Dans sa rédaction actuelle, le dernier alinéa de l'article L. 213-1 du code du travail dispose : « Cet accord collectif doit comporter les justifications du recours au travail de nuit visées au premier alinéa. »
Il est quelque peu restrictif puisque l'accord dérogatoire dont il est question ne doit avoir pour justifications que celles qui découlent de la nécessité d'assurer la « continuité de l'activité économique ».
Notre amendement est donc à la fois un amendement de repli au regard de notre position de fond - nous estimons que le travail de nuit doit être exceptionnel - et un amendement visant à offrir aux salariés des garanties complémentaires au regard de leurs conditions de travail.
Nous sommes en effet dans la problématique de l'accord majoritaire, étant entendu que rien, dans la rédaction actuelle de cet article L. 213-1, ne préjuge la nécessité de recueillir la signature des organisations syndicales majoritaires pour valider tel ou tel accord.
Prenons l'exemple de l'avenant à la convention collective nationale de l'hôtellerie-restauration du 13 juillet 2004, qui est intervenu, soit dit en passant, peu de temps après l'adoption du texte de loi portant soutien à la consommation et à l'investissement et qui comportait certaines dispositions favorables à ce secteur.
Relisons l'exposé des motifs de cet avenant signé par trois fédérations patronales et trois organisations syndicales représentatives, FO, la CFTC et la CGC, dont on peut légitimement douter qu'elles disposent du soutien de la majorité des salariés du secteur.
Dans le préambule de cet avenant, dont l'extension a été validée par un décret que vous avez contresigné, monsieur le ministre, il est indiqué que les organisations patronales et syndicales de salariés signataires :
« Souhaitent renforcer l'attractivité de la branche tant en termes de développement de l'emploi qu'en termes de formation professionnelle.
« Expriment leur volonté d'examiner les modalités d'aménagement du temps de travail au regard du nouveau cadre légal et réglementaire et de développer ainsi la modernité de la Profession.
« Reconnaissent la nécessité de préserver la pérennité des entreprises de la branche, en prenant en compte leur diversité...
« Soulignent combien l'activité de ces entreprises est susceptible de fluctuer fortement et de manière imprévisible, en fonction des situations accidentelles ou événementielles dans les domaines économiques, sociaux, écologiques ou climatiques, de leurs sensibilités à la variabilité des taux de change et de leurs expositions à la concurrence internationale. »
Rien que ça !
Ce préambule constitue indiscutablement un remarquable assemblage de données contradictoires, mais surtout quelle en est la traduction ? Elle figure en toutes lettres dans le titre II : « En application des dispositions de l'article L. 212-4, quatrième alinéa, du code du travail, la durée hebdomadaire de travail équivalente est fixée à 39 heures pour toutes les entreprises. »
De plus, au cas où l'on n'aurait pas tout à fait compris, il est rappelé que, aux termes de l'article 5 du titre II de la même convention collective, « le recours aux heures supplémentaires ne constitue pas un mode de gestion normal de l'activité mais les métiers de service restent dépendants de la demande de la clientèle et cela plus particulièrement dans la restauration ».
Dans ce cadre, le travail de nuit procède, évidemment, de la normalité.
Vous comprendrez donc aisément, mes chers collègues, pourquoi nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet amendement qui tend à poser le principe de l'accord majoritaire pour valider telle ou telle disposition dérogatoire au principe du travail de jour.