Intervention de Patricia Schillinger

Réunion du 12 novembre 2010 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Article 18

Photo de Patricia SchillingerPatricia Schillinger :

Cet article vise à augmenter le plafond de ressources de l’ACS, l’aide au paiement d’une complémentaire santé, fixé aujourd’hui à 20 %. Celui-ci va être porté, sur deux années, à dix points supplémentaires au-delà du plafond de ressources de la CMU complémentaire. Ainsi, 80 000 personnes supplémentaires devraient en bénéficier en 2011 et 227 000 en 2012.

Nous approuvons cet article, avec, toutefois, une certaine retenue.

En effet, si l’allégement du paiement de la complémentaire santé résultant de l’ACS est sensible – le rapport du Fonds de financement de la CMU souligne que le taux moyen d’effort des ménages souscripteurs est ramené de 8, 3 % à 3, 8 % –, cette charge, qui représente plus de 200 euros, reste quand même élevée pour une personne âgée entre 16 ans et 50 ans.

Ce faisant, vous ne réglez pas la question des difficultés à l’accès aux soins. En effet, avec le désengagement croissant de l’assurance maladie, le recours à l’inscription à une complémentaire de santé devient aujourd’hui un passage obligé pour se faire soigner correctement. Or, avec la baisse des taux de remboursement et une taxation grandissante sur leurs chiffres d’affaires, les mutuelles ont dû répercuter ces nouvelles charges sur leurs tarifs : en sept ans, elles ont procédé à une hausse de leurs tarifs de 44 %, ce qui représente 211 euros en plus à débourser.

Aujourd’hui, on estime que 7 % à 8 % des Français, soit environ cinq millions de personnes, sont dépourvus de complémentaire. C’est notamment le cas de 15 % des ouvriers et 18 % des chômeurs, selon une étude publiée, en 2006, par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé. Souscrire une complémentaire constitue un effort non négligeable pour bon nombre de ménages : les plus modestes y consacrent près de 10 % de leurs ressources.

Selon l’association UFC-Que choisir, 27 % des Français ne bénéficiant pas de couverture complémentaire privée et 32 % des Français ne bénéficiant pas non plus de la CMUC ont renoncé, en 2009, à se faire soigner, des pourcentages en augmentation.

Les renonciations portent surtout sur les soins et prothèses dentaires, pour 62, 8 % des cas, et sur les lunettes ou lentilles, pour 25 % des cas.

Cette exclusion des soins ne concerne plus seulement les classes populaires. Désormais, même les couches moyennes de la population sont touchées par ce phénomène. Depuis plusieurs années, notre système de santé dérive d’une approche solidaire et collective vers une logique de marché structurée par la rentabilité à court terme.

L’ACS y fait figure de vestige d’une conception politique fondée sur la force du collectif et de la régulation. Dans ce grand marché de la santé qui attire jour après jour les investisseurs les plus divers dans le champ du médicament, du service médical ou de l’accompagnement de la dépendance, nous défendons l’idée d’un égal accès aux soins pour l’ensemble de nos compatriotes.

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