Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 2 mars 2005 à 15h00
Réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise — Article 1er

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Cet amendement, qui est bien évidemment un amendement de repli, vise à clarifier le dispositif du compte épargne-temps, qui n'est absolument pas net et ne présente aucune garantie pour le salarié.

Ce nouveau dispositif permet à l'employeur d'alimenter le CET par les heures supplémentaires effectuées par le salarié en cas de variation de l'activité. Or le nouvel article L. 227-1 du code du travail tel qu'il est modifié ne précise pas si ces heures supplémentaires seront majorées et payées ultérieurement au même taux horaire qu'au moment où elles ont été effectuées.

Cette situation est doublement pénalisante pour le salarié. Non seulement c'est l'employeur qui décidera unilatéralement d'affecter ces heures supplémentaires au compte épargne-temps, mais en outre le salarié ne recevra pas de rémunération immédiate consécutivement à l'accomplissement de ces heures supplémentaires.

En d'autres termes, l'employeur peut décider de faire accomplir des heures supplémentaires aux salariés mais en créditant leur compte épargne-temps au lieu de les rémunérer immédiatement. Les salariés seront donc payés virtuellement, par une heure, deux heures, voire plus, sur leur compte épargne-temps.

Il reste à savoir ce que deviendra le dispositif du compte épargne-temps ? Les heures cumulées s'indexent-elles sur l'inflation ? Si le salarié décide d'utiliser son CET dans dix ans, puisqu'il n'y a désormais plus de limite de temps, quelle sera la majoration de ces heures accumulées ? Pour l'heure, nous l'ignorons.

Nous ne voyons pas bien comment le pouvoir d'achat des salariés peut augmenter dans ces conditions, d'autant, je le rappelle, que rien ne garantit le taux auquel ces heures supplémentaires seront majorées quand elles créditeront le CET.

Le présent amendement vise donc à préciser que ces heures correspondent bien à des heures supplémentaires qui font l'objet, à ce titre, d'une majoration de salaire et qui viennent s'imputer sur le contingent annuel d'heures supplémentaires du salarié concerné.

Cette réforme du compte épargne-temps n'a qu'un seul objectif : permettre aux employeurs d'augmenter les heures supplémentaires rémunérées par un salaire fictif. Les salariés ne s'y tromperont pas. À la fin du mois, leur feuille de paie sera la même qu'aujourd'hui et leur situation en termes de pouvoir d'achat n'aura pas changé.

Je pense qu'il faudrait engager très rapidement une politique salariale ambitieuse, surtout depuis que quelques grands groupes ont enregistré des bénéfices records, bénéfices qu'ils refusent pourtant catégoriquement de redistribuer. L'écart qui sépare ces bénéfices et des salaires tellement bas qu'ils ne permettent pas à des milliers de personnes de se loger est incompréhensible.

Cette proposition de loi ne va malheureusement pas améliorer la situation des salariés pauvres de notre pays et nous ne pouvons que le regretter. C'est pourquoi il convient d'adopter notre proposition qui réduit le caractère pernicieux du compte épargne-temps tel qu'il est conçu dans la proposition de loi.

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