Intervention de Jean-Patrick Courtois

Réunion du 11 mai 2011 à 21h30
Immigration intégration et nationalité — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois :

La France entend mener une politique migratoire non seulement humaine et fidèle à sa tradition d’accueil, mais aussi ferme dans sa lutte contre l’immigration clandestine.

Tout laxisme en matière d’immigration ne peut qu’engendrer le développement de tous les racismes.

Lutter contre l’immigration clandestine, c’est protéger les étrangers qui ont fait l’effort d’entrer légalement dans notre pays de tous les amalgames et du rejet.

Lutter contre l’immigration clandestine, c’est donner aux étrangers en situation régulière une meilleure chance d’insertion dans notre société.

Lutter contre l’immigration clandestine, c’est aussi lutter contre le racisme à l’égard des Français de deuxième ou de troisième génération.

Contrairement à ce qui a souvent été dénoncé par l’opposition, ce texte est nécessaire.

Nos voisins européens mènent des politiques d’immigration en phase avec le droit européen ; la France doit impérativement s’y conformer en transposant les directives. Je tiens, à ce titre, à rappeler que ce texte transcrit dans notre droit une partie du Pacte européen sur l’immigration et l’asile que le Gouvernement avait fait adopter lors de la présidence française de l’Union européenne, et je rappelle que nos partenaires s’étaient prononcés à l’unanimité en sa faveur.

En matière d’immigration, il nous faut éviter deux écueils.

Le premier, c’est d’adopter une position irresponsable en affirmant qu’il faut accueillir tous ceux qui le souhaitent.

Le second, c’est de se contenter de déclarer qu’on ne souhaite plus d’immigration sans dire qu’il faut de la coopération.

Évitant ces deux écueils, le Gouvernement a choisi la bonne voie. C’est pourquoi le groupe UMP se satisfait des propositions qui nous sont faites, afin de poursuivre cette politique d’immigration choisie et équilibrée, à la fois ferme et généreuse.

Le projet de loi renforce les exigences relatives à l’intégration, crée des zones d’attente ad hoc, réforme les mesures d’éloignement des étrangers en situation irrégulière, améliore la lutte contre le travail illégal.

Après avoir été discutées dans chacune des deux chambres, plusieurs mesures faisaient toujours l’objet de désaccords.

Nous nous réjouissons des points d’entente trouvés en commission mixte paritaire.

Je citerai tout d’abord la question des « mariages gris », ces mariages conclus entre un étranger ou une étrangère et une personne de nationalité française de bonne foi, alors que celle-ci a été abusée dans ses sentiments par cet étranger dont l’objectif était d’obtenir, en fait, un titre de séjour ou la nationalité française.

Nos collègues députés voulaient édicter une sanction de sept ans de prison et 30 000 euros d’amende. Ce dispositif révélait plusieurs difficultés juridiques. Il manquait de cohérence avec l’échelle des peines retenues dans le droit pénal. En effet, le dispositif souhaité par les députés portait les peines encourues en cas de « mariage gris » au même niveau que les peines encourues en cas de proxénétisme. Ainsi, mes chers collègues, nous avons, en première puis en deuxième lecture, défendu une option plus cohérente. Nous avons choisi d’appliquer, de manière raisonnable, les mêmes peines que pour les mariages de complaisance, à savoir cinq ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

Nous nous félicitons donc que ces dispositions aient été retenues.

S’agissant du droit au séjour des étrangers malades, ce sujet grave en termes humains et de santé publique a longuement été débattu dans cet hémicycle en première et deuxième lectures, et a suscité de vives tensions tout au long du parcours parlementaire du projet de loi.

En première lecture, nous avions souhaité supprimer le dispositif qui nous était proposé et qui tendait à restreindre la possibilité de délivrer un titre de séjour à un étranger atteint d’une pathologie particulièrement grave ; en effet, les conséquences en termes de santé publique étaient trop incertaines.

Néanmoins, je souhaiterais redire, au nom du groupe UMP, que nous ne pouvions laisser perdurer des situations de détresse si disparates sur notre territoire. Je voudrais éviter ainsi tout malentendu sur ce point. Il n’est pas question de remettre en cause l’une de nos traditions d’accueil des étrangers gravement malades qui viennent en France, alors que dans leur pays d’origine, ils n’ont pas un accès aux soins adaptés. Nous avons le devoir pour nos compatriotes, et pour ces hommes et ces femmes en grande souffrance, de trouver une solution juridique équilibrée.

Ainsi, un compromis a été adopté en commission mixte paritaire. Le titre de séjour, accordé aux étrangers malades, ne pourra dorénavant être accordé qu’en cas d’absence du traitement approprié dans le pays d’origine et non d’indisponibilité effective de celui-ci. Cependant, la nouvelle disposition prévoit que l’autorité administrative pourra prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles pour l’attribution du titre de séjour, après avoir recueilli l’avis du directeur général de l’Agence régionale de santé, comme le prévoyait un amendement de compromis soutenu par notre groupe et adopté par le Sénat en deuxième lecture. Le groupe UMP se satisfait donc de cette rédaction.

Un autre sujet a suscité de longues heures d’échanges, aussi bien en commission qu’en séance publique ; il s’agit du contentieux du placement en rétention des étrangers en instance d’éloignement et du délai d’intervention du juge des libertés et de la détention dans la procédure administrative.

Le Gouvernement a lancé judicieusement une réorganisation du contentieux de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière et nous la soutenons. Jusqu’ici, il y avait un enchevêtrement total dans les procédures d’intervention du juge administratif et du juge judiciaire.

Vous nous avez proposé, monsieur le ministre, d’allonger le délai de quarante-huit heures à cinq jours pour l’intervention du juge des libertés et de la détention. Ce délai a pu sembler excessif ; c’est pourquoi notre assemblée, sur proposition de la commission des lois, avait proposé à l’origine d’allonger ce délai à quatre jours.

La commission mixte paritaire a finalement préféré que l’intervention du juge des libertés et de la détention soit repoussée à cinq jours, contre quarante-huit heures actuellement, pour laisser le temps au juge administratif de se prononcer sur la légalité de la rétention.

Nous ne doutons pas que cette disposition se traduira par une meilleure efficacité des procédures, actuellement enchevêtrées, entre les deux juridictions du juge des libertés et de la détention et du juge administratif.

Il s’agira d’éviter à l’avenir un nombre trop important d’annulations juridictionnelles imputables à la complexité des procédures. En outre, il convient de rappeler que la compétence du juge administratif, en matière de libertés individuelles, est reconnue, l’existence du référé-liberté étant un gage de confiance envers elle.

Cette mesure importante du projet de loi aura pour objet de concilier, au mieux, les exigences du contrôle de la privation de liberté et la nécessité d’une bonne administration de la justice.

Autre sujet important pour nos concitoyens : la lutte contre le travail illégal. Il a été décidé que les employeurs, qui auraient embauché « de bonne foi » des étrangers sans titre de séjour, ne seront pas passibles de poursuites pénales. Il s’agit d’une position mesurée pour les employeurs ayant subi l’intention frauduleuse d’étrangers malveillants.

Enfin, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a validé les modifications que nous avions adoptées relatives à l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle pour les requérants devant la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, situés outre-mer. Le recours à la visioconférence devant cette cour a été subordonné au consentement du requérant, lorsque celui-ci séjourne en France métropolitaine.

L’existence d’un régime spécifique pour les collectivités d’outre-mer se justifie par les différences objectives de situation, entre le requérant qui séjourne en métropole et celui qui se trouve outre-mer. En créant, au bénéfice de la Cour nationale du droit d’asile, la possibilité d’utiliser la visioconférence, le projet de loi améliore la situation des étrangers qui demandent l’asile dans une collectivité d’outre-mer : le délai d’examen de leurs demandes sera significativement réduit, puisqu’il ne sera plus tributaire, comme aujourd’hui, de l’organisation de missions foraines par la cour.

Vous le voyez, mes chers collègues, ce texte respecte nos principes fondamentaux ; alors cessez de faire croire à nos concitoyens que les mesures engagées par le Gouvernement pour notre pays sont dénuées d’humanité !

C’est parce que ce projet de loi vise l’immigration irrégulière et qu’il ne remet pas en question l’immigration concertée, l’immigration légale, l’immigration choisie, voulue et acceptée, l’immigration synonyme d’intégration, d’acceptation, que le groupe UMP votera avec conviction et détermination ce texte.

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