Intervention de Louis Duvernois

Réunion du 25 novembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Action extérieure de l'état

Photo de Louis DuvernoisLouis Duvernois :

Madame le ministre d’État, je m’associe tout d’abord aux compliments amplement mérités qui viennent de vous être adressés à la suite de votre nomination au ministère des affaires étrangères et européennes.

Je rappelle que la France est le seul pays à avoir fait le choix d’un dispositif d’enseignement à l’étranger, vecteur primordial de coopération bilatérale pour les communautés françaises expatriées.

Que l’on en juge : quelque 470 établissements scolaires implantés dans 130 pays, 280 000 élèves, dont plus de 100 000 Français, 6 500 titulaires de l’éducation nationale, expatriés ou résidents et 12 000 recrutés locaux représentent un budget annuel de plus de 1 milliard d'euros, dont la moitié relève de la participation de l’État, le reste, c’est-à-dire plus de 500 millions d'euros, étant assumé par les contributions des parents d’élèves.

Madame le ministre d’État, le succès pédagogique du réseau est tel que l’AEFE, sous tutelle de votre ministère, n’arrive plus à satisfaire les demandes d’inscription des familles, faute d’investissements nécessaires pour y répondre. Une entreprise en croissance qui ne peut pas investir court à terme de grands périls.

Le problème est devenu crucial. Un rapport de la mission d’évaluation et de contrôle pointe les très importants besoins de l’AEFE, en particulier pour la mise en conformité de l’immobilier et le financement des charges patronales de pension des fonctionnaires qui lui sont détachés et dont l’État employeur a « refilé » le paiement aux établissements scolaires à l’étranger, de droit public local.

Madame le ministre d’État, je souhaiterais obtenir des réponses concrètes sur deux points spécifiques, le volet immobilier et le recrutement d’enseignants titulaires, même si je suis conscient des contraintes budgétaires de l’État. Je tiens en effet à rappeler l’importance capitale du réseau éducatif français à l’étranger, qui est d’ailleurs le prolongement du réseau national.

La question immobilière est centrale pour l’AEFE, du point de vue tant de ses missions que de son financement. Dans ce débat, deux sujets méritent toute notre attention.

Le premier sujet concerne les nouvelles règles de gestion des domaines de l’État. L’AEFE devra passer des conventions d’occupation des bâtiments avec tous les établissements scolaires en gestion directe, qui sont des services déconcentrés de cette Agence. Celle-ci devra ainsi s’acquitter d’un loyer et provisionner les charges pour entretien.

Je voudrais vous interroger sur un point précis. Comment l’AEFE, qui est déjà structurellement sous-financée, peut-elle faire face à ces charges nouvelles, sachant que les familles qui contribuent déjà beaucoup aux opérations immobilières sont réticentes à apporter leur concours à ce que l’État aurait dû financer depuis quarante ans ?

En l’absence d’une réponse claire, nous pourrions nous poser des questions sur l’inadéquation entre des discours publics volontaristes et le manque de moyens financiers correspondants. Certes, la contrainte budgétaire nous oblige à travailler autrement et à revoir, le cas échéant, l’organisation d’une tutelle unique de l’AEFE, mais aussi à mission interministérielle. L’exemple en a été donné au mois de juillet dernier par la création de l’Institut français au sein du réseau culturel extérieur. Si cette structure relève de votre ministère, une participation significative du ministère de la culture et de la communication est pour la première fois prévue.

N’est-il pas devenu opportun de réfléchir sérieusement au redéploiement des ressources publiques en matière d’offre éducative extérieure ? Des conventions renouvelées avec l’éducation nationale qui préciseraient les orientations stratégiques ne relèvent plus d’une vue de l’esprit ; nous nous inscrivons dans une perspective plus réaliste, avec une mutualisation des moyens ministériels mobilisés.

Le second sujet de préoccupation concerne le recrutement d’enseignants titulaires dans le réseau. C’est évidemment indispensable au maintien d’une offre pédagogique de qualité, force d’attractivité auprès des familles.

Ces personnels sont en constante diminution depuis plusieurs années. Les missions essentielles de coordination et de formation pédagogique qui sont assumées localement par les enseignants titulaires détachés entraînent bel et bien un risque de dégradation pédagogique à l’étranger.

La subvention de l’État au titre du programme 185 a été confirmée, et l’AEFE a inscrit dans son plan d’orientation stratégique l’objectif de maintenir environ 50 % de titulaires enseignants de l’éducation nationale.

Cependant, nous souhaitons avoir l’assurance que l’AEFE pourra continuer à l’avenir à pourvoir ses postes d’enseignants titulaires dans le réseau, en lien avec le ministère de l’éducation nationale. Nous voyons bien le rôle capital, car complémentaire, de ce dernier dans la réalisation du projet pédagogique et éducatif français à l’étranger.

Nos craintes sont pourtant fondées. Les tensions croissantes sur la gestion des personnels du ministère de l’éducation nationale poseront des problèmes dès l’année scolaire 2011-2012.

Madame le ministre d’État, comment convaincrez-vous votre collègue chargé de l’éducation nationale d’envisager le maintien des détachements d’enseignants titulaires dans le réseau de l’AEFE pour conforter l’image de qualité de notre enseignement à l’étranger, source à terme de créations de richesses multiples pour notre pays et nos concitoyens ?

En conclusion, je souhaite me faire l’interprète d’une revendication ancienne de la commission de la culture.

Nous regrettons profondément que l’effort de mise en cohérence de la maquette budgétaire de votre ministère n’ait pas également porté sur les crédits de la francophonie multilatérale, qui continuent de relever du programme 209 de la mission « Aide publique au développement ».

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