Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 28 février 2006 à 10h20
Égalité des chances — Article 3 bis suite, amendement 655

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Je tiens à dire que le Gouvernement n'a pas cru bon de répondre aux deux rappels au règlement qui viennent d'être faits. Ce n'est pas nouveau. Hier, déjà, le ministre n'a pas répondu à nos interpellations. Le Gouvernement n'a rien à dire. Les chiffres du chômage doivent le laisser sans voix.

Comme nous l'avons largement déploré, l'article 3 bis déroge d'une façon générale au droit du travail, qu'il s'agisse des règles applicables aux CDD, mais aussi et surtout aux CDI, principalement en ce qui concerne les conditions de leur rupture et les garanties attenantes pour le salarié.

De l'exception posée permettant ni plus ni moins à l'employeur de licencier à sa guise, sans avoir à donner les motifs de sa décision et sans respecter une procédure précise, il résulte notamment que l'employeur n'est plus tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable d'embauche, qu'il n'a plus à respecter les articles encadrant les licenciements économiques.

Après la systématisation du licenciement pour motif personnel par les employeurs pour contourner la législation sur les licenciements économiques leur imposant l'établissement d'un plan social, une obligation de reclassement, - 76 % des licenciements aujourd'hui ne relèvent pas de plan de sauvegarde de l'emploi - les présentes dispositions et la rupture idéologique qui les sous-tend préparent l'explosion des licenciements sans motif.

S'agissant des licenciements collectifs du CPE entrant pourtant dans le cadre des licenciements pour motif économique, la seule règle actuelle qui continuera à s'appliquer concerne la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel. On ne sait cependant pas comment cette obligation s'appliquera, car il sera impossible pour les élus du personnel de contester le bien-fondé de la décision prise dans la mesure où cette dernière n'a plus à être motivée.

Ce n'est peut-être qu'un détail pour vous, mes chers collègues, mais je souhaite que le Gouvernement puisse préciser cet aspect flou du texte.

L'amendement n° 655 vise, quant à lui, à réintroduire dans le texte l'application au CPE d'une démarche de reclassement.

Le troisième alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail impose à la charge de l'employeur une obligation individuelle de reclassement des salariés. Il dispose que « le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé (...) ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ».

Même si, comme nous ne manquons pas de le regretter, cette obligation de reclassement ne contraint pas l'employeur à un résultat, même si le non-respect de cette obligation n'est pas sanctionné par la nullité de la procédure de licenciement, elle rappelle néanmoins ce dernier à sa responsabilité.

Même si, de plus, ladite obligation devait être renforcée afin de ne plus permettre des propositions de reclassement dans des emplois de catégorie inférieure, il nous semble toutefois que rien ne justifie qu'en raison de leur âge et du type d'emploi occupé, en l'occurrence un CPE, les jeunes salariés soient exclus du champ de cette obligation de reclassement.

L'objet de notre démarche est d'une part, d'éviter qu'une classe d'âge ne soit la perpétuelle variable d'ajustement des entreprises et que les parcours professionnels des jeunes concernés ne connaissent des ruptures et, d'autre part, de mettre l'employeur face à ses responsabilités en matière de formation, domaine qui le concerne, avant qu'il rencontre des difficultés économiques.

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