Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 2 mars 2005 à 15h00
Réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise — Article 1er

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Avec le présent amendement, qui vise à réintroduire, d'une part, un délai d'utilisation du compte épargne-temps et, d'autre part, un capital temps minimal requis pour utiliser ce dernier, nous nous inscrivons résolument dans une démarche différente de celle des auteurs de la proposition de loi.

En premier lieu, nous réorientons le compte épargne-temps vers son objet initial, à savoir la « fabrication du temps » pour des projets personnels ou familiaux. Cet outil doit être un mode d'indemnisation des congés et non une voie nouvelle pour se constituer une épargne ou, plus aléatoire encore, un moyen individuel de compléter, tant bien que mal, sa rémunération.

En second lieu, mes chers collègues, nous revenons à l'esprit des lois antérieures dans un souci d'efficacité de la réduction du temps de travail, souci qui n'a pas toujours été respecté concrètement de par une certaine frilosité dans l'encadrement de ses modalités pratiques.

Ainsi, pour favoriser l'effet emploi, nous prévoyons le nombre de jours de congés accumulés, soit le capital temps minimal requis pour utiliser le compte épargne-temps. Nous fixons ce seuil à six mois et non à deux mois, comme l'avait prévu la loi Aubry II.

Enfin, pour que ce mode d'utilisation corresponde vraiment au choix du salarié, pour que son temps soit garanti et sa santé préservée, nous réintroduisons une limite dans le temps, soit cinq ans, pour le stockage de ces droits.

Je me fais peu d'illusions sur l'avenir de notre proposition dans la mesure où l'objet de la réforme que vous initiez - je m'adresse à vous, monsieur le ministre, car, même s'il s'agit d'une proposition de loi, vous n'y êtes évidemment pas étranger ! - est précisément de s'affranchir des supposés « facteurs de rigidité » des lois Aubry, dont les seuils concernant le compte épargne-temps.

Ces rigidités seraient responsables, selon vous, de l'échec du dispositif, couvrant, il est vrai, à peine 15 % des salariés. Or si, avant de réformer en profondeur ce dispositif, vous aviez pris la peine d'en dresser un bilan sérieux, vous n'auriez pu raisonnablement tenir de tels propos.

En conclusion, monsieur le ministre, je m'inquiète beaucoup du discours tenu, laissant accréditer l'idée que la suppression de toute limite dans le temps pour le stockage des droits sur le compte épargne-temps permettra à ce dernier de suivre les salariés tout au long de leur carrière, un peu à l'image de la « sécurité emploi formation » empruntée aux syndicats.

En effet, rien ne garantit véritablement les droits des salariés. Lorsque le MEDEF vous le demande, vous modifiez l'AGS. De surcroît, aucun mécanisme n'est prévu pour responsabiliser les entreprises dans les cas de fusion ou de disparition.

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