Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais attirer votre attention sur les effets néfastes du tabagisme pendant la grossesse. Je sais que vous relaierez de façon efficace ma préoccupation auprès de Mme Roselyne Bachelot-Narquin et vous en remercie.
Malgré la mesure n° 10 préconisée par le Plan Cancer 2003-2007 et le soutien par le ministère de la santé et des sports de la charte « maternité sans tabac », signée par 356 des 580 maternités – soit 60 % –, aujourd’hui un enfant sur cinq est encore exposé in utero au tabagisme de sa mère.
D’après le récent rapport européen sur la santé périnatale de 2008, la France est le pays ayant la plus grande proportion de fumeuses parmi les femmes enceintes : 22 % au troisième trimestre de la grossesse, contre 6 % en Suède, tandis que la proportion pendant toute la grossesse est de 17 % au Royaume-Uni et de 11 % en Allemagne.
Je tiens à souligner que l’exposition au tabac in utero augmente le risque d’avortement spontané, de grossesse extra-utérine, d’accouchement prématuré et d’hypotrophie. En outre, le tabagisme des parents augmente les risques de mort subite du nourrisson et d’infection broncho-pulmonaire.
La France est le pays d’Europe dans lequel la mortalité fœtale est la plus élevée – 9 pour 1000 –, supérieure d’un tiers à celle qui est observée en Russie et trois fois plus importante qu’en Suède et en Finlande.
La proportion de nouveau-nés de moins de 1 kilogramme a été multipliée par trois depuis 1990. Or un poids faible est souvent associé à des séquelles nerveuses et intellectuelles sérieuses.
La France est également le pays européen dans lequel la proportion de nouveau-nés avec un poids compris entre 1, 5 kilogramme et 2, 5 kilogrammes est la plus élevée. Elle est par exemple supérieure de 83 % à celle qui est observée en Suède.
Ces constatations illustrent la gravité de la situation actuelle sur le plan sanitaire, social et financier, et ce malgré les améliorations récentes. En effet, d’après le baromètre santé de l’INPES, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, la proportion de fumeuses parmi les femmes enceintes est passée de 28 % à 20 % entre 2000 et 2004. Mais il semble que ces chiffres sont vraisemblablement sous-estimés, car ils se fondent sur les déclarations des femmes enceintes. Or celles-ci manquent de fiabilité, comme l’ont montré les dosages du monoxyde de carbone dans l’air exhalé par les patientes.
Dans ce contexte, il serait judicieux, comme le préconise le rapport Tubiana, qu’à chaque visite prénatale les maternités effectuent un dosage du monoxyde de carbone contenu dans l’air expiré par la femme enceinte et, si possible, par son conjoint.
Si ce dosage est élevé, la femme enceinte doit être envoyée à une consultation d’arrêt du tabac. La sécurité sociale pourrait prendre en charge les substituts nicotiniques pendant la grossesse et pendant l’allaitement.
Il est également nécessaire d’organiser une éducation parentale dans les maternités, qui passerait notamment par la distribution de documents standards et, si besoin est, par un suivi personnalisé.
Par ailleurs, la réalisation d’un rapport annuel sur la mise en œuvre de ces recommandations est indispensable, afin de vérifier que les moyens engagés sont adéquats, et de suivre les résultats.
De même, la notation des établissements hospitaliers devrait prendre en compte le respect de la charte « maternité sans tabac » dans les établissements, ainsi que les résultats obtenus. En plus de la responsabilité personnelle des chefs de service, celle des directeurs d’établissement et des présidents de commission médicale d’établissement, ou CME, doit être engagée pour ce qui est du fonctionnement des maternités.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande de bien vouloir me faire part de l’avis du Gouvernement sur ces propositions du rapport Tubiana, ainsi que des mesures qu’il entend prendre pour remédier à la situation actuelle.