Séance en hémicycle du 28 février 2006 à 10h20

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • CDD
  • CDI
  • CNE
  • CPE
  • embauche
  • licenciement
  • précarité
  • rupture

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures vingt.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les orientations de la politique de l'immigration, conformément à l'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence (n°s 203, 210, 211, 212, 213, 214).

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

J'ai lu ce matin dans la presse que le Premier ministre avait dit que tout le temps nécessaire serait consacré aux débats sur le contrat première embauche au Sénat.

Compte tenu de cet engagement, je voudrais que M. le ministre nous dise si nous aurons la possibilité de donner notre avis sur les amendements que nous examinons ou si nous serons encore une fois empêchés de parler.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 49...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

... et il concerne l'organisation de nos travaux.

Nous avons un objectif commun, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs : que le Sénat débatte dans la sérénité de l'ensemble des 40 articles qui composent désormais le projet de loi pour l'égalité des chances.

Nous souhaitons avoir un débat qui n'a pas eu lieu à l'Assemblée nationale.

Or, quelle est la situation actuelle ?

Après trois jours de séance et près de trente heures de débats, seul l'article 1er a été adopté.

Sur les 86 amendements déposés sur l'article 3 bis, seuls 40 ont été présentés hier.

Nous ne comprenons toujours pas l'objectif de la réserve des votes sur les amendements de l'article 3 bis.

Cherchez-vous à gagner du temps ? Je crois que la démonstration a été faite hier qu'aucun gain n'est à attendre de ce côté.

Cherchez-vous à appliquer l'article 44, alinéa 3, de la Constitution et à recourir au vote bloqué au Sénat après le passage en force à l'Assemblée nationale avec l'article 49-3 ? C'est une question que nous posons inlassablement.

Nous voulons bien croire que ce n'est pas votre objectif, même si le doute est légitime.

Si l'organisation de nos débats reste celle que vous nous avez imposée hier, le Sénat va se transformer, le temps d'une séance, en Parlement européen. Nous aurons à l'issue de la présentation des amendements une série de 86 votes pour lesquels les sénateurs présents ne sauront pas à quels amendements précis ils se réfèrent.

C'est surréaliste et presque sans précédent.

Ce n'est pas, vous en conviendrez, favorable à la sérénité de nos débats.

Aussi, je vous fais solennellement une proposition : même si vous persistez dans la réserve des votes, les sénateurs du groupe socialiste présenteront un nombre limité d'explications de vote.

Ainsi, vous ne pourrez pas prendre prétexte d'une obstruction qui n'existe que dans vos discours pour mieux justifier l'usage cumulatif de toutes les procédures susceptibles d'accélérer les débats, procédures que je recense pour mémoire.

Premièrement, la demande de réserve jusqu'à la fin du titre 1er de tous les amendements tendant à insérer des articles additionnels avant ou après les articles 1er, 2, 3 et 3 bis, relatif au CPE.

Deuxièmement, la levée de la discussion commune conformément à l'article 49-2 du règlement du Sénat.

Troisièmement, la demande d'examen en priorité de certains amendements, afin de faire « tomber » les amendements contraires, en général ceux de l'opposition.

Quatrièmement, l'exception d'irrecevabilité prévue à l'article 44-2 du règlement du Sénat : la commission des affaires sociales a déposé une motion déclarant irrecevables 25 amendements à l'article 1er qui, selon elle, sont « dépourvus de tout lien avec l'objet du texte en discussion ».

Cinquièmement, la décision de la conférence des présidents, convoquée vendredi à quatorze heures trente, qui a ajouté aux jours prévus pour l'examen du projet de loi le mercredi 1er mars au matin ainsi que, éventuellement, le samedi 4 mars, le matin et le soir, et le dimanche 5 mars.

Sixièmement, l'invocation de l'article 40 de la Constitution : ont été déclarés irrecevables les amendements dont l'adoption « aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique ».

Septièmement, l'irrecevabilité de l'article 44-2 de la Constitution, qui a été invoquée à l'encontre des sous-amendements déposés par le groupe communiste.

Huitièmement, la clôture du débat : l'article 38-1 du règlement du Sénat dispose : « Lorsqu'au moins deux orateurs d'avis contraire sont intervenus dans la discussion générale, sur l'ensemble d'un article ou dans les explications de vote portant sur un amendement, un article ou l'ensemble du texte en discussion, le Président ou tout membre du Sénat peut proposer la clôture de cette discussion ».

Monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, soyez raisonnables et considérez que toutes ces mesures ne nous empêcheront pas de nous exprimer !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je souhaite faire une brève intervention sur les articles 51 à 62 du règlement.

Monsieur le président, je vous rappelle que le Conseil constitutionnel a très souvent insisté sur la nécessaire intelligibilité de la loi.

Or, nous nous sommes trouvés hier soir dans une extrême confusion sur la question essentielle de la motivation du licenciement, c'est-à-dire sur le fait de savoir si l'on peut licencier un jeune sans motivation.

Monsieur le ministre, dont nous connaissons les qualités et la force de conviction, nous a fait un discours sur la différence entre la motivation et la justification, qui était totalement incompréhensible.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Sur un sujet aussi grave, il n'est pas possible que l'on ne nous laisse pas expliquer notre vote, amendement après amendement.

C'est pourquoi il me semble très important de changer la procédure.

Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir accordé la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Ce n'était pas un rappel au règlement !

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 3 bis appelé en priorité, à l'amendement n° 655.

Par ailleurs, je vous rappelle que les votes ont été réservés jusqu'à la fin de cet article.

I. - Les employeurs qui entrent dans le champ du premier alinéa de l'article L. 131-2 du code du travail peuvent conclure, pour toute nouvelle embauche d'un jeune âgé de moins de vingt-six ans, un contrat de travail dénommé « contrat première embauche ».

L'effectif de l'entreprise doit être supérieur à vingt salariés dans les conditions définies par l'article L. 620-10 du même code.

Un tel contrat ne peut être conclu pour pourvoir les emplois mentionnés au 3° de l'article L. 122-1-1 du même code.

II. - Le contrat de travail défini au I est conclu sans détermination de durée. Il est établi par écrit.

Ce contrat est soumis aux dispositions du code du travail, à l'exception, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, de celles des articles L. 122-4 à L. 122-11, L. 122-13 à L. 122-14-14 et L. 321-1 à L. 321-17 du même code.

La durée des contrats de travail, précédemment conclus par le salarié avec l'entreprise ainsi que la durée des missions de travail temporaire effectuées par le salarié au sein de l'entreprise dans les deux années précédant la signature du contrat première embauche, de même que la durée des stages réalisés au sein de l'entreprise sont prises en compte dans le calcul de la période prévue à l'alinéa précédent.

Ce contrat peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, dans les conditions suivantes :

1° La rupture est notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;

2° Lorsque l'employeur est à l'initiative de la rupture et sauf faute grave ou force majeure, la présentation de la lettre recommandée fait courir, dès lors que le salarié est présent depuis au moins un mois dans l'entreprise, un préavis. La durée de celui-ci est fixée à deux semaines, dans le cas d'un contrat conclu depuis moins de six mois à la date de la présentation de la lettre recommandée, et à un mois dans le cas d'un contrat conclu depuis au moins six mois ;

3° Lorsqu'il est à l'initiative de la rupture, sauf faute grave, l'employeur verse au salarié, au plus tard à l'expiration du préavis, outre les sommes restant dues au titre des salaires et de l'indemnité de congés payés, une indemnité égale à 8 % du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion du contrat. Le régime fiscal et social de cette indemnité est celui applicable à l'indemnité mentionnée à l'article L. 122-9 du code du travail. À cette indemnité versée au salarié s'ajoute une contribution de l'employeur, égale à 2 % de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat. Cette contribution est recouvrée par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 351-21 du code du travail conformément aux dispositions des articles L. 351-6 et L. 351-6-1 du même code. Elle est destinée à financer les actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi en vue de son retour à l'emploi. Elle n'est pas considérée comme un élément de salaire au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

Toute contestation portant sur la rupture se prescrit par douze mois à compter de l'envoi de la lettre recommandée prévue au 1°. Ce délai n'est opposable aux salariés que s'il en a été fait mention dans cette lettre.

Par exception aux dispositions du deuxième alinéa, les ruptures du contrat de travail envisagées à l'initiative de l'employeur sont prises en compte pour la mise en oeuvre des procédures d'information et de consultation régissant les procédures de licenciement économique collectif prévues au chapitre Ier du titre II du livre III du code du travail.

La rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif.

En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau contrat première embauche entre le même employeur et le même salarié avant que ne soit écoulé un délai de trois mois à compter du jour de la rupture du précédent contrat.

Le salarié titulaire d'un contrat première embauche peut bénéficier du congé de formation dans les conditions fixées par les articles L. 931-13 à L. 931-20-1 du code du travail.

Le salarié titulaire d'un contrat première embauche peut bénéficier du droit individuel à la formation prévu à l'article L. 933-1 du code du travail pro rata temporis, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date d'effet du contrat. Le droit individuel à la formation est mis en oeuvre dans les conditions visées aux articles L. 933-2 à L. 933-6 du même code.

L'employeur est tenu d'informer le salarié, lors de la signature du contrat, des dispositifs interprofessionnels lui accordant une garantie et une caution de loyer pour la recherche éventuelle de son logement.

III. - Les travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi au sens de l'article L. 351-1 du code du travail, ayant été titulaires du contrat mentionné au I pendant une durée minimale de quatre mois d'activité ont droit, dès lors qu'ils ne justifient pas de références de travail suffisantes pour être indemnisés en application de l'article L. 351-3 du même code, à une allocation forfaitaire versée pendant deux mois.

Le montant de l'allocation forfaitaire ainsi que le délai après l'expiration duquel l'inscription comme demandeur d'emploi est réputée tardive pour l'ouverture du droit à l'allocation, les délais de demande et d'action en paiement, le délai au terme duquel le reliquat des droits antérieurement constitués ne peut plus être utilisé et le montant au-dessous duquel l'allocation indûment versée ne donne pas lieu à répétition sont ceux applicables au contrat nouvelles embauches.

Les dispositions de la section 4 du chapitre Ier du titre V du livre III du code du travail sont applicables à l'allocation forfaitaire.

Les dispositions de l'article L. 131-2, du 2° du I de l'article L. 242-13 et des articles L. 311-5 et L. 351-3 du code de la sécurité sociale ainsi que celles des articles 79 et 82 du code général des impôts sont applicables à l'allocation forfaitaire.

Cette allocation est à la charge du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi.

L'État peut, par convention, confier aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail ou à tout organisme de droit privé la gestion de l'allocation forfaitaire.

Un accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 351-8 du code du travail définit les conditions et les modalités selon lesquelles les salariés embauchés sous le régime du contrat institué au I peuvent bénéficier de la convention de reclassement personnalisé prévue au I de l'article L. 321-4-2 du même code. À défaut d'accord ou d'agrément de cet accord, ces conditions et modalités sont fixées par décret en Conseil d'État.

IV. - Les conditions de mise en oeuvre du « contrat première embauche » et ses effets sur l'emploi feront l'objet, au plus tard au 31 décembre 2008, d'une évaluation par une commission associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel.

L'amendement n° 655, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après le cinquième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

... ° Lorsque l'employeur envisage la rupture d'un « contrat première embauche », il est tenu de respecter les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail ;

La parole est à M. Roland Muzeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je tiens à dire que le Gouvernement n'a pas cru bon de répondre aux deux rappels au règlement qui viennent d'être faits. Ce n'est pas nouveau. Hier, déjà, le ministre n'a pas répondu à nos interpellations. Le Gouvernement n'a rien à dire. Les chiffres du chômage doivent le laisser sans voix.

Comme nous l'avons largement déploré, l'article 3 bis déroge d'une façon générale au droit du travail, qu'il s'agisse des règles applicables aux CDD, mais aussi et surtout aux CDI, principalement en ce qui concerne les conditions de leur rupture et les garanties attenantes pour le salarié.

De l'exception posée permettant ni plus ni moins à l'employeur de licencier à sa guise, sans avoir à donner les motifs de sa décision et sans respecter une procédure précise, il résulte notamment que l'employeur n'est plus tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable d'embauche, qu'il n'a plus à respecter les articles encadrant les licenciements économiques.

Après la systématisation du licenciement pour motif personnel par les employeurs pour contourner la législation sur les licenciements économiques leur imposant l'établissement d'un plan social, une obligation de reclassement, - 76 % des licenciements aujourd'hui ne relèvent pas de plan de sauvegarde de l'emploi - les présentes dispositions et la rupture idéologique qui les sous-tend préparent l'explosion des licenciements sans motif.

S'agissant des licenciements collectifs du CPE entrant pourtant dans le cadre des licenciements pour motif économique, la seule règle actuelle qui continuera à s'appliquer concerne la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel. On ne sait cependant pas comment cette obligation s'appliquera, car il sera impossible pour les élus du personnel de contester le bien-fondé de la décision prise dans la mesure où cette dernière n'a plus à être motivée.

Ce n'est peut-être qu'un détail pour vous, mes chers collègues, mais je souhaite que le Gouvernement puisse préciser cet aspect flou du texte.

L'amendement n° 655 vise, quant à lui, à réintroduire dans le texte l'application au CPE d'une démarche de reclassement.

Le troisième alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail impose à la charge de l'employeur une obligation individuelle de reclassement des salariés. Il dispose que « le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé (...) ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ».

Même si, comme nous ne manquons pas de le regretter, cette obligation de reclassement ne contraint pas l'employeur à un résultat, même si le non-respect de cette obligation n'est pas sanctionné par la nullité de la procédure de licenciement, elle rappelle néanmoins ce dernier à sa responsabilité.

Même si, de plus, ladite obligation devait être renforcée afin de ne plus permettre des propositions de reclassement dans des emplois de catégorie inférieure, il nous semble toutefois que rien ne justifie qu'en raison de leur âge et du type d'emploi occupé, en l'occurrence un CPE, les jeunes salariés soient exclus du champ de cette obligation de reclassement.

L'objet de notre démarche est d'une part, d'éviter qu'une classe d'âge ne soit la perpétuelle variable d'ajustement des entreprises et que les parcours professionnels des jeunes concernés ne connaissent des ruptures et, d'autre part, de mettre l'employeur face à ses responsabilités en matière de formation, domaine qui le concerne, avant qu'il rencontre des difficultés économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article L. 321-1 du code du travail prévoit, en son dernier alinéa, que le licenciement individuel pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut avoir lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mon cher collègue, cette précision est bien indiquée dans l'article précité, que j'ai relu.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le CPE vise à introduire plus de souplesse dans les modalités de rupture du contrat. Par conséquent, a priori, l'amendement n° 655 n'est pas compatible avec l'économie du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il est cependant tout à fait clair que la question du reclassement devra être étudiée postérieurement à l'évaluation prévue avant la fin de l'année 2008 et en fonction de l'expérience retirée du fonctionnement du CPE.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mon cher collègue, je vous remercie, car il s'agit d'une proposition intéressante. Cependant, pour l'instant, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Nous ne pouvons pas discuter ! Vous nous en empêchez !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes

Monsieur le sénateur, je veux revenir sur deux points. Je vous rappelle tout d'abord que les partenaires sociaux doivent mettre en place une convention de reclassement personnalisé, qui s'applique à la fois au contrat « nouvelles embauches » et au contrat première embauche.

Par ailleurs, la multiplication des voies procédurales assure-t-elle une garantie supplémentaire aux salariés ? Je n'en suis pas tout à fait certain. Naturellement, il existe des droits, un ordre public social. Les éléments procéduraux doivent être clairs. De ce fait, il est nécessaire de clarifier le « maquis additionnel » qui vise le code du travail et qui justifie une recodification à droit constant.

La réflexion qui devra être engagée devra concilier la souplesse du marché du travail et sa sécurisation.

Monsieur le sénateur, pour les deux raisons que je viens d'évoquer, le Gouvernement ne peut pas être favorable à l'amendement n° 655.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 161, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du sixième alinéa () du II de cet article, supprimer les mots :

ou force majeure

La parole est à Mme Gisèle Printz.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Je crois le moment venu de faire le point de la situation.

L'identité collective par le travail résulte, notamment, du développement de droits uniformément reconnus à tous les travailleurs. À partir du moment où le besoin de sécurité physique et économique des salariés s'est inscrit dans des droits, ceux-ci ont constitué l'un des objets principaux de l'activité des organisations représentatives, qui font respecter les droits existants ou cherchent à en conquérir de nouveaux.

De la reconnaissance de ces droits, de leur accumulation et de leur organisation en système a émergé le droit du travail, qui tient lieu à la fois de procès-verbal et de rempart des conquêtes d'une classe sociale déterminée, ce qui a conduit à y voir un « droit ouvrier », autant dire un « droit de classe ».

La combinaison de ces droits a donné le jour à la situation juridique du travailleur salarié, autrement dit à un système de règles s'appliquant de manière uniforme à tous les salariés, réduisant ainsi progressivement le contrat de travail à un acte, condition de l'application d'un statut commun à tous les travailleurs.

C'est le contrat de travail à temps plein et à durée indéterminée qui a joué ce rôle d'acte propre à donner aux travailleurs une véritable identité professionnelle. Tous ceux qui sont liés par un contrat de ce type se trouvent également unis entre eux par un sentiment d'appartenance à une même communauté professionnelle.

Le syndicalisme, la sécurité sociale, la mutualité ont été modelés sur leur situation juridique. Les ouvriers avaient un « état » au XIXe siècle et aujourd'hui ils sont intégrés dans un appareil de représentation et de protection de leurs intérêts.

La clé de voûte de la socialisation par le travail, c'est le contrat de travail à durée indéterminée. Il faut entendre par là que le travail ne suffit pas à assurer l'intégration sociale ; les exclus eux aussi travaillent et accomplissent même les tâches les plus dures et les plus rebutantes. Mais le travail n'est un instrument d'identification professionnelle, et donc d'intégration sociale, que dans la mesure où il s'inscrit dans une forme juridique stable, comme le statut du fonctionnaire ou le contrat à durée indéterminée du salarié. Les risques d'exclusion augmentent donc d'autant plus que l'on s'éloigne durablement de ce cadre de référence. S'en écarter provisoirement amène le salarié à relever d'un autre statut juridique, aujourd'hui bien assis, à savoir celui du chômeur temporaire, en transit entre deux emplois, et n'ayant droit qu'aux prestations de l'assurance souscrite à cet effet ou aux minima sociaux lorsque la situation se prolonge.

Avec ce projet de loi, nous sommes plus que jamais au coeur de la question. Au travers de la modification des règles juridiques relatives au contrat de travail, c'est cette identité collective que vous êtes en train de briser, mes chers collègues. Et nous avons la conviction qu'une partie d'entre vous le fait sciemment.

Certains mesurent parfaitement, avec le MEDEF, les enjeux du processus en cours. Il s'agit bien de détruire l'identité collective formée autour du travail, du statut salarial stable et des conquêtes sociales qui ont marqué son développement.

La compétitivité des entreprises, dans cette affaire-là, devient un alibi commode. En multipliant les formes juridiques sous lesquelles s'effectue le travail - CDD, intérim, contrats d'accès à l'emploi, contrats d'avenir, CPE, CNE, contrats de réinsertion-revenu minimum d'activité, les CIRMA, partage salarial, protection des services -, en précarisant toujours plus les travailleurs, en faisant toujours pression à la baisse sur les salaires, il ne s'agit pas seulement de favoriser systématiquement l'actionnaire au détriment du travailleur ; il s'agit aussi d'individualiser et d'isoler chaque travailleur et de détruire les bases du mouvement social.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'application du préavis me paraît peu compatible avec une situation de force majeure. Il est donc naturel de prévoir cette exception à la règle. La commission émet par conséquent un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame le sénateur, nous avons déjà évoqué hier la force majeure. À cette occasion, j'ai indiqué que, dans un certain nombre de cas, le CPE pouvait apporter des garanties supérieures à celles qui sont prévues dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Je rappelle que la force majeure résulte d'un événement imprévisible, inévitable, insurmontable, créant une impossibilité absolue et durable d'exécuter le contrat de travail, sans que cette impossibilité puisse être imputée à l'employeur. Lorsqu'un cas de force majeure est reconnu, il emporte rupture immédiate du contrat de travail, sans que cette rupture puisse lui être attribuée.

L'employeur est donc dispensé de la procédure de licenciement et n'a pas à verser d'indemnités de préavis ou de licenciement. Il doit seulement acquitter au salarié l'indemnité de congés payés.

Or, dans le cadre du CNE, et demain du CPE, une indemnité de 8 % doit être obligatoirement versée. Les droits ouverts pour ces deux contrats - c'est la nouvelle procédure de sécurisation - sont supérieurs, en cas de force majeure, à ceux qui existent pour le contrat de travail à durée déterminé classique. C'est, me semble-t-il, un exemple de la construction d'un nouveau parcours de sécurisation.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Ce sera très peu utilisé ! Ce sera l'exception !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 162, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le sixième alinéa () du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :

En cas de faute grave, l'employeur est tenu de respecter la procédure prévue à l'article L. 122-41 du code du travail.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Cet amendement de précision tend, en cas de faute grave, à ce que l'employeur soit tenu de respecter la procédure prévue à l'article L. 122-41 du code du travail.

Monsieur le ministre, le projet de loi actuellement en discussion comporte une bizarrerie. Le licenciement peut être prononcé sans motif et sans que soit respectée une quelconque procédure. Laissons de côté la force majeure. En cas de faute grave, le licenciement devra bien être motivé puisque, si l'employeur n'invoque pas ladite faute vis-à-vis d'un salarié à l'encontre duquel il a quelques griefs, il devra respecter le préavis et assurer le paiement des indemnités de rupture. Il aura donc tout intérêt à invoquer la faute grave pour ne rien payer, comme de nombreux employeurs le font d'ores et déjà.

Pour invoquer la faute grave, surtout en prévision du recours qui ne manquera pas d'être intenté devant le conseil des prud'hommes, il faut bien qu'il définisse cette faute et qu'il l'indique évidemment par écrit.

C'est ce qui nous amène à demander, au moins dans ce cas de figure, l'application du code du travail. S'il y a faute grave présumée, l'employeur doit au moins être tenu de l'invoquer dans un délai raisonnable et non, par exemple, vingt et un mois après le début du contrat, soit avant la fin du CPE en l'occurrence.

Monsieur le ministre, une difficulté apparaît. Le code du travail indique notamment que la convocation à l'entretien préalable, en cas de procédure de licenciement, doit être envoyée au plus tard dans les deux mois à compter du jour de la connaissance des faits par l'employeur. Qu'en sera-t-il dans le cas du licenciement pour faute grave d'un salarié recruté par le biais d'un CPE ? Comment cela va-t-il s'articuler ?

Je veux maintenant évoquer un dernier point. Pour permettre à l'employeur d'être exonéré du respect du préavis et du paiement d'indemnités dans le cadre d'un licenciement pour faute grave, on arrive à ce paradoxe sidérant selon lequel le salarié sera le seul à « bénéficier », si je puis dire, d'un licenciement motivé.

Le salarié, dont on voudra simplement se débarrasser, bénéficiera glorieusement de quinze jours ou d'un mois de préavis et de son indemnité de 8 %, mais il n'aura pas le droit de savoir les raisons pour lesquelles il est licencié, sauf à contester son licenciement pour rupture abusive, la charge de la preuve pesant à ce moment-là sur lui.

Le salarié fautif aura déjà au moins de quoi contester son licenciement. Voilà qui démontre, si besoin en était, à quel point le dispositif que vous proposez est incohérent et source permanente de contentieux.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La commission est défavorable à cet amendement, estimant qu'il est satisfait. Le code du travail, je le répète, est applicable au CPE, les cas de fautes graves et de fautes non graves étant prévus dans le projet de loi.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Cet amendement est superfétatoire, comme le disait M. le rapporteur. Car, dans le projet de loi, n'est pas exclu le respect de la procédure disciplinaire en cas de rupture pour faute du salarié. Cela nous renvoie à l'article L. 122-41 du code du travail, comme dans le cas d'un contrat à durée indéterminée classique.

Voilà pourquoi le Gouvernement ne peut pas être favorable à cet amendement. Je rappelle que nous ne sommes pas dans une zone de non-droit social. Cela a été l'objet de nos échanges et de nos débats hier soir.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 509, présenté par M. Vallet et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après le sixième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

... °L'accès au crédit est ouvert auprès des établissements bancaires aux salariés employés sous le régime d'un contrat de première embauche. Les banques ne peuvent invoquer ce régime pour refuser des éventuelles ouvertures de crédits.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

L'objet de cet amendement est d'éviter que les établissements bancaires ne puissent invoquer le contrat de première embauche pour refuser à un salarié l'accès au crédit. Les salariés en CPE doivent pouvoir bénéficier, à l'instar de n'importe quels salariés, d'ouverture de crédits pour l'achat de mobilier ou d'un véhicule, par exemple. C'est là un droit essentiel, qui apporte une protection élémentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La rédaction de cet amendement est excessivement impérative. Si elle l'estime utile, une banque refusera d'accorder un crédit en invoquant les motifs habituels, sans mentionner le CPE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est comme pour licencier les travailleurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur Muzeau, il n'existe pas un monde du CPE !

Peut-être M. le ministre pourrait-il nous rappeler à nouveau les initiatives prises par le Gouvernement afin de faciliter l'accès des titulaires de CPE au crédit bancaire ?

L'avis de la commission est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Les banquiers feront-ils comme les patrons ? Telle est la question !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappelle que le CPE est un CDI.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

En ce qui concerne le CNE, le Premier ministre a engagé, avec la fédération des banques françaises, l'Association française des établissements de crédit et les compagnies d'assurances, un dialogue qui s'est révélé fructueux.

L'engagement qui a été pris par ces organismes représentatifs est bien de considérer le contrat « nouvelles embauches » et le contrat première embauche comme n'étant pas des instruments de discrimination.

S'agissant de l'accès au logement, le projet de loi apporte un progrès par rapport à la situation de précarisation actuelle. En effet, la moitié des CDD, pour les moins de vingt-six ans, sont d'une durée allant de moins d'un mois à un mois, et n'ouvrent pas droit à l'obtention de crédits de la part des organismes financiers.

C'est là l'un des éléments que le Gouvernement a pris en compte lors de ses négociations avec les organismes représentatifs, notamment du secteur bancaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 163, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du septième alinéa () du II de cet article, après les mots :

des salaires

insérer les mots :

au sens de l'article L. 140-2 du code du travail

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Par cet amendement, nous proposons de préciser que le montant des salaires restant dus en cas de licenciement s'entend au sens de l'article L. 140-2 du code du travail.

Outre le salaire de base, le salaire brut, doivent être mentionnés les compléments ou accessoires de salaire. Il peut s'agir d'un mois double, d'un treizième mois, d'une prime de fin d'année ou de primes liées à des spécificités ou à des usages professionnels. Certains de ces accessoires de salaire ont un caractère obligatoire parce qu'ils sont mentionnés dans les conventions collectives. D'autres sont à la discrétion de l'employeur.

Quelle sera la situation du salarié en CPE au regard de ces primes et accessoires ? La jurisprudence admet que le droit à gratification soit subordonné à la condition d'appartenance à l'entreprise au moment de sa distribution.

J'en veux pour preuve deux arrêts de la Cour de cassation : le premier, en assemblée plénière du 5 mars 1993, et, le second, du 28 mai 2003 de la chambre sociale, aux termes desquels même en l'absence d'une disposition expresse excluant du bénéfice de la gratification les salariés ayant quitté l'entreprise avant la date de son versement, le droit au paiement d'une gratification calculée au prorata du temps de présence ne peut résulter que d'une convention expresse ou d'un usage, dont il appartient au salarié d'apporter la preuve.

On voit bien ce qui peut en résulter en ce qui concerne les contrats précaires.

La question se pose aussi, d'ailleurs, pour les salariés en contrat « nouvelles embauches ». Lorsqu'un salarié a quitté une entreprise depuis plusieurs mois, qui va le rappeler pour lui dire qu'il a droit à la prime de bilan ?

Cependant, le fait que le CPE soit ouvert dans toutes les entreprises, et pas seulement dans celles de moins de vingt salariés, amène à se poser une autre question : quelle sera la situation du salarié, notamment de celui qui aura été licencié, par exemple, après vingt-trois mois, au regard de l'intéressement ou du compte de participation ?

Que prévoyez-vous exactement, monsieur le ministre, pour garantir le versement de toutes les primes et accessoires de salaire au salarié licencié sans motif ? Qu'en sera-t-il pour l'intéressement et la participation ?

S'il est réembauché après trois mois de délai de carence, comment cela fonctionnera-t-il ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Je vous ai écoutée avec beaucoup d'attention, ma chère collègue. Le texte étant déjà fort complexe, je ne souhaite pas l'alourdir. S'adressant le plus souvent à des jeunes, il doit être lisible ! La commission est défavorable à cet amendement.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je rappelle que le mécanisme du CPE, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... s'il est encadré par des règles de procédure notamment s'agissant de la rupture du contrat pendant les vingt-quatre premiers mois, qui peuvent être minorés des temps de formation en alternance, des contrats, des stages ou de l'intérim, ne conduit à ne toucher aucune virgule en ce qui concerne les autres conventions collectives.

Quant aux dispositions relatives à l'intéressement et à la participation, mais aussi au plan d'épargne entreprise, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

L'intéressement pour un salarié qui travaille quatre mois : vous plaisantez !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... elles s'appliquent bien entendu à ces salariés pendant cette période de consolidation sous réserve du délai de trois mois, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... qui est le délai normal pour participer à l'intéressement ou à la participation.

Aucun de ces droits n'est touché. Cela me semblait aller de soi, mais il s'est révélé important d'apporter cette précision, pour la clarté du débat.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 164 est présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 668 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans la première phrase du septième alinéa () du II de cet article, remplacer le pourcentage :

par le pourcentage :

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 164.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Par cet amendement, nous proposons de porter le montant de l'indemnité de précarité due au salarié en CPE de 8 % à 15 % du montant du salaire brut.

En quelque sorte, on peut dire que la précarité d'un jeune en CPE est bien plus grave encore que celle d'un salarié en CDD ou en intérim, puisqu'il peut être licencié à tout moment et sans motif, ce qui n'est pas le cas du salarié en CDD, qui ira jusqu'au terme de son contrat, sauf faute grave.

Le salarié vit dans une angoisse permanente. Il n'est jamais sûr d'être là encore le lendemain, le surlendemain et ainsi de suite !

Voilà ce que l'on propose à notre jeunesse. De cette angoisse quotidienne, il convient de tenir compte.

De plus, il faut rappeler que ce jeune ne pourra construire convenablement sa vie dans ces conditions.

Admettons, néanmoins, qu'il parvienne à obtenir d'une banque un crédit pour acheter une voiture d'occasion.

Les membres de l'Association française des banques ont, sur votre invitation et en tant que membres du MEDEF, indiqué que les salariés en CPE seront traités comme les salariés en CDI. C'est déjà, d'ailleurs, un aveu quant au fait que le CPE n'est pas un CDI. Passons !

Sur le fond, c'est prendre les jeunes pour des demeurés, ainsi que nous d'ailleurs, car les conditions de prêt sont toujours similaires : elles sont liées aux revenus, c'est-à-dire à leur montant et à leur durée prévisible, au patrimoine, à l'état de santé de l'emprunteur et, pour les jeunes, en particulier, souvent, à la caution éventuelle.

La vraie question que l'Association française des banques s'est bien gardée d'évoquer est celle de l'assurance chômage, qui est liée à l'emprunt.

S'il se trouve une banque qui prête à un jeune en situation de précarité totale, va-t-elle le faire sans assurance chômage ? Évidemment non. S'appuiera-t-elle sur la caution ? Oui, mais que se passera-t-il si l'emprunteur n'a pas la caution ou les garanties suffisantes, surtout à vingt-cinq ans ?

On peut dire que les conditions de prêt seront les mêmes pour un salarié en CPE ou en CNE que pour n'importe qui d'autre. En l'absence de garanties patrimoniales ou de caution solvable, il n'y aura pas d'emprunt possible. Petit handicap quand on démarre dans sa vie d'adulte !

Cependant, si l'on admet, comme je le disais au départ, que le jeune a fait un achat à crédit, au cas où il serait licencié du jour au lendemain, les mensualités vont continuer à courir. Il lui faudra donc payer, ce qui supposera le recours à la caution, la saisie de l'éventuel patrimoine, à moins que l'on n'opte pour la procédure de surendettement.

Je n'exagère même pas en disant cela, mais la vraie question est celle de la précarisation de la situation des jeunes, y compris de ceux qui peuvent accéder aujourd'hui à un CDI, et des difficultés économiques et sociétales que cela ne manquera pas de créer.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 668.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Cet amendement est relatif à la prime de précarité à laquelle le salarié embauché a droit dans le cadre d'un contrat de première embauche et en cas de licenciement.

Le paragraphe II tend à préciser que cette prime relève du même régime que la prime de précarité due aux salariés embauchés en CDD à la fin de leur contrat.

En revanche, le montant n'est pas le même, puisque, dans la prime initiale due après CDD, le montant est fixé à 10 % du montant total de la rémunération brute du salarié, alors que ce montant n'équivaudra qu'à 8 % du même total pour les salariés embauchés en CPE.

Pourquoi un tel écart ? Il est tout de même incroyable que le CDD devienne maintenant l'un des contrats les plus intéressants en termes de garantie des droits.

Avec le CNE et, maintenant, le CPE, le Gouvernement a définitivement installé la précarité, en la généralisant à toutes les formes d'emplois. En disant qu'avec le CPE ou le CNE il s'agit de faire des contrats à durée indéterminée, vous essayez en fait d'imposer de nouvelles normes sociales et vous plongez le monde du travail dans la fragilité professionnelle, sociale et familiale.

Dans la mesure où le licenciement peut intervenir à n'importe quel moment, après un court préavis, pendant les deux premières années, il est normal que les difficultés matérielles et personnelles engendrées par cette rupture de contrat soient compensées. C'est pourquoi nous estimons que la prime de précarité doit être plus importante et nous proposons de fixer son taux à 15 %.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Il faut penser aux travailleurs de temps à autre !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'indemnité de précarité due à l'issue d'un CDD est fixée à 10 % de la rémunération brute. L'employeur d'un salarié en CPE devra payer 8 % d'indemnités de rupture, auxquels s'ajouteront 2 % de contributions destinées à financer des actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi.

Le montant total de ces indemnités est ainsi le même dans les deux cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il serait vraiment paradoxal de dissuader les employeurs de recourir au CDD plutôt qu'au CPE, en fixant une indemnité plus élevée pour la rupture de ce dernier contrat !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Parce qu'il faut leur laisser le choix !

Souriressur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Un parallélisme a été établi par les auteurs de ces amendements entre le taux de 10 %, applicable en cas de rupture du CDD, et celui de 8 %, qui concerne le CPE.

Or, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler hier à propos d'un amendement du groupe CRC, il existe une différence entre les deux contrats : Le titulaire salarié d'un CDD paie des cotisations sociales et des impôts, alors que celui d'un CPE en sera totalement exonéré.

En outre, dans un certain nombre de branches ou d'entreprises, il existe un accord collectif prévoyant une indemnité de rupture de CDD de 6 %, et non de 10 %.

Enfin, l'Association française des sociétés financières a effectivement indiqué par écrit à l'ensemble de ses sections, le 22 novembre 2005, que le CNE et le CDI devaient être traités sur le même plan lors de l'examen des demandes de crédits.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Parallèlement, nous constatons une augmentation de plus de 10 % des crédits distribués aux particuliers sur l'année 2005.

Par ailleurs, les assureurs, qui préparent actuellement un projet de convention permettant l'accès au logement et la mise en place d'une assurance logement dans le cadre du dispositif local LOCAPASS et de tous les dispositifs favorisant l'accompagnement social, nous ont dit, à la suite de leur audience, le 15 février dernier, par M. le Premier ministre que, dans l'attente de la signature de cette convention, la Fédération française des sociétés d'assurances avait demandé à ses adhérents de prendre en considération les demandes d'assurance de loyers impayés selon les modalités habituelles.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Il n'y a donc pas d'exclusion.

La convention qui est en cours de préparation sera prête en même temps que l'ensemble des décrets permettant de proposer le CPE aux jeunes de moins de vingt-six ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 445, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. Dans la première phrase du septième alinéa du II de cet article, remplacer le pourcentage :

par le mot :

II. Après la même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :

Une convention ou un accord collectif de travail peut déterminer un taux plus élevé.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Alors que l'économie mondialisée occupe toutes les niches de non-droit social ou environnemental afin d'augmenter ses bénéfices, il existe tout de même des outils internationaux répondant à l'intérêt public et dont l'objectif est de faire rempart à des pratiques de prédation et d'exploitation des hommes, des femmes, voire des enfants dans les pays en voie de développement. C'est le cas, par exemple, de l'Organisation mondiale du travail, l'OIT. Nous allons bientôt devoir y recourir.

Le démantèlement à la française du code du travail conduit à la transgression des règles minimales de protection des travailleurs.

À la proposition des deux orateurs précédents, tendant à augmenter le taux des indemnités de rupture de 8 % à 15 %, j'ajoute une référence aux accords ou conventions collectives, car ceux qui prennent part à leur négociation sont plus expérimentés que les jeunes embauchés.

Je voudrais, au-delà de la condamnable précarisation induite par cet article du projet de loi, attirer votre attention sur le vécu d'instabilité auquel vous allez livrer les jeunes. Vous qui vantez les mérites de la croissance, vous n'êtes pas prêts de favoriser la consommation de ces nouveaux embauchés qui savent qu'ils pourront être licenciés brutalement, à n'importe quel moment.

Cet amendement vise au moins à ce que les indemnités de rupture de contrat ne soient pas en deçà de tout. En augmentant les indemnités de 8 % à 15 %, nous éviterons que les employeurs ne soient abusivement encouragés à user de pratiques peu responsables à l'égard de la société.

Prenons tous en compte ce qu'est le vécu réel : le loyer à payer, le préavis à déposer en cas de déménagement, les factures de gaz, d'électricité, les courses...

Quelle société préparez-vous ? Une société où les jeunes ne pourront plus construire leur autonomie ? Resteront-ils chez leurs parents, si ceux-ci peuvent les héberger, ou prendront-ils le risque de connaître l'expulsion et la spirale de l'exclusion ? Cette tiers-mondisation rampante, préfigurant une organisation sociale comparable à celle de nombre de grandes métropoles africaines, est lamentable.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il n'est pas normal d'entendre de pareils arguments !

On ne peut pas comparer la situation d'un jeune qui reste sur le trottoir à celle d'un autre jeune, qui aura la chance, grâce au CPE, d'entrer dans l'entreprise et de montrer ses compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il y a de quoi s'étrangler quand on entend cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Chacun est libre de choisir. Pour ma part, entre les deux solutions, je préfère que le jeune travaille !

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je réponds simplement à l'argumentation qui vient d'être présentée !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Hier, vous disiez que je ne répondais pas assez !

Je suis persuadé que les propos que j'ai entendus seront pris en considération, mais je ne donnerai pas un avis favorable sur cet amendement, qui est similaire aux deux amendements précédents.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

En cas de rupture d'un CDI au cours des deux premières années, le code du travail ne prévoit pas d'indemnités de rupture.

Dans le cas du CPE, il existe des indemnités croissantes dont le taux s'élève au minimum à 8 %. Nous proposons un taux plancher. Rien n'empêche les conventions collectives de prévoir plus.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Dans la métallurgie, il existe un accord global, qui a d'ailleurs été signé par les partenaires sociaux depuis fort longtemps.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Il ne s'agit donc pas d'une décision unilatérale.

L'avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 669, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la troisième phrase du septième alinéa du II de cet article :

À cette indemnité versée au salarié s'ajoute une contribution de l'employeur variant en fonction de la date de la rupture du contrat : 8 % de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat lorsque la rupture intervient dans les six premiers mois ; 6 % de six à douze mois ; 4 % de douze à dix-huit mois ; 2 % de dix-huit à vingt-quatre mois.

La parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous vous faisons une proposition.

Nous voulons construire un projet, mais aussi défendre le salarié.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

S'agissant de l'indemnité de rupture, nous proposons de mettre en place une contribution supplémentaire qui serait versée par l'employeur et varierait en fonction de la date de rupture du contrat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cela vous aiderait à garder les jeunes dans l'emploi !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cet amendement vise donc à moduler et à augmenter le montant de la contribution de l'employeur au moment de la rupture du contrat et au regard des grandes situations de précarité que ne manquera pas de créer ce nouveau contrat dit de première embauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cet amendement complète le précédent, qui était relatif à la prime de précarité.

Nous avons rappelé en quoi la mise en place de ce contrat première embauche, qui s'inscrit dans la droite ligne du contrat nouvelle embauche, fait exploser les normes sociales en terme de précarité.

Depuis le développement d'un chômage de masse qui, d'ailleurs, est reparti à la hausse, contrairement à tout ce que l'on nous avait dit, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Voilà qui explique la popularité du Premier ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'était tellement simple ! Le CNE n'a servi à rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Il a fait « pschitt » ! Ci-gît le CNE !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... on a vu s'opérer une distinction entre emplois stables et emplois précaires.

Mais, depuis l'arrivée de votre majorité au pouvoir, la dégradation des conditions d'emploi s'est généralisée : les emplois précaires, sous-qualifiés et mal rémunérés deviennent la norme.

Cette norme s'impose au détriment de l'emploi dit « typique » qui, à cause de cette majorité, va devenir de plus en plus rare.

Je rappelle que l'emploi typique, c'était l'emploi à temps complet, en contrat à durée indéterminée, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... qui offrait un niveau de revenu permettant une projection personnelle et familiale dans l'avenir, ainsi qu'un statut social et des droits, et dont nous avons bénéficié, ce qui nous a permis de prendre l'ascenseur social.

Et je suis persuadé qu'un certain nombre de mes collègues en ont également profité. Je ne parle pas de ceux qui sont bien nés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Disons nés avec une cuillère d'argent dans la bouche !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Actuellement, 17 % de la population active dispose d'un emploi précaire, pourcentage auquel il faut ajouter les 5 % de la population active qui se trouve en situation de sous-emploi, c'est-à-dire les personnes qui travaillent à temps partiel alors qu'elles souhaiteraient travailler plus. Au total, un travailleur sur cinq est victime de conditions d'emploi dégradées.

Mais ces chiffres ne tiennent pas compte du fléau que constitue le CNE, et que va renforcer le CPE.

Nous risquons aussi de voir se généraliser la pauvreté parmi les travailleurs, phénomène qui a fait son apparition ces dernières années et qui touche actuellement 3 millions de personnes, les « travailleurs pauvres ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il n'y a jamais eu autant de personnes qui gagnent moins que le SMIC.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Vous avez probablement conscience de la dérive induite par ces nouveaux contrats, monsieur le ministre, puisque vous envisagez une contribution supplémentaire des entreprises à hauteur de 2 % de la rémunération brute du salarié, afin de financer des actions en faveur des salariés privés d'emploi.

Mais cette mesure n'est pas suffisamment « désincitative » pour les employeurs. Le montant de la contribution limitée à 2 % ne permettra pas de décourager l'entreprise de se séparer d'un salarié.

Par cet amendement, et c'est là toute son intelligence, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... nous proposons que cette contribution soit modulable en fonction du moment où intervient le licenciement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Plus celui-ci interviendrait rapidement, c'est-à-dire dans les tout premiers mois du CPE, plus le pourcentage de la compensation serait élevé.

Ce montant serait dégressif, dans la limite du taux de 2 % que vous préconisez, seulement si le salarié est licencié entre le 18ème et le 24ème mois.

Ces éléments de modulation pourraient avoir une véritable fonction de responsabilisation des entreprises, tout en offrant des moyens de financement non négligeables.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. J'ai bien évidemment écouté M. Fischer, qui a dit des choses intéressantes

Ah ! sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur Fischer, rendre le CPE nettement plus coûteux pour l'employeur que le CDD est tout à fait incompatible avec l'intention de la commission de favoriser l'utilisation de cet outil de lutte contre la précarité. Si le CPE n'est pas incitatif, pourquoi les futurs employeurs s'en serviraient-ils ? La commission émet donc un avis défavorable, mais elle se souviendra de vos intéressantes propositions dans l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Des promesses ! On a vu avec Sarkozy et GDF ce que cela voulait dire !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je rappelle que le projet de loi prévoit que les employeurs qui viendraient à rompre un contrat première embauche verseront une contribution, égale à 2 % de la rémunération brute depuis le début du contrat, au régime d'assurance chômage pour financer des actions d'accompagnement renforcé en direction du salarié dont le contrat est rompu.

Au moment de la négociation sur le régime de l'assurance chômage, il y a eu un débat sur la contribution des employeurs, notamment pour financer des actions d'accompagnement et de formation en faveur des demandeurs d'emploi indemnisés, pour divers types de contrat. Nous devons d'ailleurs aussi prendre en compte la situation des demandeurs d'emploi non indemnisés : nous étudions actuellement des propositions que nous vous présenterons dans les semaines qui viennent. Cependant, s'agissant des divers types de contrat, je veux à cet instant du débat citer les chiffres qui ressortent d'une étude parue à la mi-2005, chiffres qui font apparaître que la situation évolue peu.

Ainsi, à la mi-2005, les contrats à durée déterminée représentaient 5, 2 % de l'ensemble des contrats alors que la part des contrats à durée indéterminée était de 89, 3 %, avec d'ailleurs une relative inégalité entre les hommes et les femmes puisque ces dernières se voient moins souvent proposer des contrats à durée indéterminée.

Les contrats d'apprentissage représentaient 1, 1 % de l'ensemble des contrats. Ce pourcentage, on le sait, est en croissance, et les chiffres du mois de janvier, puisqu'ils ont été évoqués, confirment les bons résultats des contrats d'apprentissage et des contrats de professionnalisation.

Enfin, la part des contrats intérimaires était de 2, 1 %, et celle des contrats aidés de 2, 3 %.

Hors les CDI, il s'agit donc de contrats représentant un peu plus de 10, 6 % de l'ensemble des contrats. Voilà la réalité telle qu'elle est, et je crois que la dernière négociation sur le régime d'assurance chômage, qui est en cours d'agrément, a permis un certain nombre d'avancées dans ce domaine.

Le Gouvernement ne peut donc pas être favorable à votre amendement, monsieur Fischer.

Il n'en reste pas moins que la convention de reclassement personnalisé est bien financée en partie par l'employeur tout en ne constituant pas une sanction à son encontre : c'est sa contribution au parcours d'accompagnement du salarié dont le contrat a été rompu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 165, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernière phrase du septième alinéa () du II de cet article par les mots :

et l'accès aux conventions de reclassement personnalisé prévues à l'article L. 321-4-2 du code du travail

La parole est à Mme Christiane Demontès.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Cet amendement prévoit l'accès à la convention de reclassement personnalisé pour le jeune victime d'un licenciement économique.

Dans cette situation, je le rappelle, le salarié devient stagiaire de la formation professionnelle et doit alors pouvoir bénéficier d'actions d'orientation, d'actions de bilan de compétences, éventuellement d'actions de validation des acquis de l'expérience, ou VAE, et, bien évidemment, d'actions de formation, en particulier de formation qualifiante.

La convention de reclassement personnalisé est nettement plus précise que les actions d'accompagnement du salarié telles que vous les entendez et telles que vous les proposez dans le cadre de cet article concernant le contrat première embauche.

La convention de reclassement personnalisé permet au bénéficiaire de construire un parcours professionnel, un parcours de formation qui, de notre point de vue, lui permettra d'espérer davantage au moins un retour à l'emploi.

Dans ce cas, non seulement le jeune ne sera pas dans l'impossibilité de refuser n'importe quel emploi - j'insiste sur les mots : « n'importe quel » -, mais il aura en plus le statut de stagiaire, statut qui lui apportera une certaine sécurité et un complément de formation.

Nous proposons donc que l'accès des jeunes licenciés d'un contrat première embauche à une convention de reclassement personnalisé soit automatique, et cela dans tous les cas et quel que soit le déroulement des négociations internes dans l'entreprise avec les partenaires sociaux.

Accessoirement, je rappelle que, en cas de non-proposition au salarié, l'employeur se doit de verser aux ASSEDIC une contribution égale à deux mois du salaire brut du salarié licencié.

Vous ne cessez d'affirmer, monsieur le ministre, que le contrat première embauche est « l'outil miracle » pour faire baisser le chômage des jeunes. Au vu des chiffres du chômage de janvier, chiffres qui, à cause ou, peut-être, grâce au contrat nouvelles embauches, affichent une nouvelle augmentation, ce n'est pas gagné, et l'on peut craindre que vous n'ayez pas encore trouvé « l'outil miracle » !

Mais, pour le moins, vous devez permettre aux jeunes qui perdent leur emploi de bénéficier de tous les outils existants qui permettent de créer les conditions d'un possible retour à l'emploi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Ma chère collègue, personne n'a parlé d'« outil miracle ». On l'a dit et répété, en commission comme dans cet hémicycle, le CPE est « un outil » que nous estimons intéressant, mais, de là à parler d' « outil miracle », il ne faut pas exagérer !

Par ailleurs, je suis un peu étonné de ce que j'entends, car, à longueur de temps, vous nous reprochez de ne pas accepter le dialogue social. Attendons donc, ma chère collègue, d'avoir l'avis des partenaires sociaux !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Si vous voulez le dialogue social, laissez tout de même aux partenaires sociaux la possibilité d'exprimer leurs souhaits : vous ne pouvez être à la fois d'un côté et de l'autre.

Le 3° du II de l'article 3 bis prévoit, à défaut du bénéfice des conventions de reclassement personnalisé, des « actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi en vue de son retour à l'emploi ». C'est nous qui avons un peu « poussé » le Gouvernement à accepter cette avancée, qui est donc due, mes chers collègues, au travail du Sénat !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Eh bien, allons jusqu'au bout ! Inscrivez-le dans la loi !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Il est important qu'il y ait un accord entre les partenaires sociaux sur la convention de reclassement personnalisé.

Le projet de loi renvoie donc à un accord entre les partenaires sociaux le soin de définir les conditions et les modalités selon lesquelles les salariés embauchés en contrat première embauche pourront bénéficier de la convention de reclassement personnalisé.

Je profite de cet instant pour rappeler qu'au moment de l'examen de la loi de programmation pour la cohésion sociale la convention de reclassement personnalisé n'avait pas suscité, sur les travées de gauche de cet hémicycle, un très grand enthousiasme. Or, aujourd'hui, l'ensemble des partenaires sociaux participent à la mise en oeuvre de ce dispositif et mettent en place, dans des territoires qui connaissent de plus grandes difficultés, des conventions de reclassement personnalisé « plus », d'ailleurs avec le soutien de régions et de départements. Je citerai l'exemple de Romans et du secteur de la chaussure, où il y a une convention de reclassement personnalisé « plus », ou celui de l'ouest de la France, où plusieurs conventions de reclassement vont être mises en oeuvre pour faire face, notamment, à l'évolution du secteur de l'électronique.

Il s'agit d'apporter des réponses à la fois en termes de réactivation des bassins, de contrats de site, et de revitalisation - en utilisant d'ailleurs un décret de l'été 2005 qui prévoit la participation des entreprises, et pas seulement des très grandes entreprises, au financement de la revitalisation des bassins d'emplois - et en termes d'accompagnement renforcé au travers d'une convention de reclassement personnalisé des demandeurs d'emplois.

Par ailleurs, sous l'impulsion du président de la commission des affaires sociales et de son rapporteur, nous avons entamé une réflexion qui va plus loin que celle que j'annonçais à l'Assemblée nationale sur l'accompagnement personnalisé dans l'emploi, en particulier celui des jeunes dont c'est parfois le premier contact avec l'entreprise et avec l'emploi.

J'évoquais hier l'importance des taux de rupture, notamment pour les jeunes sortis sans qualification du système scolaire. Je rappelle les chiffres : 150 000 sans diplôme, 60 000 sans qualification.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Nous voyons bien que l'accompagnement des premiers mois est tout à fait essentiel pour la réussite de l'entrée dans l'emploi et pour éviter ces importants taux de rupture, imputables aussi bien aux entreprises qu'aux salariés.

C'est à cela que doit s'attacher le service public de l'emploi, et, si la commission et son président le souhaitent, je pourrai les informer de ce que sera cet accompagnement personnalisé dans l'emploi - et non pas vers l'emploi, accompagnement qui relève du dispositif CIVIS, le contrat d'insertion des jeunes dans la vie sociale - de ceux qui auront signé un contrat première embauche, accompagnement dont certains auront besoin.

C'est, me semble-t-il, un élément extrêmement important pour éviter d'additionner les contrats, comme on le voit actuellement avec les contrats en intérim et les CDD. Tel est le sens de la démarche du Gouvernement, qui entend bien faire du CPE un élément anti-précarité...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... s'inscrivant dans une entrée consolidée dans l'emploi, notamment pour la génération des jeunes âgés de seize à vingt-six ans.

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 446, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le septième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

... ° L'employeur doit respecter l'article 122-14 du code du travail.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Cet amendement vise à obtenir les garanties écrites d'un entretien préalable avant licenciement.

Vous n'avez eu de cesse, au-delà des arguments - que nous n'admettons pas - en faveur du CPE, de dire, de façon assez lapidaire, « c'est toujours mieux que rien »...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je n'ai jamais dit ça !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

...et de donner à entendre aux médias la situation des jeunes en déshérence face à la rareté de l'emploi : en déshérence, peut-être, en fragilité, sûrement, face au foisonnement de statuts nouveaux aux contours incertains !

C'est pourquoi il est nécessaire que la personne « remerciée » - triste vocable - puisse bénéficier d'un entretien et être épaulée par ceux qui sont plus documentés et mieux outillés qu'elle sur le sujet.

Qui plus est, vous éviterez ce faisant la sensation de vide qui est celle du non-dialogue. On parle peu du suicide des jeunes. C'est un fléau, et il ne faut quand même pas ajouter au mépris, car le fameux « c'est toujours mieux que rien » sans accompagnement de reconnaissance de la dignité de l'individu porte en lui-même le système bien connu des harceleurs ou même d'autres professions interdites : la caresse puis la gifle, l'espoir puis la déception, l'apprivoisement puis la blessure. C'est ainsi que l'on casse les gens, économiquement et psychologiquement.

Lorsque les prud'hommes ont été amenés à se prononcer la semaine dernière, à la suite de la rupture contestée d'un contrat nouvelles embauches, M. le ministre s'est félicité...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

...de cette preuve, selon lui, que le CNE n'était pas en dehors du cadre juridique. Mais pour que cela ait un minimum de véracité, dans votre logique, encore faudrait-il que les salariés en CNE ou en CPE aient les moyens matériels d'exercer leur droit.

C'est le sens de cet amendement, qui est indispensable pour que la grande majorité des jeunes de moins de vingt-six ans, qui souvent connaissent mal le code du travail, puissent se défendre et être reconnus dans leur parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Depuis le début de nos débats, nous avons déjà eu l'occasion à plusieurs reprises d'expliquer que nous souhaitions dans cette affaire beaucoup de souplesse.

L'entretien préalable fait partie des dispositions explicitement écartées par l'article 3 bis afin de donner à l'exécution du CPE cette fameuse souplesse nécessaire à l'embauche de la jeunesse précarisée.

Mais, monsieur le ministre, si la souplesse, c'est bien, le renvoi expéditif, c'est moins bien. C'est pourquoi il est nécessaire, à mon avis, à défaut de l'inscrire dans la loi, de tout mettre en place pour qu'il y ait une explication à l'intérieur de l'entreprise. Si le licenciement intervient simplement en raison d'une absence de commandes ou de l'existence de quelques difficultés, il est facile de le dire.

Nous souhaitons qu'il y ait, avant l'évaluation, une conversation entre la personne qui va quitter l'entreprise et le patron ou le chef de service.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Voilà ce que nous voulions dire. Mais évidemment, puisque nous sommes d'accord avec l'organisation du CPE, la commission émet un avis défavorable. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

J'ai déjà eu l'occasion, lors de l'examen des amendements n° 667, 447, et répondant à Mme Gautier, d'expliciter à la fois la fonction de conseiller du salarié, laquelle peut être occupée par un salarié sous CPE, et l'assistance d'un salarié sous CPE par un conseiller, la procédure n'étant pas applicable pendant la période de consolidation.

Un débat sur la justification et la modification opposa jadis des théologiens. Je ne voudrais pas renvoyer à des manifestes célèbres, mais il faut comprendre que c'est là que se situe l'allégement procédural.

Dans aucun des cas, sachez-le, on ne doit oublier qu'un salarié, quel qu'il soit et quel que soit son contrat, peut s'adresser à la fois à l'inspection du travail, à une organisation syndicale de son choix et au conseil des prud'hommes, c'est-à-dire à la juridiction.

Je voudrais d'ailleurs rappeler que le Gouvernement entend renforcer les moyens de l'inspection du travail ; l'ordre public social, c'est en effet aussi des moyens donnés à cette dernière. Le Gouvernement présentera donc dans quelques jours un plan pluriannuel de renforcement des moyens de l'inspection, de la formation, de l'animation de l'inspection - le doublement du nombre de places au concours d'inspecteur et de contrôleur en 2006, et le maintien de ce rythme pour les années 2007, 2008 et 2009 -, ce qui nous permettra de rejoindre la moyenne européenne, notamment en termes d'effectifs de l'inspection.

Par ailleurs, je dois le dire, c'est aussi un moyen de répondre à l'information nécessaire pour le respect des relations du travail, qui doivent être équilibrées entre employeurs et salariés.

Ce renforcement de l'ordre public social contredit ceux qui pensent que la seule vocation du Gouvernement serait, comme je l'ai entendu, de détricoter en permanence le code du travail, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

...comme si le code du travail était un tricot ! Nous avons besoin de voir dans le code du travail un outil pour les relations sociales équilibrées, et non une espèce d'empilement dans lequel plus personne ne se retrouve et à propos duquel seuls quelques exégètes donnent des interprétations souvent contradictoires avant que la chambre sociale de la Cour de cassation ne se prononce finalement après bien des années. Ce n'est pas notre vision des relations équilibrées du travail.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 656, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après le septième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

La priorité de réembauchage prévue à l'article L. 321-14 du code du travail est applicable à la rupture du « contrat première embauche ».

La parole est à M. Roland Muzeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Roland Muzeau. En fait, monsieur le ministre, s'agissant de vos derniers propos, je peux indiquer à notre assemblée que votre feuille de route est contenue dans la revue du MEDEF !

L'orateur brandit un exemplaire de cette revue. -Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Et oui, mes chers collègues, je suis un lecteur attentif de cette revue

Ce numéro de novembre 2005 est consacré au code du travail, avec pour sous-titre : Une réforme urgente. Vous venez de confirmer que vous étiez en plein dedans, ce que je savais d'ailleurs pertinemment !

Monsieur le président, j'essaie d'animer un peu les débats, faute d'avoir le droit de répondre au ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

J'en viens à l'amendement n° 656.

Comme nous le voyons depuis le début de l'examen de l'article 3 bis, le contrat première embauche, c'est le retour au XIXème siècle pour une génération de jeunes envers lesquels les employeurs n'auront plus à justifier d'un motif réel et sérieux de licenciement.

Pour sortir du chômage et de la précarité, les jeunes de moins de vingt-six ans se verront offrir comme perspective une angoisse au quotidien durant les deux premières années d'exécution du contrat, si tant est que celui-ci dure si longtemps.

Par le droit, vous les précarisez et dessinez ainsi sans complexe les contours de la nouvelle condition salariale, celle qu'analyse justement M. Patrick Savidan : des salariés taillables et corvéables à merci que l'on peut jeter, reprendre au gré des besoins de l'entreprise. Ce n'est pas une caricature, c'est votre CPE !

En défendant notre précédent amendement, je faisais remarquer que l'article 3 bis avait aussi pour conséquence de priver les salariés en CPE licenciés collectivement pour motif économique des garanties de droit commun, dont l'obligation de reclassement, mais aussi de la priorité de réembauchage.

En effet, l'article L.321-14 du code du travail dispose ceci : « Le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il manifeste le désir d'user de cette priorité. Dans ce cas, l'employeur l'informe de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. [...] »

Au passage, je vous signale que la jurisprudence considère qu'un poste tenu par des stagiaires est un poste disponible. Nous reviendrons donc sur cette question un peu plus tard.

Si l'employeur manque à ses obligations en ce domaine, il est passible d'une sanction financière.

Cette priorité de réembauchage doit être mentionnée dans la lettre de licenciement ou le document écrit adressé au salarié qui énonce le motif de licenciement, motif justement absent lors de la rupture du CPE, comme chacun s'en souvient.

Si, ainsi que vous le prétendez, le CPE est destiné à sécuriser les parcours professionnels, et donc de vie, des jeunes auxquels il s'adresse, il me semble pour le moins paradoxal de ne pas prévoir que les salariés dont le contrat est rompu bénéficient d'une priorité de réembauchage pendant un an dans l'entreprise.

Notre amendement remédie à cet oubli. Il est tout aussi paradoxal de ne pas avoir envisagé sérieusement la mise en place d'autres outils financés spécifiquement par l'employeur, comme un accompagnement personnalisé, visant eux aussi à permettre aux jeunes salariés de retrouver le plus rapidement possible un emploi.

En cas de rupture, le titulaire d'un CPE ne pourra pas prétendre de plein droit à l'indemnisation du chômage. Il entrera éventuellement dans le cadre des conventions de reclassement avec accompagnement personnalisé. Avec plus de chance, il se verra offrir un autre CPE.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Je vais répondre à mon collègue. Mais peut-être le MEDEF a-t-il publié un numéro de sa revue depuis le mois novembre 2005 ?

Exclamations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

En effet, vous avez fait état d'un vieux numéro !

La priorité de réembauchage durant un délai d'un an en cas de licenciement pour motif économique vise surtout les salariés âgés, dont le réemploi est difficile.

Dans le cas du CPE, elle aurait une autre signification, qui ne serait pas bonne, s'agissant d'un jeune travailleur en recherche active d'un emploi.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

J'ai rappelé hier que la priorité de réembauchage vaut pour le licenciement économique, mais n'est pas techniquement possible pour le CPE.

Enfin, monsieur Muzeau, puisque vous trouvez dans la revue du MEDEF l'anticipation ou la vision de l'avenir, je peux vous renvoyer à d'autres lectures

Exclamations sur les travées de l'UMP

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 661, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le huitième alinéa du II de cet article.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

C'est un nouvel amendement de repli que je vous présente, puisque nous ne connaissons toujours pas le sort qui sera réservé aux quatre amendements de suppression de cet article 3 bis, ajouté par le Gouvernement.

Le début du onzième alinéa du texte proposé pour l'article 3 bis est ainsi rédigé : « Toute contestation portant sur la rupture se prescrit par douze mois à compter de l'envoi de la lettre recommandée ».

À l'époque des discussions parlementaires sur le CNE, le rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Gournac, avait lui-même jugé « souhaitable que l'ordonnance encadre le recours au CNE », précisant même que « l'absence de motivation du licenciement est perçue par les syndicats auditionnés comme une régression difficilement acceptable. Il est vrai qu'elle ramène à une situation antérieure à 1973 et qu'elle confère à l'employeur un pouvoir discrétionnaire qui peut laisser craindre des abus. »

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Bien sûr !

Effectivement, les abus sont bien à craindre. À peine quelques mois après la mise en place du contrat nouvelles embauches, le conseil des prud'hommes voit déjà se développer des plaintes pour abus de la part d'employeurs qui n'ont pas attendu longtemps pour profiter du droit qui leur a été offert de traiter leurs salariés comme une simple variable d'ajustement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

De toute façon, dans la mesure où, durant les deux premières années, le licenciement peut se faire sans obligation de motif, les salariés seront contraints d'avoir recours aux tribunaux pour faire valoir leurs droits à comprendre la justification de leur licenciement.

En fait, en analysant en détail votre texte, on s'aperçoit que ce qui va poser problème au salarié pour alimenter son recours, c'est non pas tant le fait que le licenciement peut intervenir sans motif que l'absence d'obligation pour l'entreprise de fournir ce dernier.

D'ailleurs Mme Parisot défend son CNE en considérant qu'il est respectueux du droit dans la mesure où le salarié peut saisir les tribunaux. Les accusations portées par les salariés à l'encontre d'employeurs qui auraient abusé de la situation n'ont pas fini d'augmenter puisque, pour connaître le motif de son licenciement, le salarié n'a d'autre recours que d'assigner son employeur en justice.

En tout état de cause, face à cette multiplication des recours engagés par les salariés, l'employeur ne pourra pas longtemps et indéfiniment se retrancher derrière la présomption de bonne foi ou l'absence de nécessité de motiver la rupture.

On peut légitimement croire que ce onzième alinéa, qui introduit un délai de prescription pour les recours devant les tribunaux, est bel et bien là pour éviter cette inflation des plaintes devant les prud'hommes.

Par cet alinéa, les auteurs de ce projet de loi ont probablement essayé de limiter le désaveu que risque de subir le CPE à l'épreuve de la réalité, comme cela commence à se vivre avec le CNE.

Au cours de nos précédentes interventions, nous avons rappelé que les dispositions relatives au CPE, en particulier les articles concernant les licenciements, étaient en contradiction avec les conventions internationales, ainsi qu'avec les textes européens.

Par cet alinéa, vous franchissez une étape supplémentaire dans la mise en cause du droit. C'est pourquoi il est souhaitable qu'a minima il ne soit pas introduit de délai de prescription pour un recours juridique dans la mesure où c'est le seul rempart qui restera aux salariés face à votre déferlante de précarité et de dérégulation.

D'ailleurs, si, comme vous nous le dites depuis hier, ce CPE a été créé pour déboucher sur un CDI, vous n'auriez aucun risque à approuver notre amendement.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Ma chère collègue, je voudrais vous remercier d'avoir corroboré les propos que j'ai tenus et que je ne regrette en aucune manière, même s'il est vrai que notre approche est quelque peu différente.

Pour ce qui nous concerne, nous tenons, je le répète, à rendre le système beaucoup plus souple.

S'agissant du délai d'un an, il vise à ce que le CPE soit suffisamment attractif pour réussir.

En effet, ce que nous voulons, c'est que les jeunes puissent entrer dans le monde du travail grâce, notamment, à la mise en place de cet outil important.

Toujours à propos du délai de douze mois, il me semble que le jeune ne doit pas tomber dans une espèce de contestation permanente.Il dispose d'un an, s'il le veut, pour contester la décision prise à son encontre, et je suis absolument d'accord avec cette mesure. Cela étant dit, je considère qu'il doit par la suite envisager autre chose de façon positive, car il en va de l'emploi et de la vie elle-même.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame la sénatrice, en matière de prescription, les dispositions adoptées lors du vote de la loi de programmation pour la cohésion sociale ont fixé le délai de recours pour licenciement économique à une année.

Je voudrais rappeler que, en matière de droit social, il existe une quinzaine de délais différents de prescription, allant de deux mois à trente ans, cette dernière durée étant applicable, notamment, en cas de discrimination, ce qui, en matière de licenciement, est tout de même, reconnaissons-le, un peu long !

Ce délai est de cinq ans dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Vous avez, par ailleurs, évoqué la situation d'autres pays européens. Or, dans le droit social comparé européen, cette situation est pour le moins contrastée s'agissant des licenciements économiques, la moyenne des délais se situant entre deux mois et un an.

Par conséquent, comme vous pouvez le voir, nous nous situons plutôt dans la moyenne de l'ensemble des pays de l'Union européenne.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement. En effet, le délai d'un an lui paraît apporter les garanties nécessaires, et ce d'autant plus que nous sommes dans une phase de consolidation qui s'étend au maximum sur vingt-quatre mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 166, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du huitième alinéa du II de cet article, après les mots :

portant sur la rupture

insérer les mots :

en cas de non-respect des présentes dispositions ou de rupture abusive

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Il convient d'emblée de rappeler que le CPE, comme le CNE, fait l'objet d'une procédure « à la hussarde », que ce soit sous forme d'ordonnance ou d'amendement gouvernemental présenté au dernier moment.

Cette procédure permet d'éviter l'examen par le Conseil d'État et de ne pas tenir compte des engagements pris par le Gouvernement en matière du droit du travail, tant il est vrai que les dispositions proposées dans le domaine de l'emploi devaient, en principe, selon les termes de la loi Fillon, faire préalablement l'objet d'une consultation des partenaires sociaux.

Le CPE, comme le contrat nouvelles embauches, est techniquement un CDI, et, dès lors, soumis a priori à la législation applicable aux contrats de travail dans tous les domaines.

Or la question qui se pose aujourd'hui est de savoir quelle définition il convient de donner du CDI eu égard aux nombreuses autres catégories de contrats qui ont été créées depuis la montée du chômage de masse et l'invention du CDD, en 1982.

En effet, le CDI ne se différencie de cette multitude de contrats précaires que par ses conditions de rupture, notamment lorsque cette dernière est le fait de l'employeur : respect d'une procédure de licenciement - entretien préalable, lettre recommandée, délais, etc. - et obligation d'une cause réelle et sérieuse.

Depuis la loi du 13 juillet 1973, malgré certains aléas, ces conditions ont survécu.

Le droit du travail s'applique donc au CPE, sauf en ce qui concerne quelques articles du code du travail relatifs à la rupture du contrat, pendant une durée de deux ans. Ces articles concernent toutes les dispositions ayant trait à la rupture du contrat - articles L.122-4 à L. 122- 14- 14 -, à l'exception de l'article L. 122- 12 qui, lui, est relatif à la cessation de l'entreprise, devant donner lieu à préavis et à indemnité, et à la modification de la situation juridique de l'employeur - vente, fusion -, d'où la reprise des salariés par le nouvel employeur, avant un plan social.

Ne s'appliquent pas non plus au CPE, monsieur le ministre, les articles L. 321- 1 à L. 321- 17, relatifs au licenciement économique, ce qui implique que les jeunes en CPE ne seraient pas comptabilisés dans un plan social et ne bénéficieraient ni d'indemnités ni de procédures de reclassement, etc.

En revanche, les procédures d'information et de consultation prendront en compte les jeunes en CPE, ce qui, soit dit en passant, ne fait pas avancer le schmilblick, comme aurait dit Coluche ! Il conviendrait donc, monsieur le ministre, que vous nous apportiez des précisions sur tous ces points.

La période de deux ans n'est pas nommément inscrite dans le projet de loi. Elle a malencontreusement, dans un premier temps, été appelée « période d'essai » par M. le Premier ministre, puis « période de consolidation », selon la terminologie du MEDEF.

En réalité, cette période est juridiquement innommable - cela explique sans doute qu'elle ne soit pas nommée -, sauf à tomber sous le coup de l'article 4 de la convention 158 de l'OIT, repris dans l'article 24 de la Charte sociale européenne, approuvée par la loi du 10 mars 1999 et reconnue par ailleurs d'application directe par le Conseil d'État dans sa décision du 19 octobre 2005 : « Un salarié ne devra pas être licencié sans qu'il existe un motif valable de licenciement lié à l'aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l'entreprise ».

S'agissant du CNE, au sujet duquel il a été saisi, le Conseil d'État a considéré que le licenciement peut toujours être contesté devant un juge relativement au motif de l'abus de droit, la charge de la preuve incombant au salarié. L'on pourra alors savoir - mais un peu tard - s'il existe ou non un motif sérieux de licenciement, et ce n'est que s'il y a abus de droit que le salarié aura droit à réparation.

On peut imaginer que le Conseil d'État va juger de même pour le CPE. Mais on ne peut négliger le fait que l'article 7 de la même convention 158 impose l'existence d'une procédure contradictoire en cas de licenciement pour des motifs liés à la conduite ou au travail du salarié. Dès lors - je vous pose la question, monsieur le ministre -, la procédure judiciaire a posteriori peut-elle en tenir lieu ?

En ce qui concerne la période d'essai, la même convention 158 de l'OIT prévoit qu'un État peut exclure du champ de certaines dispositions de la convention « les travailleurs effectuant une période d'essai ou n'ayant pas l'ancienneté requise ». Le présent projet de loi pourrait donc a priori entrer dans ce champ, d'autant plus que le code du travail ne prévoit aucune durée précise pour les périodes d'essai.

La jurisprudence de la Cour de cassation a néanmoins fourni un certain nombre d'indications sur la durée raisonnable d'une période d'essai, en fonction des diverses professions dont elle a eu à connaître. Ainsi, sont considérées comme excessives une période d'essai de trois mois pour un coursier, une période de six mois pour un chargé de mission, une période d'un an pour un cadre.

Il serait intéressant, selon nous, de savoir comment la Cour de cassation qualifiera cette période de deux ans sans procédure ni motif de licenciement, donc hors du droit du travail, et si elle estime qu'une période d'essai peut, le cas échéant, durer deux ans.

Le fait que la période de deux ans ne soit pas définie par le Gouvernement comme une période d'essai est également important pour pouvoir imposer des contrats successifs.

En effet, si une période d'essai ne peut être renouvelée, en revanche, comme le prévoit expressément le projet de loi, un CPE peut succéder à un autre, pour un même salarié dans la même entreprise, moyennant un délai de carence de trois mois !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Cet amendement est satisfait par le huitième alinéa du II de l'article 3 bis, qui couvre tous les cas de rupture du contrat.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Monsieur Godefroy, s'agissant de plusieurs points que vous avez évoqués et qui portaient, notamment, sur la période de consolidation, sur les différences entre celle-ci et la période d'essai ou sur l'application de la convention 158 de l'OIT, le Gouvernement a, me semble-t-il, déjà apporté un certain nombre de réponses.

Toutefois, je voudrais revenir sur un élément particulier. Vous m'avez demandé si les contrats première embauche seront pris en compte dans les effectifs pour la mise en oeuvre des différentes mesures d'information et de consultation relatives soit aux procédures collectives dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, soit à l'ensemble des procédures de licenciement économique.

Je puis à cet égard vous confirmer que les salariés sous contrat CPE seront bien pris en compte dans les effectifs dans le cadre des procédures que j'ai citées.

Par conséquent, je puis vous donner une réponse claire et précise sur ce point et répondre ainsi à une partie de vos interrogations et de vos inquiétudes.

Certes, je ne puis accepter un tel amendement, mais je tenais, malgré tout, à vous apporter cet éclairage.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 168, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du huitième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :

douze mois

par les mots :

cinq ans

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Alquier

Le projet de loi prévoit que le délai de prescription de l'action en contestation de rupture du contrat se fait par cinq ans, conformément aux dispositions votées lors de la discussion du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.

À l'époque, nous avions voté contre cette disposition qui aboutit à réduire la possibilité pour le salarié de contester le licenciement dont il fait l'objet. Très souvent, en effet, un salarié licencié hésite à contester le motif de son licenciement ; il ne sait quelle attitude adopter ; il est en quelque sorte sous le choc, outre les problèmes matériels qu'il doit affronter dans l'urgence. Ce n'est qu'après un certain délai qu'il réagit, souvent après avoir été informé et conseillé par d'autres personnes, ou mis en rapport avec une organisation syndicale.

Cet état de fait, vous ne pouvez que l'avoir constaté, monsieur le ministre, et c'est sans doute pourquoi vous avez voulu raccourcir considérablement le délai de prescription.

Aujourd'hui, nous sommes a fortiori encore plus opposés à une telle disposition dans la mesure où le salarié, sans compter qu'il ne peut disposer que d'un délai réduit, ne peut au surplus se fonder que sur le non-respect des règles du projet de loi ou sur l'abus de droit, ce qui conduit à réduire de façon drastique les délais et les moyens.

Au demeurant, il n'est pas certain - et j'en reviens à l'incertitude juridique qui préside à ce texte - qu'une telle réduction des délais ne soit pas, en fin de compte, un élément de nature à inciter les salariés licenciés à multiplier, immédiatement après leur licenciement, les contestations devant les prud'hommes.

En effet, si le droit du travail n'offre plus aux salariés le respect de droits reconnus, si le salarié vit ce déséquilibre permanent et si, de surcroît, il n'est pas véritablement lié à l'entreprise, il jugera d'autant plus normal de contester systématiquement le licenciement.

Une nouvelle fois, le Gouvernement va beaucoup trop loin dans sa logique, ce qui aboutira immanquablement à la multiplication des conflits.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

En cohérence avec les explications que j'ai apportées sur l'amendement n° 661, la commission ne peut qu'être défavorable à cet amendement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame la sénatrice, en matière de délais, je pense avoir déjà répondu en évoquant la cohérence du texte avec la loi de programmation pour la cohésion sociale.

Quoi qu'il en soit, je tiens à préciser qu'il ne s'agit en aucune façon d'empêcher le salarié de contester le licenciement dont il est l'objet ; il dispose à cet effet d'un délai d'un an.

Cela étant dit, le délai de prescription n'est opposable au salarié que si l'employeur lui a indiqué ce délai par lettre recommandée avec accusé de réception, de telle sorte que le salarié soit effectivement informé. Par conséquent, si l'employeur ne se pliait pas à cette obligation, le délai prévu ne s'appliquerait pas.

Il existe donc bien une information du salarié, qui sait parfaitement qu'il a le droit, pendant un an, de contester la décision prise par son employeur à son encontre ; cela doit figurer expressément dans la lettre recommandée avec accusé de réception dont je viens de parler.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 167, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le huitième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Tout salarié sous contrat première embauche peut refuser d'effectuer des heures choisies au sens de l'article L. 212- 6- 1 du code du travail.

La parole est à Mme Christiane Demontès.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Il n'est pas possible de prévoir que le refus d'effectuer des heures choisies ne constitue pas un motif légitime de licenciement, puisque le licenciement d'un jeune en CPE n'a pas à être motivé.

L'employeur peut donc invoquer n'importe quel motif, sans même l'exprimer clairement, pour justifier un licenciement. Il en résulte qu'une pression permanente s'exercera sur le salarié. Celui-ci sera non plus seulement réduit à l'obéissance, mais placé dans une situation de soumission, voire d'humiliation

Exclamations sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

... sinon il recevra une lettre recommandée.

Si nous insistons sur cette notion d'heures choisies, c'est que, derrière ce nom sympathique, se cache du temps de travail accompli par le salarié au-delà des heures supplémentaires.

Officiellement, c'est le salarié qui demande à réaliser ces heures, qu'il effectue après avoir obtenu l'accord de son employeur. Toutefois, il s'agit bien sûr d'une fiction. En réalité, le salarié est invité à demander à son employeur l'autorisation d'effectuer ces heures. Rappelez-vous, mes chers collègues : lorsque ce dispositif des heures choisies a été mis en place, le Gouvernement invoquait le slogan : « travailler plus pour gagner plus ».

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

En réalité, comme nous l'avons dénoncé dès ce moment, ces dispositions ont abouti à une rédaction des articles L. 212-5 et L. 212-6-1 du code du travail qui autorise, par voie d'accord, les salariés à effectuer des heures supplémentaires et des heures choisies au-delà du contingent annuel, avec une majoration de salaire de 10 %.

Cette majoration peut de surcroît se voir remplacée par un repos compensateur. Un employeur est donc en droit d'exiger, de fait, des heures supplémentaires majorées à 10 %, voire simplement compensées !

Dès lors, nous nous posons une question simple : aux termes du projet de loi, un salarié en CPE ou en CNE pourra-t-il refuser de demander à son employeur d'effectuer des heures choisies ? Dans ce cas, ne risquera-t-il pas, plus qu'un autre encore, d'être licencié séance tenante ? Une pression constante s'exercera sur lui et l'empêchera d'exprimer un refus, a fortiori une revendication.

Par ailleurs, un salarié en CPE ou en CNE ne sera pas non plus en situation d'adhérer à un syndicat. Les pratiques de nombreux employeurs en la matière sont connues. Il leur sera d'autant plus facile de licencier un salarié qui prend contact avec un syndicat qu'il ne leur sera même plus nécessaire de motiver ce licenciement, à moins, bien entendu, qu'ils ne préfèrent imputer au salarié une faute grave, afin d'éviter en outre de payer l'indemnité de précarité et les salaires restant dus !

Le CPE, tout comme le CNE, est également une machine de guerre dirigée contre les droits des salariés et la présence des organisations syndicales représentatives dans les entreprises.

Monsieur le ministre, vous affirmez que vous entendez développer le dialogue social mais, dans le même temps, vous faites tout pour affaiblir la représentation des salariés qui en est le fondement. En fait, vous méprisez le dialogue social, comme le dialogue en général d'ailleurs. Vous l'avez prouvé - il faut tout de même le rappeler à ce stade du débat - en introduisant le CPE par voie d'amendement tendant à insérer un article additionnel dans le projet de loi, en utilisant la procédure d'urgence sans aucune concertation avec les partenaires sociaux et en mettant en oeuvre l'article 49-3 à l'Assemblée nationale.

Comment dans ces conditions les jeunes pourraient-ils vous faire confiance ? Le soir, en rentrant chez eux, au mieux sauront-ils combien d'heures ils doivent effectuer le lendemain, au pire ignoreront-ils même s'ils vont encore travailler !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Comme nos débats sont écoutés et lus en dehors de cette assemblée, j'indique, au passage, que l'article 49-3 de la Constitution a été mis en oeuvre seulement au lendemain du vote sur le CPE !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le public croit en effet que l'article 49-3 a été utilisé avant que le CPE ne soit voté, alors qu'en réalité il ne l'a été qu'après !

J'ai lu avec beaucoup d'attention l'objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Vous avez évoqué « l'extrême précarité » que créerait le CPE. Mais l'extrême précarité - je le répéterai jusqu'au terme de cette discussion -, c'est ne pas pouvoir entrer dans l'entreprise, c'est ne pas trouver son premier emploi, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Et le travail, ce n'est pas ce que vous proposez !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. ... c'est être jeune et s'entendre dire : « circulez, on n'a pas besoin de vous » !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Nous estimons que le CPE est le contraire de l'extrême précarité, contre laquelle il permet efficacement de lutter. Ainsi, rien ne justifie de limiter le champ d'application du CPE, comme le proposent les auteurs de cet amendement.

La commission émet un avis tout à fait défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je rappellerai d'abord que l'adhésion à un syndicat est protégée par l'article L. 122-45 du code du travail, qui interdit toute discrimination pour un tel motif. (Mme Hélène Luc proteste.)

Madame Demontès, vous avez évoqué la procédure de la faute grave, qui - pardonnez-moi de vous le faire remarquer - nous fait sortir du champ du CPE et qui exige une motivation, aux termes de l'article L 122-41 du code du travail !

Au début de votre intervention, vous avez également évoqué les heures choisies. Je rappelle que celles-ci reposent sur le principe du volontariat : les salariés qui souhaitent effectuer des heures choisies le demandent, l'employeur approuve, ...

Sourires

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... et un accord collectif est nécessaire, qui suppose un débat et une négociation entre les partenaires sociaux.

Pour faire le point sur la mise en oeuvre des heures choisies, j'indique que, sur seize millions de salariés affiliés à l'UNEDIC, environ deux millions sont couverts par des accords collectifs négociés ou en cours d'extension.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 506, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après le huitième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé:

La rupture du contrat donne droit pour le salarié à une validation des acquis de l'expérience, un bilan de compétence et un accompagnement spécifique par les services de l'Agence nationale pour l'emploi. Ces services font aussi au salarié des offres de formation complémentaire.

La parole est à Mme Muguette Dini.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

L'UDF n'est pas hostile par principe à la simplification et à la flexibilisation de notre droit du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Toutefois, tout assouplissement des conditions d'embauche et de licenciement doit automatiquement être accompagné de droits et de garanties supplémentaires pour le salarié.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Le CPE flexibilise à l'extrême le droit du travail, sans contrepartie substantielle en termes d'accompagnement et de formation pour les salariés dont le contrat serait rompu.

C'est pourquoi, avec cet amendement, nous souhaitons créer pour le salarié dont le CPE aurait été rompu un droit à la validation des acquis de l'expérience, ou VAE, et prévoir un bilan de compétences et un accompagnement spécifique par les services de l'Agence nationale pour l'emploi. Ces derniers devront également proposer aux salariés concernés une formation complémentaire adaptée.

C'est cela la « flexisécurité » danoise dont ce projet de loi prétend s'inspirer : de la flexibilité, mais aussi un accompagnement spécifique renforcé.

Applaudissements sur certaines travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'article 3 bis institue un accompagnement renforcé du salarié licencié et donne donc très largement satisfaction à cet amendement. J'ai déjà eu l'occasion de le souligner tout à l'heure à propos d'un autre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Les salariés doivent donc travailler à n'importe quel prix et n'importe quand, comme vous l'avez affirmé vous-même sur Public Sénat ? Ce n'est pas cela, le travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

En ce qui concerne la validation des acquis de l'expérience gagnée lors d'un CPE, le cinquième alinéa de l'article L. 901-1 du code du travail ouvre ce droit à toute personne engagée dans la vie active, indépendamment de tout licenciement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Monsieur le ministre, les membres de la commission des affaires sociales du Sénat ont beaucoup travaillé sur cette question, qui est essentielle. Nous voudrions que s'accélère la validation des acquis de l'expérience, qui semble aujourd'hui un peu patiner.

La commission émet un avis défavorable sur l'amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame Dini, vous soulignez la nécessité d'un accompagnement personnalisé pour le salarié dont le contrat s'achève ou est rompu. J'ai évoqué tout à l'heure la convention de reclassement personnalisé. D'ores et déjà, le salarié sera reçu mensuellement par le service public de l'emploi dès le premier mois de chômage, et non plus à partir du quatrième mois.

Monsieur le rapporteur, pour répondre à la question posée par la commission quant à la validation des acquis de l'expérience et la formation, je dirai que notre objectif est de tripler en 2006 le nombre des VAE, qui passeraient donc de 15 000 à 45 000.

Un délégué interministériel à la VAE a été nommé, comme l'atteste le Journal officiel de la semaine dernière.

Sourires

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Il s'agit du Délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle, le DGEFP. En effet, la VAE doit nécessairement comporter une dimension interministérielle, et le Gouvernement marque ainsi sa volonté forte d'encourager à la fois l'emploi et la formation professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah ! s'il en a la volonté, c'est gagné !

Sourires

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Jean Gaeremynck est le nouveau délégué interministériel à la VAE, et nous atteindrons notre objectif de triplement du nombre de VAE au cours de cette année.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Après avoir ainsi répondu à vos préoccupations, j'invite Mme Dini à retirer son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'UDF n'a pas de chance avec ses amendements !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

L'amendement n° 169 rectifié, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mme Cerisier-ben Guiga, M. C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mme Tasca, M. Vidal et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Compléter le dixième alinéa du II de cet article par les mots :

et aux femmes en état de grossesse.

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Alquier

Il s'agit d'un amendement de précision. Le projet de loi prévoit que « la rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif ».

Nous savons déjà qu'il faudra un courage extrême à un salarié en CPE ou en CNE pour s'investir dans une mission syndicale ; mais, parmi les salariés qui bénéficient de protections particulières, le texte oublie les femmes en état de grossesse.

C'est d'autant plus regrettable que les femmes sont les premières victimes de la précarité, du temps partiel subi et surtout du temps fragmenté et des bas salaires. Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ce problème lorsque nous avons discuté ici, en deuxième lecture, au mois de janvier, du projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, qui porte bien mal son nom. De nouveau, les femmes risquent d'être les premières victimes du CPE et du CNE, comme elles le sont déjà des contrats précaires existants.

Nous avons déjà évoqué le fait que le CPE et le CNE sont des machines de guerre dirigées contre le CDD et l'intérim, puisqu'ils offrent aux employeurs peu scrupuleux le moyen de licencier à tout moment et sans motif. En l'espèce, ils aboutiront à aggraver encore la condition des femmes, notamment celles qui sont dépourvues de qualification.

Je rappelle au Sénat que le taux de chômage des femmes reste plus élevé que celui des hommes, que 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes et que les trois quarts des femmes concernées souhaitent travailler plus. Il s'agit donc d'un temps partiel subi, car les salaires dans les secteurs où les femmes sont majoritaires, comme la grande distribution ou le nettoyage, sont tellement dérisoires, surtout à temps partiel, que ces femmes ne peuvent décemment survivre.

Jusqu'à présent, les emplois de ce type, que nous avons d'ailleurs fréquemment dénoncés, étaient le plus souvent pourvus par des contrats à durée déterminée. Demain, ils le seront par des CPE ou des CNE, avec une rotation des personnes affectées aux mêmes postes, au mieux tous les vingt-trois mois.

Non seulement vous ne faites rien de sérieux pour améliorer la situation des femmes au travail, puisque votre texte relatif à l'égalité salariale n'est qu'un catalogue d'intentions dépourvu de toute sanction à l'égard des employeurs, mais vous prenez des dispositions de portée générale qui seront, elles, d'application immédiate et qui aggraveront prioritairement le sort des femmes !

De là notre question, monsieur le ministre : l'absence de mention de la protection spécifique dont bénéficient les femmes en état de grossesse est-elle véritablement un oubli ?

Nous souhaitons connaître les intentions du Gouvernement sur ce point.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'article L.122-25-2 du code du travail est bien entendu applicable dans le cas du CPE, comme l'ensemble des dispositions de l'ordre public social.

Mieux, la loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, actuellement soumise au Conseil constitutionnel, intègre dans le champ des discriminations interdites de l'article L.122-45 du code de travail celles qui sont liées à la grossesse.

La même loi réaménage le régime de la charge de la preuve dans le cas de discriminations en raison de l'état de grossesse de la salariée en prévoyant qu'il incombe à la partie défenderesse - donc à l'employeur et non plus à la salariée - de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination.

Enfin, cette même loi mentionne la grossesse parmi les cas de discrimination identifiés à l'article 225-1 du code pénal, et l'article 225-2 du même code fixe les sanctions.

Toutes ces dispositions sont applicables au CPE. La commission est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est vrai, ils n'auront aucun motif à fournir !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

C'est un sujet qui a été longuement débattu à l'Assemblée nationale, et le rapporteur de la commission des affaires sociales vous a tout dit.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je rappellerai seulement les articles L. 122-25-2 et L. 122-27, relatifs aux protections nécessaires de la maternité.

Dans l'hypothèse d'une grossesse, les femmes embauchées dans le cadre d'un CPE seront donc protégées de la même manière que l'ensemble des femmes salariées.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Personne ne peut le croire, il n'y a pas de motif !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Hier soir a été évoqué un sujet important : le temps partiel.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

C'est un sujet sur lequel nous voulions nous exprimer, mais nous n'avons pas pu le faire !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Sur l'initiative conjointe de Catherine Vautrin et de moi-même, les partenaires sociaux ont été réunis sur le sujet du temps partiel subi.

En raison de l'évolution de leur situation matrimoniale, des femmes peuvent se retrouver seules avec des enfants à charge. Le temps partiel choisi devient alors parfois un temps partiel subi. Ce cas est fréquent, notamment dans deux domaines : les activités liées à l'entretien et au nettoyage, et celles qui sont liées à la grande distribution.

Nous avons obtenu que s'ouvrent des négociations sur ce sujet, particulièrement pour la grande distribution. Nous espérons qu'il en sera de même pour d'autres branches, afin que des pratiques différentes permettent de mieux répondre à la situation de ces femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Nous nous trouvons dans une situation incongrue : nous ne pouvons même pas nous exprimer ! C'est incroyable !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote est réservé.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 450 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 664 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter le dixième alinéa du II de cet article par les mots :

, ainsi qu'aux salariées enceintes

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour défendre l'amendement n° 450.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Cinquante ans de planning familial et plus de cent ans de luttes sociales ont construit de justes droits pour les femmes, en particulier des droits relatifs à leur protection quand elles travaillent et lorsqu'elles sont enceintes.

Au moment de l'entrée dans la vie active, le salaire permet d'être autonome, le corps est au mieux de sa forme et l'âge est idéal pour une grossesse. Mais qu'adviendra-t-il des droits des femmes enceintes pour les nombreuses femmes qui seront employées après signature d'un contrat première embauche ?

L'employeur qui sera informé de la grossesse de l'une de ses employées, à la suite d'une indiscrétion ou parce qu'il aura vu s'arrondir la taille de celle-ci, envisagera la situation d'un mauvais oeil, considérant le congé de maternité comme une perturbation.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Mais oui ! Ça se passe comme cela dans la vraie vie !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Avec le CPE, il aura toute latitude, sans motif ni entretien, de licencier la jeune femme.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Par là même, ce sont toutes les protections de la femme enceinte au travail et ses droits à congé de maternité que vous remettez en cause. Cet effet collatéral est dommageable. Aussi l'objet de cet amendement est-il de garantir les droits de ces femmes.

Si j'en juge par vos avis, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, ce sera à l'employeur de démontrer qu'il n'y a eu aucune discrimination due à la grossesse. Fort bien ! Mais vos propos sont en contradiction avec ce projet de loi, qui confère à l'employeur le droit d'agir sans motif. En effet, pour démontrer qu'il n'y a pas eu discrimination, ce dernier se contentera de répondre que la grossesse n'est pas en cause. Il pourra le faire d'autant plus aisément qu'il ne sera pas obligé de donner les causes du licenciement.

Il est par conséquent absolument nécessaire d'inscrire dans le projet de loi les protections de la femme enceinte.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 664.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l'amendement n° 662.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'appelle donc en discussion l'amendement n° 662, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, et ainsi libellé :

Compléter le dixième alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Durant un arrêt pour cause de maladie, le contrat de travail ne peut être rompu sans être motivé expressément.

La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre les amendements n° 664 et 662.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Ces deux amendements ont pour objet d'apporter les précisions nécessaires, comme l'a expliqué Mme Blandin, afin de limiter les effets néfastes du CPE en matière de licenciement.

Au-delà d'une segmentation du monde du travail et d'une mise en concurrence entre les salariés, le CPE, tout comme le CNE, constitue une attaque juridique sans précédent de notre code du travail.

Dans la mesure où, durant les deux premières années, l'employeur n'a pas besoin de fournir un motif de licenciement valable pour se « débarrasser » de son salarié, ce dernier devra systématiquement en référer aux tribunaux pour faire valoir ses droits.

Nul doute que les tribunaux sauront rétablir la conformité du contrat de travail avec les législations existantes. En particulier, l'obligation de l'employeur de justifier d'une raison « valable » de licenciement sera probablement rétablie, comme cela a été le cas dans l'affaire jugée par le conseil des prud'hommes de Longjumeau.

Le code du travail protège explicitement les licenciements en cas de maladie ou de grossesse. Les salariés embauchés en CPE demeurent couverts par ces dispositions, je vous l'accorde. Mais le problème est que, en cas de licenciement durant les deux premières années alors qu'ils sont malades, ou en état de grossesse pour les salariées, ils devront intenter une action devant les prud'hommes et faire la preuve que c'est ce motif implicite qui a conduit à leur licenciement.

Dans les faits, ils auront en effet été licenciés, alors qu'ils ne l'auraient pas été auparavant, l'employeur risquant d'être poursuivi. Vous m'accorderez qu'il s'agit d'une différence de taille !

C'est bien à cela que conduit le CPE : à un renversement de la preuve, puisque ce sera au salarié de prouver le motif pour lequel il a été licencié.

Avec ces deux amendements, nous souhaitons nous prémunir de tels abus de la part des employeurs en faisant figurer explicitement les cas dans lesquels le licenciement n'est pas permis.

Nous proposons par conséquent de préciser que « la rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif, ainsi qu'aux salariées enceintes ».

Par ailleurs, avec l'amendement n° 662, nous proposons de compléter ce même alinéa afin de préciser que, « durant un arrêt pour cause de maladie, le contrat de travail ne peut être rompu sans être motivé expressément ».

Faute de pouvoir rétablir pleinement les droits des travailleurs, que ce gouvernement s'acharne méticuleusement à mettre en pièces, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... cet amendement permettra au moins de protéger les salariés les plus fragiles, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas la garantie de conserver leurs droits, directement menacés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. Monsieur Fischer, je me demande vraiment pourquoi vous avez souhaité défendre l'amendement n° 662 en même temps que les amendements identiques nos 450 et 664, et donc associer maladie et grossesse. À mes yeux, la grossesse n'est pas une maladie ! Mais je peux me tromper...

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

S'agissant des amendements identiques n° 450 et 664, je répéterai ce que j'ai dit tout à l'heure lors de l'examen de l'amendement n° 169 rectifié : si le licenciement d'une femme enceinte est lié à la grossesse, il est contraire à l'article L. 122-45 du code du travail, qui s'applique aussi au CPE.

Avec l'aménagement de la charge de la preuve, l'employeur devra, en cas de contentieux, non seulement expliquer sa décision, mais également la justifier.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques, bien que l'objet de l'amendement n° 664 soit plus clair.

Quant à l'amendement n° 662, il vise à créer une sorte de présomption de rupture abusive lorsque le licenciement intervient pendant un arrêt pour maladie. Le droit étant déjà assez compliqué comme cela, il est préférable de s'en tenir au droit actuellement applicable en la matière. Respectons ce qui existe déjà !

C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Comme j'ai déjà longuement parlé de l'article L. 122-25 du code du travail relatif à l'état de grossesse, j'aborderai la question de la maladie.

Je le répète, l'article L. 122-45 du code du travail s'applique au contrat première embauche et permet aux salariés de présenter devant l'ensemble des tribunaux les éléments de fait qui laissent supposer que le licenciement repose sur la maladie. Il existe déjà une large jurisprudence en la matière, qui est d'ailleurs très clairement énoncée dans le code du travail.

Il appartiendra donc à l'employeur de démontrer que sa décision de licenciement repose sur des éléments objectifs autres que ceux qui sont expressément prévus par les articles L. 122-25 et L. 122-45 du code du travail. Ce dernier devra apporter la preuve du bien-fondé de sa décision.

En l'espèce, les droits des salariés sous CPE sont identiques à ceux des autres salariés.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Leurs droits sont donc totalement respectés.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements identiques n° 450 et 664 ainsi que sur l'amendement n° 662.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le vote sur ces trois amendements est réservé.

L'amendement n° 663, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le dixième alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :

En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut conclure un nouveau « contrat première embauche » pendant une durée d'un an après la rupture dudit contrat, pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement prévoit qu'un employeur qui déciderait de rompre un contrat première embauche ne peut en conclure un autre pendant une durée d'un an après la rupture dudit contrat pour faire occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise. Ce faisant, nous voulons assurer une véritable protection aux salariés qui pourraient signer un CPE.

En effet, le CPE est un contrat tellement précaire qu'il nous semble nécessaire de l'assortir du plus grand nombre de garanties possible pour les salariés.

Nous proposons d'apporter des restrictions à la signature d'un nouveau CPE. Ainsi, nous pensons que le fait d'interdire la signature d'un nouveau CPE dans le délai d'un an après la rupture d'un premier, et ce pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions, permettra de décourager l'employeur de rompre celui-ci. À nos yeux, c'est un moyen de sécuriser, pour autant que cela soit possible avec un tel contrat précaire, le parcours professionnel des jeunes de moins de vingt-six ans qui sont amenés à signer un contrat première embauche.

Par ailleurs, assortir le CPE de telles garanties permettra également d'éviter toutes les dérives et tous les excès possibles de la part d'un employeur qui, peu scrupuleux, voudrait disposer d'une main-d'oeuvre facilement renouvelable, en abusant de la période d'essai de deux ans applicable à un CPE.

Notre amendement de repli - vous aurez évidemment compris, mes chers collègues, que nous rejetons fermement le CPE - vise donc à offrir des garanties aux salariés qui signeraient un tel contrat.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. -Mme Gisèle Printz applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac, rapporteur. Je le répète, dans le cadre du CPE, le licenciement n'est rendu plus souple pendant la période de consolidation que pour inciter l'employeur à embaucher, même lorsque ses perspectives de développement ont encore une visibilité réduite. Interdire à un employeur de réembaucher sur un même poste, pendant un an, après un licenciement auquel il a été contraint pour cause de retournement des perspectives de marché serait contraire à notre objectif visant à offrir à ce dernier une nouvelle dynamique.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le délai de carence de trois mois vise à prévenir tout phénomène d'intermittence.

Riressur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Mais tout montage juridique visant simplement à faire se succéder des CPE à la seule fin de contourner la réglementation serait, je le dis, constitutif d'un abus de droit.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

D'ailleurs, la décision de Longjumeau le prouve. Le conseil des prud'hommes a considéré constitutif d'un abus de droit le fait pour deux entreprises d'avoir successivement employé une personne d'abord en période d'essai sur un CDI, puis en CNE dans le même secteur d'activité, sur le même poste.

Voilà pourquoi Jean-Louis Borloo et moi-même avons dit, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Mais il m'inspire, monsieur le sénateur !

Sourires

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

que cette décision confirmait ce que nous n'avons cessé d'affirmer au cours du débat relatif au projet de loi visant à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance.

Vos craintes ne sont donc pas fondées, madame la sénatrice. Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Mes chers collègues de la majorité, ces propos vous rassurent-ils ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions relatives au tourisme est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Bonne volonté et persévérance conduisent à l'efficacité !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures trente-cinq,

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Nous reprenons la discussion du projet de loi pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence.

Dans la discussion des articles, nous avons entamé l'examen de l'article 3 bis appelé en priorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l'amendement n°448.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que les votes ont été réservés jusqu'à la fin de l'article.

L'amendement n° 448, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le dixième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Durant un arrêt pour cause de maladie, le contrat de travail ne peut être rompu sans être motivé expressément.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Avec cet amendement nous abordons le cas des arrêts pour cause de maladie.

Il convient de conserver le principe d'arrêts de travail pour cause de maladie dans le cadre de ce contrat première embauche. Cet amendement vise ainsi à empêcher tout licenciement qui se fonderait artificiellement sur un motif inavouable.

J'imagine que vous allez évoquer les articles L. 122-25 et L. 122-45 du code du travail. Hélas ! nous avons déjà des exemples. Citons le cas de cette secrétaire, qui, à son retour d'un congé maladie, s'est vu signifier son licenciement par simple lettre, sans qu'aucun motif soit donné. Pour en savoir plus, elle devra aller devant les prud'hommes. Il en ira ainsi chaque fois en cas de doute.

Selon vous, avec les contrats nouvelles embauches et première embauche, nous devions éviter que les licenciements ne soient contestés et ainsi freiner l'augmentation du nombre des recours devant les prud'hommes. Or c'est le contraire qui se produira, le salarié, placé dans une situation délicate, ayant à prouver qu'il a fait l'objet d'une discrimination pour cause de maladie.

Au-delà de ces situations banales, j'attire spécialement votre attention, mes chers collègues, sur le cas des travailleurs placés dans des milieux sensibles, tels les milieux amiantés.

Vous savez que les employeurs des personnes chargées du désamiantage ou des ouvriers de second oeuvre, par exemple les électriciens, sont responsables des conditions d'emploi de ceux-ci. Mais qui dit qu'à la première toux suspecte à l'origine indéterminée, ils ne s'en débarrasseront pas ?

La rotation des effectifs en milieux contaminés pour des raisons de pénibilité liées aux contraintes de protection pourrait fort bien, avec votre loi, se muer en rotation des embauches.

Ce texte, sous prétexte d'introduire plus de souplesse, préfigure une société de compétition acharnée dans laquelle les moins rentables, le fussent-ils transitoirement, seront tenus à l'écart du droit du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'article L. 122-45 du code du travail dispose que personne ne peut être licencié en raison de son état de santé. Il faut de nouveau rappeler que la charge de la preuve, contrairement à ce que j'ai entendu dire, appartient en la matière à l'employeur, qui devra prouver que le licenciement a été prononcé pour d'autres motifs que la maladie. Il devra alors non seulement fournir un motif, mais encore justifier sa décision devant les tribunaux, à qui nous pouvons faire confiance pour traquer les motifs discriminatoires dans ce cas comme dans d'autres.

Le code du travail s'applique totalement au CPE, je ne cesse de le répéter.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement et souscrit à l'observation de M. le rapporteur.

S'agissant de l'amiante, sur lequel le Sénat et l'Assemblée nationale ont, l'un et l'autre, rendu un rapport, je rappellerai que, pour notre part, nous avons multiplié par dix le nombre des contrôles, notamment dans les entreprises de désamiantage, où nous avons relevé un nombre significatif de problèmes.

Nous avons institué une visite médicale préalable à l'embauche dans ces entreprises qui exercent une difficile mission et nous préparons actuellement un décret - nous avions dit que nous attendrions les deux rapports parlementaires - pour fixer de manière plus exigeante les conditions du désamiantage. La situation des salariés n'exerçant que des missions temporaires - qu'il s'agisse d'un CDD ou d'un contrat d'intérim - fera l'objet d'une attention tout à fait particulière dans le cadre de ce décret.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 449, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le dixième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut conclure un nouveau contrat première embauche pendant une durée d'un an après la rupture dudit contrat, pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Cet amendement vise le cas de la rupture de contrat à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années. Celui-ci ne pourrait conclure un nouveau contrat première embauche pendant une durée d'un an, après la rupture dudit contrat, pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise.

On imagine facilement le cas d'une entreprise qui réduirait son activité pendant l'été, un peu comme le Parlement Il serait tentant pour elle d'embaucher un salarié par le biais d'un CPE en octobre, de le licencier en juin et de le réembaucher ensuite en septembre ou en octobre.

Je propose donc de porter la période durant laquelle il est interdit d'embaucher en CPE après avoir licencié la même personne de trois mois à un an.

Vous connaissez peut-être l'exemple de ces trois jeunes femmes embauchées en CNE dans la même boutique de prêt-à-porter à la veille de l'ouverture des soldes. Elles ont toutes les trois été licenciées sans motif le dernier jour. Il est manifeste que leur employeur ne comptait pas pérenniser leur emploi au-delà de cette période de liquidation. En utilisant le CNE à la place d'un CDD - il en irait de même avec un CPE - cet employeur s'est affranchi du respect des cas de rupture possible pour un CDD - faute grave, force majeure, consentement des deux parties - et, surtout, de l'obligation de verser une prime de précarité de 10 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La commission est défavorable à cet amendement, qui est identique à l'amendement n° 663.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.

Nous avons déjà évoqué ce matin l'abus de droit, mais vous nous faites là une présentation bien manichéenne des relations entre salariés et employeurs, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

...les uns et les autres s'affrontant, y compris sur le plan procédural.

Je tiens à vous dire que les chambres syndicales territoriales de la métallurgie ont appelé l'attention de l'ensemble des entreprises adhérentes pour éviter le détournement du CNE et « veiller à l'utilisation loyale de ce nouveau contrat, dont le principe est favorable au développement de l'activité ».

La rupture du contrat, par exemple à la fin d'une période de congés payés, serait en contradiction avec le caractère à durée indéterminée du contrat nouvelles embauches. §

Vous faites aussi allusion aux variations saisonnières de l'activité. C'est pourquoi nous avons prévu un délai de carence. Madame Blandin, je le répète, le CNE n'a pas vocation à pourvoir des emplois saisonniers. Dans un tel cas, nous nous trouverions face à un abus de droit. J'ai déjà eu l'occasion d'aborder cette question lors de nos débats relatifs à l'agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 658, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Le onzième alinéa du II de cet article est ainsi rédigé :

En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau « contrat première embauche » entre le même employeur et le même salarié. Tout nouveau contrat conclu avec le même salarié doit être un contrat à durée indéterminée de droit commun.

La parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. Guy Fischer. Quelque peu honteux de son CPE et de son passage en force sur l'ensemble d'un texte intervenant en écho aux problèmes soulevés à l'occasion des événements de novembre dernier dans nos banlieues, le Gouvernement, aidé en cela par les députés de sa majorité, a tenté de renvoyer sur les parlementaires de gauche la responsabilité de l'enlisement du texte. Nous en sommes pourtant bien incapables !

Rires sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La lecture du Journal officiel montre qu'il n'en est rien et que les nombreuses heures passées à examiner l'article relatif au CPE, lequel fait tout de même trois pages et modifie substantiellement le code du travail, se justifiaient pleinement.

Une telle lecture permet également de mesurer les tentatives d'esquives, les tergiversations de certains ministres pour éviter de répondre aux questions gênantes et précises qui leur ont été posées.

Au moins, l'examen de l'amendement du Gouvernement et des sous-amendements de l'opposition, auxquels j'ajoute ceux de l'UDF, aura permis de révéler la vraie nature du CPE, redoutablement dérogatoire et précaire, et ainsi d'écorner définitivement le vernis social du présent texte.

M. Larcher a dû lâcher que « le contrat première embauche n'est pas nécessairement le premier ». Il a été contraint d'avouer qu'un jeune de moins de vingt-six ans, embauché dans ce cadre, puis licencié, peut à nouveau signer un autre CPE avec un autre employeur, ou même plusieurs successivement, sans autre limitation que celle de l'âge, et qu'un employeur qui licencie un jeune en CPE peu le remplacer par un autre jeune en CPE.

Autant dire, mes chers collègues, que la démonstration a été faite que ce contrat est prévu pour se transformer dans ces deux premières années en CDD à répétition, à la plus grande satisfaction du MEDEF, toujours en quête...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

...de nouveaux avatars de la précarité au travail.

Plaçons-nous un instant du côté des employeurs. Si les CDD sont une bonne formule, ils présentent toutefois quelques inconvénients. Normalement, ils ne peuvent être utilisés de manière constante par l'entreprise pour pourvoir des postes permanents. Les cas de recours sont limitativement énumérés. En outre, l'employeur risque la requalification des CDD en cas d'abus.

Alors, le CPE est nettement mieux en apparence, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

...dans la mesure où il présente pour l'employeur l'avantage de ne pas avoir à justifier au salarié sa décision de licenciement et qu'il n'est assorti d'aucun garde-fou contre les substitutions d'emploi, les renouvellements successifs et indéfinis de CPE.

Pour éviter les abus de CPE, notre amendement tend à revenir à l'objectif théoriquement visé par ce contrat et à la volonté affichée de ses créateurs : « l'accession à un emploi stable ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous posons une règle simple : « En cas de rupture du contrat sur l'initiative de l'employeur au cours des deux premières années, il ne peut être conclu un nouveau CPE entre l'employeur et le même salarié ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous admettons toutefois une dérogation à cette règle. La relation contractuelle pourra se continuer entre l'employeur et l'ex-titulaire du CPE, à une condition : dans l'esprit du rapport de M. Proglio recommandant aux entreprises de nouer avec leurs salariés une relation pérenne, nous préconisons que cela ait lieu dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Voilà, mes chers collègues, un amendement de fond auquel nous sommes très attachés et qui devrait emporter votre adhésion.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La commission n'est pas du tout honteuse. Elle n'est pas d'accord avec les remarques que notre collègue a formulées dans son intervention, que l'on pouvait plutôt assimiler à des propos d'ambiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Dans le cadre d'une évolution des perspectives de croissance liées à un projet, le réembauchage d'un salarié en CPE précédemment licencié peut se justifier.

Pour éviter les abus et les détournements, l'article 3 impose un délai de trois mois entre deux embauches.

Le régime juridique du CPE présente sur ce point, comme sur d'autres, l'alliance cohérente de souplesse et d'encadrement, dont nous évaluerons l'efficacité à la fin de 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Cela, vous le savez, c'est difficile à dire ! L'essentiel, c'est que nous soyons aussi immortels que vous à Château-Chinon, monsieur Signé !

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

M. Josselin de Rohan. Cela fera un deuxième immortel à Château-Chinon !

Sourires

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ce que nous souhaitons, c'est l'immortalité du contrat !

Applaudissementssur les travées de l'UMP. - Souriressur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Au-delà de la phase de consolidation, le contrat première embauche doit aller vers un contrat à durée indéterminée classique.

Entamer un processus débouchant sur autre chose que des CDD à répétition, des intérims d'une durée moyenne inférieure à quinze jours, tel est bien l'objectif que le Gouvernement se fixe au travers du contrat première embauche, afin de lutter contre la précarité et la précarisation permanente.

Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Cet objectif s'inscrit dans le droit-fil du rapport que vous avez cité d'Henri Proglio. Ce dernier propose d'exonérer les entreprises de cotisations d'assurance chômage pendant la première année suivant l'embauche de jeunes.

Nous proposons, pour notre part, - et nous aurons l'occasion d'en débattre - une exonération de ces cotisations pendant une durée de trois ans pour tous les jeunes qui sont au chômage depuis plus de six mois, afin de donner une forte impulsion et permettre à cette catégorie de la population d'entrer enfin dans l'emploi.

Compte tenu du principe et des objectifs de l'ensemble du dispositif du CPE que je viens de rappeler, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 170 rectifié est présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 507 rectifié est présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe Union centriste - UDF.

L'amendement n° 657 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après les mots :

le même salarié

supprimer la fin du onzième alinéa du II de cet article.

La parole est à M. Roland Courteau, pour défendre l'amendement n° 170 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Toute la fausseté de l'expression « contrat première embauche » est contenue dans ce membre de phrase dont nous demandons la suppression. Un deuxième contrat première embauche pourra être passé entre un même employeur et un même salarié, pourvu qu'un délai de carence de trois mois soit respecté.

En clair, si un salarié sous CPE a donné satisfaction, il sera possible de le licencier à la fin du mois de juin, pour le réembaucher en octobre, après le creux des vacances. Entre les deux dates, le salarié percevra son indemnité de précarité de 8 % et, s'il a travaillé au moins quatre mois, il sera à la charge du fonds national pour l'emploi, le FNE, pendant deux mois. Le troisième mois, il déposera une demande d'aide au bureau d'aide sociale ou bien sollicitera le revenu minimum d'insertion s'il a atteint l'âge de vingt-cinq ans. Il obtiendra un secours d'urgence, puis retournera travailler chez le même employeur. Il pourra ensuite recommencer le processus avec le CNE.

Il est évident que tous les employeurs n'agiront pas ainsi. Mais combien seront tentés de le faire, en cas de difficultés passagères, ou simplement de creux d'activité ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Et, dans ce cas, combien de fois pourront-ils répéter le mouvement ?

Nous voilà fort éloignés de la présentation que fait le Gouvernement du contrat première embauche en tant qu'introduction au CDI ! Ce n'est absolument pas cela ! Il s'agit d'un contrat autonome par rapport au CDI.

On voit nettement que le CPE a vocation à être rompu avant la fin de la période de deux ans. Il sera momentanément interrompu, à la convenance de l'employeur, et repris ensuite, exactement selon le système des missions d'intérim, sans qu'il y ait nécessité de rétribuer l'entreprise de travail temporaire.

Machine de guerre contre le CDD, le contrat première embauche est aussi un instrument de rationalisation pour l'employeur qui fait appel au personnel intérimaire. Les organisations professionnelles des entreprises de travail temporaire l'ont d'ailleurs fort bien compris et s'inquiètent de cette évolution.

Il est donc visible que, là encore, tout comme le CNE, le CPE participe à la baisse du coût du travail. En l'occurrence, l'emploi de ce terme de « coût » se justifie pleinement puisqu'il ne s'agit pas uniquement de la seule baisse des salaires. Le raisonnement consiste à frapper la rétribution de l'intermédiaire pour diminuer les frais de l'entreprise.

En conclusion, je dirai toute notre perplexité devant la dénomination d'un contrat dit « première embauche », alors qu'il peut recouvrir des embauches successives, y compris chez le même employeur. Il ne s'agirait donc plus d'une première embauche ni pour le salarié ni même pour l'employeur, mais d'un simple CDD sans terme fixé ni cause de rupture. Voilà ce qu'est le CPE !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l'amendement n° 507 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

L'objet de cet amendement est d'interdire la signature de deux CPE consécutifs entre un même employeur et un même salarié.

Lors de la discussion générale, j'avais posé la question de savoir si, avec le CPE, on avait affaire à un CDI, assorti d'une période d'essai un peu longue à notre gré, ou à un CDD modulable sur deux ans.

Monsieur le ministre, vous avez répondu à plusieurs reprises que le CPE était un CDI, affecté d'une période de consolidation de deux ans.

Mais le texte permet le renouvellement du CPE après trois mois de rupture. De ce fait, on peut craindre une utilisation abusive du CDI, transformé en CDD. Il y a là une incohérence. Un employeur peut rompre un contrat. Dans le cadre d'un CDI, quand il le fait, c'est en général parce qu'il n'est pas satisfait des services de la personne qu'il avait embauchée.

En vertu de ce que vous avez dit, un même employeur ne devrait pas pouvoir conclure un autre CPE avec le même salarié. Dès lors qu'il y aurait interdiction de renouvellement d'un CPE avec le même salarié, les employeurs réfléchiraient à deux fois avant de le rompre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je le répète, c'est une question de simple cohérence.

Monsieur le ministre, selon le célèbre vers de Boileau, ce qui se conçoit bien s'énonce clairement.

Divers commentaires sont échangés sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je ne me laisse pas interrompre, monsieur le président. J'écoute les propos intéressants qui sont échangés dans cet hémicycle. Nous sommes bien là pour nous écouter les uns les autres, pour nous parler !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

C'est le rôle et la vertu du Parlement ; il me semble utile de le rappeler aujourd'hui.

Vous avez dit, monsieur le ministre, que vous ne souhaitiez pas que le code du travail, dont vous êtes en charge et qui est déjà difficile à interpréter, devienne, à force d'empilements de textes, incompréhensible. Il me semble que vous avez ici une bonne occasion de ne pas « en rajouter », si vous me permettez cette expression. Dites à vos collègues du Gouvernement que ce paragraphe de l'article 3 bis que nous souhaitons supprimer comporte une incohérence notable avec ce que vous-même défendez, c'est-à-dire un emploi à durée indéterminée.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 657.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Selon M. Dassault, « le CPE va conditionner l'avenir de l'emploi en France. Ou on l'accepte, et tout est possible, ou on le refuse, et c'est la fin de toute embauche, avec les délocalisations à la clé. »

Prétendant agir pour la bonne cause, messieurs les ministres, vous ne dérogez pas au code du travail, vous l'aménagez. Vous revisitez en profondeur l'équilibre de notre droit social, en ouvrant en son sein une brèche énorme pour la venue d'un contrat unique.

Cette démarche n'a rien de très moderne. Elle emprunte classiquement la voie des thèses néo-libérales, attribuant au code du travail la responsabilité du chômage. On connaît !

Si vous innovez, c'est dans l'importance des coups portés : licenciement sans motif, délai de carence réduit à trois mois alors qu'il est d'une durée de six mois en général et de douze mois en cas de licenciement économique...

En prévoyant qu'en cas de rupture du contrat à l'initiative de l'employeur, au cours de la fameuse période de consolidation, un nouveau contrat pourra être conclu à la seule condition qu'un délai de trois mois sépare la rupture du premier CPE d'un second, vous ouvrez largement aux entreprises la possibilité de multiplier et de renouveler les CPE, au détriment de la création de normes d'emploi de droit commun et de CDI.

Vous accréditez la thèse que nous défendons depuis le début de l'examen de ce texte, à savoir que vous visez la substitution d'emplois, le partage du temps partiel en temps très partiel, en résumé la généralisation de la précarité. Tel est l'objectif que vous vous êtes fixé, messieurs les ministres.

L'argument avancé par le Gouvernement quant à la diminution de la précarité pour les jeunes dans la mesure où, s'ils sont soumis à des CPE successifs, les périodes préalables seront déduites de la période de consolidation, n'est pas valable.

Vous affirmez la vraie nature du CNE, qui, comme le CPE, est un contrat à durée déterminée. Sinon, pourquoi prévoir un tel délai de carence, lequel, bien que n'étant qu'un alibi, est une des caractéristiques des CDD ?

Refusant de cautionner cette hypocrisie, nous préconisons avec force l'interdiction que plusieurs CPE conclus entre le même employeur et le même salarié puissent se succéder.

C'est le sens de cet amendement que nous vous appelons à voter, mes chers collègues.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je répète qu'il ne faut pas exclure le réembauchage d'un salarié licencié alors qu'il était employé sous le régime du CPE.

C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Monsieur Vanlerenberghe, c'est bien pour assurer la pérennisation que nous souhaitons introduire ce dispositif comprenant une phase de consolidation dont la durée, de vingt-quatre mois au maximum, peut être réduite, notamment par la prise en compte des contrats de professionnalisation, des formations en alternance, des CDD, de l'intérim, des stages effectués en entreprise et autres formes de contrats.

Cela dit, j'en viens au souhait commun des auteurs des trois amendements qui est d'interdire la possibilité de signer un nouveau CPE avec le même salarié.

Je crois qu'en la matière il faut avoir présent à l'esprit une certaine logique économique. L'entreprise n'a vraiment pas intérêt à investir dans un jeune, à miser sur lui pour ensuite s'en séparer.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Se séparer d'un salarié en CPE n'est pas sans coût pour l'entreprise : il y a l'indemnité de 8 % plus 2 %, l'engagement sur la formation des salariés, le délai de carence et le risque de se voir opposer l'abus de droit. Monsieur Vanlerenberghe, un certain nombre de dispositifs répondent déjà à votre souhait d'encourager l'entreprise à garder le salarié, parce que c'est son intérêt. Encore faut-il, naturellement, que son activité reste au niveau prévu.

La deuxième actualisation de l'enquête Fiducial parue voilà vingt-quatre heures montre que 17 % des 300 entreprises, choisies à partir d'un échantillon qui en comptait 1 320 et qui ont conclu au moins un contrat nouvelles embauches n'avaient aucun salarié alors que 10 % d'entre elles n'avaient jamais fait la démarche d'en recruter un seul.

C'est bien la preuve que libérer un certain nombre de freins à l'embauche peut avoir des conséquences positives sur l'emploi. Naturellement, leur évaluation, en ce qui concerne tant le contrat nouvelles embauches que le contrat première embauche, demandera du temps, et nous aurons peut-être l'occasion d'y revenir ensemble et d'examiner si, réellement, le dispositif que nous mettons en place et qui a vocation à susciter de nouveaux emplois, à faciliter la pérennisation de l'emploi des jeunes, répond bien aux objectifs que nous nous fixons. Jean-Louis Borloo le soulignait au cours de la discussion générale, rien ne nous interdira alors de revenir devant la représentation nationale et de répondre à ses suggestions pour corriger les éventuelles insuffisances. Car notre objectif est bien l'emploi et l'entrée dans l'emploi, notamment, des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Le ministre ne nous a pas répondu ! Il n'a pas donné son avis !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 171 est présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 665 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le onzième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :

de trois mois

par les mots :

d'un an

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 171.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Nous présentons cet amendement, qui n'est qu'un amendement de repli, en espérant qu'il retiendra l'attention du Sénat.

En effet, si le délai de carence de trois mois permet toutes les dérives, un délai d'un an peut permettre qu'un jeune salarié qui a quitté une entreprise y revienne, après avoir reçu un complément de formation ou être passé par une autre entreprise, sans que la précarité de sa situation soit aggravée.

Bien entendu, il conviendrait alors que l'ancienneté dans le CPE soit comptée depuis l'origine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 665.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Le quatorzième alinéa de l'article 3 bis prévoit que : « en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau contrat première embauche entre le même employeur et le même salarié avant que ne se soit écoulé un délai de trois mois à compter du jour de la rupture du précédent contrat ».

Notre amendement vise à allonger ce délai en le portant de trois mois à un an.

Au vu de la facilité avec laquelle il sera possible pour les employeurs de licencier leur personnel, on peut craindre que l'anticipation d'une baisse des ventes, un durcissement des relations avec un fournisseur ou, pourquoi pas, une hausse du prix du pétrole, n'incite un employeur à licencier son salarié. Redoutant cela, les auteurs de l'article 3 bis veulent par cet alinéa contraindre les patrons à mûrir quelque peu leur décision en les obligeant à respecter un délai de trois mois avant la réintégration de la personne licenciée sur son poste.

Comment accepter une telle fragilisation des rapports sociaux ? Comment, surtout, ne pas condamner une telle inégalité dans les relations entre l'employeur et le salarié ? Dans ces conditions, les jeunes ne peuvent évidemment pas vous croire lorsque vous présentez le CPE comme un moyen pour faciliter leur intégration dans la vie sociale et professionnelle.

Il nous semble que ce délai doit être porté à un an au minimum pour que le salarié ne puisse pas être embauché, puis jeté sans aucune considération à quelques mois d'intervalle.

Les premières plaintes devant les tribunaux renforcent notre conviction. Il n'aura pas fallu attendre plus de six mois pour qu'un tribunal prud'homal, celui de Longjumeau, dans l'Essonne, condamne une PME pour rupture abusive de CNE. C'est la première de ce genre, mais elle en annonce déjà un nombre important. En effet, les services juridiques des différents syndicats sont submergés de demandes de conseil ou, tout simplement, de témoignages de licenciements abusifs.

À trop vouloir déréglementer le monde du travail, le Gouvernement crée des situations d'incompréhension juridique et de malaise social sans précédent.

La protection des travailleurs n'est évidemment pas une entrave au bon fonctionnement de l'économie ni à la croissance ; au contraire, elle les garantit. Il faut donc limiter les effets de cette politique, qui donne tous les pouvoirs aux employeurs sans prévoir les moyens de les contraindre. Tel est l'objet de cet amendement.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le délai de trois mois entre deux embauches du même salarié a été calculé afin d'éviter que le CPE ne soit détourné de son objectif sans pour autant empêcher le réemploi d'un salarié quand l'évolution des perspectives de l'entreprise le justifie.

À cet égard, il faut rappeler que, dans le cas d'une évolution des perspectives de croissance liée à la mise en oeuvre d'un projet, le réembauchage d'un salarié en CPE précédemment licencié peut être justifié.

Cette disposition illustre bien que, ainsi que je l'ai souligné à plusieurs reprises, le CPE est une combinaison cohérente de souplesse et d'encadrement.

La commission est donc défavorable à ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je me suis déjà exprimé sur ce sujet. J'apporterai cependant une précision : si un salarié venait à quitter l'entreprise et devait y retourner six, huit ou dix mois après, son premier contrat serait évidemment décompté de la phase de consolidation. Tout contrat effectué dans l'entreprise ne serait donc pas forclos par rapport à la phase de consolidation.

L'avis du Gouvernement est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 442, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le onzième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

À l'expiration du contrat première embauche il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, à un autre contrat première embauche avant l'expiration d'une période égale au tiers de la durée de ce contrat, renouvellement inclus.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Cet amendement traite non pas du licenciement pendant le CPE, comme l'amendement n° 449, mais de l'expiration du contrat première embauche.

Il s'agit ici d'appliquer un délai de carence pour que les CPE ne se succèdent pas indéfiniment sur le même poste, permettant ainsi de dispenser l'entreprise d'embaucher en CDI normal. Sans cette précaution minimale, vous risquez, au lieu d'aider à l'embauche des jeunes, d'inciter les employeurs à licencier à la fin de chaque CPE. Si vraiment vous vous préoccupez de l'entrée progressive des jeunes dans l'entreprise, il faut empêcher que l'on ne substitue à l'infini un CPE à un autre. Sinon, que vont devenir les ex-CPE, à vingt-six ans ? Ils seront concurrencés par leurs cadets qui prendront leur place, tout comme aujourd'hui les chercheurs d'emploi sont pénalisés par les abus de stages. Il faut donc absolument mettre un terme à ce moins-disant social permanent.

Vous affirmez que la première idée d'un employeur n'est pas, après une embauche, de se débarrasser de celui qui travaille pour lui. Nous pourrions vous entendre si l'employeur n'y trouvait aucun avantage. Mais s'il pratique le turn-over, le renouvellement régulier, il inscrit dans la durée la possibilité totale de licencier sans motif. Cela correspond à une demande forte du MEDEF ! Il est du rôle du Parlement d'empêcher cette dérive.

Vous avez, monsieur le ministre, qualifié de manichéenne notre vision des choses. Cependant, le rôle de la loi est, je crois, non pas de prédire ce qui va se passer, mais d'envisager une réponse à chaque éventualité. Quand on prévoit une vitesse que ne doivent pas dépasser les véhicules en ville, on ne considère pas tous les automobilistes comme des chauffards en puissance, mais c'est la connaissance des drames qui conduit à les prévenir par des restrictions, tout comme la bonne conduite de l'employeur ne saurait être un usage opportuniste du texte au-delà même de son sens.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur quelques travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Les précautions nécessaires sont prises à l'article 3 bis pour éviter que le CPE ne soit détourné de son objet. Si cela devait néanmoins se produire, et cela pourra toujours être le cas, quels que soient les ajouts que l'on introduira dans la loi, il y aura abus.

Les tribunaux répriment les abus ; c'est leur rôle. La loi ne peut saisir la totalité des comportements humains.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Nous ne pouvons que partager l'analyse du rapporteur !

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame Blandin, vous avez mentionné l'expiration du CPE. Je le répète, il ne saurait en être question puisque le CPE est un CDI et qu'à la différence du CDD il ne comporte pas de terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 172, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le douzième alinéa du II de cet article, après les mots :

peut bénéficier

insérer les mots :

du plan de formation prévue à l'article L. 932-1 du code du travail et

La parole est à M. Roger Madec.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Madec

Il s'agit à nouveau d'un amendement de précision.

Lorsqu'un salarié est embauché en CDI dans une entreprise, il doit normalement bénéficier du plan de formation, si toutefois il en existe un dans cette entreprise. Le CPE étant un contrat de travail conclu sans détermination de durée, il est, semble-t-il, assimilable au CDI, en dehors des modalités de rupture, qui ont déjà été abondamment évoquées.

Si, comme on nous l'affirme, le jeune embauché en CPE a vocation à rester dans l'entreprise après ses deux ans de probation, il doit pouvoir bénéficier du plan de formation. L'article L. 932-1 du code du travail indique d'ailleurs très clairement que les actions de formation réalisées dans ce cadre « participent au maintien dans l'emploi ». Dans le cas présent, on ne saurait mieux dire !

Notre amendement a donc pour objet que le jeune se voie expressément reconnu le droit d'acquérir le complément de formation qui lui permettra peut-être de demeurer dans l'entreprise et d'y acquérir davantage de compétences opérationnelles.

Nous souhaitons entendre le point de vue du Gouvernement sur ce point, ce qui nous permettra aussi de mieux déterminer dans quelle mesure le CPE a bien vocation à déboucher sur un CDI.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le droit à la formation du salarié en CPE est assuré dans le cadre de l'article L. 933-1 du code du travail, relatif au droit individuel à la formation. Nous souhaitons cependant demander au ministre de nous confirmer que le salarié en CPE relève du plan de formation de l'entreprise dans les mêmes conditions que les autres.

Sous réserve des précisions qui nous seront apportées, l'avis de la commission est défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Il s'agit en effet d'un point important.

Votre amendement, monsieur Madec, est déjà satisfait.

Tout d'abord, aux termes de l'article L. 932-1, qui figure au chapitre du code du travail intitulé « Du plan de formation de l'entreprise », tout bénéficiaire d'un CDI, et le titulaire d'un contrat première embauche est dans ce cas, peut prétendre aux actions comprises dans le plan de formation de l'entreprise.

Dans le chapitre suivant, « Du droit individuel à la formation », l'article L. 933-1, que vous évoquiez à l'instant, monsieur le rapporteur, prévoit des droits plus importants que dans les autres formes de contrat. En effet, le droit individuel à la formation instauré dans la loi du 4 mai 2004, issue de l'accord interprofessionnel de décembre 2003, est effectif à la fin de la première année. Or, avec le contrat première embauche, c'est dès la fin du premier mois que naît ce droit individuel à la formation.

Comme pour les indemnités de cessation de contrat, vous constatez que la situation est sur ce point plus avantageuse avec le CPE que dans le cadre du CDI. C'est là un des éléments de sécurisation du parcours professionnel qu'introduit le contrat première embauche.

C'est donc, monsieur le rapporteur, à la fois du plan de formation et du congé individuel de formation que bénéficiera le titulaire d'un CPE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 505, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé:

Pendant les deux premières années courant à compter de la date de la conclusion du contrat, l'employeur effectue avec le salarié un bilan d'étape semestriel.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

L'amendement n° 505 a pour objet d'institutionnaliser un bilan d'étape semestriel entre l'employeur et le salarié stagiaire titulaire d'un CPE durant la période de consolidation.

S'il n'est pas question que le jeune en CPE ne puisse avoir connaissance des motifs de la rupture de son contrat, de même il nous semble indispensable qu'il puisse savoir si son employeur est satisfait de son travail au cours de cette période de consolidation.

Ainsi, un entretien d'évaluation périodique nous paraît nécessaire pour que le jeune en CPE puisse, le cas échéant, s'améliorer dans le but de rester, bien sûr, dans l'entreprise.

Nous espérons que l'objectif du CPE est bien de mettre tout en oeuvre afin de répondre durablement au problème du chômage des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'idée d'un bilan d'étape semestriel est a priori pertinente. Faut-il cependant inscrire dans la loi une disposition susceptible d'apparaître à l'usage un peu formelle et décevante ? En effet, la période de consolidation n'est pas une période d'essai ni une période probatoire au cours de laquelle il est utile de faire régulièrement le point sur la qualité du travail fourni.

La période de consolidation est une période au cours de laquelle se vérifie la pertinence d'un projet économique auquel l'embauche du salarié est liée. Ce n'est pas la personnalité du salarié qui est d'abord en cause, c'est la viabilité d'un projet économique en train de se construire.

La commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement sur ce point, elle s'en remettra néanmoins à la sagesse du Sénat.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame le sénateur, vous évoquez un sujet que nous avons déjà abordé, mais je souhaite y revenir un instant sous l'optique du tutorat.

En effet, le tutorat fait partie des propositions des partenaires sociaux et de l'accord interprofessionnel conclu en octobre dernier concernant les seniors. Dans le cadre de l'article 5 de l'accord transmis au Gouvernement, les partenaires sociaux demandent de prendre un certain nombre de dispositions visant à favoriser ce tutorat et consacrées notamment à l'accompagnement des jeunes dans l'entreprise.

Nous avons eu trois séries de réunions avec les partenaires sociaux pour la préparation du plan « seniors », qui déclinera l'accord interprofessionnel sur les seniors et qui sera présenté à la fin du mois de mars. D'un commun accord, nous avons retenu le tutorat comme un des éléments d'aménagement de l'activité des seniors dans l'entreprise pour lequel un certain nombre de dispositions contractuelles seront prises.

Par ailleurs, j'ai confirmé ce matin, en répondant aux préoccupations exprimées par M. le président de la commission et par M. le rapporteur, la mise en place, dans le cadre du service public de l'emploi, de l'accompagnement personnalisé vers l'emploi, qui sera à la fois un bilan et un accompagnement dans les premiers mois, car nous voyons bien que c'est à cette période que se produisent les ruptures et les difficultés.

Par conséquent, cet accompagnement se fait au bénéfice du jeune salarié et parfois également au bénéfice de l'entreprise. En effet, quand certains chefs d'entreprise n'ont plus de salarié depuis longtemps ou n'ont jamais eu de salarié, ils ont parfois besoin que le service public de l'emploi réponde à leurs questions.

Nous avons donc, Jean-Louis Borloo et moi-même, demandé au service public de l'emploi, notamment à l'Agence nationale pour l'emploi de préparer ce dispositif. Nous le présenterons à la commission dès qu'il sera prêt, parallèlement au décret portant mise en oeuvre du contrat première embauche.

Madame le sénateur, nous répondons ainsi à vos préoccupations par un double dispositif : d'une part, par le tutorat qui sera reconnu comme tel dans le plan « seniors » et, d'autre part, par cet accompagnement personnalisé vers l'emploi.

En conséquence, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 659, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le III de cet article.

La parole est à M. Roland Muzeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Même un amendement qui n'a strictement aucune portée, le Gouvernement n'en veut pas. C'est quand même fort !

Le paragraphe III de l'article 3 bis traite notamment du régime spécifique d'indemnisation du chômage, dont relèveront les salariés sortant d'un CPE.

Conscient tout de même que ce contrat atypique d'un nouveau genre proposé à l'ensemble des jeunes était effectivement critiquable dans la mesure où il était hors cadre du droit commun, excluant toutes les garanties, si minimes soient-elles, applicables notamment en matière de licenciement, le Gouvernement s'est employé à vanter d'autres aspects particuliers du CPE.

Ainsi, comme le Locapass - dispositif facilitant l'accès au logement - ou les droits reconnus à la formation, l'indemnisation à laquelle ce contrat ouvre droit est présentée comme un atout supplémentaire, une innovation majeure contrebalançant en quelque sorte la précarité bien réelle par ailleurs imposée.

Quelles que soient les précautions prises par le Gouvernement que vous soutenez sans broncher, mes chers collègues, une lecture attentive du texte permet de relativiser les supposées avancées qu'il contient.

Le droit individuel à la formation requérant l'accord de l'employeur à raison de vingt heures par an existe déjà pour les salariés en CDI. Vous avancez simplement le délai d'ouverture du droit à un mois d'ancienneté.

S'agissant de la sécurisation du parcours d'accès au logement, le texte se contente de prévoir que l'employeur est tenu d'informer son salarié des dispositifs existants accordant une garantie et une caution de loyer. Encore faut-il que lesdits dispositifs puissent absorber tous les bénéficiaires potentiels du CNE, mais aussi que la durée de dix-huit mois pendant laquelle, gratuitement, les échéances de loyer peuvent être payées au propriétaire, soit adaptée à l'incertitude que fait peser sur le salarié, d'une part, le fait que durant vingt-quatre mois son contrat peut être rompu et, d'autre part, le fait qu'à l'issue de ces deux ans rien ne lui garantit la transformation en CDI.

S'agissant enfin des droits à indemnisation chômage et au bénéfice de la convention de reclassement personnalisé, là encore, ce qui semble vous convenir, ne saurait nous satisfaire.

En effet, mes chers collègues, l'allocation forfaitaire versée durant deux mois, c'est évidemment mieux que rien. Reste que, dans son montant - 16, 40 euros par jour au lieu de 25, 01 euros pour l'allocation de base du régime de droit commun d'indemnisation chômage - et dans sa durée - deux mois au maximum au lieu de sept -, cette allocation est sensiblement inférieure à l'allocation minimale des ASSEDIC.

Reste surtout que les jeunes salariés aux parcours chaotiques, éjectés de l'entreprise avant d'avoir travaillé suffisamment longtemps - quatre mois en CPE ou enchaînant des CPE de courte durée - demeureront, pour les uns, exclus du dispositif de l'allocation forfaitaire et, pour les autres, maintenus en marge du système d'assurance chômage, dont relèvent les autres salariés. Bref, ils seront exclus de la protection indemnitaire de droit commun en raison de leur âge et du type d'emploi précaire proposé, et ce alors même qu'ils cotisent dès le premier mois de travail.

Que dire, par ailleurs, du droit à une convention de reclassement personnalisé, dispositif dont on attend encore le bilan, mais qui est déjà largement torpillé par l'expérimentation du contrat de transition professionnelle, si ce n'est qu'il est lui aussi largement hypothétique.

Nous venons de voir toutes les limites de l'accord de décembre dernier sur l'assurance chômage, qui a, une fois de plus, écarté le sujet de l'amélioration de la couverture des situations de chômage aux primo-demandeurs d'emploi ou aux salariés précaires.

Nous voyons également toute l'hypocrisie de cet article sur le CPE, dit « projet le plus social jamais élaboré pour les jeunes » - excusez du peu ! - qui ne sécurise absolument pas la situation financière et juridique des personnes qu'il vise.

Dans ces conditions, le présent amendement de suppression se justifie pleinement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Cet amendement de suppression n'est pas compatible avec la position de la commission sur l'article 3 bis, qu'elle vous demande d'adopter.

Elle émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Le Gouvernement partage l'avis de la commission, car la proposition formulée dans cet amendement reviendrait, d'une part, à supprimer l'allocation forfaitaire pour ceux qui ne peuvent avoir accès au régime d'assurance chômage parce qu'ils n'ont pas les six mois nécessaires et, d'autre part, à supprimer la convention de reclassement personnalisé.

Cette convention - et je ne parle pas du contrat de transition professionnelle - concerne aujourd'hui 40 000 personnes, dont certaines ont opté pour un reclassement personnalisé renforcé dans les bassins d'emploi qui connaissent des difficultés et des mutations extrêmement importantes.

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 173, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du III de cet article, remplacer le mot :

quatre

par le mot :

deux

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Cet amendement vise à réduire la durée d'activité d'un salarié en CPE nécessaire à l'acquisition de droit à une allocation forfaitaire. Le projet de loi propose une durée de quatre mois, que nous demandons de réduire à deux mois.

L'extrême précarité dans laquelle seront maintenus ces jeunes salariés et le fait qu'ils ne disposent pas, avant vingt-cinq ans, de recours autre que la solidarité familiale impliquent qu'une allocation leur soit versée dès lors qu'ils ont travaillé pendant un laps de temps qui ne peut être qu'assez court.

En effet, un jeune risque d'accepter un emploi sous CPE parce qu'il ne peut obtenir un CDI ou qu'il croit ainsi avoir une solution plus durable qu'un CDD. Trois mois après, il est licencié et, si je ne me trompe, il n'aura droit à rien.

La condition d'indemnisation avec la nouvelle convention UNEDIC est qu'il ait travaillé au moins six mois au cours des vingt-deux derniers mois. Quel jeune de vingt et un ans qui a fait des études pourra avoir travaillé six mois au cours des vingt-deux derniers mois puisqu'il entre dans le monde du travail ?

Notre amendement, une nouvelle fois, met l'accent sur les difficultés pratiques que le CPE va causer aux jeunes et à leur famille.

Il est un simple contrat précaire de plus, et ce qui le démontre, c'est que les modalités d'indemnisation après, non pas une fin de contrat prévisible, mais un licenciement impromptu, sont calquées sur celles du CDD.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La période de quatre mois d'emploi nécessaire pour bénéficier d'une allocation forfaitaire en cas de licenciement semble adéquate.

Je précise que cette indemnisation offerte aux personnes n'ayant pas accès à l'assurance chômage est un apport du CPE. Il est justifié d'en subordonner l'octroi à l'existence d'une période de travail un peu significative.

La commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je rappellerai d'abord que plus de 55 % des jeunes de moins de vingt-six ans inscrits à l'ANPE n'ont pas accès au régime d'assurance chômage...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... et que ce pourcentage dépasse de 20 % la moyenne de l'ensemble des salariés.

En matière d'assurance chômage, le CPE apporte une grande innovation en créant ce régime d'allocation forfaitaire de deux mois doublé de la convention de reclassement personnalisé, car, jusque-là, il n'y avait aucune allocation forfaitaire. Le contrat première embauche apporte réellement une nouvelle garantie.

Nous ne pouvons pas vous suivre, madame Schillinger, parce que cette sécurisation que nous souhaitons apporter constitue une véritable avancée.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 174, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

A la fin du premier alinéa du III de cet article, remplacer les mots :

deux mois

par les mots :

six mois

La parole est à Mme Gisèle Printz.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Les raisons qui nous ont conduits à proposer la diminution de la durée d'activité permettant à un jeune en CPE de bénéficier d'une indemnisation après un licenciement nous amènent maintenant à demander une augmentation de la durée de cette indemnisation.

Je rappelle que la réception de la lettre de licenciement fait courir un préavis de quinze jours si le CPE a duré moins de six mois et d'un mois si le contrat a duré plus de six mois. Cela signifie qu'un jeune qui aura été embauché en février et licencié à la fin du mois de juin de la même année, au moment des vacances, bénéficiera, après son préavis de quinze jours, d'une allocation forfaitaire pendant deux mois parce qu'il aura eu un emploi pendant au moins quatre mois. En dessous de ces quatre mois, il aura un préavis de quinze jours et rien d'autre.

Pour les jeunes dépourvus d'une qualification professionnelle solide, c'est une véritable condamnation à aller d'emploi précaire en emploi précaire. Le CPE n'améliore pas leur situation : il l'aggrave. Et votre réaction lorsque nous demandons le tutorat ou l'accès automatique au plan de formation est explicite sur la manière dont vous envisagez leur avenir.

Pour les jeunes qui ont une formation, il ne s'agira au mieux que d'une expérience professionnelle courte, suivie d'une faible allocation à la sortie, le temps d'essayer de trouver un autre emploi.

Selon votre philosophie, plus l'allocation est modique et son versement limité dans le temps, plus le chômeur est incité à retrouver rapidement un emploi. Le problème est que, de façon implicite, vous ne vous situez plus dans le cadre du CDI. Pour ces jeunes qualifiés, vous créez un ersatz du contrat de mission que nous avions connu au moment du rapport Virville.

Sans que cela soit jamais dit, on évolue vers la généralisation et la succession des contrats précaires, en encerclant en quelque sorte le CDI jusqu'à en faire un élément résiduel du droit du travail, qui disparaîtra avec ses derniers détenteurs. Le CDI deviendra un objectif inatteignable, qui sera toujours remplacé par un autre type de contrat dont les caractéristiques principales seront la précarité, l'exonération de cotisations sociales pour l'employeur et la faiblesse des droits associés pour le salarié.

On comprend bien pourquoi le MEDEF ne tient pas à voir fondre tous ces dispositifs dans un contrat unique. La multitude des contrats offre des opportunités beaucoup plus intéressantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'allocation forfaitaire de deux mois quand le salarié licencié ne répond pas aux conditions d'ouverture de l'assurance chômage est une initiative coûteuse dont il n'est pas possible d'étendre la portée sans créer une surcharge pour les fonds de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Pour des raisons que j'ai déjà eu l'occasion de développer, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Le contrat première embauche n'a rien à voir avec le projet de contrat de mission que Michel de Virville proposait dans son rapport, au début de l'année 2004. Avec le CPE, il s'agit non pas d'un contrat à durée déterminée, mais bien d'un contrat à durée indéterminée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 452, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après le cinquième alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi reçoit une contribution appelée « contribution de précarité », payée par les employeurs lors de la signature de chaque contrat de travail précaire, relevant de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 relative au contrat de travail « nouvelles embauches », d'un contrat prévu à l'article L. 122-1 du code du travail d'une durée de moins de six mois, d'un contrat prévoyant un temps de travail inférieur à la durée légale en vertu de l'article L. 212-4-3, ou d'un contrat première embauche créé par la présente loi. Cette contribution sera d'un montant inférieur dans les cas où les contrats de travail précaires énumérés ci-dessus sont transformés en contrat à durée indéterminée. Un décret en Conseil d'État définit les modalités de recouvrement et le montant de cette contribution, due à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Cet amendement porte sur le fonds de solidarité créé par la loi du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi.

Il est inquiétant de constater que les missions de ce fonds semblent s'étendre indéfiniment. Destiné à l'origine à l'allocation de solidarité spécifique, il a ensuite financé l'allocation forfaitaire de rupture d'un contrat nouvelles embauches, la prime de retour à l'emploi, la prime mensuelle et, maintenant, l'allocation de rupture d'un contrat de première embauche.

Dans le même temps, la subvention de l'État à ce fonds, inscrite au projet de loi de finances pour 2006, a été réduite. Or, à budget constant, a fortiori en cas de diminution, l'allocation forfaitaire pour les jeunes salariés victimes d'une rupture de CPE après au moins quatre mois de travail menacera finalement le bénéfice plénier des allocataires de l'allocation de solidarité spécifique. Ce fonds doit donc être abondé.

La plupart des embauches observées ces dernières années ne s'effectuent pas en emplois durables - contrats à durée indéterminée ou contrats à temps plein - mais en emplois précaires - CDD, temps partiel, CNE et aujourd'hui CPE. Ces contrats aggravant la précarité et le chômage, ils doivent être mis à contribution pour financer le fonds de solidarité.

Je propose toutefois que les employeurs qui transforment leur CNE ou CPE en CDI normal au bout de deux ans soient moins taxés que les autres.

Si la période de consolidation est une manière d'entrer progressivement dans le marché du travail normal, il est légitime de récompenser les entreprises qui jouent le jeu, donc de pénaliser financièrement celles qui abusent des emplois précaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

La création d'une contribution de précarité à la charge des employeurs recourant au CNE ou au CPE serait contraire au bon sens, qui voit dans ces dispositifs des modalités de lutte contre la précarité.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Madame Blandin, la contribution spécifique dont vous proposez la création est déjà prévue dans le projet de loi : c'est la contribution à la charge de l'employeur, qui est égale à 2 % de la rémunération brute et s'ajoute à l'indemnité de rupture.

Par ailleurs, certaines des questions que vous évoquez ont fait l'objet d'un débat entre les partenaires sociaux dans le cadre de la négociation de l'assurance chômage, le CPE n'étant pas concerné puisqu'il fait l'objet d'une dotation spécifique. Ces négociations ont permis de réaliser des progrès s'agissant des contrats à durée déterminée, de l'accès au congé individuel de formation-contrat à durée déterminée, le CIF-CDD.

Il est également prévu que les négociateurs de branches examinent les modalités selon lesquelles les salariés titulaires d'un contrat à durée déterminée pourront bénéficier d'une validation des acquis de l'expérience.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 508, présenté par MM. Mercier, Vallet et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le dernier paragraphe (IV) de cet article:

IV. - Le dispositif du « Contrat Première Embauche » est expérimenté pour trois ans. Les conditions de sa mise en oeuvre et ses effets sur l'emploi feront l'objet, au plus tard au 31 décembre 2008, d'une évaluation par une commission associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel. La reconduction du dispositif par la loi dépendra des conclusions de cette évaluation.

La parole est à M. André Vallet.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallet

L'amendement n° 508 vise à faire du CPE un dispositif expérimental.

Comme vous l'avez rappelé à plusieurs reprises, monsieur le ministre, l'objectif principal du CPE est de permettre la création d'emplois et la baisse de l'insupportable chômage des jeunes, que nous déplorons tous.

Y parviendra-t-il ? Nous le souhaitons évidemment, mais, pour l'heure, nul ne peut répondre à cette question.

Le CPE est bâti sur le modèle du CNE, lequel, à en croire un rapport qui a été publié récemment, n'a pas fait la preuve de son efficacité.

Une enquête récente révèle que 70 % des embauches en CNE auraient été réalisées en l'absence de ce dispositif, dont 40 % en CDI et 28 % en CDD. En outre, 48 % des employeurs ayant embauché en CNE déclarent ignorer à ce jour s'ils garderont la personne embauchée. Nous savons d'ores et déjà que les mêmes interrogations se poseront pour le CPE.

C'est la raison pour laquelle il nous semble essentiel que le dispositif du CPE soit expérimenté pendant trois ans. Les conditions de sa mise en oeuvre et de ses effets sur l'emploi feront l'objet, au plus tard au 31 décembre 2008, d'une évaluation par une commission associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel. La reconduction du dispositif du CPE par la loi dépendra des conclusions de cette évaluation.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'évaluation, prévue dans les trois ans qui viennent, sera soumise au Parlement qui décidera des suites à lui donner. Le CPE n'est pas fixé pour l'éternité. Il constitue une piste à explorer de façon optimiste, dynamique et sans préjugé. Je puis vous assurer, mon cher collègue, que nous suivrons l'évolution de ce dispositif avec beaucoup d'attention.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Monsieur Vallet, le bilan du contrat nouvelles embauches, prévu pour le 31 décembre 2008, sera précédé d'évaluations intermédiaires. Pour le moment, nous ne disposons que de simples enquêtes. Or, à l'heure actuelle, seuls trois pays de l'Union européenne décomptent les taux d'activité et de chômage par d'autres méthodes que des sondages approfondis.

Ce que je puis vous dire c'est que, dans la seconde version de l'enquête de l'organisme d'analyses Fiducial, les embauches résultant de la création du CNE représentent 29 % de 335 000 contrats, ce qui est relativement important.

Je répète que 17 % des entreprises n'employaient aucun salarié avant l'embauche de leur premier salarié en CNE. Cette possibilité constitue donc une incitation extrêmement importante, capable de lever les freins au recrutement du premier emploi. Par ailleurs, les entreprises de trois à cinq salariés représentent 11 % des entreprises, mais 32 % des embauches en CNE.

Je tenais à porter à la connaissance du Sénat ces informations qui sont parues récemment.

Un amendement adopté à l'Assemblée nationale prévoit que le dispositif fera l'objet d'une évaluation au 31 décembre 2008. Nous serons attentifs aux résultats de cette évaluation et à l'impact du contrat première embauche sur l'emploi des jeunes, sur la diminution du taux de chômage de cette catégorie de la population ainsi que sur les éventuels phénomènes de substitution que nous ne pourrons mesurer qu'après un certain temps.

Monsieur le rapporteur, en tout état de cause, il appartiendra au législateur de tirer les conséquences qui s'imposent. Mais nous ne souhaitons pas, à ce stade, que l'on ait du contrat première embauche une vision limitée et restrictive qui conduirait à ne pas voir au-delà de la période de trois ans et à refuser d'emblée toute mise en perspective.

Dans ces conditions, eu égard à l'amendement qui a été adopté à l'Assemblée nationale et au travail qui va être conduit, y compris par le conseil d'orientation pour l'emploi, tant sur le contrat nouvelles embauches que sur le contrat première embauche, le Gouvernement souhaite le retrait du présent amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 175, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Au début du IV de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :

Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 432-4-1 du code du travail, après les mots : « le nombre de salariés sous contrat de travail temporaire, » sont insérés les mots : « le nombre de salariés sous contrat première embauche, ».

La parole est à M. Madec.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Madec

L'article L. 432-4-1 du code du travail prévoit que, chaque trimestre dans les entreprises d'au moins trois cents salariés, et chaque semestre dans les autres, le chef d'entreprise informe le comité d'entreprise de la situation de l'emploi qui est analysée en décrivant, mois après mois, l'évolution des effectifs et de la qualification des salariés et en retraçant, par sexe, le nombre de salariés sous contrat de travail à durée indéterminée, le nombre de salariés sous contrat de travail à durée déterminée, le nombre de salariés sous contrat de travail temporaire et le nombre de salariés appartenant à une entreprise extérieure.

Le chef d'entreprise doit également indiquer au comité d'entreprise les motifs l'ayant amené à recourir à des contrats de travail autres que des CDI et le nombre de journées de travail effectuées sous ces types de contrat.

Ces listes permettent aux membres du comité d'entreprise d'apporter leur contribution à la gestion du personnel. On peut en effet mesurer ainsi la nécessité de conclure des contrats de travail précaires pour faire face aux aléas de production, mais aussi l'opportunité de conclure de préférence des contrats à durée indéterminée.

Les contrats première embauche étant, comme les contrats nouvelles embauches, une nouvelle catégorie de contrats, il paraît souhaitable de les ajouter à la liste ainsi prévue. Le CPE comme le CNE ont en effet nécessité une modification législative pour leur introduction dans le code du travail. Cela prouve une nouvelle fois qu'ils ne sont pas des CDI, contrairement à ce que vous voulez nous faire croire, monsieur le ministre.

Ce sont des contrats qui, comme n'importe quel CDD, ont vocation à devenir un jour des CDI, si l'employeur, d'une part, ne licencie pas le salarié ou, d'autre part, décide de transformer le CDD en CDI. Concrètement, il n'y a pas de grande différence entre ces deux cas de figure.

La nécessité d'inclure les CPE dans la liste s'impose, en raison même des arguments que vous avancez devant les Français. En effet, si, comme vous le prétendez, le CPE a vocation à devenir un CDI, il sera utile de mesurer combien de CPE arrivent à leur terme et sont donc transformés en CDI.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

L'avis de la commission est totalement défavorable, monsieur le président.

Nous ne pouvons certainement pas accepter de classer le CPE avec les contrats temporaires !

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Monsieur Madec, « ne tremblez point parce qu'il n'est point d'objet à votre crainte », comme disait l'évangéliste !

Le contrat première embauche étant un contrat à durée indéterminée, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... il fait et il fera partie des informations fournies sur le nombre de salariés sous CDI. C'est comme tel qu'il sera porté à la connaissance des institutions représentatives et du comité d'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Ce n'est pas marrant d'être jeune avec un gouvernement de droite !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 176, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le IV de cet article, remplacer les mots :

l'emploi

par les mots :

le nombre de créations nettes d'emplois

La parole est à Mme Raymonde Le Texier. Allez-y, chère collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

M. Didier Boulaud. Elle a du temps devant elle, elle n'est pas en CDD !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Mme Raymonde Le Texier. Je ne suis pas immédiatement « virable ». En tout cas, pas par vous !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Cet amendement propose de remplacer l'évaluation des effets du CPE sur l'emploi par une évaluation portant sur le nombre de créations nettes d'emplois. Il ne faut pas en effet souffrir d'ambiguïté dans ce domaine.

On entend trop souvent dire actuellement que le Gouvernement obtient une baisse du chômage, alors que cette baisse a essentiellement des causes démographiques, avec les 600 000 départs en retraite intervenus cette année.

M. le ministre délégué s'entretient avec l'un des membres de la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Mme Raymonde Le Texier. M. le ministre semble vraiment passionné par mes propos ! Puisqu'il en est ainsi, je recommence mon propos !

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Cet amendement propose de remplacer l'évaluation des effets du CPE sur l'emploi par une évaluation portant sur le nombre de créations nettes d'emplois. Il ne faut pas en effet souffrir d'ambiguïté dans ce domaine, disais-je.

On entend trop souvent dire actuellement que le Gouvernement obtient une baisse du chômage - même si les nouvelles ne sont pas très bonnes depuis hier - alors que cette baisse a essentiellement des causes démographiques, avec les 600 000 départs en retraite intervenus cette année. C'est une tendance lourde qui est appelée à se poursuivre.

Mais on ne peut tout attendre de la démographie. Nous ne cessons de dire que le CPE n'est qu'une machine à effet d'aubaine, contre l'embauche directe en CDI, bien sûr, mais aussi contre le contrat à durée déterminée, contre l'intérim.

Les premiers résultats connus concernant le contrat nouvelles embauches vont dans notre sens. Une récente enquête de l'organisme d'analyse Fiducial est révélatrice. Il ressort des réponses mêmes des patrons que ce qui devait libérer l'embauche n'a fait qu'accroître la précarité. Quelques éléments de cette enquête paraissent intéressants.

Ainsi, 86 % des entreprises ont embauché un seul salarié. Ce chiffre augmente naturellement avec la taille de l'entreprise, la moyenne pour les entreprises de 10 à 19 salariés atteint 1, 55 embauche. La proportion des non-cadres parmi les recrutés atteint 97 %, ce que confirme le tableau des diplômes : 78 % des recrutés n'ont pas le bac et seulement 10 % détiennent un diplôme de l'enseignement supérieur. Enfin, 90 % des embauchés étaient réticents face à ce type de contrat ! Ce sont eux qui disent : « C'est mieux que rien », parce qu'ils attendent un emploi depuis des mois.

Plus intéressant encore : 40 % des entreprises ont utilisé le CNE pour remplacer du personnel existant et 71 % auraient embauché tout de même sans l'existence du CNE, en utilisant le CDI pour 57 % d'entre elles, le CDD ou l'intérim pour 40 %, l'apprentissage, ou tout autre mode d'embauche pour 3 %. C'est l'effet d'aubaine, le transfert.

Les créations nettes d'emplois représentent tout de même 29 % des CNE signés, mais, pour au moins 57 % des embauchés, un contrat qui aurait pu être stable et non précaire s'est transformé en contrat avec deux ans d'incertitude.

Sur les raisons du choix du CNE, plusieurs réponses sont fournies : 55 % des dirigeants l'ont choisi pour ne pas prendre de risque si l'activité ralentit ; 51 % pour tester les compétences de la personne pendant plus longtemps ; enfin, ils sont 46 % à vouloir ainsi éviter les contraintes du CDI en matière de licenciement - soit presque un sur deux - et 21 % veulent éviter les contraintes d'un CDD.

Il faut noter que 35 % des embauchés avaient déjà travaillé dans l'entreprise, principalement en CDD ou en apprentissage. Pour les autres, il n'est pas question de diminuer leur période d'essai en validant leur expérience, puisqu'elle n'a pas eu lieu dans l'entreprise.

Toujours d'après cette même enquête sur l'avenir des CNE, près de 12 % des contrats conclus ont déjà été rompus. Parmi eux, 52 % l'ont été par le salarié, 44 % par l'entreprise.

Quand on interroge les dirigeants sur la suite de la période d'essai de deux ans, c'est à dire la transformation éventuelle du CPE en CDI, seuls 43 % affirment qu'ils garderont leur salarié, 48 % ne savent pas et 9 % affirment déjà qu'ils ne les conserveront pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Qu'en sera-t-il dans les grandes entreprises si d'aventure le CNE est généralisé demain ?

Et pour le CPE ? En ouvrant ce type de contrats aux entreprises de toutes tailles, le Gouvernement ouvre imprudemment la boîte de Pandore.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Certains secteurs vont faire appel massivement à cette nouvelle main d'oeuvre corvéable à merci, à ces salariés jetables. Je pense, par exemple, à la grande distribution.

Quand il s'agit de recruter de la main d'oeuvre sans qualification nécessaire, on favorise le moins-disant économique et social. On l'avait vu avec les stages d'initiation à la vie professionnelle, les SIVP, au début des années 1990 : les grandes surfaces embauchaient pour six mois et renouvelaient leur stock deux fois par an pour continuer à bénéficier des aides publiques. Le mot « stock » est, en l'occurrence, employé à dessein.

Rien n'empêchera d'en faire autant avec les CNE : huit heures de formation, et hop ! à la caisse pendant deux ans, avec, de fait, l'obligation d'accepter les horaires morcelés, les pressions morales, les salaires indécents, les contraintes illégales. Pourquoi pas ? Quel salarié sous CPE va protester, en sachant pertinemment qu'il prendra la porte sans que l'employeur soit tenu de présenter une justification ?

Le pire, c'est que ce sont les jeunes les moins qualifiés qui vont être les plus violemment touchés par ce contrat déséquilibré, eux qui seront interchangeables parce qu'utilisés à des tâches ne nécessitant aucun savoir-faire, aucune connaissance particulière. L'exemple du CNE le montre parfaitement, et c'est d'autant plus vrai que le seuil de 26 ans limitera considérablement l'accès à ce type de contrats pour les plus diplômés, puisque, bien évidemment, ils investissent le marché du travail à un âge plus avancé que les non-diplômés.

Ce contrat ouvre donc la voie à un immense retour en arrière vers l'inégalité sociale.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Cet amendement est porté par une vision très réductrice du CPE...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Il conviendra d'évaluer l'ensemble des effets du CPE sur l'emploi. Il faudra alors envisager non seulement les créations d'emplois mais aussi, par exemple, l'existence d'effets de substitution entre le CPE et le CDI, et bien d'autres choses encore.

Nous avons mentionné plusieurs pistes au cours du débat, certaines touchent au régime juridique du CPE, aux modalités d'information du salarié licencié, à la durée de la période de consolidation. Il ne faut pas refermer l'évaluation sur la création nette d'emploi, ce serait la priver de la portée que nous lui attachons. La commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

L'avis du Gouvernement est semblable à celui de la commission, pour les mêmes motifs.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je voudrais simplement apporter deux éléments d'information complémentaires.

En premier lieu, madame Le Texier, vous faisiez référence, je pense, à l'enquête de l'IFOP sur le CNE. Je rappelle que, parmi 65 % des nouveaux embauchés, 36 % étaient au chômage ou au RMI. On ne peut pas ignorer les 36 % qui ont retrouvé un emploi et, pour certains, un emploi qu'ils n'arrivaient pas à trouver depuis longtemps.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ces faits méritent d'être rappelés, car on ne peut que se réjouir de voir des gens depuis longtemps au chômage ou au RMI retrouver le chemin de l'emploi. C'est bien l'objectif du Gouvernement et c'est l'objectif du contrat nouvelles embauches comme du contrat première embauche !

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

En second lieu, vous avez évoqué la croissance démographique. Je voudrais rappeler que la population active continuera à croître jusqu'en 2014. Les chiffres dont nous disposons pour 2005, 2006 et 2007 laissent prévoir sur ces trois années une croissance cumulée de la population active qui avoisine les 60 000.

Je ne peux laisser accroire que nous serions dans une spirale négative de croissance de la population active qui permettrait d'expliquer un certain nombre d'améliorations de la situation de l'emploi. Bien évidemment, ces améliorations doivent être confortées, parce que la situation de l'emploi n'est pas déconnectée de la croissance économique, c'est une réalité, mais on ne peut pas dire qu'elles s'expliquent exclusivement par la diminution de la population active.

Et il faut s'en réjouir ! Car nous sommes, avec l'Irlande, un des rares pays de l'Union européenne qui conserve aujourd'hui une démographie positive.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 510, présenté par M. Nogrix, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le dernier paragraphe (IV) de cet article:

IV. - Les conditions de mise en oeuvre du « contrat première embauche » et ses effets sur l'emploi feront l'objet, tous les semestres, d'une évaluation quantitative effectuée par les organismes chargés du recueil et de la production des statistiques et d'une analyse qualitative associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel.

La parole est à M. Philippe Nogrix.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nogrix

L'objet de mon amendement est de prévoir un dispositif d'observation pour évaluer l'impact économique et social du CPE au plus près de sa mise en oeuvre.

La logique pragmatique qui vous conduit, monsieur le ministre, à tenter l'expérience du CPE doit être poursuivie jusqu'au bout. En l'état, l'évaluation prévue d'ici à 2008 paraît pour le moins désinvolte et, de toute façon, inutile car, comme pour le CNE, le Gouvernement n'attendra pas cette évaluation pour proposer un nouveau dispositif. L'engagement ainsi pris est bien lointain au regard du rythme auquel vit notre époque.

Par ailleurs, dans la mesure où l'on touche aux fondamentaux de notre droit du travail et au prétendu système d'exploitation de notre modèle social, le dispositif d'observation doit moins relever d'un bilan final que d'un mécanisme de veille qui étudiera l'impact du CPE en continu, sous tous ses aspects.

Il convient d'évaluer l'efficacité du CPE pour l'emploi, sur laquelle je suis personnellement prêt à vous suivre, mais également ses conséquences sociales et économiques pour la société française et les salariés, car nul ne peut prédire aujourd'hui où le CPE peut mener.

La meilleure réponse que vous puissiez apporter au procès d'intentions - ou au procès en sorcellerie - que l'on vous intente est l'élaboration d'un dispositif subtil, au plus près des réalités.

Du CPE peuvent jaillir le meilleur comme le pire. À vous vouloir magicien des chiffres du chômage, vous pourriez vous retrouver apprenti sorcier.

Vous demandez à être jugé sur les résultats : il vous appartient donc de mettre en place toutes les conditions de succès.

Tous les observateurs avisés s'accordent à dire que le CPE pose incontestablement plus de questions qu'il n'apporte de réponse.

Les experts de tous bords ont pronostiqué plusieurs effets pervers. Ils évoquent notamment les conséquences matérielles et psychologiques de la précarisation du salarié et l'introduction d'un biais dans le fonctionnement naturel du marché du travail.

Les jeunes qui auront dépassé l'âge limite pour conclure un CPE intéresseront sans doute moins les entreprises : que deviendront, à compétences égales, les jeunes de 27 ans, de 28 ans, de 29 ans et plus ? Que deviendront les jeunes de moins de 26 ans qui auront déjà effectué un CDD additionné de plus de deux ans et qui ne pourront pas bénéficier d'un CPE ?

Les experts prévoient enfin un phénomène de seuil, accru par l'exonération de charges sociales pendant deux ans pour l'embauche d'un jeune au chômage depuis six mois et un effet général de freinage à l'embauche du fait de cette énième modification de la législation du travail.

L'annonce de l'introduction d'un contrat de travail unique risque ainsi de conduire les employeurs à attendre des jours meilleurs.

Ces signaux contradictoires sont confirmés par M. Proglio, que plusieurs ont évoqué. Dans le rapport de son groupe de travail sur l'insertion professionnelle des jeunes, M. Proglio conclut que, pour favoriser l'embauche des jeunes diplômés, les solutions ne se trouvent ni dans une fuite en avant vers la professionnalisation des études ni dans la multiplication de mesures incitatives.

Pour ma part, je le répète, je ne suis pas hostile au CPE. Les risques qu'il comporte doivent toutefois inciter à une certaine modestie. Quoi qu'il en soit, une analyse au plus près du terrain est nécessaire.

Le précédent du CNE, dont vous vous inspirez, est à cet égard plus qu'éloquent. Sur quelles études s'appuyait-on, de quel recul disposait-on jusqu'à présent pour en apprécier le succès dont vous vous prévalez ?

L'enquête que l'IFOP a menée pour le compte de Fiducial auprès de 300 dirigeants ayant recruté sur la base de CNE nous a, il est vrai, révélé que 250 000 contrats ont été signés entre août et décembre. Elle a également révélé que 30 seulement d'entre eux ne seraient pas intervenus sans l'existence du CNE et que celui-ci répond essentiellement à ce qui constitue pour les employeurs une priorité : embaucher sans risque.

Cette analyse est intéressante, mais elle reste un peu sommaire sur un plan qualitatif. Elle est un peu courte en tout cas pour justifier à elle seule la nouvelle donne que représente le CPE.

Une autre étude, beaucoup plus détaillée, confirme la pertinence de l'amendement n° 510. Cette étude est le fait de deux universitaires : M. Pierre Cahuc, professeur à l'université Paris I et membre du Conseil d'analyse économique, rattaché aux services du Premier ministre, et M. Stéphane Carcillo, chercheur au Centre d'économie de la Sorbonne, à l'université Paris I.

Au terme d'une modélisation mathématique originale et rigoureuse, les deux experts montrent que le CNE stimulera les embauches à court terme mais que l'on assistera parallèlement à une augmentation des séparations. Les auteurs tablent au total sur 70 000 créations d'emplois nettes d'ici à la fin de 2008, si le CNE perdure jusqu'à cette date.

Ces emplois, certes, ne coûtent rien aux finances publiques, à la différence des emplois aidés, qui, selon le dispositif retenu, pèsent entre 5 000 euros et 50 000 euros par emploi et par an. Notons néanmoins que 70 000 emplois créés en deux ans et demi, cela reste relativement modeste, tant en valeur absolue qu'au regard d'une évolution démographique qui profitera nécessairement à l'emploi d'ici un an ou deux.

Je ne mentionnerai pas les hypothèses contentieuses, dont les récents développements laissent augurer bien des incertitudes.

Ces arguments montrent qu'il importe de mesurer précisément si, au regard de ces enjeux, le jeu du CPE en vaut la chandelle, si la fin justifie les moyens. Restons modestes !

Je le disais lors de la discussion générale, ce n'est pas la loi qui crée l'emploi, ce sont les conditions économiques, les conditions du marché, les conditions démographiques. Vous avez sur ce point politiquement raison, car l'état de notre démographie va apporter la solution : nous risquons même de manquer de main d'oeuvre d'ici à 2010.

Quant à vous, chers collègues de l'opposition, ayez quelque retenue, lorsque vous exprimez vos réflexions sur les chiffres du chômage : les conjonctures fluctuent, et leur incidence sur l'évolution de l'emploi n'a souvent rien à voir avec les politiques déployées.

Soyons attentifs à l'efficacité de notre système de formation. C'est là qu'il faut agir, monsieur le ministre. À cet égard, je n'évoquerai pas le mammouth à dégraisser, mais plutôt le caméléon, magnifique témoin du passé, qui sait s'adapter à son environnement pour s'y fondre.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je remercie vraiment notre collègue Nogrix, que j'ai écouté avec beaucoup d'attention. Je suis néanmoins obligé de lui dire que je ne partage pas son analyse.

Il propose que l'on procède tous les semestres à une évaluation quantitative. Je l'ai dit tout à l'heure, il me semble que nous ne devons pas nous soucier uniquement du quantitatif, mais également du qualitatif. Il faut étudier l'évolution des différents éléments. Une analyse quantitative, est une succession de chiffres qui s'additionnent. Il faut examiner dans le détail comment ces chiffres ont été obtenus.

Selon la commission des affaires sociales, il est indispensable d'effectuer une évaluation globale du CPE, et ce dans un délai qui permettra de disposer de données pertinentes. Si nous procédions immédiatement à cette évaluation, les éléments nécessaires nous feraient défaut.

Cela ne m'empêche pas de proposer à M. le président de la commission des affaires sociales que la commission procède au suivi du CPE et du CNE. Je suis, quant à moi, tout disposé à participer à cette tâche.

Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 510.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Selon les termes de l'article 3 bis, l'évaluation se fait « au plus tard au 31 décembre 2008 » - l'expression « au plus tard » a son importance -, en « associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel ».

En ce qui concerne le contrat nouvelles embauches, les premières enquêtes sont en cours, car nous souhaitons mettre en place un suivi de cette mesure.

Je souhaiterais à cet égard que l'on n'oppose pas les deux modèles dont il a été question : le modèle mathématique de MM. Cahuc et Carcillo, au modèle des sondages, dont l'étude IFOP-Fiducial est l'exemple. Ce sont deux approches différentes.

Le Conseil d'orientation pour l'emploi, au sein duquel sont présents les partenaires sociaux ainsi que des économistes, comme M. Pierre Cahuc, nommé par le Gouvernement et qui est également membre du Conseil d'analyse économique, a vocation à évaluer l'efficacité des nouveaux dispositifs destinés à favoriser l'emploi, notamment des dispositifs d'allégement de charges. Cela évoque sans doute pour M. Raffarin un projet présenté en conseil des ministres sous son autorité.

M. Jean-Pierre Raffarin acquiesce

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Le modèle du sondage est réalisé sur un fichier comptant 130 000 entreprises, dont sont extraites 1 325 très petites entreprises et l'enquête porte sur 300 dirigeants et non pas sur 300 cas d'embauches. Il en est ainsi chaque fois qu'elle se répète.

Le modèle mathématique, quant à lui, fonde l'étude de Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo. Ses résultats quantitatifs ne doivent être considérés, selon ses auteurs mêmes, que comme des valeurs indicatives.

Deux conclusions semblent aujourd'hui pouvoir être tirées : d'une part, l'augmentation des embauches et, plus généralement, la rotation sur le marché du travail sont susceptibles d'entraîner des effets positifs. D'autre part, le niveau global d'emploi augmente. Il serait un peu rapide de conclure de ces deux données que l'on ne créera que 70 000 emplois ou que l'on ne créera que 29 % ou 30 % des emplois attendus. D'où l'intérêt d'une évaluation plus tardive et d'un suivi par le Conseil d'orientation pour l'emploi. À cet égard, j'ai bien entendu la proposition de la commission des affaires sociales. Ce me semble être une très intéressante contribution à l'évaluation du résultat de ces politiques.

Une de nos particularités, depuis des décennies, est de ne jamais évaluer les résultats des politiques conduites. Le Conseil d'orientation pour l'emploi a été mis en place pour pallier ce défaut.

Le Gouvernement demande donc le retrait de l'amendement n° 510.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 177, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le IV de cet article, remplacer l'année :

par l'année :

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Ma défense de l'amendement n° 176 s'appuyait sur l'enquête IFOP-Fiducial. À propos de cet amendement d'ailleurs, monsieur le ministre, vous avez été chaleureusement applaudi par une partie de la Haute Assemblée, après avoir déclaré, avec des trémolos dans la voix, que ceux qui avaient été recrutés sous CNE étaient, pour 36 % d'entre eux, des chômeurs et des RMImistes. Pensez-vous qu'ils auraient dû rester chômeurs et RMImistes ?

Je disais, monsieur le ministre, que 90 % de ces personnes avaient déclaré avoir accepté ce contrat avec beaucoup de réticences. Ils l'ont accepté à défaut d'une autre proposition. Pensez-vous vraiment que, parce qu'il s'agit de chômeurs et de RMImistes, vous pouvez leur proposer n'importe quoi sauf un réel contrat de travail ? Tel n'est pas notre avis.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Il ne s'agit pas là d'un classique débat entre gauche et droite, nous ne sommes pas ici pour jouer une partition connue : nous pensons vraiment que ce CPE est un pur scandale.

J'en viens à la défense de l'amendement n° 177.

Le CPE étant porté par l'actuel gouvernement tout entier, nous souhaitons que les Français soient correctement informés des conséquences de cette politique de l'emploi avant les grandes échéances électorales de 2007. Nous souhaitons que l'évaluation soit disponible à la fin de 2006.

Nous savons que, d'ici à 2007, nous assisterons à des départs en retraite massifs. Nous nous attendons à un tour de prestidigitation qui ferait apparaître de nouveaux emplois, de nouvelles embauches, comme les conséquences positives du CPE ou du CNE.

Combien d'emplois réellement nouveaux peut-on espérer de la création du contrat première embauche ? C'est la question de fond à laquelle les économistes tentent dès aujourd'hui de répondre.

Permettez-moi de vous donner brièvement lecture des conclusions du rapport de MM. Cahuc et Carcillo, rapport qui fait quelque bruit.

Ces scientifiques, au moyen de nombreuses courbes et équations, arrivent malheureusement aux mêmes conclusions que nous.

« Trois enseignements principaux peuvent être retirés des exercices menés dans cet article.

« Tout d'abord, l'introduction de nouveaux contrats de type CNE a un impact vraisemblablement positif de faible ampleur sur l'emploi à l'horizon de quelques années. Dans le cas le plus vraisemblable, ces contrats devraient accroître faiblement l'emploi, mais réduire, à terme, la population active.

« Ensuite, le CNE exerce l'essentiel de son impact sur l'emploi sur un horizon inférieur à deux ans. Mais l'effet couperet induit par la période d'essai de deux ans implique que l'emploi cesse de croître après deux années, pour diminuer ensuite légèrement au-delà de l'horizon de trois ans. Ce phénomène indique que les résultats d'évaluations ex-post de court terme doivent être interprétés avec prudence, dans la mesure où la détection d'effets positifs forts sur l'emploi observés sur quelques mois ne permet pas de préjuger de l'impact à moyen et long terme.

« Enfin, le CNE aurait tendance, en augmentant l'instabilité des emplois, à détériorer le bien-être des demandeurs d'emploi. Cette détérioration est la conséquence de l'effet couperet induit par la période d'essai de deux ans qui contribue à déstabiliser significativement l'emploi.

« Ces conclusions sont cohérentes avec celles obtenues par les études qui ont évalué les conséquences de l'extension des possibilités d'usage des contrats à durée déterminée. Ces études montrent en effet que les réformes qui flexibilisent le marché du travail à la marge augmentent artificiellement la rotation des emplois, avec des gains faibles en termes d'emploi et des conséquences qui peuvent être néfastes pour le bien-être. En revanche, des réformes qui modifient en profondeur le contrat de travail en substituant une taxe sur les licenciements aux procédures de reclassement interne et au contrôle administratif et judiciaire du licenciement sont susceptibles de réduire l'instabilité de l'emploi tout en favorisant les créations d'emplois ».

Voilà que, par une stupéfiante coïncidence, d'éminents scientifiques démontrent que le CPE, comme le CNE, ne créera que des effets d'aubaine, alors qu'une surcotisation sur les contrats précaires et sur les licenciements serait beaucoup plus efficace pour stabiliser l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mme Le Texier a employé le terme « scandale », mais le véritable scandale serait de ne rien faire, de ne rien proposer aux jeunes qui ont les plus grandes difficultés à trouver un premier emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Le délai proposé est trop court pour permettre une évaluation sérieuse : à la fin de 2006, les données seront fragmentaires et globalement peu significatives.

La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 177.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Puisque Mme Le Texier pense que je parle avec des trémolos dans la voix, quasiment d'une manière chevrotante, je me permettrai de la renvoyer à la symbolique de la chèvre, celle qu'illustre le mythe d'Amalthée nourrissant Zeus. La chèvre n'est-elle pas cette vache du pauvre qui permet à un certain nombre de départements de bien de se développer ? Un excellent ouvrage vient d'ailleurs d'être publié sur le sujet...

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Je voudrais maintenant revenir, d'une voix assurée, sur l'intérêt d'une évaluation dans la durée.

Madame Le Texier, quel intérêt aurait une évaluation réalisée après six mois seulement ? J'ai dit tout à l'heure à M. Nogrix qu'il était nécessaire d'évaluer les effets de ces nouveaux contrats d'emploi dans la durée.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

En conséquence, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 177.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 451, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Dans le premier alinéa de l'article L. 122-25 du code du travail, après les mots : « résilier son contrat de travail au cours d'une période d'essai », sont insérés les mots : «, ou au cours des deux premières années d'un contrat nouvelles embauches ou d'un contrat première embauche, ».

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous défendons le code du travail parce que nous tenons à ce rempart. Nous le défendons également parce que, loin d'être un solide vaisseau permettant de voguer vers l'emploi durable, votre projet de loi sera une embarcation percée, dans laquelle sombreront beaucoup d'espoirs et qui ne conduira qu'à des lendemains amers.

Nous sommes à trois amendements de la fin du débat sur l'article 3 bis : nous en sommes donc aux bouées de sauvetage !

C'est un peu le sens de cet amendement, tendant à créer un bonus-malus incitatif pour les entreprises qui feraient le choix de l'emploi durable. Si le bonus-malus fonctionne pour les assurances, afin d'inciter les conducteurs à la prudence et à l'achat de voitures propres, ce système pourrait inciter les employeurs à la vertu et les décourager de se servir de la précarité comme d'un instrument de gestion de l'embauche. C'est un mécanisme souple, qui permet d'éviter le pire et qui stimule les bonnes pratiques, ne serait-ce que dans un intérêt bien compris.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

On en a longuement parlé lors de nos débats, qui ont été fort longs, mais très intéressants.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Oui ! Je n'ai jamais dit le contraire !

Il a déjà été rappelé en détail comment l'article L. 122-45 du code du travail, relatif aux discriminations et applicable au CPE, interdit à l'employeur de prendre en considération l'état de grossesse lors d'une procédure de licenciement. Il a été aussi rappelé à plusieurs reprises comment cette protection est organisée par la loi de la façon la plus vigoureuse.

C'est pourquoi, madame Blandin, la commission est défavorable à l'amendement n° 451.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Nous avons déjà abordé ce sujet, ce qui m'a notamment permis d'évoquer l'évolution des négociations et la nouvelle convention sur le régime d'assurance chômage ; mais il s'agissait alors des contrats à durée déterminée.

Or le CPE est un contrat à durée indéterminée : il ne peut pas être assimilé à un contrat précaire ; il n'entre donc pas dans le cadre de la réflexion sur la modulation des cotisations sociales en fonction du nombre de recours à des contrats précaires dans l'entreprise, l'indemnité de cessation de contrat, les 2 % de contribution pour la convention de reclassement personnalisé et les actions d'accompagnement.

En conséquence, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 453, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Une modulation de cotisations sociales dont s'acquittent les entreprises est créée en fonction de leur recours à des contrats précaires tels que ceux relevant de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 relative au contrat de travail « nouvelles embauches », ceux prévus à l'article L. 122-1 du code du travail d'une durée de moins de six mois, ceux prévoyant un temps de travail inférieur à la durée légale en vertu de l'article L. 212-4-3, ou d'un contrat première embauche créé par la présente loi. Un décret en Conseil d'État définit les modalités précises de cette modulation.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

La fatigue aidant, à l'instant, j'ai défendu l'amendement n° 453, qui concerne le bonus-malus, à la place de l'amendement n° 451. Cela me permet de vous répondre, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, sur ce dernier.

Même si vous pensiez nous rassurer en nous affirmant qu'il n'y a pas de problème, que la garantie existe, nous maintenons qu'une jeune femme qui n'a guère l'expérience du monde du travail a besoin d'une protection accessible, clairement explicitée dans la loi, et non d'un conflit dont seront éventuellement saisis les prud'hommes, pour inaugurer la promesse qu'elle porte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Cet amendement vise à dissuader les employeurs de recourir au CPE en rendant son utilisation plus coûteuse.

Il est contraire à la position de la commission, et vous comprendrez, madame, que nous donnions un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 453.

Cela dit, je voudrais revenir sur l'amendement précédent en lisant quelques lignes de l'article L. 122-5-2 du code du travail : « Aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit en application de l'article L. 122-26, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines qui suivent l'expiration de ces périodes ».

Par ailleurs, je tiens à réaffirmer le droit au congé parental.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 666, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Le fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi reçoit une contribution appelée « contribution de précarité », payée par les employeurs lors de la signature de chaque contrat de travail précaire, relevant de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 relative au contrat de travail « nouvelles embauches », d'un contrat prévu à l'article L. 122-1 du code du travail d'une durée de moins de six mois, d'un contrat prévoyant un temps de travail inférieur à la durée légale en vertu de l'article L. 122-4-3 du même code, ou d'un contrat première embauche créé par la présente loi. Un décret en Conseil d'État définit les modalités de recouvrement et le montant de cette contribution, due à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi.

La parole est à Mme Hélène Luc, à qui je rappelle qu'elle ne dispose que de cinq minutes. §

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Monsieur le président, vous n'allez pas nous empêcher de parler !

Cet amendement concerne le Fonds de solidarité pour l'emploi, qui a été créé en 1982 et a pour fonction de financer un certain nombre de dispositifs d'insertion au bénéfice des travailleurs privés d'emploi.

Ce fonds est actuellement financé par une cotisation sur les salaires des fonctionnaires, à laquelle s'ajoute une subvention d'équilibre de la part de l'État. Il a vu son budget réduit dans la dernière loi de finances, alors que l'on augmente aujourd'hui ses attributions et que la politique menée par le Gouvernement laisse penser que les travailleurs privés d'emploi relevant de la solidarité nationale risquent de devenir légion.

On peut ainsi s'interroger sur la solvabilité de ce fonds et donc sur la pérennité des actions qu'il est censé financer.

Notre amendement reprend l'une des pistes de réflexion mises en avant par la commission présidée par Martin Hirsch, le président d'Emmaüs, qui est favorable au développement des sanctions pénales en cas de recours abusif au travail précaire.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, nous venons, au sein de la délégation aux droits des femmes, de recevoir le président Hirsch. Il nous a parlé de tous ces nouveaux pauvres, qui sont souvent jeunes et parmi lesquels on compte beaucoup de jeunes femmes seules avec des enfants : ce sont des victimes du travail précaire.

Malheureusement, une part importante des embauches se fait aujourd'hui sur des emplois précaires, et cela est d'autant plus fréquent que le Gouvernement multiplie les contrats qui, comme le contrat « nouvelles embauches », institutionnalisent la précarité.

La presse publie aujourd'hui une étude prospective qui est un véritable pavé dans la mare. Cette étude a été réalisée par deux économistes de Paris I-Sorbonne, Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo ; tous deux sont de fervents défenseurs d'une réforme qui modifie en profondeur le contrat de travail et militent pour la création d'un contrat unique. Ils démontrent, à partir d'une simulation, que l'incidence du CNE sur le chômage ne serait que de 0, 5 % en quinze ans - on est loin des 303 900 emplois prévus ! - et qu'il augmenterait fortement l'instabilité de l'emploi.

Ces chercheurs confirment que la grande nouveauté du CNE est d'avoir suspendu l'ensemble des articles du code du travail qui réglementent le licenciement pendant les deux premières années. Le CPE, réservé aux jeunes de moins de vingt-six ans, présente, de ce point de vue, les mêmes caractéristiques.

L'instauration d'une période d'essai de deux ans, avec un couperet à l'issue de cette période, empêche de produire un effet à long terme sur l'emploi. En effet, même en partant du principe que la flexibilité quasi complète du licenciement liée au CNE libère l'embauche, les destructions d'emplois sont tout autant facilitées.

De ce fait, estiment les économistes, il est possible que le CNE, en devenant la norme en matière d'emploi, se traduise à terme par un accroissement et non par une diminution du chômage.

À l'inverse de cette tendance désastreuse, sur le plan social comme en termes économiques, nous proposons que le Fonds de solidarité pour l'emploi soit abondé par une contribution exceptionnelle sur les emplois précaires. Les CDD, l'intérim, les contrats « nouvelles embauches », les CPE sont autant de possibilités de recours à la flexibilité pour les entreprises, dont les rendements boursiers explosent à mesure que les salariés sont contraints à l'instabilité familiale et économique.

Au cours de la discussion du projet de loi pour le retour à l'emploi, cette question avait déjà été soulevée et, à l'Assemblée nationale, Mme Vautrin avait justifié la baisse des crédits attribués au Fonds de solidarité par la baisse du nombre de bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique. Mais si leur nombre diminue, ce n'est pas parce que celui des chômeurs de très longue durée est en régression - au contraire, il a augmenté de 8 % cette année -, c'est plutôt que les bénéficiaires basculent vers le RMI, un régime bien plus défavorable, et qui les coupe plus encore du monde du travail.

Face à un tel désastre, une contribution minimale des entreprises pour financer les politiques de solidarité en matière d'emploi serait un moindre mal.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Nous ne sommes pas du tout d'accord avec ce que nous venons d'entendre.

Comme nous l'avons dit quand a été examiné l'amendement n° 452, la création d'une contribution de précarité à la charge des employeurs recourant au CNE ou au CPE serait contraire au bon sens. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Nous avons déjà abordé ce sujet à propos la contribution au régime de l'assurance chômage et de l'allocation forfaitaire. Nous en avons parlé également quand il a été question de l'abus de droit.

Le rapport de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion qui est paru voilà quelques jours, et auquel vous avez fait allusion, fait ressortir l'émergence d'un problème chez les jeunes. J'évoquais ce point en présentant, de manière condensée, le rapport émanant de l'association représentant les foyers de jeunes travailleurs, rapport qui fait apparaître que le pourcentage de jeunes percevant plus de 1 065 euros par mois est extrêmement faible.

Madame Luc, c'est bien parce que le Gouvernement voit émerger chez les jeunes cette pauvreté, cette précarité, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

... que traduit le très grand nombre d'entrées sur le marché du travail par le biais de l'intérim ou de CDD de courte durée, cette difficulté d'accès au logement, qu'il propose le contrat première embauche.

Naturellement, nous aurons à mesurer les effets de ce dispositif et à nous assurer qu'il induit une réduction des phénomènes de pauvreté chez les jeunes, comme le recommande le rapport précité.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Nous faisons le même constat, mais nous n'en tirons pas les mêmes conclusions !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le vote est réservé.

L'amendement n° 671, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les exonérations de charge accordées aux entreprises pour des emplois relevant d'un contrat première embauche font l'objet d'un remboursement lorsque la rupture du contrat intervient pendant la période de consolidation.

La parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. Guy Fischer. Il s'agit là du dernier des amendements qui ont été déposés sur l'article 3 bis.

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous avons défendu l'idée selon laquelle les embauches en CPE ne devraient en aucun cas bénéficier d'exonérations de charges sociales, d'autant que nous n'avons aucunement la garantie d'une quelconque compensation par l'État.

Avec cet amendement de repli, nous voulons prévenir une situation inacceptable, celle qui consisterait, pour une entreprise, à bénéficier de manière définitive d'exonérations de charges au titre d'emplois relevant d'un CPE attribués à des jeunes qu'elle n'a pas l'intention d'utiliser au-delà de ses besoins immédiats. Comme on le sait, ce sera, par définition, bien trop souvent le cas des embauches en CPE.

Il nous paraît donc logique et nécessaire que toute entreprise dans cette situation ait l'obligation de rembourser les fonds qui lui auraient été ainsi accordés si elle rompt le contrat avant l'expiration des deux années de la période de consolidation. Si tel n'était pas le cas, la mesure reviendrait à lui accorder une prime au licenciement.

Il faut absolument décourager les entreprises de « profiter » impunément de l'argent public, de cumuler tous les avantages, au détriment des salariés.

Nous savons tous que certains patrons, soutenus d'ailleurs en cela par le MEDEF, n'ont pas beaucoup de scrupules en la matière. Loin de moi l'idée de jeter la pierre à tous les employeurs, mais l'expérience est là.

Rappelons-nous le cas de l'entreprise Hewlett-Packard, implantée notamment en Rhône-Alpes, dans le département de l'Isère. Après avoir empoché 1, 2 million d'euros d'aides publiques d'État, cette entreprise a annoncé, au mois de septembre dernier, la suppression de 1 240 emplois. Mes chers collègues, estimez-vous qu'un tel comportement est moral ? La question du remboursement de ces fonds avait alors été posée, suscitant des réactions extrêmement véhémentes de la part de la direction de cette entreprise. Le Premier ministre, Dominique de Villepin, dans un entretien accordé au journal Les Échos, avait lui-même affirmé qu'il paraissait « normal » que la société informatique « rembourse les aides publiques spécifiques dont elle a pu bénéficier ».

Le problème, c'est que les outils juridiques n'existent pas réellement en France - et pour cause : vous n'en voulez pas ! -, et que l'opacité est reine dans le versement des aides qui sont, du même coup, difficiles à évaluer. Robert Hue avait formulé toute une série de propositions tendant à éviter cette gabegie, afin de vérifier que toutes les aides publiques, auxquelles les membres de mon groupe ne sont pas systématiquement opposés, soient utilisées à bon escient.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Contrairement à vous, monsieur de Raincourt !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Effectivement, je ne vous ai pas vu ce matin, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En acceptant l'amendement n° 671, tant le gouvernement de M. de Villepin que la majorité parlementaire aideraient à apporter un peu de clarté en la matière, d'autant que l'évaluation est facile en matière d'exonérations de charges accordées dans le cadre d'un CPE.

Accepter notre amendement serait aussi mettre un petit coup d'arrêt au gâchis des aides publiques en France. Je rappelle que l'ensemble de celles qui transitent par le budget de l'État représente, selon les estimations, de 1, 8 % à 3, 5 % du PIB.

Les exonérations de charges sociales, quant à elles, ont dépassé les 20 milliards d'euros, sans entraîner d'effet positif sur l'emploi, comme nous l'avons démontré. En revanche, elles ont engendré des effets pervers et sur l'emploi et sur la protection sociale.

Mais il est vrai que, sur ce dernier point, il y a une parfaite cohérence avec votre politique sociale et de santé, laquelle consiste à toujours réduire les dépenses pour laisser plus de place aux profits.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je rappelle que les dividendes distribués aux actionnaires par les entreprises du CAC 40 se sont accrus de 33 % en un an. Et l'on voudrait faire croire aux jeunes qu'il faut diminuer le coût de leur travail parce que les entreprises n'auraient pas d'argent !

Il est grand temps d'admettre que la multiplication des exonérations, des aides publiques en tout genre, toutes accordées sans aucune garantie pour l'emploi, est une politique désastreuse. C'est pourquoi les membres du groupe CRC ont déposé l'amendement n° 671.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Mon cher collègue, vous avez employé l'adjectif « inacceptable ». Oui, il est inacceptable de laisser les jeunes en dehors du monde du travail. Oui, il faut tout faire pour que les jeunes puissent entrer dans le monde du travail. Oui, le CPE y contribue.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

À n'importe quel prix, à n'importe quelle condition, comme vous l'avez indiqué lors d'une émission diffusée par Public Sénat !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Par ailleurs, je dois souligner qu'aucune exonération de charge n'est accordée au titre du CPE. En revanche, les aides éventuellement perçues au titre du CIE pour un salarié embauché en CPE devront être reversées, en cas de rupture, dans les conditions prévues par le régime du CIE. Je suis heureux que vous m'ayez fourni l'occasion d'apporter cette précision : ainsi, le lecteur du Journal officiel saura de quoi il retourne réellement.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

Monsieur le sénateur, vous proposez de prévoir un remboursement des exonérations de charges en cas de rupture du contrat de travail pendant la période de consolidation du CPE. Mais aucun allégement de charges n'est associé au CPE, qui n'est pas un nouveau contrat aidé.

Je l'ai déjà indiqué en répondant à M. Nogrix, le Premier ministre a saisi le Conseil d'orientation pour l'emploi afin que soit dressé un bilan et que soient suggérées des pistes au sujet de l'éventuelle conditionnalité des aides des pouvoirs publics à des engagements de la part de l'entreprise, notamment en termes d'emploi et de qualité d'emploi. Nous verrons, à la lumière du rapport demandé par M. le Premier ministre, quelles dispositions doivent être prises.

Pour le reste, le droit commun s'applique. Si, par exemple, le contrat première embauche est un contrat initiative-emploi, en cas de rupture sur décision de l'employeur, ce dernier devra rembourser les aides publiques perçues, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Larcher, ministre délégué

...sauf, naturellement, en cas de faute grave.

Je tiens à l'indiquer clairement : par parallélisme, ce mécanisme s'appliquera à d'autres dispositifs incluant notamment des exonérations ou des aides particulières : l'employeur, en cas de rupture du contrat sur son initiative, hormis le cas de faute grave, devra rembourser les aides publiques perçues.

Pour ce qui concerne Hewlett-Packard, la somme de 1, 2 million d'euros a été versée non par l'État, mais par les collectivités territoriales. C'est un sujet que nous avons évoqué avec M. Vallini, président du conseil général de l'Isère.

M. Christian Poncelet remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, nous avons achevé la présentation des amendements déposés sur l'article 3 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Conformément au règlement, je vais mettre aux voix les amendements dont le vote a été précédemment réservé.

La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 146 rectifié, 273 rectifié, 440 et 648.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

« Égalité des chances » : c'est avec ce titre mensonger et prétentieux que le Gouvernement vient devant le Parlement pour imposer, en fait, de très graves reculs en matière de droit du travail et de droit au travail.

Contrairement à ce qu'affirme M. de Villepin dans ses déclarations en faveur de l'emploi, nous assistons à un bouleversement du droit ainsi qu'à une précarisation sensible de la société dans son ensemble et, surtout, des couches modestes de la population.

Mesdames, messieurs de la majorité, vous avez déjà oublié le « non » au référendum du 29 mai dernier, au cours duquel les électeurs ont clairement exprimé, ainsi que toutes les analyses des spécialistes l'ont démontré, combien étaient fortes leurs préoccupations devant la gravité de la question sociale et leur exigence de voir enfin un autre système social se mettre en place à l'échelle de notre pays et de l'Europe.

Or, texte après texte, l'insécurité sociale dont parlent nombre de spécialistes s'accroît.

Mais au fait, sommes-nous en train d'assister à une stérile opposition entre droite et gauche ? Participons-nous à un débat dans lequel la majorité détiendrait la vérité alors que l'opposition répandrait la mauvaise foi ? Pour vous convaincre qu'il n'en est rien, je veux citer un remarquable « point de vue » signé par cinq spécialistes, Tiennot Grumbach, Pierre Lanquetin, Pierre Lyon-Caen, Claude Michel et Christine Zbinden : « Non, décidément, l'espoir très aléatoire d'une amélioration de l'emploi ne peut justifier l'existence d'une catégorie de salariés corvéables à merci et l'effacement de trente-deux années d'acquis sociaux, ainsi que la négation de principes fondamentaux internationalement reconnus. »

Ces spécialistes portent un jugement autant sur l'insécurité sociale aggravée pour les salariés que sur celle qui se fait jour dans les entreprises.

Le titre de leur contribution est clair : « Employeurs, salariés, vous avez été trompés ! » Ils écrivent encore : « En effet, en droit commun, le salarié licencié sait ce que l'employeur lui reproche. Il peut donc, en connaissance de cause, décider de saisir ou non le juge, ce qui se fait assez rarement, contrairement à une idée reçue chez les employeurs. Devant le juge, la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Avec le CNE, et demain le CPE, la lettre de licenciement sera le plus souvent non motivée. »

L'orateur s'exprime dans un bourdonnement provoqué par des conversations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Écoutez donc, chers collègues, je pense que c'est important pour que vous puissiez vous forger une opinion en connaissance de cause ! Merci, monsieur le président, de faire respecter l'ordre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

« La charge de la preuve incombera au salarié qui devra démontrer que son licenciement n'est fondé ni sur l'insuffisance professionnelle ni sur un motif économique. Perversion du système : l'ignorance du motif du licenciement va contraindre le salarié, pour le connaître, à assigner presque systématiquement en justice son employeur, alors que l'on entretient les employeurs dans l'illusion que le CNE les mettrait à l'abri du juge ! »

Nous, sénateurs de l'opposition, avons développé cette thèse à de très nombreuses reprises ici même, et je prends là quelques exemples dans un désordre qui n'est apparent.

Ces cinq spécialistes poursuivent ainsi : « Or, l'ordonnance en question... » - il s'agit de l'ordonnance n° 158 de l'OIT, ordonnance que vous avez contestée à plusieurs reprises, monsieur le ministre - « ... est contraire à l'article 4 de la convention de l'OIT, qui interdit qu'un travailleur puisse être licencié sans qu'il existe un motif valable de licenciement, ainsi qu'à l'article 7, qui impose l'existence d'une procédure contradictoire en cas de licenciement pour les motifs liés à la conduite ou au travail du salarié. »

Ils ajoutent ceci : « Le Conseil d'État a considéré que le délai de deux ans prévu par l'ordonnance précitée était raisonnable au regard du but poursuivi : favoriser l'emploi. Sa décision, très contestable, ne s'impose nullement au juge judiciaire, qui a toute latitude pour avoir une appréciation contraire. Pour le moins, le juge prud'homal devra tenir compte des termes de la convention n° 158 pour interpréter restrictivement l'ordonnance du 2 août 2005.

« Cependant, le plus préoccupant est ailleurs. Imagine-t-on la situation angoissante de ces salariés qui, chaque matin, et pendant deux années, ignoreront si leur contrat sera maintenu le lendemain, même s'ils bénéficient, en cas de rupture, d'un court délai de préavis, insuffisant pour retrouver un emploi ?

« Comment les salariés parviendront-ils à faire respecter leur dignité alors que, à la moindre contrariété ressentie par leur employeur, ils sauront qu'ils peuvent, sans préalable et sans motif, voir leur contrat rompu ? »

Mes chers collègues, vous aurez noté que ces spécialistes relèvent non seulement beaucoup d'incertitudes, mais aussi beaucoup de certitudes quant aux dangers suscités par le CPE, que le Gouvernement veut faire adopter.

Enfin, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

... je citerai un observateur que vous ne contesterez pas, monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité : le directeur de la rédaction du magazine Liaisons sociales. Je crois en effet utile de porter à votre connaissance, avant que vous ne procédiez au vote sur ces amendements, une appréciation que formule M. Denis Boissard.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. Permettez, monsieur Braye ! C'est moi qui préside la séance !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Roland Muzeau. Il écrit : « L'erreur du Premier ministre, c'est, au nom de l'urgence, de brûler les étapes, sans prendre le temps ni de l'évaluation promise du CNE, ni de la pédagogie de la réforme, ni d'une concertation poussée avec les partenaires sociaux. Encouragé par l'absence d'opposition significative au CNE, Dominique de Villepin a choisi de tenir les corps intermédiaires pour quantité négligeable. Le voilà, à l'heure où ces lignes sont écrites, sous la menace d'une coalition entre syndicats et mouvements d'étudiants, fort semblable à celle qui avait fait capoter le projet du CIP

Manifestations d'impatience sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. Monsieur Muzeau, terminez, s'il vous plaît !

Exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Roland Muzeau. L'opposition n'est pas seule à contester le CPE : tous les spécialistes que je viens de citer, les jeunes, les étudiants, les lycéens sont opposés au CPE, et je suis sûr qu'ils obtiendront satisfaction.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Monsieur Muzeau, j'ai été tolérant, mais je ne le serai pas toujours !

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Saisi par la colère d'une jeunesse qui se sent malmenée et discriminée...

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin. Est-ce le mot « jeunesse » qui me vaut ce sursaut de M. de Rohan ?

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je reprends mon propos : saisi par la colère d'une jeunesse qui se sent malmenée et discriminée, le Gouvernement a répondu par un texte sur l'égalité des chances.

Hélas, de même que, aux élèves en difficulté en classe l'article 1er propose, non du soutien scolaire, mais une sortie accélérée, cet article 3 bis ne tend à offrir aux jeunes impatients de prendre toute leur place dans la société que les aléas d'un contrat aux engagements unilatéraux et aux recours incertains puisque les garanties votées hier dans le code du travail se trouvent mises en question dans le texte d'aujourd'hui.

Quant aux amendements déposés par l'opposition et ayant pour objet de sécuriser ce dispositif, tous ont été refusés.

Cela renforce les sénatrices et le sénateur Verts dans leur conviction qu'il faut supprimer cet article, comme ils le proposent dans l'amendement n° 440.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote, et je vous prie de l'écouter, mes chers collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Pourquoi voulons-nous supprimer cet article, monsieur le ministre ? Parce que dire à un jeune que la meilleure raison de l'embaucher c'est la certitude qu'on pourra le licencier sans motif, ce n'est pas une proposition, c'est un affront ; parce que utiliser la peur du chômage pour ne laisser d'autre choix que la régression sociale, ce n'est pas une politique, c'est une manipulation ; parce que laisser entendre que la création d'emplois dépend de la destruction de notre modèle social, ce n'est pas dire la vérité, c'est prêcher le faux.

À installer dans les esprits l'idée que c'est la facilité à licencier qui est la clé de l'embauche, vous faites du code du travail le seul frein à la création d'emplois.

L'étape suivante est évidente et, surtout, logique : étendre à tous la précarité et calquer tous les contrats de travail sur le modèle du CPE et du CNE. C'est le contrat unique.

Vous oubliez au passage qu'une économie moderne et dynamique ne peut appuyer sa croissance sur l'exploitation du travail précaire et peu cher. Ce dont elle a besoin, c'est d'investissements, de recherche et d'innovation, c'est de compétence et de motivation, c'est d'éducation et de stabilité.

Or, monsieur le ministre, en guise de modernisation de l'économie, vous n'offrez à notre pays qu'un retour au XIXe siècle : chômage de masse, embauche à la journée, absence de protection sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

C'est honteux d'affirmer des choses pareilles !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Un tel choix n'est pas seulement inefficace et contre-productif, il est surtout injuste.

Qu'il soit inefficace, vous le savez bien : depuis que vous êtes au pouvoir, vous n'avez cessé vos attaques contre le droit du travail. Pour quel résultat ? La France ne crée toujours pas d'emplois !

Qu'il soit contre-productif, vous ne pouvez l'ignorer : à défaut de créer des emplois, vous favorisez les effets d'aubaine, et ce sont les contrats stables, du type du CDI, qui ont subi une nette érosion au profit de ces nouveaux contrats jetables.

Contre-productif, il l'est également parce que facteur d'insécurité juridique. À défaut de relancer l'emploi des jeunes, vous allez remplir le porte-monnaie des avocats !

Il est injuste, enfin, parce qu'il n'offre à notre jeunesse qu'une place subalterne dans le monde du travail.

Faciles à supprimer, faciles à renouveler, les CPE devraient rapidement devenir la règle de l'emploi des moins de vingt-six ans, tant ils permettent à l'entreprise d'utiliser son jeune personnel comme une variable d'ajustement en cas de retournement de conjoncture.

Et c'est bien là son seul intérêt. La création du CPE témoigne de votre indifférence envers ceux qui sont l'avenir de notre pays. J'en veux pour preuve le fait que vous ne vous êtes même pas attaqué aux inégalités que le chômage des jeunes recouvre.

Prétendre que les jeunes mettent onze ans à s'intégrer dans la vie active c'est énoncer une contrevérité, monsieur le ministre ! Seuls ceux qui sortent sans qualification de notre système scolaire sont dans cette situation. C'est dire si le chômage des jeunes dépend du niveau de formation ! Quand on observe la situation des jeunes cinq à dix ans après la fin de leurs études, on s'aperçoit que seuls 6 % de ceux qui ont un diplôme supérieur au baccalauréat sont au chômage, contre plus de 30 % de ceux qui n'ont aucun diplôme.

Ce n'est pas en créant un contrat tel que les jeunes seront corvéables et révocables à merci que vous leur ouvrirez un meilleur avenir, c'est d'abord en vous intéressant aux questions d'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Si cet article est maintenu, c'est une fin de non-recevoir aux espoirs de toute une génération que vous opposerez là, monsieur le ministre.

Comment trouver sa place dans la société quand on n'entre sur le marché du travail que par le biais d'un sous-contrat ? Comment être fier de son emploi quand on sait qu'on a été recruté parce qu'on était facile à limoger ? Comment envisager l'avenir quand on ne sait jamais de quoi demain sera fait ? Comment affermir ses compétences et progresser quand on est à la merci du bon vouloir de l'employeur ? Comment s'affirmer dans un contexte où la peur du licenciement est promesse de soumission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Un tel contrat, loin de rendre espoir à la jeunesse, la stigmatise toujours plus et creuse encore les inégalités qui la traversent.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Les employeurs ne sont pas dupes, qui le disent eux-mêmes : « on ne prendra jamais le risque de proposer un CPE à un élève ingénieur très convoité. »

C'est assez dire que, pour eux, le CPE n'est qu'un sous-contrat à destination d'une population interchangeable et paupérisée, un sous-contrat qui risque très vite de devenir l'unique modèle des relations de travail dans l'avenir : par petites touches, de CNE en CPE, c'est le salarié que l'on dépouille de toute protection et le monde du travail que l'on transforme en jungle !

Que la jeunesse soit l'une des premières cibles de cette entreprise de précarisation générale est un aveu du manque total de confiance que vous avez en son avenir. En rognant ses droits, vous la privez de son audace et c'est toute notre société que vous fragilisez.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons déjà exposé toutes les raisons pour lesquelles nous nous prononcerons évidemment pour la suppression de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l'Ump

De cet article !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il s'agit bien d'un amendement que le Gouvernement nous a infligé, et non d'un article du projet de loi initial.

Si nous voulons le supprimer, c'est parce que, par ce biais, monsieur le ministre, vous mettez à mal les garanties des salariés, qui, ma foi, n'en ont déjà pas beaucoup tant il est vrai que, dans ce pays, il est plus facile d'être licencié que de garder son emploi.

Mais nous avons des raisons supplémentaires de nous opposer à cet article parce que, il n'y a pas si longtemps, vous avez présenté le CNE comme un remède miracle, comme la clé permettant aux petites entreprises d'embaucher. Dans la foulée, vous vous êtes précipité pour étendre le CNE, sous la forme du CPE, à toutes les entreprises, et ce à l'intention des jeunes de moins de vingt-six ans.

Vous savez que le CPE suscite une très grande colère, en particulier chez les jeunes, qui se sentent ainsi, avec raison, méprisés et stigmatisés, mais vous avez bâti toute votre argumentation sur le fait qu'il allait, lui aussi, inciter les entreprises à embaucher des jeunes - reconnaissant au passage que ceux-ci, dans notre société, subissent le plus durement la précarité -, ce qu'elles ne faisaient pas. M. le rapporteur n'a-t-il pas répété à l'envi - à peu près toutes les demi-heures ! - qu'il vaut mieux avoir un CPE que rien du tout ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous pensiez, monsieur le ministre, pouvoir annoncer que, grâce au CNE, 250 000 emplois seraient créés ; le chiffre de 300 000 avait même été avancé.

Mais que nenni ! Vos propres services eux-mêmes vous ont contredit : selon eux, seuls 70 000 emplois, en tout et pour tout, étaient dus au CNE ; les autres résultaient d'effets d'aubaine et auraient été créés de toute façon. De plus, le nombre d'inscrits à l'ANPE et de bénéficiaires du RMI laissait penser que, s'il y avait moins de chômeurs, c'était surtout parce qu'ils avaient disparu des fichiers d'inscription au chômage.

Les premiers échos que nous avons du CNE montrent que, si ces personnes ont bel et bien été embauchées au mois de novembre ou au mois de décembre, la plupart sont, hélas ! déjà licenciées.

En réalité, ce CNE a, tout compte fait, vraiment été une aubaine pour embaucher quelqu'un avec un contrat inférieur à un CDD. Ce n'est évidemment pas ce que vous nous aviez promis !

De plus, vos propos concernant la reprise de l'emploi se trouvent totalement contredits : au lieu d'entrevoir l'embellie promise, on s'aperçoit que, ce mois-ci, le chômage a crû de nouveau de 0, 7 %, alors même qu'il se situait déjà à un niveau très élevé !

Aujourd'hui, la proportion de salariés payés au SMIC atteint un record : 16, 8 %, soit 2, 5 millions de personnes. On sait également que le nombre de RMIstes a augmenté. Quant aux chiffres de la précarité et de la pauvreté, ils explosent.

On peut donc considérer que, dans ce pays, 6 millions de personnes vivent en deçà du seuil de pauvreté, c'est-à-dire qu'elles n'ont même pas la tête hors de l'eau.

Mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, ne pensez-vous que, au lieu de vouloir à toute force adopter le CPE, vous devriez vous pencher plus avant sur les moyens de relancer l'emploi ?

Ne croyez-vous pas, car il est inadmissible que le niveau des salaires soit aussi bas dans notre pays, qu'il faudrait envisager une augmentation des salaires, ainsi que le relèvement du SMIC et des minima sociaux. Ah, bien sûr, cela se traduirait par une diminution de la rémunération des actionnaires, qui, elle, ne cesse d'augmenter !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous seriez bien avisés de constater combien ce type de contrat, qui représente une étape extrêmement dangereuse dans la casse du code du travail, est néfaste pour les jeunes, qui attendent autre chose de leur premier emploi. Vous seriez, par conséquent, bien inspirés de supprimer cet article 3 bis puisque le CPE, loin de constituer un bon moyen de créer des emplois, est parfaitement inefficace. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. André Vézinhet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vézinhet

Depuis bientôt trois heures, nous débattons des amendements déposés sur l'article 3 bis. Pendant ce temps, dans la rue, dans les universités, dans les lycées, des jeunes, de jeunes travailleurs mais aussi, souvent, de jeunes demandeurs d'emplois se mobilisent, disant à quel point leur situation est difficile, criant leur détresse.

La représentation parlementaire, en présentant de nombreux amendements tendant à améliorer cet article, si tant est que cela soit possible, a joué son rôle.

Ces propositions portent sur les thèmes les plus divers. Améliorations concernant la protection sociale : refus par la voix du rapporteur, refus par la voix du ministre ! Aménagements pour parer aux effets néfastes du renouvellement du contrat de travail ou du licenciement, qui devient tellement aisé dans le cadre du CPE : refus par la voix du rapporteur, refus par la voix du ministre ! Aménagements relatifs aux obligations de formation : refus par la voix du rapporteur, refus par la voix du ministre !

Sur ce dernier point, le Gouvernement a émis un avis défavorable alors même que M. le rapporteur s'en était remis à la sagesse du Sénat.

S'agissant des obligations d'évaluation : refus ! Monsieur le ministre, vous êtes allé jusqu'à nier la validité des méthodes statistiques utilisées, qui sont pourtant éprouvées depuis longtemps. Les statistiques seraient-elles donc aux ministres ce que le lampadaire est à l'alcoolique, à savoir qu'elles les soutiennent, mais ne les éclairent pas ?

Nous sommes face à une situation dramatique et je crois que, si les jeunes qui manifestent aujourd'hui avaient été présents lors de ce débat, l'amendement de suppression se serait imposé de lui-même.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je mets aux voix les amendements identiques n° 146 rectifié, 273 rectifié, 440, 648.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 94 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous avez pris une grave responsabilité, chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote sur l'amendement n° 501.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nogrix

Nous avons déposé cet amendement parce qu'il nous semble que le CPE ne répond pas aux attentes des entreprises ni à celles des futurs salariés.

D'une part, les entreprises, lorsqu'elles embauchent, ont besoin de l'assurance que tout se passera au mieux lors de la réalisation de la mission confiée au salarié.

Bourdonnement sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nogrix

M. Philippe Nogrix. D'autre part, le salarié a également besoin d'une certaine assurance, afin d'effectuer dans les meilleures conditions la mission que l'employeur lui aura confiée.

Malgré un rappel à l'ordre de M. le président, le bourdonnement persiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nogrix

Il nous semble donc nécessaire de mettre en place un nouveau CDI, appelé « contrat progressif », évoluant au fur et à mesure que le salarié, grâce à l'expérience et au savoir-faire acquis, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Pardonnez-moi de vous interrompre, mon cher collègue, mais j'aimerais que cesse ce bavardage permanent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère. Si vous ne le voyez pas, alors...

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nogrix

Merci, monsieur le président.

Nous proposons donc le remplacement du CPE par un CDI à droits progressifs, qui se caractériserait par quatre éléments importants.

Premièrement, la période d'essai serait de six mois, la période de deux ans étant à notre avis beaucoup trop longue. Il nous semble en effet qu'en six mois l'employeur peut juger de la qualité et des compétences de celui qu'il a embauché et que celui-ci peut, en retour, exprimer la totalité de son savoir-faire et de son engagement dans l'entreprise.

Deuxièmement, la rupture du contrat devrait obligatoirement être soumise à motivation. En effet, et nous l'avons répété à maintes reprises en présentant nos amendements, comment peut-on laisser partir un jeune sans lui donner la raison réelle de son licenciement ? Comment pourra-il se reconstruire, modifier son parcours ? Quelle formation choisira-t-il afin d'améliorer son efficacité et d'augmenter son attractivité professionnelle auprès d'un nouvel employeur ?

Troisièmement, nous prévoyons un renforcement progressif, au fil du temps, des droits accumulés, notamment des droits à indemnités des salariés signataires de ce contrat.

Enfin, en cas de rupture du contrat de travail, le salarié devrait bénéficier d'une validation des acquis de l'expérience. Vous avez dit, monsieur le ministre, que vous étiez très attentif à cet aspect. En effet, un accompagnement spécifique du salarié par l'Agence nationale pour l'emploi, tel que vous l'avez décrit, est absolument nécessaire.

On va vers une simplification et une flexibilisation du droit du travail : soit ! Cependant, quand on parle de « flexsécurité », je crois que l'on pense beaucoup à la flexibilité et peu à la sécurité. À l'UDF, nous souhaitons qu'il y ait autant de sécurité que de flexibilité.

Dans ce pays, lorsqu'on emploie deux termes juxtaposés, l'un des deux est souvent prédominant. Rappelez-vous nos discussions sur le capital-risque : on parlait beaucoup de capital et très peu de risque. De même, à propos du RMI, il a été beaucoup plus question de revenu minimum que d'insertion. Ne sommes-nous pas dans un cas de figure un peu semblable avec la « flexsécurité » ?

Nous voudrions donc rétablir l'équilibre entre les deux termes. C'est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement, en espérant qu'il sera adopté. En effet, mieux vaut enterrer le CPE et adopter notre CDI à droits progressifs.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Même si ce n'est pas tout à fait sous la même forme, cet amendement reprend certaines des volontés que nous avons affichées dans nos différents amendements. Il présente un certain intérêt puisqu'il y est question d'un contrat à durée indéterminée, qu'il prévoit pour la période d'essai une durée raisonnable, clairement limitée à six mois - durée qui mériterait toutefois d'être examinée - et qu'il institue l'obligation de motiver toute rupture de contrat.

Cet amendement va donc dans le bon sens et il correspond à une optique qui ne s'oppose pas à celle qui pourrait être la nôtre, à savoir un CDI bien aménagé.

Cependant, tel qu'il s'intègre dans ce texte, il nous semble difficile de le voter, d'autant que l'institution d'un CDI qui faciliterait véritablement l'ouverture de l'emploi aux jeunes passerait par une définition beaucoup plus claire du rôle et des moyens que l'on veut donner à ces derniers dans l'entreprise.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste s'abstiendra sur l'amendement de nos collègues de l'Union centriste-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Roland Muzeau. Lors de la discussion générale, nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt les interventions des membres du groupe UC-UDF, qui ont exprimé, de façon extrêmement claire, me semble-t-il, un refus du CPE.

Marques d'approbation sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Au long de nos débats, ils ont conservé cette ligne de conduite et ils ont multiplié les interventions dénonçant de manière très explicite les aspects néfastes et dangereux du CPE pour les jeunes.

Certes, nous le savons tous, dans le débat parlementaire, après les amendements de départ, qui traduisent la position la plus éloignée du texte, viennent des amendements « de repli », destinés à « limiter la casse » pour les populations que nous voulons défendre.

En l'occurrence, on soumet maintenant à notre vote un amendement qui, comme vient de le dire mon ami Jean-Pierre Godefroy, est porteur d'un certain nombre de dispositions non dépourvues d'intérêt, mais le vote important était celui qui vient d'intervenir sur les amendements de suppression de l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

À cet égard, je regrette vivement que nos collègues n'aient pas saisi cette occasion de marquer plus franchement leur désaccord sur le CPE. Convenons-en, avec cet amendement, on descend brutalement de plusieurs crans.

Je crains que la déception que nous pouvons ressentir sur les travées de l'opposition ne soit sans commune mesure avec l'énorme déception des jeunes qui seront victimes du CPE si celui-ci est finalement adopté.

C'est pourquoi le groupe CRC ne participera pas au vote sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Mes chers collègues, le moment me semble venu de souligner qu'il se produit à cet instant un événement politique qui n'a pas eu d'équivalent lors du débat à l'Assemblée nationale. C'est donc que le développement du débat a permis que mûrissent les esprits, au point que la majorité gouvernementale - je ne crois pas me tromper sur le terme : il s'agit bien de la majorité gouvernementale - n'est pas d'accord sur l'appréciation qu'il y a lieu de porter quant au CPE.

Je ne ferai pas un usage politicien de cet événement, car je veux m'attacher au fond, mais je tiens à le pointer : il ne saurait être question qu'il soit emporté dans le brouhaha et sa portée réduite à rien.

Vous n'êtes pas d'accord entre vous, et c'est un fait politique parce que ce désaccord tient à des raisons de fond.

Les uns - ils reconnaîtront que nous leur faisons la grâce de les prendre au mot - pensent que le CPE va favoriser l'emploi et manient depuis des heures le paradoxe selon lequel un droit plus grand de licencier faciliterait l'embauche ! Depuis le début du débat, nous leur disons qu'ils se prévalent de leurs propres turpitudes.

Constatant que le niveau d'emploi des premiers entrants dans le travail, que nous nommons « les jeunes », baisse - et cela du fait de quoi, sinon de la politique que vous menez ? - vous proposez, comme remède, l'aggravation des conditions qui conduisent à ce désemploi !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

Et pourquoi, alors, les jeunes partent-ils travailler en Angleterre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

Mais nous vous prenons au mot : supposons que le but soit bien de favoriser l'emploi et non pas de donner aux patrons un outil de pression de plus sur les jeunes travailleurs. Car, à vingt-six ans, c'est bien de travailleurs et de travailleuses que nous parlons, pas de bambins en culottes courtes ! Supposons donc que vous ne vouliez pas seulement donner un avantage au MEDEF, qui réclame tout et son contraire et qui voudra sans cesse aller plus loin dans l'art de domestiquer les travailleurs. Eh bien, s'il s'agit d'augmenter l'emploi, faites-nous en la démonstration !

Nous continuons à vous dire que le travail fait dans la peur du lendemain sera mal fait. Nous continuons à vous démontrer que, lorsque la qualification existe, l'embauche est meilleure, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Et, vous, qu'avez-vous fait lorsque vous étiez ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

...que vous développerez l'emploi par la croissance et que l'on développe la croissance par la qualification et par la qualité du travail qui est produit, à moins que ce ne soit par le partage du temps de travail. Il n'existe d'exception à cette règle dans aucune économie développée !

Vous n'avez pas été capables de nous démontrer qu'un seul poste supplémentaire serait créé de la manière que vous nous proposez. Chose incroyable, vous vous prévalez de vos propres turpitudes, c'est-à-dire du désemploi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Mélenchon

C'est peut-être long, mais c'est notre argument central : souffrez donc de l'entendre !

Nous ne sommes pas d'accord avec vous et vos collègues de l'UDF non plus. Sur un point au moins, nous sommes d'accord avec eux : ce n'est pas la précarité qui crée l'emploi, mais au contraire la stabilité.

Alors, chers collègues de l'Union centriste-UDF, nous devrions, si nous n'étions que politiciens, pour encourager le mouvement et soutenir l'ambiance, voter avec vous. Nous ne le ferons pas : nous allons nous abstenir de participer au vote. Pourquoi ? Parce que vous maintenez l'illusion de l'encouragement à l'emploi par la précarité. Vous faites à vos collègues de la majorité une concession qui n'a pas de sens : vous ne proposez que de « réduire » la précarité en réduisant la durée de la période d'essai. Or il faut abroger la précarité, il faut éradiquer la précarité ! C'est la condition de la croissance !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout le monde convient que le moment est décisif. Il y a, d'un côté, le Gouvernement, accroché à son texte, de l'autre, le pays, et l'on sent bien que ce texte ne le rassure pas !

L'inquiétude est forte dans le pays, mais une opposition frontale ne permettra pas davantage d'apporter les garanties qui restaureraient la confiance. Or l'important, au-delà de nos débats d'assemblée, c'est ce que ressentent tous les jeunes en situation de précarité.

La précarité doit être abolie, et tout doit être fait en ce sens. Bien entendu, l'amendement proposé par nos collègues de l'Union centriste-UDF n'est pas la panacée et il y a des raisons de s'abstenir, mais, en ce qui me concerne, parce que je veux éviter le choc frontal et parce que cet amendement permet sans doute une petite avancée, je le voterai, sans d'ailleurs me faire d'illusions quant au résultat...

Applaudissements sur certaines travées de l'UC-UDF, ainsi que sur quelques travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

MM. Jean-Pierre Raffarin et Dominique Braye. C'est un fait politique majeur !

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je mets aux voix l'amendement n° 501.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 95 :

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote sur l'amendement n° 650.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Je tiens d'abord à dire que je regrette de n'avoir pu défendre l'amendement n° 649 : il est « tombé » parce que le président de séance a souhaité montrer son autorité. C'est le seul que nous n'avons pas pu défendre au cours de ce débat !

Pour présenter cet amendement n° 650, nous avons fait référence à plusieurs reprises au rapport Proglio, du nom du président de Véolia Environnement. Il indique que les avis ne sont pas unanimes dans les rangs des libéraux. Il affirme aussi que les CDI sont la forme normale de l'embauche.

Deux ans ! Comment pouvez-vous vouloir laisser pendant deux ans des personnes en situation précaire ? On ne bâtit pas une vie de cette façon, on ne bâtit pas une relation durable, pérenne avec son employeur. Vraiment, ce n'est pas une solution ! D'ailleurs, certains parmi vous n'y croient même pas.

Les droits sociaux, vous les caricaturez, vous les considérez comme des « problèmes ». Eh bien, les droits sociaux, c'est ce qui garantit, face à un employeur qui a tous les pouvoirs dans l'entreprise, la dignité du salarié. Ils sont donc la réponse normale d'une société évoluée, et il faudra bien vous y habituer !

Je souhaiterais vous poser une question : accepteriez-vous que vos enfants ou vos petits-enfants soient dans cette situation ? Certainement pas !

Je souhaite vraiment que ce débat se poursuive, en espérant qu'ainsi on n'ira pas trop loin dans le « n'importe quoi ». §

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote sur l'amendement n° 148.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Que vous le vouliez ou non, monsieur le ministre, le mot qui est venu le plus souvent à la bouche de tous ceux qui se sont préoccupés de ce projet de loi - c'est-à-dire, en fait, l'ensemble de nos concitoyens -, c'est le mot « précarité ».

Quelle que soit la conclusion de nos débats, ce projet de loi sera marqué d'une étiquette sur laquelle il sera écrit en gros caractères : « précarité ».

À partir du moment où vous essayez de nous convaincre qu'il ne s'agit pas d'un contrat précaire mais d'un véritable CDI, pourquoi faire une loi instituant le CPE ? Vous auriez tout simplement pu préciser les conditions dans lesquelles vous entendiez favoriser l'embauche des jeunes sur de véritables CDI !

En d'autres termes, vous aviez la possibilité de donner de l'espoir à notre jeunesse, de lui donner des assurances sur son avenir, de lui permettre de croire en son destin. Or aujourd'hui, qui y a-t-il dans l'esprit de la jeunesse ? Il y a de l'inquiétude, il y a de l'angoisse pour l'avenir et il y a le sentiment d'être exclu.

On comprend d'ailleurs que vous ne parliez pas véritablement de CDI puisque, chaque fois que nous avons demandé des garanties quant à la bonne application du code du travail, nous n'avons pas eu de réponse, sinon cette affirmation : « C'est déjà dans le code du travail ! »

Vous le savez, votre projet est rejeté par l'opinion. Malgré toutes les procédures utilisées à l'Assemblée nationale ou ici, c'est un projet dont ne veulent ni le monde du travail ni les jeunes. Or ceux-ci se mobilisent un peu plus chaque jour. Et ce n'est pas terminé, vous le verrez dans les jours prochains !

Ne croyez pas, même si vous arrivez à faire voter cette loi, en particulier cet article, que vous allez remporter une victoire. En réalité, vous allez traîner un boulet ! Tant pis pour vous : c'est votre choix !

Si vous aviez parlé le langage de la vérité, ce contrat, vous l'auriez appelé « contrat précarité-exclusion ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Pour nous, membres du groupe socialiste, il est nécessaire de dire la vérité aux jeunes. Certes, cet amendement peut paraître à certains un peu provocateur. Il n'en reflète pas moins l'exacte vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Mais si ! Et les jeunes s'en apercevront très vite !

Votre gouvernement est malade du chômage. On l'a vu récemment encore, malgré les dissimulations, avec les derniers chiffres publiés. La baisse de popularité du Gouvernement est manifeste, notamment celle du Premier ministre, qui perd onze points dans les sondages

Vous dites que ce CPE, c'est mieux que rien. Nous, nous disons que c'est pire que tout !

C'est mieux que rien ? C'est même bien pour le patronat, évidemment ! Mais c'est pire que tout pour les jeunes, car vous les dupez. Vous avez inventé le jeune travailleur-Kleenex : on se sert et on jette !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

On ne lui donne aucune garantie. Il pourra être licencié sans motif.

Vous créez la suspicion. Pensez à ce jeune qui, par la suite, présentera un curriculum vitae comportant une succession de CPE : l'employeur éventuel devant lequel il se présentera ensuite ne sera-t-il pas nécessairement suspicieux ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

La concurrence entre générations est évidente puisque vous incluez le CPE dans l'emploi productif. Avec les emplois-jeunes, c'était complètement différent ! (Même mouvement sur les mêmes travées.) En effet, ils n'entraient pas en concurrence avec les autres salariés. Nous avons d'ailleurs, convenez-en, pleinement réussi dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Ce CPE ne créera pas d'emplois précisément parce qu'il concerne le secteur productif.

L'abandon du CDI est manifeste. Tout à l'heure, on a cité un grand chef d'entreprise. Bien sûr, s'il n'y a pas de jeunes formés qui arrivent sur le marché du travail, les chefs d'entreprise pourront conserver ceux qu'ils ont embauchés, mais ils comprennent très bien que, là où la concurrence est forte, ils pourront prendre un jeune pendant quelque temps, le licencier, en prendre un autre, etc. Ainsi, ils bénéficieront pleinement des avantages du CPE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

En fait, les qualifications sont bradées.

Et le bluff vaut aussi en ce qui concerne le Locapass. En tant que maire, je sais bien comment on désigne les locataires d'HLM dans les collectivités territoriales. Bien entendu, nous proposons aux sociétés et offices d'HLM des candidats, mais la pénurie de logements est telle que ce n'est pas le Locapass de quelqu'un qui sera peut-être limogé dans deux ans qui lui permettra d'« emporter le morceau » dans l'attribution de tel ou tel logement !

C'est un cadeau aux entreprises, mais ces exonérations entraîneront automatiquement un déficit supplémentaire de la sécurité sociale

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Un jeune pourra aller de CPE en CPE. Ne pas permettre à des jeunes travailleurs d'avoir, à vingt-six ans, une situation stable et un avenir clair, c'est vraiment les décourager !

Pour conclure, je dirai que l'intitulé exact de ce contrat, c'est « contrat précarité-exclusion ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour explication de vote sur l'amendement n° 147.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Au risque de me répéter (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP), je dirai que le CPE est un instrument de précarisation pour tous les jeunes qui ne sont pas encore précarisés, car tous les jeunes qui étaient embauchés avec un CDI le seront désormais avec un CPE. Belle façon de débuter une carrière professionnelle, d'entrer dans la vie active !

De plus, rien ne garantit qu'un jeune en recherche d' emploi ne sera pas réduit à enchaîner CPE sur CPE et, avec l'âge, suprême promotion, accéder à un CNE !

Nous sommes en train de faire un gigantesque retour en arrière, un retour à l'époque où les maîtres de forge...

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Mme Gisèle Printz. ... régnaient souverainement sur le monde du travail, rendant les hommes et les femmes corvéables à merci.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Monsieur le ministre, messieurs, je me suis posé une question : si votre fille ou votre fils était chômeur, irait-il postuler à un CPE ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Eh bien oui ! Plutôt que de rester au chômage, comme les vôtres !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous nous rendons compte, en cet instant, des raisons réelles qui vous ont conduit à proposer un tel contrat, monsieur le ministre.

Selon votre motivation affichée, le CPE s'adresse aux jeunes en recherche d'emploi. Or il est clair que tel n'est pas le cas : je pense notamment à la possibilité que vous introduisez, pour une même personne, de cumuler plusieurs CPE, avec le délai de trois mois.

À l'Assemblée nationale, vous êtes même allé plus loin puisque, à une question qui vous était posée, vous avez répondu qu'il serait possible, en cas de licenciement d'un titulaire d'un contrat de CPE, d'embaucher immédiatement une autre personne en CPE, sur le même poste de travail.

Nous sommes donc là au coeur du sujet. Il s'agit en fait ni plus ni moins que d'une facilité offerte aux patrons, notamment à ceux qui, disons-le, sont les moins civiques. Car, je dois le dire - et cela invalide les accusations que vous nous lancez -, les patrons n'ont pas tous recours à de telles facilités.Cependant, en tant que membre du Gouvernement, vous devriez imposer à tous un comportement responsable.

De quoi parle-t-on depuis le début de ce débat sur le projet de loi pour l'égalité des chances ? D'une réalité qui touche au plus profond de chacun d'entre nous.

Nous connaissons tous le désarroi actuel dans lequel est plongée notre jeunesse et nous savons que, grâce à l'éducation, un certain nombre de problèmes pourraient être résolus si l'on y mettait les moyens.

Nous savons tous aussi combien la relation de travail est structurante pour les jeunes. Lutter contre la précarité, c'est donc lutter pour que se reconstitue cette relation de travail structurante qui, il faut le dire, fait défaut depuis presque une génération à une masse de jeunes obligés de se diriger sans attendre sur le marché du travail. À tous ces jeunes, on ne répond que par le chômage ou des contrats à durée déterminée, des petits boulots, etc.

Or la relation de travail n'est structurante que si elle est pérenne et donc sécurisante.

Le Gouvernement ne cesse de dire qu'une société a besoin de sécurité, que nos concitoyens ont besoin de sécurité. Or, sachez-le, monsieur le ministre, les jeunes sont les premiers à réclamer cette sécurité ou à en ressentir le besoin même quand ils ne le formulent pas.

Cette sécurité pourrait s'illustrer de la façon suivante : les jeunes âgés de moins de vingt-six ans qui entrent dans l'emploi, tout en étant pleinement conscients qu'ils ne seront pas véritablement opérationnels tout de suite, faute d'expérience, doivent être sûrs qu'ils ne seront pas sanctionnés pour cette raison, leur contrat leur permettant d'évoluer, de se former, d'apprendre, et qu'ils ne risqueront donc pas à tout moment d'être « virés » ! Telle est la sécurité dont un jeune a besoin.

Dès lors, si vous teniez à créer un contrat précaire de ce type en faveur des patrons, il est une catégorie qu'il aurait fallu protéger : les jeunes. Car ce sont eux qui ont le plus besoin de visibilité, d'avenir, de s'engager en fondant une famille, de se loger, de pouvoir accéder à des prêts bancaires et, surtout, d'être à l'aise dans cette société.

Voilà la réponse qu'il convenait d'apporter aux émeutes des banlieues ! Or vous faites tout l'inverse : vous misez sur le désespoir, en considérant que les jeunes se contenteront de ce que vous leur « offrez » parce qu'ils n'auront pas d'autre choix. Je le répète : vous ne faites là que miser sur le désespoir !

Pour ce qui nous concerne, nous voulons continuer à croire que l'on peut offrir un véritable avenir aux jeunes !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Michèle André.