Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 7 novembre 2005 à 21h45
Loi d'orientation agricole — Articles additionnels avant l'article 14

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

Il est très important d'établir une liste des coûts de production des produits agricoles et d'empêcher la vente à perte, qui constitue un véritable drame pour nos agriculteurs.

Nous avons maintes fois demandé qu'un prix rémunérateur correspondant au coût de revient - le coût de production plus la rémunération du travail familial, les capitaux propres et le foncier - soit garanti.

En effet, le prix des produits agricoles est de plus en plus déconnecté du coût du travail, si bien que, dans les secteurs les plus fragiles, comme celui des fruits et légumes, nous assistons au développement d'une main-d'oeuvre sous-payée.

A ce sujet, permettez-moi de vous donner l'exemple des travailleurs agricoles étrangers saisonniers sous contrat avec l'Office des migrations internationales, l'OMI, plus communément appelés « saisonniers sous contrat OMI », dont le statut est précaire.

Ces travailleurs immigrés sont employés massivement depuis plus de trente ans, en particulier dans le secteur des fruits et des légumes. Ils subissent abus et injustices, en raison de la précarité de leur statut, d'une méconnaissance de leurs droits et de leur extrême dépendance vis-à-vis des employeurs.

Monsieur le ministre, mon collègue et ami M. Robert Bret avait attiré l'attention de votre prédécesseur sur la nécessité de lutter contre les abus de certains employeurs et de donner à ces salariés des moyens légaux de protection.

Or les statistiques de l'OMI montrent que le nombre de saisonniers agricoles ne cesse de croître : il est ainsi passé de 7 187 en 1999 à 10 403 en 2001 ! En outre, plus de la moitié de ces travailleurs sont localisés dans le département des Bouches-du-Rhône.

Votre prédécesseur avait précisé que les saisonniers français ou étrangers devaient bénéficier d'une égalité de traitement avec les travailleurs permanents en matière de rémunération et de conditions de travail.

Le respect de cette obligation conditionnait l'octroi des autorisations, conformément à l'accord national du 18 juillet 2002, qui précise les engagements en termes d'accueil, de formation, de transport et de logement des saisonniers.

Or, deux ans après, force est de constater que ces directives n'ont pas été suivies. Ainsi, le conflit qui a eu lieu en 2005 dans une exploitation agricole de Saint-Martin-de-Crau, dans les Bouches-du-Rhône, a démontré clairement que le « principe de nécessité », au nom des difficultés bien réelles du monde agricole, continuait de prévaloir sur le droit du travail. Deux cent quarante ouvriers agricoles avaient alors fait grève, car plus de trois cents heures supplémentaires ne leur avaient pas été payées !

Sous-payés, disponibles, car logés sur place, recrutés en fonction de leur résistance physique, soumis et dépendants - leur contrat est renouvelable selon le bon vouloir de l'employeur -, les « saisonniers sous contrat OMI » sont devenus des permanents à temps partiel !

A cet égard, il serait essentiel de redéfinir la « saisonnalité », en termes de durée minimale et maximale. De plus, le contrat de travail devrait comprendre une clause de reconduction pour les saisons suivantes et l'accès au statut de travailleur étranger avec titre de séjour.

Ces mesures permettraient aux saisonniers de s'intégrer durablement dans un système professionnel et social précis et de pérenniser une part importante de la main-d'oeuvre saisonnière locale indispensable pour certaines productions, comme les fruits et légumes.

Il était, me semble-t-il, nécessaire d'évoquer la précarité des conditions de travail et la faiblesse de rémunération de certains salariés agricoles à l'occasion de l'examen du présent projet de loi. Celui-ci a en effet pour vocation d'orienter l'agriculture française vers de nouvelles perspectives, mais également vers de nouveaux revenus.

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