Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il est vrai que les finances publiques ne se limitent pas au budget de l'Etat, les prélèvements obligatoires ne se cantonnent pas aux impôts : ils couvrent également les charges sociales. Nous le savons bien puisque, chaque année, grâce notamment aux dispositions de la loi organique relative aux lois de finances, nous avons un débat sur les prélèvements obligatoires.
Aussi, afin de parvenir à une vision globale du niveau des prélèvements obligatoires, il convient, mes chers collègues qu'une seule institution soit chargée d'apprécier leur évolution et leur impact économique, social et budgétaire.
Voilà pourquoi la commission des finances souhaite remplacer le conseil des impôts par le conseil des prélèvements obligatoires, dont le recrutement serait diversifié au lieu d'être limité à la fonction publique.
Les dispositions que nous vous proposons concernent la date de création du conseil des prélèvements obligatoires, ses compétences, sa composition.
Tout d'abord, le conseil des prélèvements obligatoires serait créé à partir du 1er octobre 2005 afin de permettre au conseil des impôts en place, auquel il se substituerait, de remettre son dernier rapport prévu pour septembre 2005. Cela permettrait également aux membres de ce conseil d'achever leur mandat de deux ans.
S'agissant maintenant des compétences du conseil des prélèvements obligatoires, l'amendement n° II-82 rectifié vise à élargir le champ d'investigation aux impôts et aux prélèvements sociaux.
S'agissant enfin de la composition du conseil des prélèvements obligatoires, alors que, jusqu'à maintenant, seuls les représentants de la fonction publique, autrement dit ceux qui mettaient en recouvrement l'impôt, siégeaient au sein de ce conseil, nous souhaitons que les représentants des contribuables y soient également présents.
En d'autres termes, nous proposons que des sept personnalités qualifiées siègent aux côtés des représentants de l'administration : quatre de ces personnalités qualifiées seraient nommées par les présidents des assemblées, après avis du président et du rapporteur général de leur commission des finances et après avis du président de leur commission des affaires sociales, et une personnalité qualifiée serait nommée par le président du Conseil économique et social. Les personnalités qualifiées désignées par le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat et le président du Conseil économique et social ne pourraient appartenir à l'une de ces assemblées.
Deux de ces personnalités qualifiées seraient nommées respectivement par le ministre chargé de l'économie et des finances et par le ministre chargé des affaires sociales.
Les membres, sauf le président, seraient nommés pour deux ans, leur mandat étant renouvelable.
La pratique actuelle selon laquelle le directeur de la prévision et de l'analyse économique ainsi que le directeur de la législation fiscale, ou leur représentant, assistent aux réunions du conseil serait formalisée et étendue au directeur de la sécurité sociale. L'indépendance des membres et des rapporteurs du conseil serait consacrée, et ces derniers seraient soumis au secret professionnel.
Bien sûr, l'assujettissement des membres et rapporteurs du conseil des prélèvements obligatoires au secret professionnel peut apparaître contradictoire avec la présence de représentants du ministère de l'économie et des finances et du ministère des affaires sociales, qui ne peuvent en pratique être également soumis au secret professionnel.
Je rappelle toutefois que cette situation se retrouve dans le statut de l'autorité des marchés financiers, l'AMF, le commissaire du Gouvernement n'étant pas soumis, contrairement aux membres, au secret professionnel.
En contrepartie, les membres ou rapporteurs non fonctionnaires du conseil seraient rémunérés de manière propre à assurer leur indépendance.
Un droit de saisine serait reconnu aux commissions des finances et des affaires sociales des deux assemblées, ainsi, naturellement, qu'au Premier ministre.
Enfin, les rapports au Président de la République et au Parlement dans lesquels les membres du conseil pourraient apporter une contribution personnelle, éventuellement dissidente ou dissonante, seraient publiés, de même que les comptes rendus des débats au sein du conseil auxquels ces rapports auront donné lieu.
Les membres et les rapporteurs du conseil des prélèvements obligatoires disposeraient d'un droit d'accès à l'information comparable à celui qui est reconnu par les textes aux grands corps d'inspection de l'Etat.
Pour le reste, le conseil des prélèvements obligatoires serait similaire au conseil des impôts.
L'amendement n° II-82 rectifié vise, en quelque sorte, à la reconnaissance et à la consécration du conseil des impôts, dont le président resterait naturellement le Premier président de la Cour des comptes.
Mes chers collègues, le débat global sur l'ensemble des prélèvements obligatoires est désormais incontournable : quel système de prélèvements obligatoires faut-il mettre en place dans une économie globalisée ?
Nous devons cesser d'improviser, comme cela arrive parfois, les réponses fiscales, les réponses en termes de prélèvements obligatoires. Il arrive que l'on donne l'impression d'agir ou d'annoncer des décisions le dos au mur. Il nous faut donc désormais anticiper.
Nous avons retenu, en matière de finances publiques, deux priorités, dont la première consiste à maîtriser la dépense publique et, pour ce faire, la loi organique relative aux lois de finances, appuyée sur un système d'information budgétaire, comptable et financière, représentera certainement un levier décisif. Mais nous devons également repenser notre système de prélèvements obligatoires, privilégier la compétitivité et l'attractivité des territoires en vue de stimuler la croissance, pour lutter efficacement contre le chômage et donc pour tendre vers le plein emploi.
Dans cette optique, il nous faut impérativement remettre en cause notre système de prélèvements obligatoires.
Nous avons eu l'occasion, lors du récent débat sur les prélèvements obligatoires, de nous interroger sur le caractère corrosif de certains prélèvements tels que la taxe professionnelle, qu'il va falloir réformer ; chacun d'entre nous, à cet égard, est impatient de connaître les propositions de la commission Fouquet.
Nous savons aussi que les charges sociales constituent, comme la taxe professionnelle, des impôts de production, une sorte de droit de douane à l'envers.
Aussi, pour préparer l'avenir, pour anticiper, nous vous invitons, mes chers collègues, à approuver le principe d'un conseil des prélèvements obligatoires qui se tiendra aux côtés du Parlement pour éclairer le débat et pour permettre au Gouvernement et au législateur de prendre les décisions appropriées.
Tel est l'objet de cet amendement que, en plein accord avec M. le rapporteur général, je vous propose, au nom de la commission des finances.