Notre tradition juridique était en effet opposée au contrôle de constitutionnalité de la loi, a fortiori lorsqu’il doit s’exercer après l’entrée en vigueur de celle-ci.
Avant 1958, le contrôle de constitutionnalité était pratiquement inexistant, si bien que l’introduction à cette date d’un véritable contrôle, même sous une forme a priori, a été, dans l’esprit du constituant de l’époque, un changement majeur.
Le contrôle a priori s’est progressivement affirmé dans notre ordre juridique, notamment grâce à l’audace de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais surtout après l’extension du droit de saisine aux soixante députés ou sénateurs. Le contrôle de constitutionnalité a posteriori, qui avait déjà été introduit par la plupart de nos voisins, restait cependant perçu avec méfiance.
Toutefois, au début des années 1990, un infléchissement s’est produit dans les esprits. S’appuyant sur les propositions formulées dès 1989 par notre excellent collègue Robert Badinter, alors président du Conseil constitutionnel, le Président de la République, François Mitterrand, formait le vœu, le 14 juillet 1989, que « tout Français puisse s’adresser au Conseil constitutionnel lorsqu’il estime qu’un droit fondamental est méconnu ».
Conformément à l’objectif fixé par le Président de la République, un projet de loi constitutionnelle était déposé en mars 1990, accompagné d’un projet de loi organique.
Comme vous le savez, l’hostilité du Sénat entraîna l’échec de la réforme.