Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, les années se suivent et se ressemblent.
Je veux à mon tour vous alerter sur la situation financière extrêmement préoccupante de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
L’adoption de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État pouvait augurer un avenir moins sombre pour notre « diplomatie culturelle et d’influence », dont l’AEFE est l’un des acteurs.
Le projet de loi de finances pour 2011 a rapidement dissipé toute illusion.
Les crédits du programme 185, Diplomatie culturelle et d’influence, sont amputés de 1, 8 % par rapport à l’année dernière, et le projet de loi de programmation des finances prévoit encore des baisses sensibles sur la période 2011-2013. Et si le programme 151 apparaît en progression significative, c’est essentiellement en raison de la hausse du coût de la prise en charge des frais de scolarité des lycéens français à l’étranger.
Plus précisément, si la subvention de l’État à l’AEFE est reconduite à l’identique pour 2011, et même « sanctuarisée » pour la période 2011-2013, son insuffisance demeure manifeste au regard des charges nouvelles qui lui incombent.
L’ampleur, la vigueur et l’excellence de notre réseau font l’unanimité. Le Président de la République appelle régulièrement à son développement. Mais les déclarations incantatoires n’y changent rien. Il s’agit aujourd’hui pour l’État de prendre ses responsabilités.
Au cours de ces dernières années, l’AEFE a vu le nombre d’élèves progresser régulièrement. La tendance s’est accentuée ces trois dernières années, avec un pic de 10 000 élèves supplémentaires l’an dernier.
Une telle hausse des effectifs est positive. Cependant, il faut y apporter un bémol. On constate une prédominance des élèves français au détriment des étrangers, pourtant principaux pourvoyeurs du financement par les droits d’écolage et garants du rayonnement de notre culture.
Cet accroissement devrait donc s’accompagner d’une augmentation des moyens financiers. Mais qu’en est-il en réalité ? La relative stabilité des ressources s’accompagne d’une explosion des charges.
Chaque année, ou presque, nous réserve ainsi sa « nouvelle charge surprise » insuffisamment compensée par l’État.
Je mentionne ainsi le transfert de la compétence immobilière sur les établissements en gestion directe fin 2003, le transfert de la part des cotisations patronales sur les pensions des personnels détachés fin 2007, la prise en charge progressive des frais de scolarité depuis 2007 et le décret qui devrait conduire, au mieux à cinq ans, au transfert de la gestion de la totalité des établissements scolaires français à l’étranger au mois de décembre 2008.
Que nous a réservé la cuvée 2011 ? L’interdiction pour l’AEFE, du fait de l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, de contracter un emprunt sur plus de douze mois. Comme cela a été indiqué à plusieurs reprises, si l’arrêté le confirme, les effets d’une telle disposition seraient désastreux pour l’Agence, qui finance par un emprunt à quinze ans la grande partie de ces opérations immobilières, à savoir la construction de nouveaux établissements et la réhabilitation des anciens.
Je souhaite m’attarder sur la prise en charge des frais de scolarité, la PEC, véritable « cauchemar budgétaire », comme le relève si justement notre collègue Yves Dauge.
Il est inutile d’expliquer une telle mesure, qui, depuis sa mise en place voilà trois ans, revient périodiquement sur le devant de la scène parlementaire
Ce fut une nouvelle fois le cas voilà trois semaines, lors de la remise au Président de la République du rapport de la députée Geneviève Colot et de notre collègue sénatrice Sophie Joissains, qui dressent un bilan extrêmement positif de la PEC, contrairement aux conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances de l’Assemblée nationale, déposées au mois de juin dernier.
La plus remarquable de leurs préconisations réside la cristallisation de la PEC des frais de scolarité de l’année 2007-2008 pour l’ensemble des établissements du réseau.
Cette recommandation aurait donc pour effet, à terme, d’offrir à toutes les familles de lycéens, qu’elles en aient besoin ou non, une partie des frais d’écolage, laissant à leur charge un « ticket modérateur » toujours plus important.
En dénaturant totalement la mesure brandie par Nicolas Sarkozy, cette proposition révèle l’incongruité même de la gratuité. Mais, surtout, elle ne comble aucunement le profond sentiment d’injustice suscité par la PEC et exacerbé encore par ses « dommages collatéraux », notamment le durcissement des critères de bourses, qui est consécutif à la hausse des demandes, elle-même provoquée par l’augmentation des frais d’écolage.
La véritable et indispensable équité, qui fait tant défaut à l’action de l’État ces derniers mois, ne peut résider que dans un retour à une aide à la scolarité fondée exclusivement sur des critères sociaux.