même si les moyens dont disposent la Communauté française de Belgique, le Luxembourg ou le Québec sont naturellement plus modestes que ceux de la République française, une coordination avec nos amis francophones peut être utile au renforcement de la visibilité des actions destinées à défendre la langue française dans le monde.

Madame le ministre d’État, de tels dispositifs peuvent-ils être mis en œuvre ? De mon point de vue, ce qui pouvait paraître utile en 2007 devient franchement indispensable en 2010 !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, à la demande de la commission et de nombreux sénateurs, je vous propose de poursuivre nos débats sans suspendre la séance.

Toutefois, je me permets d’inviter les auteurs des amendements à faire preuve de concision, et les différents orateurs à éviter de multiplier les explications de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président. La parole est à Mme le ministre d'État.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes

Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier toutes celles et tous ceux d’entre vous, issus d’ailleurs de différents groupes parlementaires, qui m’ont chaleureusement accueillie.

J’aurais aimé pouvoir profiter de ma première intervention devant le Sénat depuis mon entrée en fonctions au Quai d’Orsay pour aborder les sujets de fond de notre politique étrangère. Ceux d’entre vous qui me connaissent – pour certains, cela fait longtemps – savent bien que cela me passionne.

Cela m’aurait permis de répondre à plusieurs d’entre vous. Nos conceptions, parfois opposées, sont respectables, et chacune, y compris la mienne – ma vision n’est pas forcément identique à celles qui ont été exprimées –, mérite d’être exposée.

J’aurais également pu rectifier des propos qui ont été tenus et qui ne correspondent pas, à mon sens, à la réalité. Je pense notamment aux affirmations sur la prétendue absence de politique de la France sur certains dossiers.

Prenons l’exemple de la rénovation du siège de l’ONU, qui a été évoqué au cours de la discussion. Hier encore, j’étais avec le Président de la République, qui s’exprimait sur ce point. Et, voilà trois jours, j’ai assisté aux discussions qu’il a menées avec le président des États-Unis, la chancelière allemande et le président de Russie à Lisbonne. À cette occasion, je me suis également entretenue avec M. Karzaï, et nous avons évoqué un certain nombre d’aspects du problème afghan.

La politique internationale et multinationale, la coopération bilatérale avec un certain nombre de pays, la francophonie sont des sujets passionnants. Pour ma part, je souhaite pouvoir en discuter régulièrement avec vous, en prenant tout le temps nécessaire.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je serai toujours heureuse de répondre aux invitations de la commission des affaires étrangères, mais aussi, plus largement, du Sénat, afin de pouvoir aborder l’ensemble de ces questions.

Notre débat d’aujourd’hui s’inscrit dans un cadre bien déterminé, celui de la procédure budgétaire. J’ai bien noté que nous étions soumis à des contraintes horaires, monsieur le président.

L’adoption d’un budget est un acte éminemment politique, au sens le plus noble du terme : il s’agit de définir les moyens mis à la disposition des missions que l’on veut mener à bien et des actions que l’on veut engager.

Certes, le projet de budget qui vous est soumis n’a pas été préparé par mes soins. Je ne l’ai pas négocié. Les « lettres plafond » ont été adressées au ministère des affaires étrangères bien avant ma nomination.

Pour autant, et e le dis d’emblée, j’assume et je revendique ma responsabilité. Je suis membre du Gouvernement. À ce titre, ce projet de budget est aujourd’hui le mien.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je suis donc chargée de le défendre devant vous, et je vais m’y employer.

Réseaux diplomatiques et consulaires, situation des Français de l’étranger, contributions aux organisations internationales, diffusion des moyens du rayonnement de la France, telles sont les actions qui s’appuient largement sur les moyens de la mission « Action extérieure de l’État ».

Aujourd’hui – la plupart d’entre vous l’ont indiqué –, force est de reconnaître que des contraintes pèsent sur le budget. J’en évoquerai trois.

Première contrainte, dans un contexte de crise économique et financière, où un certain nombre de pays sont menacés par des spéculateurs qui profitent des difficultés budgétaires des États, des efforts de maîtrise des dépenses publiques s’imposent. À l’évidence, le ministère des affaires étrangères ne saurait y faire exception.

Mais, comme cela a été souligné, voilà longtemps déjà que le ministère a spontanément commencé à réaliser des efforts, aussi bien d’ailleurs – je me tourne vers Mme Cerisier-ben Guiga et MM. Bel et Hue – sous des gouvernements « de droite » que sous des gouvernements « de gauche ». On ne peut donc pas accuser qui que ce soit d’avoir fait preuve d’imprévoyance.

Il faut en tirer les conséquences. Ainsi que j’avais eu l’occasion de l’indiquer lorsque j’exerçais les fonctions de garde des sceaux, on ne peut pas demander des efforts à un ministère sans tenir compte de ceux qu’il a déjà fournis par le passé.

Deuxième contrainte, le budget de la mission « Action extérieure de l’État » doit favoriser la mise en œuvre des réformes engagées, notamment des mesures adoptées dans le cadre de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, en y associant – cela m’a été demandé – les autres ministères intéressés. Je pense par exemple au ministère de l’éducation nationale et au ministère de la culture, qui ont été évoqués par MM. Gouteyron, Dauge et Raffarin.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Troisième contrainte, la présidence française du G8 et du G20 constitue une échéance majeure pour mon ministère, comme elle est une échéance majeure non seulement pour la France, mais également pour tous les pays concernés et, plus généralement, pour la planète entière. L’enjeu, ce sont les équilibres mondiaux et la perspective d’une stabilité internationale.

Dans ce contexte contraint, le présent projet de budget de la mission « Action extérieure de l’État » pour 2011 repose sur un choix de responsabilité et tient compte de la nécessité de faire évoluer un certain nombre de pratiques du ministère.

Le total des crédits s’élève à 2, 96 milliards d’euros, soit une progression de 4, 8 % en crédits d’engagement et de 6 % en crédits de paiement. Surtout, comme l’ont souligné MM. les rapporteurs, l’exigence de responsabilité que j’évoquais se traduit par un triple effort de sincérité, de sécurité et de pérennité.

Effort d’abord de sincérité : les dépenses engagées au titre de nos contributions internationales et des opérations de maintien de la paix font l’objet d’une budgétisation.

Certes, il y a toujours la tentation, et c’est un classique, de sous-évaluer ce type de dépenses ; je l’avais déjà remarqué lorsque j’exerçais les fonctions de ministre de la défense. Mais comme l’a souligné votre éminent rapporteur spécial, Adrien Gouteyron, les montants inscrits au projet de loi de finances pour 2011 correspondent bien aux dépenses que pouvons aujourd’hui anticiper.

Cet effort, qui était indispensable, doit s’accompagner d’une analyse sur nos contributions, qu’elles soient volontaires ou obligatoires. C’est ce que souligne à juste titre le sénateur André Trillard dans le rapport pour avis qu’il a remis au nom de la commission des affaires étrangères.

Effort ensuite en faveur de la sécurité : il est de notre devoir d’œuvrer pour la sécurité d’un certain nombre de territoires avec lesquels nous avons des relations privilégiées ou qui sont essentiels pour la stabilité du monde. En particulier, nous devons éviter que le développement de certains conflits larvés ne favorise le développement de zones grises.

Nous devons donc assumer nos responsabilités en faveur de la paix. De ce point de vue, la coopération militaire de défense et de sécurité est plus que jamais nécessaire. Les crédits d’intervention sont stabilisés à hauteur de 35 millions d’euros. Ils ne sont donc pas touchés par les restrictions ; le contraire eût été irresponsable.

Je remercie le rapporteur pour avis André Trillard d’avoir analysé une grande précision l’utilité de ces crédits pour notre politique nationale comme pour nos intérêts essentiels d’aujourd’hui et de demain.

Plus près de nous, la sécurité, c’est aussi celle de nos implantations à l’étranger, notamment dans un certain nombre de pays où notre personnel diplomatique peut se retrouver dans des situations extrêmement difficiles. Ainsi, 2 millions d’euros sont consacrés à la mise en sécurité d’un certain nombre de nos ambassades par l’installation de moyens de vidéoprotection, de moyens informatiques ou, dans un certain nombre de cas, par le recrutement de personnels supplémentaires.

Bien entendu, en 2011, cet effort portera tout particulièrement sur la zone sahélienne et sur plusieurs pays du Moyen-Orient ou du sous-continent indien.

Effort enfin de pérennité : notre action doit s’inscrire dans la durée.

Ainsi, nous devons attirer dans nos universités les futurs cadres des pays étrangers. Comme je l’ai déjà souvent indiqué lorsque j’occupais d’autres fonctions, c’est évidemment une manière de préparer l’avenir. Ces futurs cadres, par les décisions qu’ils prendront, auront une influence directe à la fois sur nos exportations et sur notre politique.

Quand on a reçu un enseignement dans une langue autre que sa langue maternelle, quand on a été formé dans un pays étranger, quand on y a créé un réseau, on garde des liens tout au long de sa vie. J’y vois là un élément de notre influence.

Les crédits consacrés aux bourses sont donc sanctuarisés à hauteur de 80 millions d’euros. Ce sont ainsi près de 15 000 boursiers, dont 3 000 en Europe et autant en Asie, qui pourront en bénéficier.

C’est un début ; je pense qu’il faut aller plus loin. Comme l’ont souligné plusieurs orateurs, le financement des bourses est, là encore, un élément de notre influence, un aspect de la francophonie.

Un opérateur unique des bourses du ministère des affaires étrangères sera mis en place au cours de l’année 2011. En effet, nous devons mieux gérer l’attribution des bourses.

Cet opérateur unique résulte de la fusion de l’association EGIDE, centre français pour l’accueil et les échanges internationaux, avec les activités internationales du Centre national des œuvres universitaires et scolaires, le CNOUS.

Je veux aussi y associer des entreprises qui, dans un certain nombre de cas, mènent des actions de formation plus ciblées. De fait, nous avons besoin d’une vision globale de tous les efforts qui peuvent être réalisés en la matière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la France, et j’insiste sur ce point, est une puissance de premier rang ! Contrairement à ce que prétendent les « déclinistes » ou les défaitistes, ce n’est pas une puissance de second ordre.

M. le vice-président de la commission applaudit.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Aussi, face au monde qui se crée sous nos yeux, face aux défis de la mondialisation, face à l’émergence de nouvelles puissances, il est important de conserver ce qui fait notre spécificité et ce qui contribue à notre rayonnement dans le monde.

M. Pozzo di Borgo a raison de dire que la France a une voix à faire entendre. C’est pourquoi nous devons être soucieux des moyens qui sont mis au service de notre vision et de notre action.

La présence de notre pays à l’étranger, en Europe ou dans les pays francophones, participe aussi de cette puissance. Nous pouvons également utiliser pour étendre notre capacité d’influence auprès des pays qui leur sont frontaliers, et faire ainsi tache d’huile.

Je nourris donc de hautes ambitions en la matière pour le ministère des affaires étrangères et européennes.

Pour répondre à une question qui m’a été posée, je souhaite prendre en charge directement la politique de francophonie ! Cela se traduira dans la structure du ministère. Je fais effectivement de la francophonie un élément de la présence de la France dans le monde !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Les missions les plus fondamentales de l’État, et celle-ci en est une, monsieur Chevènement, ne peuvent pas être soumises à de banales contraintes de gestion. Soyez-en assurés, pas plus que je ne l’ai fait dans le passé, je ne laisserai des considérations comptables l’emporter sur les intérêts de la France ou sur son influence !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Effectivement, messieurs Raffarin, Chevènement et Yung, j’ai l’intention de me battre pour défendre le budget de ce ministère. Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, j’essaierai d’obtenir des moyens supplémentaires.

Je suis opposée non pas au principe la RGPP, mais à une approche strictement comptable !

Si la RGPP a pour finalité une utilisation optimale de l’argent dont les Français nous confient la gestion en payant leurs impôts, j’y suis favorable. Mais faire de celle-ci un simple instrument destiné à justifier des coupes budgétaires, ce serait oublier les intérêts majeurs de la France et le long terme au profit d’équilibres comptables immédiats !

Certes, il faut associer les deux aspects. Nous avons besoin de moyens, mais nous devons aussi veiller à les gérer au mieux.

En tout état de cause, je n’accepterai pas un décalage excessif entre nos ambitions et les moyens consacrés à la diplomatie française dans toutes ses composantes.

Que ce soit en matière stratégique, économique, scientifique, linguistique et culturelle, nous pouvons avoir des ambitions, car notre pays dispose d’atouts dans la compétition internationale, sans doute encore plus aujourd’hui qu’hier, face au risque de la mondialisation.

Bien entendu, nos moyens resteront insuffisants pour satisfaire nos ambitions, mais nous devons réfléchir ensemble à la manière de mieux les utiliser et les développer.

Madame Garriaud-Maylam, monsieur de Montesquiou, je suis tout à fait disposée à réfléchir à des solutions innovantes nous permettant d’être plus efficaces dans un certain nombre de domaines.

À l’évidence, notre organisation diplomatique doit mieux intégrer la construction européenne et les enjeux d’aujourd’hui, tout en anticipant ceux de demain.

Monsieur Yung, vous m’avez interrogée sur le nombre de Français au sein du nouveau Service européen pour l’action extérieure.

Je vous rappelle que, à compter du 1er décembre prochain, le premier collaborateur de Mme Ashton sera un diplomate français dont la compétence est unanimement reconnue.

En outre, dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois, trois Français seront nommés chefs de délégation de l’Union européenne en pays tiers. Enfin, l’ancien ministre de la défense que je suis se félicite de la présence d’un compatriote à la tête de l’une des directions principales de l’Agence européenne de défense.

Mon ambition, puisque nous devons anticiper, est que le Quai d’Orsay devienne, ou redevienne, l’outil permettant d’avoir une vision stratégique à dix ans, vingt ans, trente ans de ce que doit être l’action de la France et qu’il puisse ainsi mieux servir la politique du Président de la République et de notre pays.

Dès lors, nous devons nous adapter et nous moderniser. Nous devons apprendre à travailler différemment, sur la base des moyens prévus pour l’heure par la mission « Action extérieure de l’État », quand bien même ceux-ci augmenteraient à l’avenir.

La mise en œuvre de ce budget soulève un certain nombre de questions, auxquelles j’entends apporter des réponses concrètes le plus rapidement possible.

S’agissant des effectifs, ceux-ci seront réduits. Ainsi, 160 équivalents temps plein seront supprimés en 2011. Ces réductions prolongent malheureusement celles des exercices précédents.

Comme certains d’entre vous l’ont fait remarquer, dans un certain nombre de cas, une utilisation plus rationnelle des moyens est non seulement possible, mais encore nécessaire.

Monsieur de Montesquiou, une logique d’adéquation aux priorités stratégiques doit être mise en œuvre. Nous devons définir nos priorités et y adapter nos moyens. Vous avez d’ailleurs cité un certain nombre de chiffres. Ce sont les missions qui doivent définir les moyens, et non l’inverse.

Il n’est pas question que les suppressions de postes remettent en cause la qualité du service, en administration centrale comme dans les ambassades et les consulats. Là où les postes sont nécessaires, ils subsisteront. Je rejoins sur ce point les préoccupations exprimées par plusieurs sénateurs, notamment par M. le rapporteur spécial.

Concrètement, une trentaine d’ambassades dites « à mission simplifiée » sont aujourd’hui en service. La question est de savoir si une ambassade peut réellement fonctionner avec onze, voire dix équivalents temps plein.

À ce jour, je ne suis pas en mesure de vous répondre. C’est pourquoi je lancerai un audit dès le début de l’année 2011 pour évaluer la pertinence du modèle. Ne le condamnons pas par avance. Voyons ce qu’il en est.

Je tiens à rassurer Jean-Pierre Raffarin. Mon objectif est de conforter notre présence diplomatique à l’étranger. Je veux aussi valoriser certains ambassadeurs qui n’ont pas d’affectation territoriale ou qui ne sont pas en poste. Quel dommage de ne pas employer leur compétence, leur savoir-faire, leur expertise, qui seraient si utiles, par exemple, pour renforcer la culture diplomatique de nos entreprises ou de nos collectivités territoriales !

S’agissant maintenant des crédits de fonctionnement, qui doivent également faire l’objet d’une réflexion approfondie, ils seront réduits de 5 % cette année, soit une économie non négligeable.

La présidence du G8 et du G20 n’en sera toutefois pas affectée. Comme l’ont d’ailleurs noté MM. Adrien Gouteyron et André Trillard, une enveloppe spécifique nous permet de nous en assurer.

En outre, dans le total des dépenses de fonctionnement, plus du tiers sont liées aux loyers. Cette charge nous oblige aujourd’hui plus que jamais à suivre tout particulièrement notre parc immobilier, afin de voir dans quelle mesure il correspond réellement à nos besoins. Nous devons également réfléchir à l’utilisation d’un certain nombre de locaux.

Je reviens de Berlin, où j’ai passé la journée avec mon homologue et la chancelière Merkel. J’ai pu constater que certains locaux de notre ambassade, notamment les locaux de réception, étaient loués à des entreprises étrangères qui ont besoin de mener des actions à Berlin. Cela permet de diminuer d’autant, voire de prendre en charge entièrement les frais de fonctionnement de l’ambassade. Ce modèle peut être reproduit ailleurs.

Il existe également un problème d’entretien, cela n’est pas contestable. Monsieur Trillard, monsieur Yung, vous avez eu raison de le noter.

Compte tenu des règles établies, se pose aussi un problème de fluidité des ventes. Pour cette raison, j’ai demandé au Quai d’Orsay de prendre contact avec la SOVAFIM.

La Société de valorisation foncière et immobilière, créée sur capitaux publics à l’initiative de Jean-Pierre Raffarin alors qu’il était à Matignon, s’occupe de ventes « prépayées », c’est-à-dire que le vendeur reçoit l’argent avant même que la vente ne soit réalisée, et dispose également d’une clause d’incitation à vendre au-delà de l’estimation.

J’ai fait travailler cette société pour le ministère de la justice, notamment au titre de la cession de prisons. Je désire la faire travailler également pour le ministère des affaires étrangères. La formule a donné de bons résultats ailleurs, pourquoi ne pas y recourir ici ?

Il est vrai, monsieur Yung, que les délais de rattachement des crédits immobiliers sont longs et complexes, vous avez souligné ce décalage effectivement préoccupant. Je demanderai donc à M. Baroin de faire en sorte que ses services soient un peu plus rapides et efficaces. Il est bon de demander aux autres de faire des efforts, mais il n’est pas moins utile d’en exiger de soi-même…

En tout état de cause, la fluctuation des taux de change pose le problème de l’anticipation d’un certain nombre de dépenses. Pour parvenir à une plus juste appréciation de ces charges, j’entends demander le plus rapidement possible à Bercy de trouver une solution, afin de procéder à la nécessaire couverture du risque de change.

D’autres solutions peuvent être trouvées, et j’en ai entendu qui étaient appréciables, notamment de la part de M. Béteille, qui prône une politique de partage ou de mutualisation d’un certain nombre de biens immobiliers. Ces voies sont à explorer. L’important est d’être concret et pragmatique, et de chercher des solutions de bon sens.

Enfin, toujours au titre de la nécessaire adaptation des pratiques, je citerai la prise en charge des frais de scolarité pour les élèves français.

Beaucoup d’intervenants ont évoqué, et à juste titre, notre politique d’enseignement à l’étranger et l’attrait que nous pouvions avoir pour un certain nombre d’étrangers. Je pense notamment à MM. Duvernois, Pozzo di Borgo et Yung, ainsi qu’à Mme Garriaud-Maylam.

Les actions à mener sont de plusieurs ordres.

Le problème des élèves français à l’étranger est particulier. La décision du Président de la République d’instaurer la gratuité de l’enseignement public à l’étranger répond à une exigence d’égalité.

En conséquence, le coût de prise en charge budgétaire des frais de scolarité augmente, la dotation budgétaire correspondante aussi. Ainsi, l’évolution entre 2010 et 2011 correspond à une augmentation de 13 %. Les besoins sont couverts pour l’année prochaine. Cela étant, il faut envisager cette question aussi sous l’angle du moyen et du long terme. Je sais que le Parlement est attentif à ce sujet, nous aurons l’occasion d’en reparler.

Un rapport a été remis par Mmes Colot et Joissains au Président de la République. Dans ce contexte, plusieurs amendements sénatoriaux ont été déposés. Nous y reviendrons plus tard au cours de ce débat.

À cet instant, je veux souligner que le financement public des frais de scolarité ne doit pas conduire à un désengagement total des entreprises et des acteurs économiques, désengagement que je n’admettrai pas.

Pour un certain nombre d’entreprises, en effet, cela représentera une économie, et j’attends que ces dernières montrent aussi qu’elles sont prêtes à participer au rayonnement de la France, singulièrement à l’entretien des bâtiments. J’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs grands chefs d’entreprises ayant des implantations à l’étranger. Je me suis adressée à eux très directement, car je pense que cela relève aussi de leur responsabilité, et de leur intérêt à long terme, que de soutenir l’action menée en la matière par le gouvernement français.

Monsieur le président, je ne voudrais pas abuser de l’attention du Sénat. Je crois en effet savoir qu’une règle a été fixée pour que nous tâchions d’achever rapidement cette discussion.

Permettez-moi cependant de souligner que 2011 sera une année importante pour le ministère des affaires étrangères et européennes.

Le budget prévu pour la mission « Action extérieure de l’État » correspond aux priorités les plus importantes. Il nous oblige aussi à faire des choix, à innover, à proposer des pratiques nouvelles, ce qui n’est pas désagréable : nous sommes dans un monde en mouvement et devons savoir nous remettre en cause.

L’année 2011 sera celle de la mise en œuvre d’outils nouveaux, tel que l’Institut français, qui répondra en partie aux préoccupations de M. Béteille.

Que nous soyons d’accord ou pas, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, dans les discussions qui vont suivre, toujours constructives, je l’espère, à ne pas oublier l’essentiel.

L’essentiel, c’est la France, et la place incontournable qu’elle occupe désormais dans le monde. C’est le rôle de premier plan que nous avons repris grâce à la présidence française de l’Union européenne, grâce à la présidence du G20, et bientôt celle du G8.

Nos valeurs et nos principes nous amènent à élever une voix forte, et une voix entendue dans le monde entier. Notre responsabilité à tous est de faire en sorte que cette voix soit la plus audible possible.

Nous pouvons avoir des divergences, nous ne sommes sans doute plus à l’époque du consensus général sur tous les sujets, mais l’important est la hauteur de vues que nous exigeons de nous-mêmes pour débattre.

Le budget que je vous présente aujourd’hui est un moyen. L’important est que ce moyen nous permette de mettre en œuvre ce que sont nos idées et ce qu’est notre politique. Nous n’avons pas le temps d’aborder l’Afghanistan, l’ONU, l’Afrique, l’Europe ou la piraterie. Je le regrette, car j’ai des choses à dire sur tous ces sujets.

Ces débats, je souhaite que nous les ayons. Ils sont en effet aussi essentiels à l’information de tous qu’aux échanges d’idées. Et nous aurons ces débats dans un état d’esprit qui sera digne des enjeux, car je suis persuadée que nous sommes tous ici attachés à des valeurs qui ont fait la grandeur et l’histoire de notre pays, et à cette valeur qui nous dépasse tous : la France !

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J’espère, dans ce cas, que les orateurs auront à cœur de tenir l’engagement pris de ne pas terminer trop tard dans la soirée. En effet, mes chers collègues, je souhaite vous rendre attentifs au fait que nous innovons, par cette procédure.

J’ai donc bien compris que, dans une heure, tout serait terminé, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Très bien !

Donc, pour faciliter et clarifier le débat, la commission des finances souhaite que les amendements à l’article 67 ainsi que les amendements portant article additionnel après l’article 67 soient examinés en priorité. En effet, l’adoption de certains d’entre eux aurait des conséquences budgétaires dont il nous faudrait tenir compte lors de l’examen des crédits de la mission.

C’est donc par souci de cohérence que j’exprime ce souhait, au nom de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je rappelle que la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est donc l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je suis à la disposition du Sénat pour examiner les amendements dans l’ordre qu’il souhaite. Bien entendu, je ne vois pas d’objection à la priorité demandée par le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La priorité est ordonnée.

J’appelle donc en discussion par priorité l’article 67 et les amendements afférents, ainsi que les amendements portant article additionnel après l’article 67, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission : « Action extérieure de l’État ».

Action extérieure de l’État

I. – Le dernier alinéa du IV de l’article 19 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale est supprimé.

II. – Le premier alinéa de l’article L. 766-9 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Le budget de l’action sanitaire et sociale est financé, pour l’action visée au 1° de l’article L. 766-4-1, à parts égales par la Caisse des Français de l’étranger et par un concours de l’État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-1, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

à parts égales

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Cet amendement concerne la Caisse des Français de l’étranger, dont nous ont parlé tous nos collègues, me semble-t-il, en particulier Jean-Pierre Cantegrit.

Cet amendement a pour objet de revenir à la rédaction initiale de l’article 67, aux termes duquel la prise en charge des adhésions à la Caisse des personnes relevant de la « troisième catégorie » – c’est-à-dire disposant de faibles ressources – est assurée par la Caisse elle-même et par un concours de l’État, sans que soit précisée la répartition.

Je rappelle que l’Assemblée nationale a voté une répartition à parts égales entre la Caisse et l’État, mais n’a pas voté les crédits correspondants. Cela nous a été rappelé tout à l’heure par Jean-Pierre Cantegrit.

La situation est par conséquent intenable, sauf à rechercher les fonds manquants dans des crédits dont on nous a assez dit aujourd’hui à quel point ils étaient serrés.

Parce que donc nous ne disposons pas de « mou », si vous me permettez l’expression, je propose que l’on en revienne au texte initial du Gouvernement, et que l’on prévoie la participation de l’État sans en indiquer le taux.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Le Gouvernement souscrit à la proposition du rapporteur spécial. Il est évident que la protection sociale, en France comme à l’étranger, est pour tous les Français un droit intangible. Les plus modestes de nos compatriotes doivent pouvoir bénéficier de l’adhésion à la Caisse des Français de l’étranger. J’ai entendu un certain nombre de sénateurs évoquer tout à l’heure des solutions difficiles.

Les ressources financières de la Caisse, supérieures à 40 millions d’euros, doivent permettre de soutenir le coût de ces adhésions, relativement limité.

Je rejoins votre rapporteur dans son analyse des grandes difficultés que nous rencontrons avec ce programme, je ne vous l’ai pas caché. Gager sur tel ou tel élément revient à gêner, voire empêcher certaines actions indispensables.

L’avis du Gouvernement est donc favorable, et sans réserve, étant donné que cet amendement traduit le nécessaire équilibre entre notre volonté d’agir et la considération que nous devons porter à l’état actuel des finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Attention aux explications de vote, monsieur le président ! Si vous laissez les uns et les autres s’exprimer, nous ne tiendrons pas notre engagement…

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mon cher collègue, M. Cantegrit réagit en tant que président de la Caisse des Français de l’étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Cantegrit

Je suis en effet président de la Caisse, et j’ai déposé un amendement sur ce point. Puisqu’il est abordé, je réponds, monsieur le président.

Mission nous a été confiée conjointement à Mme Christiane Kammermann et à moi-même, car nous siégeons au conseil d’administration de la Caisse, que je préside.

Jusqu’à maintenant, l’État assurait la totalité du financement de cette troisième catégorie aidée. Lors d’un conseil d’administration extraordinaire, il nous a été demandé de participer. Nous avons donc voté sur un cofinancement.

En tant que président de la Caisse des Français de l’étranger, je suis obligé de traduire ce qui a été dit par le conseil d’administration et ne peux pas manquer à ma mission.

Je confirme donc ici le souhait qui a été exprimé par la Caisse.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Nous serions heureux de revenir à la rédaction initiale de l’article 67, car nous l’avions fait voter à l’origine. Toutefois, nous n’en tirons pas les mêmes conséquences que M. Gouteyron et souhaitons que l’État participe au financement de cette troisième catégorie, pour manifester la solidarité nationale avec les Français de l’étranger.

Par conséquent, nous nous abstiendrons.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Pardonnez-moi, madame Cerisier-ben Guiga, mais M. Gouteyron a bien dit qu’il n’était pas question de remettre en cause la participation de l’État. Il s’agit de ne pas retenir un amendement, voté par l’Assemblée nationale, qui a fixé une participation à parts égales.

Le but ici est bien de revenir à l’intention initiale. Il ne s’agit pas de dire que l’État ne participera pas, il s’agit de ne pas fixer de clé de répartition.

L'amendement est adopté.

L'article 67 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-79 rectifié, présenté par MM. Ferrand, Cantegrit, Cointat, del Picchia, Duvernois, Frassa et Guerry et Mme Kammermann, est ainsi libellé :

Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 452-7 du code de l'éducation, après le mot : « emprunts », sont insérés les mots : « le cas échéant, d'une durée supérieure à douze mois, ».

La parole est à M. André Ferrand.

Debut de section - PermalienPhoto de André Ferrand

Je ne redirai pas en cet instant tout le bien que nous pensons de l’action de l’AEFE, de son développement extraordinaire, car cela a été souligné par de nombreux intervenants. Il s’agit en effet d’un magnifique instrument de rayonnement de notre pays dans le monde.

Il se trouve que l’AEFE est victime de son succès et elle doit, lors de chaque rentrée, accueillir de nombreux nouveaux élèves, français ou étrangers. Parallèlement, elle assure la gestion du parc immobilier qui lui est dévolu par l’État. Et ce parc est souvent en piteux état, y compris sur le plan de la sécurité.

Afin de gérer ces biens immobiliers dans de bonnes conditions, l’AEFE doit nécessairement recourir à l’emprunt. Or le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, qui a récemment été examiné par le Parlement, interdit, dans son article 11, aux ODAC, ces organismes divers d’administration centrale dont fait partie l’AEFE, de souscrire des emprunts d’une durée supérieure à douze mois.

Si cette disposition devait être appliquée, et si l’arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministère chargé du budget, qui établira la liste des organismes soumis à l’article 11, devait inclure l’AEFE, il est clair que cette dernière serait totalement paralysée.

Si l’on veut que l’AEFE poursuive son action, que vous avez tous saluée, mes chers collègues, il est indispensable de lui permettre d’avoir recours à l’emprunt.

À cette fin, nous proposons de modifier le code de l’éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mon cher collègue, cette question a été largement développée dans la discussion générale. Je vous serais reconnaissant d’être plus concis afin que nous puissions tenir notre engagement.

Debut de section - PermalienPhoto de André Ferrand

Dans ces conditions, monsieur le président, je me limiterai à rappeler que nous devons prévoir, dans l’article L. 452-7 du code de l’éducation, que l’AEFE est habilitée à émettre des emprunts, le cas échéant, d’une durée supérieure à douze mois.

Mes chers collègues, il est indispensable d’apporter ce soutien à l’ensemble des acteurs concernés qui, tous, sont conscients de la nécessité d’agir.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je serai très bref, laissant à M. le président de la commission des finances le soin d’apporter toutes les précisions qu’il jugera utiles.

En qualité de membre de la commission des finances, je ne peux que rappeler les principes. En l’occurrence, le principe en vigueur, c’est celui qui a été retenu par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

Avec cet amendement, M. André Ferrand a le mérite de poser un vrai problème, et je ne peux pas être insensible, étant moi-même très attaché à notre réseau d’établissements et au rôle de l’AEFE.

Madame la ministre d’État, je me tourne donc vers vous : comment le Gouvernement envisage-t-il de se sortir de cette situation ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Monsieur Ferrand, je vous rassure d’emblée : il n’est pas question de mettre en cause le fonctionnement de l’AEFE et personne ne prévoit de lui retirer ses responsabilités en matière immobilière.

Chacun le sait, y compris à Bercy, , la politique immobilière ne se finance pas avec des emprunts d’une durée d’un an ; je vous en donne acte.

Dès lors, monsieur le rapporteur spécial, se pose en effet une véritable question de cohérence entre les dispositions de l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et la mission confiée à l’AEFE.

L’article 11 de ce projet de loi de programmation a sa logique ; je la respecte. Il est vrai que, compte tenu de son poids, l’État est meilleur emprunteur que n’importe quel établissement public.

Pour sortir de l’incohérence dans laquelle nous risquons de nous trouver, M. Ferrand propose d’exclure l’AEFE de la liste des établissements soumis à l’article 11.

J’ai été saisie de cette question hier et j’ai contacté sans attendre Matignon afin de chercher le moyen de permettre à l’AEFE de disposer des ressources nécessaires à la bonne exécution de sa politique immobilière, sans recourir à l’emprunt direct.

Tout d’abord, j’ai obtenu du Premier ministre et de Bercy que soient mis à la disposition de l’AEFE, dans le cadre du prochain collectif budgétaire, les 9, 5 millions d'euros nécessaires à la réalisation des trois opérations décidées par le conseil d’administration. Cette question est donc résolue.

J’ai toutefois indiqué au Premier ministre que cette solution ne réglait pas le problème dans la durée ni pour les autres opérations. Il m’a alors donné son accord pour que les ressources nécessaires aux opérations ultérieures soient également apportées à l’AEFE par l’État.

Je précise sans plus attendre, car nous sommes nombreux à savoir ce que sont les difficultés budgétaires, que ces ressources s’ajoutent aux enveloppes actuellement fixées par la mission « Action extérieure de l’État » pour les années 2012 et 2013.

Monsieur Ferrand, ces éléments me paraissent de nature à répondre à vos préoccupations, qui ont été prises en compte par Matignon.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je ne peux vous donner la parole en cet instant, madame Cerisier-ben Guiga, je le regrette.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Je veux évoquer un point d’ordre en qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

Monsieur le président, en ma qualité de rapporteur pour avis, j’ai posé à Mme la ministre d’État cette même question ; elle ne m’a pas répondu.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je ne pouvais pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Elle a attendu que la question lui soit posée par un parlementaire de la majorité pour lui répondre, à lui. Je ne trouve pas cela acceptable dans le cadre de nos débats. Je le regrette, madame la ministre d’État.

Debut de section - PermalienPhoto de André Ferrand

J’ai beaucoup de considération pour Mme la ministre d’État et j’aurais été très heureux de lui être agréable pour notre premier échange. Mais j’ai une trop grande expérience du monde de l’enseignement français à l’étranger, je sais trop les problèmes qu’a affrontés l’AEFE, ses difficultés de financement, pour ne pas prendre à témoin l’ensemble de nos collègues.

Madame la ministre d’État, j’ai le regret de vous dire que je ne souhaite pas retirer mon amendement, et je demande à chacun de se déterminer en son âme et conscience, compte tenu de sa propre expérience.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. André Ferrand a déposé cet amendement en conscience, en qualité de représentant des Français de l’étranger. J’ai pu mesurer à quel point notre collègue vivait un vrai déchirement, lui qui est également membre de la commission des finances.

M. Adrien Gouteyron a rappelé la position de la commission des finances.

Madame la ministre d’État, j’ai été heureux d’entendre votre réponse et les apaisements que vous avez souhaité apporter à M. Ferrand. Je ne doute pas que votre cabinet sera garant du respect de l’orthodoxie financière.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas voter un projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques portant, en son article 11, la prohibition de l’emprunt contracté par des opérateurs de l’État, et y déroger à la première occasion. Certes, l’AEFE a sa spécificité, mais, si nous ouvrons cette fenêtre, nous aurons d’autres exceptions à prendre en compte.

Madame la ministre d’État, l’autorité de la parole de la France, que vous allez porter à travers le monde, dépendra bien sûr de vos convictions, de votre charisme et de votre autorité personnelle, mais aussi de la qualité de gestion de la France. C’est, à mes yeux, incontestable. Or nous ne pouvons pas laisser subsister tous ces points de fuite que représentent les opérateurs de l’État.

Nous avons institué des règles strictes pour les effectifs de la fonction publique d’État ; pourtant, nous avons pu constater, au fil des années, que les opérateurs de l’État créaient des emplois.

Nous avons institué des règles strictes pour encadrer les emprunts de l’État ; pourtant, nous avons vu que les opérateurs de l’État contractaient des emprunts.

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas poursuivre dans cette voie : c’est une fausse piste.

Comme Mme la ministre d’État vient de le rappeler, le Gouvernement est parfaitement conscient des contraintes qui pèsent sur l’AEFE. Il revient à l’État de lui consentir les moyens nécessaires à son action.

Il y a eu un remaniement ministériel, mais c’est le même Premier ministre qui a été reconduit. C’est donc un gouvernement placé sous l’autorité de François Fillon qui a conçu le projet de loi de programmation pluriannuelle ; c’est un autre gouvernement mais dirigé par le même Premier ministre – c’est un avantage –, qui sera chargé de sa mise en œuvre, le présent projet de loi de finances marquant la première transcription de la future loi de programmation.

André Ferrand, pour lequel j’ai la plus grande estime et amitié, ne m’en voudra pas de demander au Sénat de repousser son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le règlement m’interdit de vous donner la parole une seconde fois, mon cher collègue.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je suis sûr que M. André Ferrand prendra dans sa sagesse la bonne décision.

Cet amendement répond à une inquiétude évidente. La mesure qui nous est proposée est-elle adaptée ? Je n’en suis pas persuadé. En tout cas, l’amendement a le mérite de poser un vrai problème.

Les engagements pris par Mme la ministre d’État, au nom du Gouvernement, sont suffisamment forts et fermes ; ils paraîtront au . S’il en était besoin, nous n’hésiterions pas à les lui rappeler.

Il revient à l’État de permettre à l’AEFE d’assumer ses responsabilités immobilières ; nous souhaitons avec beaucoup de fermeté qu’il le fasse.

Pour toutes ces raisons, je demande à André Ferrand de bien vouloir retirer son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous donnons acte à Mme la ministre d’État des efforts sincères qu’elle a faits pour essayer de trouver une solution. Malheureusement, l’expérience politique nous a appris que les promesses d’un jour ne valent pas plus d’une semaine…

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

On ne m’a jamais prise en défaut !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Un jour, vous ne serez plus ministre… Bien sûr, je ne vous le souhaite pas, mais il en est ainsi.

Pour notre part, nous avons le souci d’assurer le financement de l’AEFE à long terme. Or il y a tout de même quelque chose de paradoxal dans ce débat : le Gouvernement supprime partout les dépenses les plus vitales, et là, il nous propose d’ajouter gaillardement de 10 millions à 15 millions d’euros par an. J’avoue que je ne comprends pas la cohérence de l’action budgétaire.

Par conséquent, nous ne suivrons pas la proposition de Mme la ministre d’État, et nous soutiendrons l’amendement n° II-79 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Louis Duvernois, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

J’entends ce que disent les uns et les autres. Leurs propos sont certes raisonnables, mais ils ne tiennent pas compte de la réalité du terrain, et il faut bien que je la rappelle, car cela n’a pas été fait jusqu’ici.

Si nous appliquons stricto sensu l’article 11, l’Agence sera contrainte à une véritable gestion de crise auprès des communautés scolaires concernées, et ce pour une raison très simple : le remboursement des emprunts est assuré, il faut le souligner, par une augmentation des frais de scolarité acceptée par les parents d’élèves français et étrangers.

Nous devons avoir à l’esprit cette dimension lors du vote que nous allons émettre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur Ferrand, je suis au regret de vous dire, au nom de la majorité de la commission des affaires étrangères, que nous ne pourrons pas vous suivre sur cet amendement, car les explications de Mme la ministre d’État sont convaincantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'amendement n° II-79 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après l’article 67.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, ainsi que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du scrutin n° 111 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les amendements n° II-2 rectifié et II-49 rectifié sont identiques.

L'amendement n° II-2 rectifié est présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° II-49 rectifié est présenté par M. del Picchia, Mme Garriaud-Maylam, Mlle Joissains, Mme Kammermann et MM. Cantegrit, Cointat, Duvernois, Ferrand, Frassa et Guerry.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Nonobstant l’octroi de bourses scolaires, la prise en charge par l’État des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l'étranger ne peut excéder un plafond, par établissement, déterminé par décret pris après avis de l'Assemblée des Français de l’étranger et, au plus tard, le 31 juillet 2011.

Le plafond est déterminé selon les frais de scolarité pratiqués l’année de référence fixée par le décret ; il est ajusté annuellement par arrêté, pour tenir compte notamment des variations des changes et des conditions locales d'existence.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-2 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je présenterai rapidement cet amendement, que nous commençons à bien connaître, car il est récurrent, du moins depuis trois ans.

Je crois avoir été le premier à soulever ce problème, qui en est un, malgré tout. J’ai même déposé cette année-là un amendement, qui ressemblait beaucoup à celui que défendront nos collègues sur ces travées. Mais je me suis vite aperçu que cette suggestion ne pouvait pas être retenue, et que les difficultés d’application risquaient d’être considérables.

Notre proposition, au contraire, est parfaitement opérante. Elle consiste à plafonner la prise en charge des frais de scolarité par établissement, avec l’année 2007 comme référence. Il est vrai que nous ne tenons pas compte des revenus des parents, parce que nous ne savons pas sur quelles bases les apprécier.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je sais que cet amendement est conforme au contenu du rapport Colot-Joissains, qui formule une préconisation dans ce sens, et j’espère vivement que le Sénat acceptera de l’adopter, comme un certain nombre d’autres suggestions qui relèvent de la même inspiration.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Robert del Picchia, pour présenter l'amendement n° II-49 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Cet amendement est défendu, puisqu’il est identique au précédent. Je signale que tous les sénateurs représentant les Français de l’étranger appartenant au groupe UMP l’ont signé.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-81, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga et Lepage et M. Yung, est ainsi libellé :

Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Nonobstant l'octroi de bourses à caractère social, la prise en charge par l'État des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger ne peut excéder un plafond fixé par décret, pris après avis de l'Assemblée des Français de l'étranger. Ce décret détermine également les conditions dans lesquelles le niveau de revenu des familles est pris en compte pour l'obtention de cette prise en charge.

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Cet amendement n’est pas du tout semblable aux précédents, car il s’agit précisément de plafonner la prise en charge en fonction du niveau de revenu des familles.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Ma chère collègue, votre amendement n’est pas identique aux deux autres, il est même incompatible avec eux, et c’est bien la raison pour laquelle il y a discussion commune.

Veuillez poursuivre, madame Cerisier-ben Guiga.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Je tenais à bien souligner le caractère différent de notre amendement.

Je m’étonne que l’on puisse vérifier les revenus des familles de plus de 20 000 boursiers, mais que ce soit impossible pour 8 000 demandeurs potentiels de prise en charge. Il faudrait savoir…

Nous estimons par conséquent que ce refus de vérifier le niveau de revenu des familles pour la prise en charge correspond à un choix que je pourrais qualifier de philosophique, mais qui est en réalité idéologique ! Nous y sommes hostiles.

Nous souhaitons, je le répète, que cette prise en charge soit plafonnée en fonction du revenu des familles.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La commission ne peut pas être favorable à l’amendement n° II-81, puisque, comme l’a dit Mme Cerisier-ben Guiga elle-même, il est différent de l’amendement n° II-2 rectifié que j’ai soutenu, au nom de la commission des finances.

Si, à certains égards, nos amendements respectifs tendent aux mêmes fins, ils n’emploient pas les mêmes moyens.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Le Gouvernement est plutôt défavorable à l’amendement n° II-81, et lui préfère les amendements identiques n° II-2 rectifié et II-49 rectifié, qui semblent aller plus loin et être d’une plus grande précision.

Le dispositif envisagé nous permettra de garantir la pérennité de la prise en charge des frais de scolarité des lycéens français qui sont scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l’étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je voterai l’amendement n° II-81 qui a été déposé par nos collègues socialistes représentants les Français établis hors de France : Mme Cerisier-ben Guiga, M. Yung, et Mme Lepage. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est une disposition visant à prendre en compte la réalité des difficultés rencontrées par les familles.

Je regrette d’être obligé de le dire à M. le rapporteur spécial, mais l’amendement n° II-81 est une mesure de justice, contrairement au sien, qui permet unilatéralement aux familles de percevoir une aide ou d’obtenir le financement des frais de scolarité, alors que ce n’est pas justifié pour toutes les familles, du fait du niveau de revenu de certaines d’entre elles.

Il ne me semble donc pas pertinent d’opposer les amendements en affirmant que l’un va plus loin que l’autre. Non, chers collègues : nous avons un amendement de justice, en l’occurrence celui qui est porté par Mme Cerisier-ben Guiga, et, en face, un amendement d’injustice, celui que soutient le Gouvernement !

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 67, et l'amendement n° II-81 n'a plus d'objet.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-51 est présenté par M. del Picchia, Mme Garriaud-Maylam, Mlle Joissains, Mme Kammermann et MM. Cantegrit, Cointat, Duvernois, Ferrand, Frassa et Guerry.

L'amendement n° II-72 est présenté par M. Trillard, au nom de la commission des affaires étrangères.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement joint au projet de loi de finances de l’année une annexe faisant apparaître au sein des crédits destinés à l’aide à la scolarité des élèves français dans les établissements d’enseignement français à l’étranger la part affectée à la prise en charge des frais de scolarité et la part affectée aux bourses scolaires.

La parole est à M. Robert del Picchia, pour présenter l’amendement n° II-51.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Parce que voulons connaître précisément le coût et de la prise en charge et des bourses, et que nous souhaitons avoir une possibilité de contrôle et de suivi sur la destination des crédits que nous votons, nous demandons au Gouvernement de joindre chaque année au projet de loi de finances une annexe dont l’objet est précisé dans cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-72.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Les membres de la commission des affaires étrangères ont déposé le même amendement que M. del Picchia et ses collègues, car, tout comme eux, ils tiennent à cette opération de vérité de la comptabilité publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La commission des finances ne peut qu’être sensible à cette volonté de clarification, mais le moyen employé, à savoir une annexe au projet de loi de finances de l’année, lui semble quelque peu disproportionné.

Je souhaiterais savoir ce qu’en pense le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je suis pour la transparence, qui, seule, permet de se déterminer sur des bases claires, quelle que soit par ailleurs la position que l’on adopte.

Il me semble dès lors que cet instrument de pilotage, qui sera utile à tous, constituera un véritable progrès.

En conséquence, l'avis est favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

S’il s’agissait seulement d’un amendement de transparence, nous voterions pour ! Mais il s’agit, en réalité, de faire baisser le coût de la PEC, la prise en charge, en la transformant en une bourse différentielle pour les élèves boursiers. (Mme la ministre d'État proteste.)

Madame la ministre d'État, la PEC sera attribuée d’abord aux élèves boursiers de seconde, première et terminale et, éventuellement, si ce n’est pas une bourse complète, on ajoutera la PEC, ce qui permettra de diminuer le coût de la prise en charge et de faire que les demandes de bourse augmentent, ce qui est bien l’objectif ici !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Absolument pas ! Il ne s’agit que d’un document !

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 67.

L'amendement n° II-47, présenté par M. Dauge, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :

Après l’article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard le 30 juin 2011, un rapport sur les conséquences de la prise en charge par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger des contributions employeur pour pensions civiles des personnels titulaires de l’État qui lui sont détachés. Ce rapport évalue la capacité de l’agence à supporter la croissance de cette dépense sur le long terme, en tenant compte du niveau des moyens versés par l’État au titre de la compensation de cette prise en charge.

La parole est à M. Yves Dauge, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

Cet amendement concerne le transfert à l’Agence des cotisations patronales sur les pensions des personnels civils détachés par l’État. Il se trouve que le différentiel entre cette charge, qui évolue de manière très dynamique, et le montant de la compensation que l’État a consenti une fois pour toutes, au moment du transfert, risque de s’accroître.

Pour nous aider à faire la lumière sur la capacité de l’Agence à supporter cette charge supplémentaire, nous demandons que le Gouvernement remette un rapport au Parlement avant le 30 juin 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La compensation n’est pas intégrale, et la charge est effectivement lourde pour le budget du ministère des affaires étrangères et européennes. Nous devons donc effectivement y voir plus clair.

En conséquence, la commission des finances approuve l’initiative de la commission de la culture et émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je distinguerai le fond et la forme.

Sur le fond, j’approuve la démarche de la commission de la culture, et je pense en effet qu’il convient d’aborder cette question.

En revanche, sur la forme, ne serait-il pas possible de recourir à un moyen d’information moins lourd et moins formel que le rapport ?

Il suffirait peut-être que je m’engage à vous fournir chaque année tous les éléments d’information dont vous avez besoin, monsieur le rapporteur pour avis...

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Yves Dauge, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

La commission a été très ferme sur cette demande d’information, madame la ministre d'État. La situation est très préoccupante et ne peut pas être laissée en l’état.

Cela étant, le mot « rapport » ne doit effrayer personne. Les éléments d’information que nous sollicitons peuvent être rassemblés rapidement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Pourquoi ne pas parler plutôt d’une « communication » ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Très bonne idée !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le président de la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Le but de la commission de la culture à travers cet amendement n’est pas d’alourdir la tâche de l’AEFE et du ministère, mais simplement d’obtenir les éléments d’information dont elle a besoin.

Le terme « rapport » ne doit pas faire peur, nous sommes d’accord. Ce que nous attendons, et le compte rendu de nos débats pourra l’attester, c’est un rapport précis mais léger, qui fournira à la représentation nationale les moyens de comprendre les évolutions de cette dépense supportée par l’AEFE, rien de plus.

Sous cette réserve, il me semble que vous pouvez accepter notre demande, madame la ministre d'État.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je suis prête à faire une communication détaillée, pour reprendre la suggestion de M. Carrère.

Je sais, pour avoir défendu un certain nombre de textes dans cette maison, que, lorsque le Sénat sollicite un rapport, il attend généralement un document relativement formel, car le terme recouvre un sens précis.

Dès lors, en lieu et place du rapport proposé par M. Dauge, nous pourrions peut-être prévoir une communication annuelle devant la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Dauge

Je ne verrais pas d’inconvénient à ce que l’on remplace le terme de « rapport » par celui de « communication », mais il faudrait que le président de la commission de la culture en soit d’accord, car l’amendement a été déposé au nom de cette dernière.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Vous pouvez faire le choix de retirer cet amendement, mon cher collègue. En revanche, je suis navré, mais une loi de finances ne saurait comporter de demande de « communication ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Pour sortir de l’impasse, et compte tenu de l’heure, je suggère, madame la ministre d'État, que nous votions cet amendement. Nous verrons ensuite sous quelle forme le Gouvernement pourra informer la commission.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je souscris à votre proposition, monsieur le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Les travaux préparatoires attesteront les raisons pour lesquelles nous nous prononçons sur l’amendement ainsi rédigé.

Je mets aux voix l'amendement n° II-47.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 67.

Nous allons procéder à l’examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action extérieure de l’État

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont titre 2

548 022 669

548 022 669

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont titre 2

88 091 824

88 091 824

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont titre 2

190 896 508

190 896 508

Présidence française du G20 et du G8

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-50, présenté par M. del Picchia, Mme Garriaud-Maylam, Mlle Joissains, Mme Kammermann et MM. Cointat, Duvernois, Frassa et Guerry, est ainsi libellé :

I. - Créer le programme : Accès des élèves français aux établissements d’enseignement français à l’étranger

II. - En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Présidence française du G20 et du G8

Accès des élèves français aux établissements d’enseignement français à l’étranger

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Robert del Picchia.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Un amendement de repli ayant déjà été adopté, nous allons retirer celui-ci.

Je précise toutefois que, outre la division du programme en deux actions, la création de ce programme aurait aussi été l’occasion de changer l’intitulé de l’action n° 2, «Accès des élèves français au réseau AEFE », qui est trop restrictif. Étant donné que nous n’avons pas le droit de changer l’intitulé d’une action par amendement, il faudra, à l’avenir, que le Gouvernement procède à cette modification.

Je retire l’amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-50 est retiré.

L'amendement n° II-80, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga et Lepage et M. Yung, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2

Diplomatie culturelle et d'influenceDont Titre 2

Français à l'étranger et affaires consulairesDont Titre 2

Présidence française du G20 et du G8

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Cet amendement vise à abonder de 10 millions d’euros le budget de l’AEFE. C’est en effet la somme prévisionnelle qui manque pour couvrir les dépenses liées aux pensions civiles, qui ont été injustement transférées à l’AEFE.

Pour que l’AEFE puisse maintenir son équilibre budgétaire, nous proposons de prélever cette somme sur les crédits alloués au programme lié à la présidence française du G20 et du G8, qui a été créé cette année dans la nomenclature budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La commission des finances n’est pas favorable à cet amendement.

Nous avons déjà eu l’occasion de préciser tout à l’heure que les crédits alloués à la présidence française du G20 et du G8 étaient calibrés au plus juste, et que nous ne pouvions pas y toucher.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Au moment où la France s’apprête à prendre la présidence du G8 et du G20, au service de la gouvernance mondiale, ce serait un très mauvais signal que de diminuer les crédits destinés à la préparation de ces sommets, crédits dont M. le rapporteur spécial vient de préciser à juste titre qu’ils avaient été calculés au plus juste.

En conséquence, l'avis est défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° II-82, présenté par M. Yung et Mme Lepage, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

Dont Titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Présidence française du G20 et du G8

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Il s’agit de rétablir le financement par l'État d'une partie du coût de la troisième catégorie aidée des adhérents à la Caisse des Français de l'étranger.

Le projet de loi de finances initial prévoit de réduire de 2, 5 millions à 500 000 euros la subvention de l'État.

Nous continuons à penser qu’il s’agit d’une responsabilité de solidarité collective, et nous demandons que les 2 millions d’euros qui manquent soient rétablis.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-83, présenté par Mme Lepage et M. Yung, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

Dont Titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Présidence française du G20 et du G8

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Claudine Lepage.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Il s’agit d’un amendement de repli, qui concerne également la troisième catégorie aidée des adhérents à la Caisse des Français de l’étranger.

L’Assemblée nationale a adopté un amendement à l’article 67 prévoyant que l’aide à cette catégorie sera prise en charge à parité par la Caisse des Français de l’étranger.

Or, bien que cet amendement ait été adopté, l’amendement de conséquence prévoyant un tel transfert de crédits a été rejeté par les députés. Il importe donc aujourd’hui que le transfert de crédits vers le programme 151 soit appliqué.

Les crédits d’aide sociale sont déjà dramatiquement et honteusement insuffisants, ils n’ont pas à pâtir de ce changement de répartition de la charge.

Dans ces conditions, je vous demande de voter cet amendement, chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Les amendements n° II- 82 et II- 83, et l'amendement n° II-77, qui nous sera présenté tout à l’heure, vont dans le même sens, même si le transfert de crédits n’est pas du même montant. J’ai déjà eu l’occasion de me prononcer.

J’aurais voulu aller dans le sens souhaité par Jean-Pierre Cantegrit et j’ai bien cherché. Si j’avais pensé pouvoir trouver les crédits dans le budget tel qu’il est, je l’aurais proposé.

Par conséquent, la commission ne peut qu’être défavorable à ces amendements, qui visent à transférer des crédits prélevés sur les dépenses d’informatique, par exemple, ou sur d’autres dépenses, respectivement pour 2 millions d’euros, pour 750 000 euros ou pour 700 000 euros.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Le Gouvernement émet également un avis défavorable, monsieur le président.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-77, présenté par M. Cantegrit et Mme Kammermann, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le mondeDont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influenceDont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulairesDont Titre 2

Présidence française du G20 et du G8

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Cantegrit

Compte tenu des votes précédemment intervenus, cet amendement a perdu son objet et je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-77 est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de cette mission.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Je remercie chacun d’entre vous, mes chers collègues, d’avoir quasiment tenu l’engagement pris, ainsi que le personnel, qui a accepté que nous poursuivions la séance sans désemparer jusqu’à cette heure tardive.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur le président, lors du scrutin n° 110 sur la déclaration de politique générale du Gouvernement, M. Philippe Paul, qui souhaitait voter pour, figure à la suite d’une erreur matérielle parmi ceux qui n’ont pas pris part au vote.

Je vous demande, monsieur le président, de bien vouloir en prendre acte.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur Trillard. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 26 novembre 2010, à neuf heures trente, à quatorze heures trente, le soir et, éventuellement, la nuit :

- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (110, 2010-2011).

Examen des missions :

Défense (+ article 69)

MM. François Trucy, Jean-Pierre Masseret et Charles Guené, rapporteurs spéciaux (rapport n° 111, annexe n° 8) ;

M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense – Environnement et soutien de la politique de défense – avis n° 112, tome IV) ;

MM. Xavier Pintat et Daniel Reiner, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense – Équipement des forces – avis n° 112, tome V) ;

MM. André Dulait et Jean-Louis Carrère, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Défense - Préparation et emploi des forces - avis n° 112, tome VI).

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation (+ article 68 ter).

M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 5) ;

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 113, tome I).

Écologie, développement et aménagement durables (+ articles 70, 71, 71 bis, 72, 73 et 73 bis).

Budget annexe : contrôle et exploitation aériens.

Compte spécial : contrôle de la circulation et du stationnement routiers.

Compte spécial : services nationaux de transport conventionnés de voyageurs.

Compte spécial : avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Gérard Miquel, François Fortassin et Mme Fabienne Keller, rapporteurs spéciaux (rapport n° 111, annexe n° 10) ;

M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (avis n° 114, tome IV) ;

MM. Bruno Sido, Jean-François Le Grand, Francis Grignon, Roland Courteau et Charles Revet, rapporteurs pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 115, tome II).

Solidarité, insertion et égalité des chances (+ articles 87, 87 bis et 87 ter)

MM. Auguste Cazalet et Albéric de Montgolfier, rapporteurs spéciaux (rapport n° 111, annexe n° 29) ;

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 113, tome VI).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt et une heures trente-cinq.